Logo de l'épisode Un nouveau modèle de formation en ligne - avec Alexandre Dana du podcast Marketing Mania - Conversations d'entrepreneurs

Un nouveau modèle de formation en ligne – avec Alexandre Dana

Épisode diffusé le 29 janvier 2019 par Marketing Mania

Écouter l'épisode :

Des cours particuliers à l’entrepreneuriat : la naissance d’une vocation

L’histoire de LiveMentor, une entreprise de formation en ligne au modèle unique, ne commence pas dans un incubateur de startups, mais dans le métro parisien. Alexandre Dana, son fondateur, partage une genèse inattendue, née d’un simple besoin d’argent de poche après le bac. « J’ai commencé à donner des cours. dès que j’ai eu mon bac. […] Je me suis rendu compte qu’il y avait pas mal de collégiens et de lycéens qui étaient partants pour avoir de l’aide en soutien scolaire. »

Son premier cours, un dimanche matin à 9h près de Vincennes, fut une révélation. Loin de la corvée, l’expérience s’est avérée fondatrice. « J’ai adoré. […] C’est un des premiers moments dans ma vie où je suis sorti en me disant : ‘j’ai vraiment passé un bon moment, c’est chouette, c’est cool’. » Mais qu’est-ce qui a rendu ce cours de maths si spécial ? Pour Alexandre, c’était la découverte d’un sentiment nouveau : « C’était la première fois que j’expliquais quelque chose à quelqu’un. […] C’est une sorte de quête, une aventure collective. Et ça m’a plu, ça m’a beaucoup plu. »

Quand la passion devient un travail à temps plein

Ce plaisir de transmettre s’est rapidement transformé en une activité dévorante. Coincé dans une école de commerce qui ne lui plaisait pas, Alexandre a plongé corps et âme dans les cours particuliers, une échappatoire autant qu’une nécessité financière. « Je suis monté à 35 heures par semaine de cours. Je faisais 10 heures le dimanche, 10 heures le samedi, et ensuite j’avais 15 heures que je répartissais dans la semaine. »

Son organisation était intense, sillonnant Paris à vélo pour enchaîner les cours. « Mon weekend classique, c’était vraiment, je me levais le samedi à 7h30, je prenais mon vélo, je montais dans le nord de Paris, je faisais 2 heures, je reprenais le vélo, j’allais dans l’est, je faisais 3 heures… » Des journées épuisantes mais gratifiantes, car sans le savoir, il posait les premières pierres de sa future entreprise.

L’instinct de l’optimisation : les premiers pas vers un système

Face à une charge de travail colossale, Alexandre a développé des réflexes d’entrepreneur de manière purement intuitive. Il ne s’agissait pas d’appliquer des théories lues dans des livres, mais de résoudre des problèmes concrets. « Inconsciemment, je commençais à développer des réflexes d’entrepreneur. Par exemple, puisque je me rendais compte que je donnais souvent le même cours, j’ai commencé à créer du contenu, créer des fiches de cours, créer des ressources que je pouvais partager entre les élèves. »

Cette démarche, née de la simple observation que certaines tâches étaient répétitives et chronophages, est à la base de toute optimisation. « Je me suis aussi rendu compte que j’envoyais souvent par mail exactement le même mail. Donc, au bout d’un moment, j’ai commencé à organiser tout ça dans des dossiers Google Drive, des fichiers partagés. » C’était, selon ses propres mots, « purement l’instinct du truc : ce que je suis en train de faire, c’est débile parce que je le fais quatre fois et je devrais pas avoir besoin de le refaire. »

La meilleure source de productivité : l’amour du travail

Pour Alexandre, la motivation pour améliorer ses méthodes venait d’un moteur simple mais puissant : l’amour de ce qu’il faisait. « Le principe qui reste le plus important pour moi, c’est de se mettre dans une situation où tu fais ce que tu aimes et tu te rends compte que la manière dont tu le fais est stupide. Et donc, là, tu es forcé de changer tes méthodes. » C’est cette tension entre la passion pour la tâche et l’inefficacité du processus qui, selon lui, pousse à l’innovation. « Je suis en train de faire ce que j’aime, mais j’ai une telle charge de travail, si je continue comme ça, je vais vraiment faire 16 heures par jour. Il faut que je mette en place des systèmes pour continuer à faire ce que j’aime. »

Le tournant digital : la découverte de la formation en ligne

Le passage au numérique ne fut pas le fruit d’une grande stratégie, mais d’une demande client inattendue. Une mère de famille, habitant près de la Suisse, le contacte pour son fils. Face à l’impossibilité logistique de faire le trajet chaque week-end, Alexandre propose une solution alternative : « Essayons sur Skype. » Ce premier cours à distance, il y a plus de six ans, a été un véritable déclic.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la transition ne s’est pas accompagnée d’un sentiment de perte. « Absolument pas. Rien du tout », affirme-t-il. Ce cours sur Skype est aussi marquant pour lui que son tout premier cours en présentiel. Il réalise alors le potentiel immense de cet outil : « Ça marchait super bien ce truc. On pouvait se parler, on n’avait plus à perdre le temps du métro. On pouvait s’envoyer des ressources à distance. » Cette expérience a posé les deux piliers de la future vision de LiveMentor : l’efficacité du format en ligne et l’importance de l’accompagnement personnalisé.

L’échec qui forge le succès : une première entreprise et ses leçons

Avant que LiveMentor ne voie le jour, Alexandre a connu un échec cuisant avec sa première entreprise. La motivation de départ était déjà bancale : « Pire motivation au monde, créer une entreprise pour valider son année d’études. » Pressé par le temps, il s’associe « n’importe comment » avec deux personnes. Le résultat est catastrophique : « Un des associés a quitté l’entreprise 2 semaines après sa constitution. C’est ce qui, je pense, est un record de rapidité. »

Ce projet, qui consistait à vendre en ligne les fiches de cours qu’il avait créées, a ignoré les fondamentaux. « On a dépensé énormément d’argent dans un site Internet. On savait pas comment se parler, on savait pas comment bosser ensemble. » Le marketing était inexistant, l’adéquation produit-marché n’a jamais été validée. Bilan : trois clients en huit mois. Cette expérience, bien que douloureuse, a été riche d’enseignements, notamment sur l’importance cruciale des relations humaines dans un projet entrepreneurial.

La diversité des relations professionnelles

Cet échec a mis en lumière une erreur fréquente chez les jeunes entrepreneurs : la confusion entre les différentes formes de collaboration. « Quand on est jeune, on sous-estime la diversité des relations humaines. Il y a plein de manières de bosser avec quelqu’un. » Alexandre souligne qu’il ne faut pas se précipiter dans une association. D’autres options existent : le recrutement, la collaboration avec un freelance, le rôle d’advisor, ou encore le coaching. « On peut tout à fait imaginer que la personne qui commence en tant que freelance pendant 3 mois, si le projet décolle, on peut envisager une association. On aura appris à bosser ensemble, ça aura été moins stressant. »

Le secret d’une association réussie : complémentarité et communication

L’expérience actuelle de LiveMentor offre un contraste saisissant. Alexandre s’est associé avec Anaïs, qu’il connaît depuis dix ans, mais qui a rejoint le projet bien après sa création. C’est ce qu’on appelle une « late co-founder ». Leur relation est gérée de manière proactive et structurée. « Un des premiers réflexes a été de prendre un coach pour nous aider tous les deux dans notre communication. On est parti 2 jours, on a appris à mieux se connaître. »

Cette approche met l’accent sur la nécessité de consacrer du temps à la relation humaine : « On essaie de se consacrer au moins 4 heures par mois, tous les deux, ensemble. C’est un moment de recul, pour savoir si l’autre va bien ou pas, pour se parler franchement. »

Le duo parfait : le semeur de graines et le récolteur

La force de leur partenariat réside dans leur complémentarité. Alexandre se décrit comme intuitif et quelque peu chaotique : « Moi, je ne sais pas planifier, je sais pas structurer, je sais pas faire des plans. » Anaïs, au contraire, apporte la structure. « Anaïs, tu lui donnes n’importe quel sujet, elle fait un ordre de bataille. Elle met en place des process, elle met en place un cadre là où moi je suis dans un chaos total. » Cette dynamique, comparable à celle du « planteur de graines » et du « récolteur », permet de combiner la créativité et l’exploration avec la rigueur et l’exploitation, une synergie essentielle à la croissance de l’entreprise.

Bâtir une communauté, pas juste un business : le marketing par les valeurs

Le succès de LiveMentor ne repose pas uniquement sur son modèle pédagogique, mais aussi sur sa capacité à fédérer une communauté autour de valeurs fortes. Alexandre appelle cela le « marketing par les valeurs », qui s’incarne dans une ligne éditoriale très précise.

Le premier axe de cette ligne est de raconter des histoires d' »entrepreneurs artisans », en opposition au narratif dominant de la startup qui lève des millions. Il prend l’exemple de Cécile, une élève de LiveMentor : « Il faut raconter l’histoire de Cécile qui a monté GreenMa. C’est une maman célibataire, elle est dans l’est de la France. GreenMa, c’est un site de thé bio. » Ce sont des histoires concrètes, humaines, qui parlent des vrais défis de l’entrepreneuriat au quotidien. « On est dans du très, très concret, et on est aussi dans des réflexions comme : comment est-ce que Cécile, elle construit son projet de sorte à se garder du temps pour son enfant ? »

Scaler l’humain : comment faire grandir une communauté sans la diluer ?

Le plus grand défi pour une entreprise comme LiveMentor est de grandir sans perdre son âme. Comment maintenir un sentiment de tribu quand le nombre de membres explose ? La réponse d’Alexandre est claire : « Une communauté ne peut grandir que si elle abrite des micro-communautés en son sein. »

Créer des micro-communautés en ligne et hors ligne

La stratégie de LiveMentor se déploie sur deux fronts. D’abord, le présentiel, avec un projet ambitieux : « Créer un réseau d’événements locaux sous un format meetup dans une quarantaine de villes en France. » Ces événements ne sont pas de simples apéros, mais des ateliers structurés (co-développement, feedback bienveillant, entraînement au pitch) pour créer du lien et de la valeur.

Ensuite, le numérique. Conscients des limites d’un groupe Facebook, ils développent leur propre technologie. « On va lancer cette année un annuaire intelligent avec tous nos porteurs de projets, où tu peux mettre un mot-clé et avoir automatiquement tous les profils des membres de la communauté qui ont le même secteur d’activité que toi. » L’objectif est de créer un effet de réseau : plus il y a de membres, plus la communauté a de la valeur pour chaque individu.

Les leviers de croissance à chaque étape du développement

Alexandre insiste sur un point crucial : « Ce qui t’amène de 0 à 1, t’amène pas forcément de 1 à 15. Il faut toujours se réinventer. » La stratégie de croissance de LiveMentor a ainsi évolué par phases.

Au début, le levier principal était sa newsletter personnelle. « J’y consacrais 2 jours entiers de rédaction par épisode. » Un contenu de haute qualité qui a généré un bouche-à-oreille puissant. Ensuite, les réseaux sociaux, notamment Facebook, ont pris le relais pour animer la communauté et attirer de nouveaux membres. Aujourd’hui, pour passer à une échelle supérieure, le levier est devenu institutionnel. « Ce sont des discussions avec des acteurs comme Pôle Emploi, comme les CCI. » Grâce à un travail de fond mené par Anaïs, LiveMentor a obtenu des agréments permettant à des centaines de personnes de se faire financer leur formation, luttant ainsi contre l’inégalité d’accès à la formation pour les indépendants.

La technologie comme garante de la personnalisation

Pour accompagner cette croissance tout en maintenant un haut niveau de suivi, LiveMentor développe des technologies propriétaires. Un questionnaire détaillé à l’inscription permet de cerner les besoins spécifiques de chaque élève. « Ce qui nous permet nous de définir de ces réponses un parcours et certaines problématiques spécifiques. » L’entreprise consolide ainsi ses données pour pouvoir, à terme, mettre en relation des élèves aux profils similaires ou leur proposer des contenus adaptés, sans dépendre du « cerveau d’un humain ». Une approche qui permet de scaler l’accompagnement personnalisé, le cœur du réacteur de LiveMentor.

FAQ : Questions fréquentes sur la création d’entreprise et la formation en ligne

Faut-il s’associer pour lancer un business ?

S’associer n’est pas une obligation et il est crucial de ne pas se précipiter. Il existe de nombreuses manières de collaborer (freelance, advisor, coach) qui permettent de tester une relation de travail avant de s’engager. L’association doit être envisagée quand une complémentarité est évidente et que la confiance a été établie.

« Le problème de fond, c’est que quand on est jeune, on sous-estime la diversité des relations humaines. Il y a plein de manières de bosser avec quelqu’un. […] L’association, […] le recrutement, […] bosser avec un freelance, c’est une autre manière d’avancer. » – Alexandre Dana

Comment savoir si une association d’entreprise va fonctionner ?

Une association réussie repose sur la complémentarité des compétences et une communication soignée et régulière. Il est essentiel que les associés apportent des forces différentes et qu’ils consacrent du temps dédié à l’entretien de leur relation, par exemple via des points mensuels ou du coaching de partenaires.

« On se complète bien, je pense, de par nos différences. Moi, je peux lancer un nouveau projet rapidement. […] Par contre, […] je vais le lancer à ma manière, qui est donc déstructurée. […] Elle, elle m’aide à prendre du recul, à y aller plus lentement et à structurer l’entreprise. » – Alexandre Dana

Qu’est-ce que le marketing par les valeurs ?

Le marketing par les valeurs consiste à construire sa communication et sa communauté autour d’une ligne éditoriale et de principes forts qui créent un sentiment d’appartenance. Cela implique de choisir les histoires que l’on raconte et les profils que l’on met en avant, en opposition à d’autres, pour créer une identité de marque claire et attractive pour une cible spécifique.

« Tu respectes le guide éditorial, premièrement, quand tu parles des projets que nous, on a dans notre communauté […], à savoir des projets artisans. Ça va être par opposition à la start-up qui va lever beaucoup d’argent pour faire le prochain Facebook. » – Alexandre Dana

Comment faire évoluer la stratégie d’une entreprise qui grandit ?

Il faut accepter que les leviers de croissance changent avec la taille de l’entreprise. Ce qui fonctionne au début (ex: une newsletter personnelle) ne suffira plus pour atteindre une échelle supérieure. Il est nécessaire de se réinventer constamment et d’explorer de nouveaux canaux (réseaux sociaux, puis partenariats institutionnels, etc.).

« Ce qui t’amène de 0 à 1, t’amène pas forcément de 1 à 2, et t’amène pas forcément de 2 à 15. Et donc, il faut toujours se réinventer et se poser les bonnes questions. » – Alexandre Dana

Comment créer et faire grandir une communauté en ligne ?

Pour faire grandir une communauté sans qu’elle ne perde son âme, la clé est de favoriser la création de micro-communautés en son sein. Cela peut se faire via des événements locaux, des sous-groupes thématiques en ligne, et des outils technologiques (comme un annuaire intelligent) qui permettent aux membres de se connecter entre eux de manière pertinente.

« Une communauté ne peut grandir que si elle abrite des micro communautés en son sein. L’enjeu pour Live Mentor sur l’année qui vient et les cinq prochaines années, est de créer un maximum de micro communautés en ligne et en présentiel. » – Alexandre Dana

Quelle est l’alternative aux formations en ligne passives ?

L’alternative est un modèle de formation en ligne basé sur l’interaction, l’accompagnement personnalisé et la communauté. Au lieu de laisser l’apprenant seul face à des vidéos, ce modèle intègre du coaching en direct, des sessions de groupe et des outils pour connecter les participants, créant ainsi une expérience d’apprentissage plus engageante et efficace.

« Dans tout ce qu’on fait, on essaie de mettre le maximum d’interaction, de surtout pas avoir des formations passives, où tu es face à une série de vidéos et tu sais pas comment les aborder. » – Alexandre Dana

Comment un échec entrepreneurial peut-il mener au succès ?

Un échec, bien que difficile, est une source d’apprentissage extrêmement riche. Il permet de comprendre ce qui ne fonctionne pas, notamment en matière de motivation, de choix des associés ou de stratégie. Les leçons tirées d’un premier projet raté peuvent devenir les fondations solides du succès d’un projet futur.

« J’étais traumatisé par ma première création d’entreprise, qui avait été un énorme échec sur cette partie [technique]. Donc, j’ai appris à coder. » – Alexandre Dana

Peut-on gérer une équipe technique sans être développeur soi-même ?

Oui, mais il est fortement recommandé d’acquérir des connaissances techniques de base pour comprendre les enjeux et mieux communiquer avec les développeurs. Apprendre les bases du code ou maîtriser un outil comme WordPress permet de mieux gérer les projets techniques, même si on ne réalise pas le développement soi-même.

« Je regrette pas d’avoir appris à coder, mais si c’était à refaire, j’apprendrais d’une autre manière. J’apprendrais en partant d’un outil comme WordPress et en essayant de le comprendre au maximum. » – Alexandre Dana


Épisodes similaires