L’origine d’un positionnement marketing radical : Everyone Hates Marketers
Comment naît une idée qui va à contre-courant ? Pour Louis Grenier, l’animateur du podcast anglophone Everyone Hates Marketers, tout a commencé non pas par un éclair de génie solitaire, mais par une série d’expériences et une suggestion providentielle. Cette genèse révèle l’importance cruciale d’un positionnement marketing audacieux.
D’un événement live à une idée de podcast
Avant de devenir une voix reconnue du marketing, Louis organisait des événements à Dublin pour les entrepreneurs. Le format était simple : une interview en direct d’une heure. C’est le retour des participants qui a tout déclenché. « Quelques personnes m’ont dit qu’ils aimaient bien la façon dont j’interviewais les gens. […] Moi ça m’a surpris », confie Louis. Ce feedback inattendu a planté une graine : et s’il étendait ce format au-delà des murs d’une salle ?
Il a alors enregistré dix interviews sur Skype, et un thème commun a rapidement émergé. Il posait des questions « un peu bien cyniques, bien controversées », cherchant toujours à gratter sous la surface. Sa méthode ? La question la plus simple et la plus puissante : « Pourquoi ? »
« Quand je pose cinq fois la question pourquoi, en général, on arrive à la vraie vérité. Ce que les journalistes font d’ailleurs, […] ils apprennent à jamais prendre la première réponse pour argent comptant et toujours gratter plus loin. »
Cette quête de vérité est devenue la pierre angulaire de sa démarche : un marketing « no bullshit », sans conneries, qui retourne aux fondations, c’est-à-dire aux humains.
La naissance d’un nom qui détonne
Avec ses dix interviews en poche et une vision claire, Louis s’est tourné vers la communauté. Sur Slack, il a partagé son projet : promouvoir un marketing honnête et humain. C’est alors qu’une suggestion inattendue a tout changé. « Il y a quelqu’un sur Slack que je connaissais pas qui m’a qui m’a donné le nom quoi, qui m’a dit ‘Bah Everyone Hates Marketers, ça m’a l’air pas mal.’ »
La réaction fut immédiate. « Ça m’a pris aux tripes quoi, je me suis dit ‘Attends, là c’est risqué, il y a quelque chose d’intéressant là.’ » Malgré l’hésitation face à un titre aussi clivant, il a décidé de se lancer. Ce choix illustre une leçon fondamentale qu’il a apprise : « Tu peux jamais rien faire tout seul et que les gens, ton marché, tes clients et cetera, ont énormément d’idées […] si tu poses les bonnes questions. » Le nom est ainsi devenu l’étendard de son positionnement marketing.
Le marketing éthique face à la pression des objectifs
Tout le monde se revendique du marketing honnête. Mais qu’est-ce que le marketing éthique signifie vraiment, et comment tenir ses principes lorsque la pression des résultats se fait sentir ? Louis Grenier explore cette tension qui définit le véritable marketing « no bullshit ».
Qui est l’ennemi du marketing ‘no bullshit’ ?
Si personne n’admet pratiquer un marketing malhonnête, où se situe la ligne de démarcation ? Pour Louis, l’ennemi n’est pas une personne, mais une idée : le culte du « growth hacking ». Il dénonce « tous ces raccourcis qui font croire qu’en fait tu peux avoir une croissance à trois ex par mois juste en utilisant ce petit truc magique ». Il soutient que convaincre des gens est bien plus complexe qu’un simple hack dans un tunnel de conversion.
La véritable épreuve de l’éthique survient sous pression. Louis résume cette idée dans une phrase percutante :
« Tout le monde croit au marketing éthique jusqu’à ce qu’il soit sous pression pour atteindre leurs objectifs. »
C’est dans ces moments difficiles que les marketeurs sont tentés de franchir les lignes qu’ils s’étaient fixées, se justifiant par la nécessité de survivre. « Le rationnel va toujours revenir à des trucs assez pour se rassurer », explique-t-il.
Définir sa propre ligne de conduite : plus qu’une question d’éthique, une question de marque
Pour éviter de tomber dans ces pièges, Louis prône une démarche proactive : définir un code de conduite clair. Il insiste sur l’importance de s’asseoir « au moins 10 minutes devant une page blanche en disant ‘Voilà, c’est ça les choses que je j’accepte de faire et ça c’est les choses que j’accepte pas de faire.’ »
Avoir ces principes écrits permet de prendre de vraies décisions morales lorsque la situation se corse. Pour lui, la définition ultime d’une transaction éthique est simple : le client regrette-t-il son achat ?
« Est-ce que quand tu achètes quelque chose […] tes clients le regrettent juste après, est-ce qu’il y a ce genre est-ce que tu t’es senti un peu souillé quoi, ou est-ce que tu as aucun regret, tu adores le produit […]. Je pense qu’elle est là la limite entre les deux. »
Cette ligne directrice n’est pas seulement une question de morale, elle est intimement liée à l’image de marque et à la construction d’une relation de confiance sur le long terme.
Comment lancer un podcast et attirer des invités de renom ?
Avec un nom provocateur et une philosophie claire, Louis Grenier a réussi à attirer des sommités du marketing comme Seth Godin. Sa méthode pour lancer un podcast et convaincre les plus grands repose sur une simplicité désarmante et un positionnement marketing en béton.
La stratégie de l’email d’une seule ligne pour convaincre les plus grands
Comment approcher des personnalités sur-sollicitées ? Louis a opté pour une approche radicalement minimaliste, née, selon ses dires, de la paresse. Pas de longs paragraphes vantant les mérites de son podcast, pas de listes de statistiques d’audience. Juste une ligne.
« C’est simple, j’envoie une ligne par email, c’est tout. Je dis ‘Hey Mark, would you like to be on my podcast fighting against marketing bullshit ?’ C’est tout. »
Pourquoi cette technique fonctionne-t-elle ? D’abord, elle garantit que 100% de l’email est lu. Ensuite, elle exploite le biais psychologique du « pied dans la porte » : obtenir une première réponse, même courte, augmente les chances d’un accord final. Enfin et surtout, cette approche ne fonctionne que parce que son positionnement est extrêmement fort. Le nom et le slogan du podcast suffisent à piquer la curiosité et à provoquer une réaction, positive ou négative, mais jamais neutre.
Une préparation minimaliste pour des interviews authentiques
La simplicité se retrouve aussi dans sa préparation d’épisodes. Louis avoue être « assez feignant » et ne passe pas des heures à rechercher ses invités. Il se repose sur une astuce ingénieuse : il leur donne du travail.
Via son outil de planification Calendly, il pose une question clé à chaque invité : « Quel est le sujet hyper spécifique et hyper pratique dont tu es expert, que dont tu voudrais parler sur ce podcast là ? »
Cette approche a deux avantages majeurs. Premièrement, elle garantit que l’invité parlera d’un sujet qu’il maîtrise et qui le passionne. Deuxièmement, elle transforme l’interview en une conversation authentique où Louis, guidé par sa curiosité, n’a plus qu’à creuser avec sa question fétiche : « Pourquoi ? » Cette méthode, affinée grâce aux retours de ses auditeurs, permet d’aller directement à l’essentiel et de fournir un maximum de valeur pratique.
Bâtir une audience et une carrière de créateur de contenu en parallèle de son travail
L’un des aspects les plus fascinants du parcours de Louis Grenier est sa capacité à créer un business en parallèle de son travail chez Hotjar. Sa stratégie de carrière de créateur de contenu est basée sur la patience, la construction lente et l’authenticité.
La vision long terme : construire sans être pressé
Louis n’a pas « le feu aux fesses pour quitter son job ». Après avoir vécu un burnout avec sa première agence, il s’est promis de ne jamais recommencer une entreprise sans avoir d’abord bâti une crédibilité, une réputation et une audience. Son podcast est la matérialisation de cette promesse.
Il consacre moins de trois heures par semaine à son podcast et ne fait aucune promotion active. La croissance est entièrement organique, basée sur le bouche-à-oreille. « J’ai eu le luxe depuis 3 ans d’avoir du temps. C’est-à-dire que je me suis jamais mis de pression », explique-t-il. Cette approche long-termiste lui permet de se concentrer uniquement sur la qualité du contenu, avec la conviction que si ce qu’il crée a de la valeur, l’audience suivra.
« Qui vivra verra, on va voir ce qui va arriver. Et en fait, je me focalise seulement sur créer du très très bon contenu. »
L’accent français, un atout inattendu pour son personal branding
Dans un marché anglophone dominé par les accents américains, Louis a rapidement compris que son accent français n’était pas un handicap, mais un véritable atout pour son personal branding. C’était un élément de différenciation immédiat.
« J’ai compris en fait très vite que mon accent français c’était une identité quoi, de marque. […] Ça m’a permis tout de suite en fait les gens ont se sont connectés là-dessus. »
Cette expérience lui a appris une leçon essentielle : être à l’écoute de ce que les autres remarquent en nous comme étant original. Ces éléments, que l’on prend souvent pour acquis, sont les composants qui permettent de créer une identité unique et mémorable. Il a même intégré cette touche française dans son introduction iconique : « Bonjour, bonjour, and welcome to Everyone Hates Marketers. »
La monétisation et le futur d’Everyone Hates Marketers
Après des années à construire une audience fidèle, comment Louis Grenier envisage-t-il l’avenir ? Sa vision pour monétiser son podcast reste fidèle à sa philosophie : la confiance avant tout.
Pourquoi refuser la publicité pour préserver la confiance ?
Contrairement à de nombreux podcasteurs, Louis a fait le choix radical de ne pas inclure de publicité. Pour lui, cela irait « à l’encontre de la vision du podcast ». Il souhaite garder ce canal de communication pur et authentique.
« La raison pour laquelle je fais pas de pub sur le podcast, c’est parce que j’ai envie de garder ce canal de communication pur. […] Je pense que ça irait à l’encontre de la vision du podcast de faire des pubs. »
Sa stratégie est de patienter jusqu’au jour où il pourra proposer ses propres produits ou services. Il est convaincu qu’en ayant bâti une relation de confiance solide, son audience sera beaucoup plus réceptive à ses offres, sans avoir été lassée par des publicités pour des produits tiers.
Des ressources marketing à une communauté privée : les prochaines étapes
Le futur d’Everyone Hates Marketers ne se limite pas au podcast. Louis prévoit de transformer son site en un véritable « environnement de ressources marketing », avec des interviews écrites de professionnels moins connus mais tout aussi pertinents. L’objectif est de construire un écosystème de valeur autour de sa marque.
La deuxième grande étape est la création d’une communauté privée, une demande forte de ses auditeurs. Son but n’est pas d’en être le centre, mais de connecter les personnes qui partagent la même vision du marketing. « J’ai envie de donner accès à ces gens-là comme modérateur et en fait leur laisser lancer et créer cette communauté eux-mêmes. »
Ces projets, ainsi que de futures formations ou coachings, seront lancés lorsque la pression de son audience sera « tellement forte » qu’il se sentira prêt. Une approche patiente qui contraste avec l’urgence souvent prônée dans le monde de l’entrepreneuriat.
Les leçons de carrière : de l’introspection au personal branding visuel
Le parcours de Louis est riche en enseignements. Il a appris à se connaître et à aligner son image avec sa véritable personnalité. Son évolution sur le plan du personal branding est particulièrement révélatrice.
Il raconte avec humour sa première tentative de créer une image de consultant sérieux : costume trois pièces, photographe professionnel, pose rigide sur les quais de Dublin. « Qu’est-ce que j’étais con parce que c’est totalement pas moi quoi », s’amuse-t-il aujourd’hui. Il a compris que le marketing le plus efficace est celui qui est authentique.
Aujourd’hui, pour son prochain photoshoot, il a une idée bien différente qui incarne parfaitement son esprit « no bullshit » :
« J’ai envie d’acheter une tu sais les emojis le caca là, […] une peluche grand format de ça et j’ai envie de faire des photos avec en genre en en en tapant dessus ou des trucs comme ça, tu vois, j’ai envie de m’amuser. »
Cette anecdote illustre sa conclusion : dans un monde où tout le monde peut créer du contenu, se faire remarquer est primordial. Le positionnement marketing, le packaging, l’identité visuelle, tout doit raconter une histoire cohérente et clivante. Il ne faut pas avoir peur de déplaire, car c’est en étant soi-même qu’on attire les bonnes personnes.
Questions fréquentes sur le marketing éthique et le podcasting
Qu’est-ce que le marketing éthique selon Louis Grenier ?
Pour Louis Grenier, le marketing éthique consiste à comprendre les gens si bien que vous leur offrez ce dont ils ont besoin, quand ils en ont besoin, sans forcer. La limite est franchie lorsque les clients regrettent leur achat juste après, se sentant ‘souillés’.
Citation : « C’est comprendre les gens tellement bien que tu peux leur donner ce dont ils ont besoin quand ils en ont besoin, sans sans sans forcer […] Est-ce que tes clients le regrettent juste après, est-ce qu’il y a ce ce ce genre est-ce que tu t’es senti un peu souillé quoi. »
Comment trouver un nom de podcast original et mémorable ?
L’idée n’est pas venue de lui, mais d’une suggestion sur Slack après avoir partagé sa vision d’un marketing honnête. Il a osé choisir un nom risqué et clivant, ‘Everyone Hates Marketers’, qui a immédiatement capté l’attention.
Citation : « Il y a quelqu’un sur Slack que je connaissais pas qui m’a donné le nom quoi, qui m’a dit ‘Bah Everyone Hates Marketers, ça m’a l’air pas mal.’ Et ça m’a ça m’a choqué quoi d’avoir un titre qui m’a là ça m’a plu, ça m’a pris aux tripes. »
Quelle est la stratégie pour inviter des experts comme Seth Godin sur son podcast ?
Louis Grenier utilise une approche minimaliste : un email d’une seule ligne qui pique la curiosité et met en avant son positionnement marketing unique. Il évite les longs argumentaires et la preuve sociale pour initier une conversation.
Citation : « J’envoie une ligne par email, c’est tout. Je dis ‘Hey Mark, would you like to be on my podcast fighting against marketing bullshit ?’ C’est tout. »
Peut-on lancer un podcast à succès en travaillant à temps plein ?
Oui, Louis Grenier consacre moins de 3 heures par semaine à son podcast. Il a adopté une stratégie long terme, sans pression de monétisation immédiate, en se concentrant sur la qualité du contenu pour générer une croissance par le bouche-à-oreille.
Citation : « Moins de 3 heures par semaine. […] J’ai eu le luxe depuis 3 ans d’avoir du temps. C’est-à-dire que je me suis jamais mis de pression en disant ‘Attends, il faut absolument que j’ai 100 000 écoutes dans les 6 mois’. »
Pourquoi le positionnement marketing est-il si crucial pour un créateur de contenu ?
Le positionnement est l’élément le plus critique car il agit comme un ‘packaging’. Il permet de se différencier, de créer quelque chose d’original qui attire l’attention, de rendre la marque mémorable et de convaincre des partenaires ou invités de grande renommée.
Citation : « C’est l’un des principes premiers […] c’est le positionnement. Et absolument c’est critique, c’est l’une des phases les plus critiques du marketing. […] C’est cet ensemble global qui te permet d’avoir quelque chose qui est cohérent et qui donne envie aux gens. »
Comment définir son personal branding de manière authentique ?
Il faut être à l’écoute de ce que les autres remarquent en vous comme étant original. Louis Grenier a transformé son accent français en atout et veut utiliser un photoshoot décalé pour refléter sa personnalité ‘no bullshit’ plutôt que de se conformer à l’image stéréotypée du marketeur.
Citation : « Il faut vraiment être à l’écoute de ce que les gens reconnaissent vers toi, tu vois, les choses en fait les les choses que tu prends toi pour argent comptant […] mais que les autres remarquent comme quelque chose d’un peu original. »
Faut-il préparer ses interviews de podcast en détail ?
Pas nécessairement. Louis Grenier avoue être ‘feignant’ et fait peu de préparation. Il demande à ses invités de choisir un sujet très pratique en amont, puis il se laisse guider par sa curiosité en posant sans cesse la question ‘Pourquoi ?’ pour creuser le sujet.
Citation : « Je suis assez feignant. Donc je fais peu de préparation. […] Je leur demande quel est le sujet primordial que tu voudras dont tu voudras parler sur le podcast. […] Et ensuite c’est pourquoi, pourquoi, pourquoi ? »
Comment monétiser un podcast sans publicité ?
La stratégie de Louis Grenier est de construire une audience et une réputation sur le long terme sans publicité, pour garder le canal de communication ‘pur’. La monétisation viendra plus tard via des produits (formations, coaching) proposés à une audience qui a déjà une grande confiance en lui.
Citation : « J’ai envie de de garder ce canal de communication pur. […] Plutôt de choisir une stratégie plus long terme, qui va être d’utiliser le podcast comme canal de communication pour moi-même quand je vendrai des produits ou des services. »