Logo de l'épisode La fondation financière d’un e-commerce en croissance avec Vincent Redrado, CEO @Digital Native Group du podcast Le Rendez-vous Marketing

La fondation financière d’un e-commerce en croissance avec Vincent Redrado, CEO @Digital Native Group

Épisode diffusé le 16 juin 2023 par Danilo Duchesnes

Écouter l'épisode :

Bâtir sur du roc : les règles d’or de la fondation financière d’une marque e-commerce

Le monde du e-commerce, et plus particulièrement celui des DNVB (Digitally Native Vertical Brands), est un univers fascinant, rempli d’histoires de croissance fulgurante. On voit les chiffres d’affaires exploser, les communautés s’enflammer sur les réseaux sociaux, les levées de fonds s’enchaîner. Mais derrière cette façade brillante se cache une réalité beaucoup plus pragmatique, une mécanique invisible qui détermine qui survivra et qui s’effondrera : la fondation financière. Trop d’entrepreneurs, passionnés par leur produit, se perdent dans les métriques de vanité : le trafic, les abonnés, et même le chiffre d’affaires brut. Ils pilotent leur navire dans le brouillard, sans véritable boussole financière. La question fondamentale n’est pas ‘combien je vends ?’, mais ‘combien je gagne réellement sur chaque vente ?’. Et surtout, ‘ce gain est-il suffisant pour financer ma croissance de demain ?’.

C’est une problématique que nous rencontrons tous les jours. Des fondateurs qui travaillent sans relâche mais peinent à dégager des bénéfices, qui se sentent pris au piège par des coûts d’acquisition qui grimpent et des marges qui s’érodent. Ils ont un produit formidable, une marque forte, mais l’équation économique ne fonctionne pas. C’est précisément pour démystifier cette équation que nous allons plonger au cœur du réacteur. Nous n’allons pas parler de paniers moyens ou de taux de conversion, car comme je le dis souvent, ‘ils sont extrêmement variables en fonction des catégories’. Comparer la cosmétique et l’ameublement n’a aucun sens sur ces points. Nous allons nous concentrer sur les piliers universels, les lois non négociables qui s’appliquent à toute DNVB aspirant à une croissance durable et rentable. Cet article vous livrera la structure de coûts idéale, les ratios à surveiller comme le lait sur le feu, et les seuils en dessous desquels votre projet, aussi brillant soit-il, risque de rencontrer un plafond de verre infranchissable. Préparez-vous à construire sur des fondations solides.

Le pilier incontournable : la règle sacrée des 75% de marge brute

Si je devais ne donner qu’un seul conseil, un seul chiffre à graver dans le marbre pour tout entrepreneur e-commerce, ce serait celui-ci. Avant même de parler de marketing, de logistique ou de salaires, la première question à se poser est : quelle est votre marge brute ? La réponse doit être, sans hésitation, supérieure à 75%. C’est la règle d’or, le point de départ de toute discussion sur la viabilité d’une DNVB. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Comme je l’explique, ‘c’est-à-dire quand mon produit, il est livré chez mon logisticien et je le vends, mais déjà je suis à plus de 75 %.’. En d’autres termes, les 25% restants correspondent à ce que l’on appelle le ‘Cost of Goods Sold’ (COGS), soit le coût de fabrication du produit et son acheminement jusqu’à votre entrepôt. C’est tout. Ce chiffre est le véritable oxygène de votre entreprise. C’est le capital de départ que chaque vente génère pour couvrir absolument toutes les autres dépenses et, à terme, créer du profit.

Pourquoi cette obsession pour les 75% ?

Ce chiffre peut paraître élevé, voire intimidant pour certaines catégories de produits. Pourtant, il n’est pas arbitraire. Il est le fruit d’une analyse simple de la chaîne de valeur complète d’une marque. Une marge brute plus faible, disons à 60% ou 65%, ne vous laisse tout simplement pas assez de ‘carburant’ pour faire fonctionner le reste du moteur. Chaque point de marge en moins est un point que vous ne pourrez pas allouer à votre marketing pour acquérir de nouveaux clients, à votre service client pour les fidéliser, à votre équipe pour innover, ou à votre trésorerie pour supporter les aléas. Vous entrez alors dans un cercle vicieux : sans marge suffisante, vous ne pouvez pas investir agressivement en marketing. Sans marketing, votre croissance ralentit. Vous êtes alors tenté de faire des promotions pour stimuler les ventes, ce qui érode encore plus votre marge. C’est une spirale mortelle pour de nombreuses jeunes marques. C’est d’ailleurs pour cette raison que les fonds d’investissement les plus avertis sont intransigeants sur ce point. ‘Tu vois même certains fonds comme Elton qui disent que en dessous de 80-85 % de marge brute, ils ne regardent pas.’ Pourquoi ? Parce qu’ils savent que sans cette marge de manœuvre initiale, le potentiel de scalabilité, notamment à l’international, est quasi nul. Nous y reviendrons.

Comment construire et défendre cette marge ?

Atteindre ce niveau de marge n’est pas une mince affaire, cela demande une discipline de fer dès la conception du produit. Cela implique plusieurs leviers stratégiques. D’abord, la négociation avec les fournisseurs est cruciale. Il faut sourcer intelligemment, optimiser les volumes de commande sans mettre en péril sa trésorerie, et construire des relations solides. Ensuite, le pricing est fondamental. Votre prix de vente ne doit pas seulement être défini par le marché, mais avant tout par votre structure de coûts et votre objectif de marge. Il faut avoir le courage de fixer un prix qui reflète la valeur de votre produit et la santé de votre entreprise. L’optimisation du packaging (poids, dimensions) joue également un rôle, car elle impacte les coûts de transport en amont. Enfin, il faut constamment chercher des gains d’efficacité dans la production. Une marge brute n’est jamais acquise ; elle doit être défendue bec et ongles à chaque étape de la vie de l’entreprise. C’est le premier rempart de votre forteresse financière.

Avant de décortiquer les couches de coûts suivantes, il est essentiel de bien intégrer cette première étape. La marge brute est le gâteau que vous allez vous partager. Si le gâteau est trop petit dès le départ, peu importe la manière dont vous coupez les parts, il n’y en aura jamais assez pour tout le monde. Avec 75% de marge brute, vous disposez d’un gâteau suffisamment grand pour nourrir votre croissance, vos opérations et, in fine, votre rentabilité. C’est avec cette base saine que nous pouvons maintenant analyser comment allouer intelligemment ces 75 points restants.

La dissection du profit : des coûts variables à la marge contributive

Une fois que vous avez sécurisé votre marge brute de 75%, la bataille n’est pas terminée. C’est maintenant que commence la gestion fine des coûts opérationnels. L’erreur commune est de tout mélanger. Il faut absolument distinguer les coûts variables directement liés à la vente, des coûts fixes qui structurent l’entreprise. Nous allons ici décomposer ce qui se passe entre votre marge brute et le ‘cash’ réellement disponible pour payer vos équipes et vos bureaux. Ce chemin est balisé par deux indicateurs essentiels : la marge contributive 1 et la marge contributive 2.

Étape 1 : La marge contributive 1 (> 55%), le coût de la transaction

Après avoir payé votre produit (les 25% de COGS), vous devez couvrir tous les frais engendrés par le simple fait de réaliser une vente en ligne. Ces coûts sont ce que j’appelle les ‘coûts variables hors marketing’. Ils représentent environ 20 points de votre chiffre d’affaires. Si on décompose, on trouve principalement trois postes : la logistique, les paiements et les outils. ‘Ta logistique, ton shipping, tes retours, c’est 15 points. Tout ce qui est paiement CMS, c’est 3-4 points.’ La logistique (préparation de commande, emballage, expédition) et la gestion des retours sont le plus gros morceau. C’est un centre de coût majeur qu’il faut optimiser en permanence via le choix du bon partenaire, la négociation des tarifs et l’optimisation des process. Ensuite, viennent les frais de transaction (Stripe, PayPal…) et les coûts de votre plateforme e-commerce (Shopify, etc.). Ces derniers, bien que semblant faibles individuellement, pèsent lourd sur le volume. En soustrayant ces 20 points de vos 75 points de marge brute, vous arrivez à ce que l’on nomme la marge contributive 1, qui doit être supérieure à 55%. C’est la marge réelle que vous dégagez après avoir produit, stocké, vendu et livré votre produit. C’est un indicateur de votre efficacité opérationnelle pure.

Étape 2 : La marge contributive 2 (20-30%), le fruit de votre acquisition

Maintenant que vous avez 55% de marge opérationnelle, il est temps de financer le moteur de la croissance : le marketing. Je parle ici des ‘coûts marketing traqués’, c’est-à-dire les investissements dont vous pouvez mesurer directement le retour : Social Ads (Meta, TikTok), SEA (Google Ads), affiliation, etc. Je ne mets volontairement pas dans ce calcul les dépenses de communication plus larges comme une agence de presse ou une campagne télévisée, qui relèvent davantage des coûts de structure. Pour une DNVB en croissance, la norme du marché est claire : ‘tu dois mettre entre 20 et 30 points dessus.’ Consacrer 20 à 30% de votre chiffre d’affaires à l’acquisition est un investissement sain et nécessaire pour alimenter la machine. Aller au-delà est souvent un signe de danger : soit votre produit n’a pas assez de rétention, soit vos canaux d’acquisition sont peu performants, et vous ‘surpayez’ votre croissance. En respectant cette fourchette, vous faites le calcul suivant : 55% (marge contributive 1) – 20 à 30% (coûts marketing) = 25 à 35% (ou plus simplement, entre 20 et 30% comme je le mentionne dans l’échange). C’est votre marge contributive 2. C’est le résultat final de votre modèle de vente variable. C’est l’argent qu’il vous reste après avoir payé le produit, sa logistique, et son marketing. C’est avec cette somme que vous allez enfin pouvoir payer les coûts fixes, aussi appelés Opex : ‘les salaires, je mets pas les bureaux, je mets pas un expert-comptable, tout ça je le mets pas.’

Cette structure 75% -> 55% -> 25% est le squelette financier d’une DNVB saine. Elle vous donne une feuille de route claire pour analyser votre propre compte de résultat (P&L). Si votre marge brute est à 60%, vous comprenez immédiatement pourquoi il ne vous reste rien à la fin. Si vos coûts logistiques sont à 20% au lieu de 15%, vous savez où agir. Si votre marketing dépasse 35%, vous devez auditer vos campagnes. C’est un outil de pilotage extrêmement puissant qui va bien au-delà de la simple comptabilité. C’est la grammaire de la rentabilité e-commerce.

L’indicateur suprême : le ratio LTV/CAC, votre boussole pour une croissance rentable

Nous avons établi la structure de coûts idéale pour chaque transaction. Mais une marque ne se construit pas sur une seule vente. Le véritable enjeu est de bâtir une relation durable avec ses clients, de les faire revenir. C’est là qu’intervient le ratio le plus puissant pour juger de la viabilité à long terme d’un modèle d’acquisition : le ratio LTV sur CAC. Si la marge brute est l’oxygène, ce ratio est le cœur qui pompe le sang dans tout l’organisme. Il répond à une question simple : pour chaque euro investi pour acquérir un nouveau client, combien d’euros ce client me rapporte-t-il sur la durée ? C’est le KPI généraliste par excellence, car contrairement au panier moyen, il transcende les catégories de produits. ‘Quand tu achètes de la lessive ou que tu achètes un matelas, pareil ton taux de récurrence n’est pas le même.’ Le ratio LTV/CAC, lui, permet de tout comparer sur une base commune.

Décryptage du LTV (Lifetime Value) : la valeur d’un client dans le temps

La LTV, ou ‘Lifetime Value’, représente le chiffre d’affaires cumulé qu’un client génère tout au long de sa relation avec votre marque. C’est une projection de sa valeur future. On la calcule simplement : ‘panier moyen par commande fois le nombre de commandes et tu arrives à un chiffre d’affaires cumulé.’ L’important est de l’analyser sur différentes périodes : 6 mois, 12 mois, 24 mois, 36 mois. Cela vous permet de comprendre à quelle vitesse vous ‘rentabilisez’ vos clients. Un client qui dépense 60€ à son premier achat puis plus rien n’a pas la même valeur qu’un client qui dépense 40€ mais revient trois fois dans l’année. La LTV met en lumière la puissance de votre rétention et la fidélité de votre base client. C’est la récompense de la qualité de votre produit et de votre expérience client. Sans une bonne LTV, vous êtes condamné à un jeu épuisant et coûteux : l’acquisition permanente de nouveaux clients pour remplacer ceux qui ne reviennent pas.

Le CAC (Coût d’Acquisition Client) : une définition simple et efficace

De l’autre côté de l’équation, il y a le CAC. Son calcul peut vite devenir un casse-tête avec des modèles d’attribution complexes. Nous prônons une approche radicalement simple et pragmatique. Le CAC, c’est le total de vos dépenses marketing traquées sur une période, divisé par le nombre de *nouveaux* clients acquis sur cette même période. ‘Nous l’acquisition, on part du principe que le repeat est gratuit […] tout le budget que tu mets, il est pour les nouveaux et les anciens ne coûtent rien.’ Est-ce parfaitement exact ? Non. Mais cette méthode a deux avantages immenses : elle est simple à calculer et elle est conservatrice. Elle ‘gonfle’ volontairement le CAC, ce qui vous oblige à être encore plus performant. Tenter de répartir les coûts entre acquisition et rétention mène souvent à des ‘attributions qui sont foireuses’. En considérant que 100% de votre budget publicitaire sert à acquérir de nouveaux clients, vous vous imposez une discipline de fer et une vision claire de la performance de votre machine d’acquisition.

La règle des 3 : pourquoi votre ratio LTV/CAC à 12 mois doit être supérieur à 3

Le chiffre magique, c’est 3. ‘Ce qu’on dit c’est que ce ratio LTV sur CAC à 12 mois doit être supérieur à 3.’ Cela signifie que 12 mois après son premier achat, un client doit vous avoir rapporté au moins trois fois ce qu’il vous a coûté pour l’acquérir. Décortiquons ce que ce ratio implique :
Un ratio de 1:1 signifie que vous récupérez tout juste votre investissement marketing. Compte tenu de tous les autres coûts (produit, logistique, salaires…), vous perdez de l’argent sur chaque client.
Un ratio de 2:1 est encore très fragile. La marge est trop faible pour financer les coûts fixes et la croissance de manière sereine.
Un ratio de 3:1 et plus est le signe d’un modèle économique sain et scalable. Le premier ‘tiers’ rembourse le CAC. Le deuxième ‘tiers’ couvre les coûts du produit et les frais opérationnels. Le troisième ‘tiers’ est le bénéfice brut qui peut être réinvesti dans la croissance ou devenir du profit net. C’est ce cercle vertueux qui permet de scaler. D’ailleurs, ce ratio est mathématiquement lié à la règle de la marge brute. ‘On revient sur le ratio de 75 % si tu n’es pas minimum à 75 % en fait, il te reste rien à la fin.’ Pour générer 3€ de chiffre d’affaires, si votre marge après tous les coûts variables est de 33% (soit 1/3), il vous reste bien 1€ pour payer le CAC. Les chiffres sont interconnectés et racontent la même histoire : celle de la viabilité.

Après avoir examiné votre P&L transactionnel, l’analyse du ratio LTV/CAC est donc l’étape suivante. Elle vous donne une vision dynamique de votre business. Elle ne regarde pas seulement une vente à un instant T, mais la valeur que vous construisez sur le long terme. C’est le véritable juge de paix de la performance de votre marque, combinant l’efficacité de votre marketing à la puissance de votre rétention client.

Le test ultime de la scalabilité : pourquoi une marge élevée ouvre les portes du monde

Une DNVB peut très bien vivre et être rentable sur son marché domestique avec un modèle de vente directe au consommateur. C’est l’essence même de ce modèle. Cependant, la véritable ambition de nombreuses marques est de croître, de s’étendre, de conquérir de nouveaux marchés, que ce soit via des distributeurs physiques ou à l’international. C’est à ce moment précis que la solidité de votre fondation financière est mise à l’épreuve. C’est là que la règle des 75% de marge brute prend tout son sens et devient une question de survie. Un modèle économique qui fonctionne en direct peut s’effondrer complètement dès qu’on y ajoute des intermédiaires.

Le choc des distributeurs : la dilution brutale de la marge

Lorsque vous décidez de vendre vos produits via un réseau de distribution (une chaîne de magasins, un concept store, etc.), vous introduisez un nouvel acteur dans l’équation qui va logiquement demander sa part du gâteau. Et sa part est énorme. ‘Tu as un distributeur qui va te vendre ton produit, il va prendre entre 45 et 55 %.’ C’est un chiffre colossal qui change radicalement votre P&L. Faisons un calcul simple. Imaginez que vous ayez une marge brute de 65%. Le distributeur prend 50% du prix de vente public. Il vous reste donc 15% (65% – 50%) pour couvrir votre COGS initial (35%), votre marketing, votre logistique, vos équipes… L’équation est impossible, vous vendez à perte. Maintenant, reprenons le calcul avec notre règle d’or : une marge brute de 75%. Le distributeur prend 50%. Il vous reste 25%. C’est exactement le montant de votre COGS. Vous êtes à l’équilibre, sans avoir encore payé quoi que ce soit d’autre. C’est extrêmement tendu. Vous comprenez maintenant pourquoi les fonds comme Elton exigent 80-85% ? Avec 80% de marge brute, il vous reste 30% après la part du distributeur, ce qui vous laisse 5% de marge (30% – 25% de COGS) pour couvrir le reste. C’est faible, mais c’est jouable. ‘Si tu es pas à 75 % déjà il te reste plus rien.’ La vente en gros est un formidable levier de volume, mais elle est un destructeur de marge. Seules les marques avec une structure de coûts initiale extrêmement saine peuvent s’y aventurer sans se brûler les ailes.

L’expansion internationale : la complexité des coûts multipliés

Si la distribution est un test, l’international est l’épreuve du feu. Le schéma est similaire, mais avec des couches de complexité et de coûts supplémentaires. ‘Si tu après tu vas à l’international, tu as un distributeur, ce distributeur va prendre entre 10 et 15 %.’ Ce distributeur ‘master’ va ensuite vendre à des revendeurs locaux qui prendront leur propre marge. À cela s’ajoutent les droits de douane, la complexité des devises, les coûts de transport plus élevés, et les investissements marketing nécessaires pour construire la notoriété de la marque dans un nouveau pays. Chaque maillon de la chaîne prélève sa part, et votre marge initiale fond comme neige au soleil. ‘À la fin, si tu n’as pas ce niveau de marge, en fait tu es capé dans ton dans ta croissance internationale parce que ben […] à la fin il te reste rien.’ Vous vous retrouvez face à un choix cornélien : soit vous vendez à perte pour exister sur ce marché, soit vous ne vous lancez pas. C’est ce que j’appelle un ‘plafond de verre de croissance’. Votre modèle économique, bien que viable en direct sur votre marché local, n’est structurellement pas conçu pour supporter le poids de l’expansion. Voilà pourquoi la quête d’une marge brute élevée n’est pas une simple optimisation comptable, c’est une décision stratégique qui conditionne l’ambition et le futur de votre marque.

Conclusion : ces chiffres sont votre stratégie

En conclusion, les chiffres que nous avons parcourus – 75% de marge brute, 55% de marge contributive 1, un budget marketing de 20-30%, et un ratio LTV/CAC supérieur à 3 – ne sont pas de simples indicateurs à observer dans un tableau de bord. Ils sont le plan directeur de votre stratégie. Ils dictent votre politique de prix, vos choix de fournisseurs, votre stratégie de distribution et vos ambitions de croissance. Les ignorer, c’est naviguer à vue en espérant un coup de chance. Les maîtriser, c’est prendre le contrôle de votre destinée et vous donner les moyens de construire une marque non seulement désirable, mais aussi profondément résiliente et rentable. Il n’y a aucun jugement à avoir sur la taille ou l’ambition d’une entreprise, ‘des entrepreneurs qui sont très heureux d’avoir une boîte à 1 million, 1 million 2’. Mais si l’objectif est de bâtir une DNVB scalable et de dépasser ces paliers, alors le respect de ces fondations financières n’est pas une option, c’est une obligation.


Questions fréquentes sur la fondation financière en e-commerce

Quelle est la marge brute idéale pour une marque DNVB et pourquoi est-elle si cruciale ?

La marge brute idéale et non négociable pour une marque DNVB (Digitally Native Vertical Brand) doit être supérieure à 75%. Ce chiffre n’est pas arbitraire ; il représente le ‘carburant’ initial que chaque vente génère pour couvrir toutes les autres dépenses de l’entreprise : coûts variables (logistique, paiement), marketing, et coûts fixes (salaires, bureaux). Une marge inférieure ne laisse tout simplement pas assez de marge de manœuvre pour investir dans la croissance et être rentable. Elle est particulièrement cruciale car elle conditionne la capacité de la marque à se développer via des canaux plus coûteux comme la distribution ou l’international, où les intermédiaires absorbent une part importante de la marge. Sans ce socle de 75%, la croissance rencontre très vite un plafond de verre.

‘Globalement, il faut avoir une marge brute qui est supérieure à 75 %. Donc c’est-à-dire quand mon produit, il est livré chez mon logisticien et je le vends, mais déjà je suis à plus de 75 %. OK, donc tu as 25 % de coûts pour fabriquer le produit et l’envoyer. ce qu’on appelle de cost of good sold.’

Comment se décomposent les coûts dans un P&L e-commerce typique ?

La structure de coûts d’une DNVB saine suit une décomposition précise. Tout part du chiffre d’affaires. On soustrait d’abord environ 25% pour le coût du produit (COGS) pour obtenir la marge brute (>75%). Ensuite, on déduit les coûts variables hors marketing, qui représentent environ 20 points (15 pour la logistique/retours, 5 pour le paiement/CMS), pour arriver à la marge contributive 1 (>55%). De là, on soustrait les coûts marketing traqués, qui doivent se situer entre 20 et 30 points. On obtient alors la marge contributive 2 (entre 20 et 30%), qui est le montant disponible pour couvrir les coûts fixes (salaires, loyers, etc.), aussi appelés Opex, et générer du profit.

‘Tu as 25 % tu as 25 points. OK. Deuxièmement, après tu as tous tes coûts variables hors marketing […] Et là tu arrives à ce qu’on appelle à une marge contributive 1 qui doit être supérieure à 55 %. […] Et après tu as ce qu’on appelle les coûts marketing traqués […] tu dois mettre entre 20 et 30 points dessus […] et donc du coup tu arrives à une marge contributive 2 […] qui en fait va aussi entre 20 et 30 %.’

Qu’est-ce que le ratio LTV/CAC et comment l’interpréter ?

Le ratio LTV/CAC est un indicateur de performance fondamental qui mesure la rentabilité du modèle d’acquisition d’une marque. Il met en relation la LTV (Lifetime Value), qui est le chiffre d’affaires total généré par un client sur toute la durée de sa vie, avec le CAC (Coût d’Acquisition Client), qui est le montant dépensé en marketing pour acquérir ce nouveau client. L’interprétation est simple : il indique combien d’euros un client rapporte pour chaque euro investi pour le recruter. Un ratio de 1 signifie que vous récupérez juste votre mise. Un ratio supérieur à 1 indique que vous gagnez de l’argent sur la durée de vie du client.

‘Un ratio qui est qui est généraliste, c’est le ratio LTV sur CAC. […] Lifetime value, c’est euh en fait le chiffre d’affaires cumulé de ton client sur la durée de sa vie. […] Et ça tu le divises par ton coût d’acquisition.’

Pourquoi un ratio LTV/CAC à 12 mois supérieur à 3 est-il la règle d’or ?

Un ratio LTV/CAC supérieur à 3 à 12 mois est considéré comme le seuil d’un modèle économique sain et scalable. Cela signifie qu’un an après son premier achat, un client a généré trois fois plus de chiffre d’affaires que ce qu’il a coûté pour l’acquérir. Cette ‘règle des 3’ assure une rentabilité robuste : le premier tiers du chiffre d’affaires rembourse l’investissement marketing (le CAC), le deuxième tiers couvre le coût du produit et les frais opérationnels (COGS, logistique…), et le troisième tiers représente la marge brute disponible pour couvrir les coûts fixes et générer du profit. En dessous de 3, le modèle est trop fragile pour supporter les aléas et financer une croissance agressive.

‘Ce qu’on dit c’est que ce ratio LTV sur CAC à 12 mois doit être supérieur à 3. […] tu dois par rapport à ton chiffre d’affaires généré par rapport à ton coût d’acquisition mais générer minimum trois fois plus de chiff d’affaire que ce que tu as coûté ton coût d’acquisition.’

Quel budget marketing allouer pour une croissance saine en e-commerce ?

Pour une DNVB en phase de croissance, il est recommandé d’allouer entre 20% et 30% de son chiffre d’affaires aux coûts marketing traqués. Il s’agit des dépenses directement mesurables comme les publicités sur les réseaux sociaux (Social Ads) ou les moteurs de recherche (SEA). Cette fourchette représente un équilibre sain : elle est suffisante pour alimenter l’acquisition de nouveaux clients et soutenir la croissance, sans pour autant mettre en péril la rentabilité globale de l’entreprise. Dépasser significativement les 30% peut être un signal d’alarme, indiquant une dépendance excessive à la publicité payante ou une performance insuffisante des campagnes.

‘Et là tu dois mettre entre 20 et 30 points dessus. C’est vrai, c’est connu, c’est généralement tu dépasses pas 20 30 % de ton de ton de ton chiffre d’affaires. 30 % de co en fait qui est qui est qui est mis là-dessus.’

En quoi une marge brute élevée est-elle vitale pour l’internationalisation ?

Une marge brute élevée, idéalement supérieure à 75-80%, est la condition sine qua non pour une expansion internationale réussie. L’internationalisation ajoute de multiples couches de coûts qui viennent directement éroder la marge : la commission d’un distributeur master (10-15%), la marge des revendeurs locaux, les droits de douane, les frais de change et les coûts logistiques accrus. Si la marge brute de départ est insuffisante, après déduction de toutes ces parts d’intermédiaires, il ne reste absolument plus rien pour couvrir ne serait-ce que le coût de fabrication du produit. Une marge brute élevée est donc la seule assurance de pouvoir absorber ces coûts supplémentaires et de conserver une rentabilité, même minime, sur les marchés étrangers, évitant ainsi un plafond de verre à la croissance.

‘Si tu n’as pas ce niveau de marge, en fait tu es capé dans ton dans ta croissance internationale parce que ben quand tu prends la marge distributeur, que tu prends les douane, que tu prends les différents niveau devise […] ben en fait à la fin il te reste rien.’

Les salaires et les frais de bureau sont-ils inclus dans ces calculs de marge ?

Non, il est crucial de comprendre que les salaires, les loyers des bureaux, les honoraires d’un expert-comptable ou les abonnements à des logiciels de gestion (tous les coûts fixes, ou Opex) ne sont PAS inclus dans le calcul des marges contributives 1 et 2. Ces marges analysent uniquement la rentabilité du modèle de vente variable : produire, vendre, livrer et marketer un produit. La marge contributive 2, qui se situe entre 20 et 30%, représente précisément le montant disponible *avant* de payer tous ces coûts de structure. C’est le résultat brut de l’activité commerciale, qui doit ensuite être suffisant pour faire fonctionner l’entreprise au quotidien.

‘On est d’accord que les salaires, je pense qu’on a parlé rapidement c’est dans les Opex. les coûts fixe, je ne mets pas les salaires, je mets pas les bureaux, je mets pas tenda, je mets pas un expert comptable, tout ça je le mets pas. Là, c’est juste les modèles on va dire variables.’


Épisodes similaires