Logo de l'épisode Réinventer le tourisme au Japon - avec Axel Deroubaix du podcast Marketing Mania - Conversations d'entrepreneurs

Réinventer le tourisme au Japon – avec Axel Deroubaix

Épisode diffusé le 25 septembre 2018 par Marketing Mania

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Réinventer le tourisme au Japon : les coulisses d’un business de niche

Dans un marché aussi concurrentiel que le tourisme au Japon, comment peut-on encore innover ? C’est le défi qu’a relevé Axel Deroubaix, fondateur d’Eyexplore. Son idée : proposer une expérience unique qui est un croisement entre un tour touristique standard et un coaching en photographie. Dans cet article, inspiré d’une conversation passionnante, nous allons découvrir comment il a réussi à trouver son angle unique, à comprendre les besoins profonds de ses clients et à bâtir une entreprise prospère. Vous apprendrez comment se différencier sur un marché concurrentiel, l’importance de bien choisir ses partenaires et les clés pour définir le pourquoi de son entreprise.

L’idée d’Eyexplore : un concept hybride entre tourisme et photographie

L’aventure d’Eyexplore commence avec un concept simple mais puissant. Axel explique : « Mon business, en fait, c’est au Japon, dans trois destinations différentes, Tokyo, Osaka et Kyoto. On offre aux touristes du coaching en photographie en fait. » L’objectif est clair : s’adresser à des voyageurs qui ont peu de temps, peu de connaissance de la ville et souvent, une maîtrise limitée de leur appareil photo.

Le but est de leur permettre de « repartir avec des photos dont ils ont toujours rêvé du Japon et plus encore. » Mais au-delà de la simple prise de vue, l’ambition est plus grande. « On veut vraiment, et ça c’est très important, on veut vraiment challenger le regard du touriste au Japon. » Cette volonté de bousculer les perspectives est au cœur du projet.

Une offre tarifaire adaptée à différents profils

Pour toucher une clientèle variée, Eyexplore a développé plusieurs formules. Le modèle économique innovant s’adapte à la fois aux budgets serrés et aux demandes les plus exclusives.

  • La formule en groupe : « La formule la moins chère, c’est une formule où on est en groupe (…) notre max, c’est six personnes. » Pour environ 90 dollars américains, les participants bénéficient d’une session de trois heures.
  • La session privatisée : Pour une expérience en tête-à-tête avec un coach, le tarif monte à environ 218 dollars pour trois heures, et jusqu’à 490 dollars pour six heures.
  • Les ateliers d’exception : Le summum de l’offre est l’atelier « Behind the Mask » à Kyoto. Il inclut les services d’une Geisha pour un shooting photo unique. Le prix peut atteindre 1624 dollars. « On embauche, on loue les services d’une Geisha et on on la prend en photo (…) avant qu’elle se transforme en Geisha et après. »

Qui sont les clients du tourisme photographique ?

Le profil des clients est assez large. Majoritairement anglophones, ils ne sont pas tous occidentaux. « On a beaucoup de gens assez fortunés de Hong Kong, de Malaisie, de Chine aussi, » précise Axel. L’âge moyen est de 38-39 ans, avec une parité homme-femme. Les plus jeunes optent généralement pour les formules de groupe, plus abordables. Ce sont des personnes qui, pour la plupart, ont déjà des notions de photographie, mais le véritable défi pour l’entreprise est d' »aller chercher des gens qui n’auraient pas eu idée de faire ça et qui vont apprécier, en fait, l’expérience de la photographie. »

Comment se différencier sur un marché concurrentiel

Le secteur du tourisme au Japon est saturé. Alors, comment Eyexplore a-t-il réussi à trouver sa place ? La réponse réside dans une analyse fine des offres existantes et des besoins non satisfaits des clients. Axel a identifié deux types de concurrents qui passaient à côté de l’essentiel.

Les offres qui dévient de leur promesse initiale

D’un côté, il y avait des acteurs qui voulaient proposer un produit photographique mais qui, par facilité, ont dérivé vers du tourisme classique. « Ils ont choisi la solution de facilité, c’est-à-dire qu’ils sont partis en fait de quelque chose à la base qui voulait photographique, et ils l’ont transformé petit à petit en quelque chose de de tourisme lambda, » analyse Axel. Ils n’avaient pas réussi à créer un vrai business model autour de la photo.

Les photographes artistes déconnectés du client

De l’autre côté, il y avait les photographes professionnels, trop centrés sur leur art et pas assez sur le client. « C’est un truc que j’ai très vite réalisé quand j’ai commencé le business, c’est que les photographes artistes font pas de très bon (…) dans le relationnel avec le client. » Ils n’avaient pas compris les besoins spécifiques du touriste. C’est cette lacune qui a créé une opportunité pour créer un business de niche performant.

La force du partenariat : combiner les compétences

La réussite d’Eyexplore vient de la complémentarité des compétences de ses fondateurs. Axel explique : « Même si nous, on a toujours apprécié la photo (…), on a quand même mis sur la table des ‘skills’ (…) qui vont au-delà de la photographie. » Lui a apporté sa connaissance de l’industrie du tourisme au Japon, acquise sur dix ans. Son partenaire, Lucas, a apporté son expérience de manager et de coach. C’est cette fusion qui a permis de créer « un produit, finalement, qui était assez extraterrestre, qui n’existait pas jusqu’à présent. »

Comprendre les besoins profonds du client pour une expérience inoubliable

Au-delà de l’aspect technique, le véritable enjeu est de répondre à des besoins psychologiques. Qu’est-ce que le client cherche vraiment ? Axel a une vision très claire sur le sujet.

Le gain de temps et de connaissance

« Ce qui manque vraiment à la personne qui vient dans un pays aussi lointain (…) c’est le temps. » Le touriste n’a ni le temps, ni la connaissance du lieu, ni l’expertise photographique. L’offre d’Eyexplore est donc une solution tout-en-un. « On leur apporte finalement, en 3 heures, ce qui leur aurait fallu des années, en fait, à découvrir en terme de lieu, de connaissance de la lumière, de la qualité de la lumière, des saisons. » C’est un gain de temps exceptionnel.

Aller au-delà de la technique : le coaching artistique

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la technique n’est pas le plus important. « Tout ce qui est réglage, finalement, c’est assez facile. » La plupart des clients connaissent déjà les bases comme l’ISO ou l’ouverture. Le vrai blocage est ailleurs : « C’est vraiment quand il faut avoir une idée originale et pas juste reproduire la même photo qu’on a vue sur le Lonely Planet, il y a plus personne, en fait. »

C’est là qu’intervient le rôle de coach. « Nous, on arrive là et on les pousse en fait. C’est pour ça qu’on veut pas s’appeler photographe ou enseignant, on est des coachs, on les pousse à aller au-delà de ce à quoi ils avaient pensé. » Il s’agit d’apprendre à voir différemment, à penser « outside the box ».

L’art de regarder et de sortir des sentiers battus

Le touriste est souvent bombardé d’images préconçues et pressé par le temps. Le résultat ? « Finalement, on prend les mêmes, désolé du terme, mais les mêmes merdes que tout le monde. » Le coaching vise à casser ce cycle. Comment ? En invitant à la lenteur et au changement de perspective.

Axel donne un exemple concret : « Déjà c’est de s’arrêter (…) et de changer son point de vue. » Au lieu de prendre une photo à hauteur d’homme, il suggère de s’accroupir pour trouver un angle différent. Il pousse aussi à observer les détails : « Regardez là-bas, il y a une vitrine d’un magasin et il y a un reflet intéressant. Est-ce que vous l’aviez vu ? Ah, non, j’avais pas vu. » C’est cette prise de conscience qui transforme l’expérience client dans le tourisme de niche.

Stratégies d’acquisition : comment trouver des clients pour un business de niche

Une offre originale ne suffit pas, il faut la faire connaître. Pour cela, Eyexplore utilise une approche multicanale.

La puissance du référencement et des partenariats

Le site web est un canal central, notamment via le référencement organique et payant (Adwords). « La plupart de nos clients nous trouvent parce que c’est assez facile de nous trouver de manière organique ou de manière CPC sur Adwords. »

Les partenariats avec des agences de voyage, notamment les agences réceptives basées au Japon, sont un autre pilier. Convaincre ces agences n’a pas été simple au départ. Il a fallu qu’elles testent le produit lors de « Fam trip » (voyages de familiarisation). « Ils sont venus, ils ont vu ce qu’on faisait, ils ont vu qu’on n’était pas des blaireaux (…) Et donc, du coup, ils ont pas peur de le proposer à leurs clients. » Mieux encore, ils ont réalisé que ce produit original leur permettait de se démarquer de leur propre concurrence.

Travailler avec des influenceurs pour le tourisme

Eyexplore a également investi dans les relations publiques et le marketing d’influence, en déléguant cette tâche à une agence spécialisée. « On a délégué tout ça. On l’a fait un petit peu au début nous-mêmes, mais on s’est rendu compte que quand on a une une agence de relations publiques, tout va plus vite. » Bien que difficile à mesurer précisément, l’impact est réel. « Les gens arrivent, ils nous disent, ah, je vous ai vu sur YouTube. Ah, je vous ai vu dans la vidéo de machin. » Cette stratégie permet de toucher des personnes qui n’auraient jamais pensé à ce type d’activité.

L’art de s’associer : l’importance de l’attitude vs l’aptitude

L’histoire de la création d’Eyexplore est aussi une leçon sur comment choisir un associé pour son entreprise. Axel a rapidement compris qu’il ne pouvait pas faire cavalier seul.

Les erreurs du début : se concentrer sur les compétences

Au départ, Axel a tenté de s’entourer de photographes professionnels. Il a vite déchanté. « Je me suis très vite rendu compte que la plupart avaient quand même un ego assez ultra développé. Ils étaient pas tournés vers le client. » Il a compris que l’aptitude technique ne faisait pas tout. L’attitude était primordiale.

Trouver le partenaire idéal : la rencontre avec Lucas

La rencontre avec Lucas, son futur partenaire, a été un tournant. Après un premier test, Lucas lui dit : « Axel, mais putain, mais les clients, j’aurais pas juste enseigné la photo, je les ai emmenés dans une aventure photographique. » C’est là qu’Axel a compris : « Là, j’ai dit, faut que tu sois mon partenaire. Tu as tout compris. » Ce qui l’a séduit chez Lucas, ce n’est pas seulement ses photos, mais ce qu’elles transmettaient : l’amour de sa ville. C’était un critère essentiel pour un business touristique.

Le test ultime de l’engagement

Avant de sceller le partenariat, Axel a voulu tester la motivation de Lucas. Ils ont travaillé ensemble en freelance pendant un an. Puis, le moment décisif est arrivé dans une station de métro. « Je lui dis, bon, écoute, mon gars, tu veux être partenaire, pas de problème. Tu m’envoies un million de yens sur mon compte en banque dans la semaine. » Soit environ 7800 euros. « Le gars, il avait aucune garantie. Il m’a serré la main, il me l’a fait. » Pour Axel, cet engagement financier était indispensable. « L’argent, finalement, est quand même un bon moyen ultime de savoir si le gars, il va aller jusqu’au bout ou pas. » C’est une illustration parfaite de l’importance de l’attitude vs l’aptitude chez un partenaire.

Définir le pourquoi de son entreprise pour une vision claire

Une des clés de la réussite d’Eyexplore est sa philosophie, fortement inspirée par le concept « Start with why » de Simon Sinek. C’est Lucas qui a apporté cette vision.

Plus qu’un service, une mission

Lucas a posé la question essentielle : « Il nous faut une vision, il nous faut qu’on sache pourquoi on fait. We need a why. » Cette réflexion a permis de définir une mission qui va bien au-delà de la simple prestation de service. Axel résume : « On le fait pour nous challenger. Pour challenger nos clients. » Cette philosophie transpire dans toute leur communication et leurs actions. C’est ce qui les différencie fondamentalement de la concurrence qui se concentre sur le « quoi » (la photo) et le « comment » (la technique), sans jamais aborder le « pourquoi ».

« Challenge your eye » : une promesse incarnée

Cette mission est résumée dans leur tagline : « Challenge your eye ». Et ce ne sont pas que des mots. Ils le prouvent en organisant des ateliers sur les toits des immeubles de Tokyo, des lieux inaccessibles que personne d’autre ne propose. « Pour les trouver, il a fallu qu’on investisse du temps et qu’on pousse des portes, en fait. » Le résultat est un effet « waouh » constant, même chez les Japonais qui redécouvrent leur propre ville. « Les Japonais, ils sont putain, mais est-ce que c’est le même Tokyo ? J’habite ici, ça fait je suis ici depuis que je suis né, j’avais jamais vu ça, quoi. »

Les défis d’un entrepreneur au Japon

Monter une boîte au Japon en tant que Français n’est pas une sinécure. Axel partage son expérience sur les spécificités culturelles et administratives.

La complexité de la culture japonaise

Au-delà de la barrière de la langue, c’est la compréhension des codes sociaux qui est cruciale. « Les Japonais sont vraiment des gens très compliqués à comprendre avec notre vision d’Occidentaux. » Il faut savoir que beaucoup de choses se jouent en dehors du cadre formel. « Il y a des contrats qui ne se passent jamais, le vrai contrat, il se signe jamais au bureau, il se signe à l’Izakaya au bar d’à côté, quoi. » Adapter son business à une culture étrangère est un impératif : « Soit tu la fais à la japonaise, soit tu dégages, quoi. »

Le proverbe qui guide l’action

Pour conclure, Axel partage un proverbe japonais qui résume son état d’esprit : « Ino naka no kawazu taikai wo shirazu ». Ce qui signifie : « La grenouille qui est dans son puit, elle ne connaît rien de l’océan. » Un rappel puissant qu’il faut oser sortir de sa zone de confort, se challenger et explorer les possibilités infinies qui s’offrent à nous. Une philosophie qui est, finalement, l’essence même d’Eyexplore.

Foire aux questions

Comment trouver sa niche sur un marché déjà concurrentiel ?

Pour trouver sa niche, il faut créer une offre hybride qui combine plusieurs services pour répondre à un besoin non exprimé. Il est essentiel d’analyser les faiblesses des concurrents pour proposer une solution unique et plus complète.

« On va faire à la fois quelque chose qui est un croisement essentiellement entre un tour standard qu’on pourrait faire en touriste, aller voir la ville et apprendre, apprendre de meilleures photos. (…) Il y avait déjà des gens qui faisaient des trucs un peu similaires, mais personne qui avait réussi à vraiment à créer un business model autour de ça. »

Quel est le profil type des clients pour du tourisme photographique ?

La clientèle est principalement anglophone, avec un âge moyen de 38-39 ans et une parité hommes-femmes. Elle est composée de voyageurs qui ont déjà des bases en photographie mais qui cherchent à vivre une expérience unique et à améliorer leur regard artistique.

« J’ai environ 38 ans, 39 ans de moyenne d’âge. C’est 50-50 homme-femme. (…) c’est des gens qui pour la plupart connaissent déjà un petit peu la photographie, mais pas seulement. »

Comment choisir le bon associé pour lancer son entreprise ?

Il est crucial de choisir un partenaire basé sur son attitude, sa vision et son engagement plutôt que sur ses seules compétences techniques. Une période de collaboration en freelance et un engagement financier peuvent être de bons tests pour évaluer sa motivation.

« Je pense que c’est vraiment important de prendre des gens basés sur leur attitude et pas sur leur aptitude. (…) L’aptitude, tu pourras toujours lui enseigner (…) alors que l’attitude, si elle est pourrie dès le départ, tu es dans la merde, en fait. »

Pourquoi est-il si important de définir le « pourquoi » de son entreprise ?

Définir son « pourquoi » (sa mission, sa vision) permet de se différencier fondamentalement de la concurrence, de guider toutes ses décisions stratégiques et de créer une marque forte qui inspire à la fois les clients et les collaborateurs.

« Il nous faut une vision, il nous faut qu’on sache pourquoi on fait. (…) la concurrence qu’on a là maintenant (…) j’ai pas trop peur d’eux. parce que je sais que dans notre message, dans notre façon, dans ce qu’on est en train de faire, ça transpire par rapport à notre site web. »

Quels sont les principaux canaux pour trouver des clients pour un business de niche ?

Une stratégie efficace combine plusieurs canaux : le référencement naturel (SEO) et payant (Adwords) pour la visibilité en ligne, les partenariats avec des agences de voyage pour l’accès à une clientèle qualifiée, et le marketing d’influence pour toucher une nouvelle audience.

« Nos canaux principaux, donc c’est effectivement l’organique sur Google. c’est donc le les Adwords et toutes les pubs. C’est aussi les influenceurs et c’est aussi les agences de voyage. »

Quels sont les défis pour un entrepreneur français qui veut monter une boîte au Japon ?

Les principaux défis sont la barrière de la langue et, plus important encore, la nécessité de comprendre et de s’adapter aux codes culturels et sociaux japonais. Les relations d’affaires et la communication y sont très différentes de celles en Occident.

« Au-delà de la langue en elle-même, il faut aussi comprendre les clés du rapport social que tu as avec les gens. (…) C’est tout un tas de trucs qu’il faut connaître. Et si culturellement tu es pas habitué à ça (…) soit tu la fais à la japonaise, soit tu dégages. »

Comment un coaching photo peut-il améliorer l’expérience d’un touriste ?

Le coaching va au-delà de la technique. Il apprend au touriste à ralentir, à changer de perspective et à observer son environnement différemment. Cela lui permet de créer des images plus personnelles et originales, transformant une simple visite en une véritable aventure créative.

« Nous, on arrive là et on les pousse en fait. C’est pour ça qu’on veut pas s’appeler photographe ou enseignant, on est des coachs, on les pousse à aller au-delà de ce à quoi ils avaient pensé. »

Est-il rentable de déléguer le marketing d’influence à une agence ?

Oui, déléguer à une agence de relations publiques peut être très rentable. Même si cela représente un coût, les agences spécialisées ont les contacts et l’expertise pour obtenir des résultats plus rapides et de meilleure qualité que si on le faisait soi-même.

« On s’est rendu compte que quand on a une une agence de relations publiques, tout va plus vite et et tout est plus facile, en fait. Donc ça nous ça nous coûte plus cher, mais la qualité parce qu’on en retire en tout cas est énorme, en fait, par rapport à ce que nous on aurait pu faire. »


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