Logo de l'épisode #112 - Faire 6M€ de CA en 2 ans dans le marché ultra-concurrentiel des vélos électriques avec Amélie Guicheney, Co-Founder & CEO @GAYA (1/2) du podcast Le Rendez-vous Marketing

#112 – Faire 6M€ de CA en 2 ans dans le marché ultra-concurrentiel des vélos électriques avec Amélie Guicheney, Co-Founder & CEO @GAYA (1/2)

Épisode diffusé le 29 janvier 2024 par Danilo Duchesnes

Écouter l'épisode :

Comment lancer une marque à succès dans un marché saturé : les coulisses de la création de GAYA

Lancer une marque de produits physiques, qui plus est dans un secteur aussi compétitif que celui du vélo électrique, peut sembler être une mission impossible. Le marché est un véritable ‘océan rouge’, avec des dizaines d’acteurs établis, des géants de la distribution et une complexité industrielle qui peut effrayer les plus audacieux. Pourtant, en l’espace de deux ans à peine, nous avons réussi à vendre plus de 2500 vélos pour un chiffre d’affaires dépassant les 6 millions d’euros avec notre marque, GAYA. Comment avons-nous fait ? Ce succès n’est pas le fruit du hasard, mais celui d’une démarche méthodique, d’une écoute obsessionnelle de nos futurs clients et d’une volonté farouche de résoudre de vrais problèmes. Ce n’est pas seulement l’histoire d’un vélo, c’est l’histoire d’une vision : celle de simplifier la vie des familles urbaines. Avant même de dessiner le premier prototype, tout a commencé par une profonde remise en question personnelle, une quête de sens qui m’a menée bien plus loin que je ne l’aurais imaginé. Dans cet article, je vais vous partager, étape par étape, le chemin que nous avons parcouru, de l’étincelle initiale à la commercialisation, en passant par les doutes, les découvertes et les stratégies qui ont fait la différence. Vous découvrirez comment transformer une intuition en une étude de marché actionnable, comment un produit peut se différencier radicalement en répondant à des besoins ignorés, et comment nous avons ‘prouvé’ notre concept avec seulement 1000€ de publicité avant même d’avoir levé le moindre euro.

Le déclic entrepreneurial : quand la quête de sens rencontre l’opportunité

On me demande souvent ce qui m’a poussée à quitter le confort du salariat pour me lancer dans l’aventure incertaine de l’entrepreneuriat, surtout en 2021, en plein contexte post-Covid. La réponse n’est pas une simple idée de business. C’est un cheminement bien plus profond, un alignement de planètes entre une expérience professionnelle qui m’a donné confiance et un bouleversement personnel qui a redéfini mes priorités. J’ai toujours eu cette envie de créer mon entreprise, une sorte de vœu pieux que je repoussais depuis mes 20 ans. Il me manquait toujours quelque chose : la légitimité, la bonne idée, le bon moment. Ce qui a tout changé, c’est une combinaison de facteurs qui m’ont finalement donné le courage de sauter le pas. Mon expérience chez Evaneos, une marketplace de voyages, a été fondatrice. J’y ai vécu l’hypercroissance, j’ai structuré des équipes sur des périmètres très variés, de l’offre au produit en passant par la data et la marque. J’ai acquis une vision à 360 degrés qui a considérablement renforcé ma confiance en mes capacités. Paradoxalement, c’est la crise du Covid, qui a durement touché le secteur du tourisme, qui a agi comme un accélérateur. Gérer des plans de relance et de licenciement a été une expérience humaine et professionnelle singulière, qui m’a forgée et m’a préparée à affronter l’incertitude.

L’introspection comme véritable point de départ

Le véritable tournant fut personnel. En 2020, je suis devenue maman. Cette expérience a radicalement changé ma perspective sur le monde et sur ma place dans celui-ci. Comme je le dis souvent,

‘le fait de devenir parent, je pense que ça a aussi contribué à me poser pas mal de questions et de regarder aussi le monde par un prisme qui va au-delà de soi-même’.

Cette nouvelle responsabilité m’a amenée à m’interroger sur l’impact que je voulais avoir, sur ce que je souhaitais construire pour la génération de mon fils. Je ne voulais plus seulement participer à une aventure, je voulais en être l’initiatrice, et porter un projet qui ait un impact écologique et social concret, ici et maintenant. C’est cette quête de sens qui m’a poussée à quitter mon poste début 2021. Je n’avais pas d’idée précise de produit, mais j’avais des convictions fortes : un projet à impact, une solution innovante qui simplifie réellement le quotidien des gens, et un positionnement grand public. Cette phase d’introspection est, à mon sens, une étape fondamentale trop souvent négligée. Avant de chercher le ‘quoi’, il faut solidifier son ‘pourquoi’. C’est ce qui vous donnera la résilience nécessaire pour surmonter les obstacles inévitables.

La rencontre qui a tout changé : la force du binôme

Armée de ces convictions, je me suis lancée dans une phase d’exploration intense. J’ai rencontré énormément de monde, sans idée préconçue. C’est de fil en aiguille, au gré des discussions, que je me suis orientée vers le secteur de la mobilité. Et c’est là que la magie a opéré. On m’a présenté Jacques Bonneville, mon futur associé. Jacques, c’est le pendant ingénieur de notre binôme. Il possède un parcours incroyable dans la mobilité, de l’automobile, le secteur ‘star’ en termes de standards et d’innovation, jusqu’aux nouvelles mobilités. Il avait notamment été un précurseur sur le marché du vélo électrique dès 2014 avec la marque Matra. Cette rencontre a été le catalyseur. Nos compétences étaient parfaitement complémentaires : ma vision business, stratégique et marketing, et son expertise technique et produit. C’est un message que je tiens à passer à tous ceux qui veulent se lancer :

‘vous n’avez pas nécessairement besoin d’avoir une idée parfaite, magique, incroyable, innovante qui va être une révolution sur le marché. C’est quelque chose qui peut se construire’.

Et cela se construit souvent à deux. Ensemble, nous n’avions pas encore GAYA, mais nous avions une méthode et une ambition commune : analyser le marché pour y trouver une place unique.

Plongée en eaux troubles : comment GAYA a trouvé son océan bleu dans un marché saturé

Une fois le binôme formé, notre première mission était claire : cartographier le champ de bataille. Le marché du vélo électrique en 2021 était déjà en pleine explosion, un véritable ‘océan rouge’ où des centaines de marques se disputaient l’attention des consommateurs avec des produits souvent très similaires. Se lancer bille en tête avec une énième copie aurait été un suicide commercial. Notre approche ne pouvait pas être de crier plus fort, mais de parler différemment, à une audience que personne n’écoutait vraiment. Pour cela, nous avons adopté une démarche quasi-scientifique, en analysant le marché sous tous les angles, non pas depuis un bureau, mais en nous mettant réellement dans la peau de l’utilisateur. Nous voulions comprendre les frustrations, les peurs et les désirs cachés de ceux qui hésitaient encore à franchir le pas de la mobilité électrique. C’est ce travail de détective qui nous a permis de déceler non pas une, mais plusieurs failles béantes dans l’offre existante, des ‘trous dans la raquette’ qui allaient devenir la fondation de notre stratégie de différenciation.

Une analyse de marché 360° : au-delà des chiffres, l’expérience utilisateur

Notre analyse s’est déroulée en trois temps. D’abord, nous avons mené des dizaines d’interviews qualitatives avec des utilisateurs potentiels. Je les ai réalisées moi-même pour sentir le pouls du marché, pour entendre les mots, les hésitations, les enthousiasmes. Ensuite, nous avons analysé l’expérience client existante. Concrètement, que se passe-t-il quand une personne novice cherche à acheter un vélo électrique en ligne ou en magasin ? Le constat était sans appel. Comme je l’expliquais,

‘la réalité c’est qu’il y a plein d’informations ultra techniques vraiment tu te perds en tant qu’utilisateur quand tu fais des recherches sur le sujet du vélo électrique’.

Le couple moteur, les watts, le type de freins… Un jargon opaque qui érige une barrière à l’entrée et intimide plus qu’il n’aide. Enfin, avec la vision technique de Jacques, nous avons disséqué les offres présentes sur le marché. Et là, une évidence nous a sauté aux yeux : une uniformité frappante. La grande majorité des vélos se ressemblaient, avec des positionnements prix et des spécificités techniques quasi identiques. C’était un océan de vélos à grandes roues, efficaces mais sans âme et surtout, sans réelle adaptation aux contraintes spécifiques de la vie de famille en ville.

Identifier les besoins non adressés : la clé des familles urbaines

C’est en croisant toutes ces analyses que nous avons identifié notre cible et les trois besoins fondamentaux que personne n’adressait de front : les familles urbaines. Leurs problématiques étaient claires et récurrentes. Premièrement, un besoin criant de **modularité**. Un vélo de famille ne sert pas qu’à une seule chose. Il doit pouvoir vous accompagner du matin au soir : déposer les enfants à l’école, filer au bureau, faire les courses sur le chemin du retour, transporter les affaires de sport… Les solutions existantes étaient souvent mono-usage, soit un vélo classique, soit un cargo imposant et difficile à manœuvrer. Deuxièmement, un enjeu crucial de **sécurité**. Nous avons découvert un insight puissant :

‘une personne sur deux a peur de faire du vélo en ville’.

La peur de la circulation, de manquer de stabilité avec les enfants à l’arrière, de ne pas être vu par les automobilistes. Il ne s’agissait pas seulement d’avoir de bons freins, mais de créer un véritable sentiment de confiance et de maîtrise à bord. Enfin, le troisième frein majeur était la **peur du vol**. Un vélo électrique représente un investissement conséquent, souvent plus de 2000€. Cette peur était un frein à l’achat, mais aussi un frein à l’usage. Combien de fois les gens nous ont dit renoncer à prendre leur vélo de peur de ne pas trouver un endroit sûr où l’attacher ? Ces trois piliers – modularité, sécurité, anti-vol – sont devenus notre feuille de route pour la conception du produit. C’était notre océan bleu.

Du concept au produit : la matérialisation d’une vision différenciante

Identifier les problèmes est une chose, y apporter une solution élégante, fonctionnelle et désirable en est une autre. C’est là que l’expertise technique de Jacques et ma vision de l’expérience utilisateur se sont véritablement unies. Nous ne voulions pas simplement ajouter des ‘features’ à un vélo existant. Nous voulions repenser l’objet lui-même pour qu’il soit la réponse incarnée aux besoins que nous avions identifiés. Chaque décision de conception, du diamètre des roues à la forme du phare, a été guidée par cette obsession de résoudre les problèmes de modularité, de sécurité et de vol. Notre cahier des charges n’était pas une liste de composants techniques, mais une liste de promesses faites à nos futurs clients : un vélo capable de s’adapter à toutes les facettes de leur vie, un cocon de sécurité sur la route, et la tranquillité d’esprit face au vol. C’est cette approche holistique qui a donné naissance à un vélo au design si particulier, un design qui ne laisse pas indifférent car il est avant tout au service de la fonction.

Concevoir un vélo qui répond aux vrais problèmes, pas aux tendances

Pour la **modularité**, nous avons créé deux versions : un ‘Compact’ et un ‘Cargo’, mais tous deux capables de porter une charge exceptionnelle de 160 kg. Cela signifie que même notre vélo compact, de la taille d’un vélo classique, peut transporter un deuxième adulte. C’est une proposition de valeur quasi unique sur le marché. Sur la version allongée, on peut emmener jusqu’à trois enfants. Nous avons brisé le dilemme entre un vélo agile et un vélo capable. Pour la **sécurité**, nous nous sommes inspirés d’un autre univers.

‘On s’est inspiré un peu de la géométrie des mobylettes’.

Nous avons opté pour des roues plus petites et des pneus plus larges. Cela abaisse le centre de gravité et rend le vélo incroyablement stable et maniable, même lourdement chargé. Fini l’appréhension dans les virages. À cela, nous avons ajouté un arsenal d’équipements issus du monde du scooter pour ‘voir et être vu’ : un grand phare iconique, des clignotants à l’avant et à l’arrière pour ne plus avoir à lâcher le guidon, un vrai klaxon et un feu stop. Chaque élément répond à un ‘insight user’ précis. Enfin, pour la **peur du vol**, nous avons intégré une solution technologique robuste : un traceur GPS connecté à une application mobile. Cela permet de géolocaliser le vélo en permanence, de déclencher une alarme en cas de tentative de vol et de bloquer l’assistance électrique à distance. L’effet est double : dissuader les voleurs et faciliter la récupération en cas de vol. L’anecdote la plus parlante est personnelle : je me suis fait voler le tout premier prototype de GAYA à Paris.

‘Je l’ai récupéré 3 jours plus tard grâce à ça’.

C’était la meilleure preuve de concept possible.

Un style affirmé comme signature de marque

Au-delà de la fonctionnalité, nous savions que le style était un élément de différenciation crucial. Dans un marché où tout se ressemble, avoir une identité visuelle forte est un avantage concurrentiel énorme. Le design de GAYA, avec son cadre bas, ses petites roues et son grand phare rond, n’est pas le fruit du hasard. Il découle des choix techniques faits pour la sécurité et la modularité, mais nous l’avons assumé et transformé en une signature esthétique. Ce look, à la fois rétro et moderne, sympathique et robuste, a créé un attachement immédiat. Il communique instantanément nos valeurs : simplicité, sécurité, praticité. Il a permis à nos vélos d’être immédiatement reconnaissables dans la rue et sur les réseaux sociaux. Cette différenciation visuelle a été un atout majeur dans notre stratégie d’acquisition, car elle rend nos publicités plus mémorables et crée un désir qui va au-delà de la simple fiche technique. Le style n’est pas qu’une question de beauté, c’est un langage qui exprime la promesse de la marque.

La validation avant l’investissement : la stratégie ‘Growth Hacking’ pour prouver le potentiel

Avoir une idée brillante et un concept produit solide sur le papier, c’est bien. Prouver qu’il existe un marché prêt à payer pour cette idée avant d’investir des centaines de milliers d’euros dans la production, c’est mieux. C’est peut-être l’étape la plus critique de notre parcours, celle qui nous a permis de passer du statut de ‘projet’ à celui de ‘start-up investissable’. Nous étions face à un dilemme classique dans le ‘hardware’ : pour produire, il faut de l’argent, mais pour avoir de l’argent, il faut prouver qu’on peut vendre. Pour sortir de ce cercle vicieux, nous avons adopté une approche de ‘growth hacking’ en menant une double validation en parallèle : un prototypage physique pour tester le produit, et un prototypage digital pour tester le marché. Cette stratégie nous a permis de collecter une quantité impressionnante de données et d’insights avec des ressources très limitées, et de nous présenter devant les investisseurs non pas avec des suppositions, mais avec des preuves tangibles de l’attractivité de notre offre.

Le double prototypage : confronter le produit et le marché à la réalité

La première voie était celle du concret. Nous avons fait fabriquer nos deux premiers prototypes, le Compact et le Cargo. C’était essentiel pour nous de pouvoir toucher, tester, sentir le vélo. Nous l’avons ensuite confié à plus de 50 ‘beta-testers’, un panel varié de personnes correspondant à notre cible. Leurs retours ont été d’une richesse inestimable. Ils nous ont permis d’affiner des dizaines de détails, d’améliorer l’ergonomie, de valider nos hypothèses sur la stabilité et la maniabilité. Mais cette approche qualitative, bien qu’indispensable, a ses limites. Elle peut être sujette à des biais. En parallèle, j’ai donc décidé de lancer une expérience à plus grande échelle, une sorte de ‘crash test’ digital pour notre concept. L’idée était simple : simuler un lancement e-commerce pour mesurer l’intérêt réel et collecter des données quantitatives. J’ai monté une page web qui présentait notre offre, nos vélos, notre promesse, comme si tout était déjà disponible à la vente. C’était notre prototype digital.

1000€ de Facebook Ads pour 400 leads : une étude de marché grandeur nature

Pour attirer du trafic sur cette page, j’ai décidé d’utiliser la publicité Facebook. Je n’étais pas une experte, j’ai donc suivi des formations en ligne pour monter mes premières campagnes. L’objectif n’était pas de vendre, mais de mesurer l’attractivité et de comprendre qui était sensible à notre message. J’ai investi un peu plus de 1000€. Le résultat a dépassé toutes nos espérances.

‘En mettant un peu plus de 1000 € sur la table en Facebook Ads, j’ai eu plus de 400 questionnaires remplis’.

Le ‘funnel’ était simple : les publicités menaient au site, où les visiteurs étaient invités à réserver un essai via un questionnaire. Ce questionnaire était en réalité une étude de marché déguisée, avec une dizaine de pages de questions sur leurs besoins, leurs préférences (couleurs, prix), leurs freins… Analyser les performances des publicités m’a permis de valider nos intuitions sur la cible. Les campagnes sur-performaient sur les femmes de 35 ans et plus, les urbains et les parents. Nous avons découvert une audience féminine particulièrement réceptive, probablement parce que

‘globalement ce marché là avait quand même peu communiqué auprès du secteur féminin’.

Les 400 réponses au questionnaire nous ont donné une base de données statistique robuste pour affiner notre offre, nos arguments marketing et même notre stratégie de prix. Forts de tout cela, nous étions prêts pour la prochaine étape : la levée de fonds.

De la validation à la production : structurer l’hypercroissance en un temps record

Armés de nos prototypes physiques validés par les utilisateurs et, surtout, des résultats éloquents de notre campagne de test digitale, nous avions transformé une intuition en un business case solide. Nous n’arrivions pas devant les investisseurs avec une simple idée, mais avec la preuve d’une adéquation produit-marché. Nous avions démontré qu’il existait une demande réelle et quantifiable pour un vélo électrique pensé pour les familles, et nous savions précisément à qui nous adresser et comment leur parler. Ce travail en amont a été le facteur décisif qui a tout accéléré. Entre la première discussion avec Jacques et la confirmation de notre première levée de fonds, il s’est écoulé entre six et neuf mois. Un temps record qui témoigne de l’importance de cette phase de pré-validation. Une fois les fonds sécurisés, nous sommes entrés dans une nouvelle dimension : celle de l’exécution. Il fallait transformer le plan en réalité, et le faire vite, sur deux fronts parallèles et tout aussi exigeants : lancer la production industrielle et construire toute l’infrastructure de commercialisation.

La levée de fonds : quand les données transforment un projet en une entreprise financée

Notre pitch aux investisseurs était simple et puissant. Nous présentions l’analyse du marché, les ‘trous dans la raquette’, notre proposition de valeur unique et, pour couronner le tout, les données de notre test Facebook Ads. Nous pouvions dire : ‘Voilà la cible, voilà le message qui fonctionne, voilà l’intérêt qu’il suscite, et voilà les préférences exprimées par 400 prospects qualifiés’. Nous ne vendions pas un rêve, nous présentions un concept pré-validé. C’est ce qui a convaincu notre premier investisseur, le fonds du groupe Mobivia, de nous suivre. Ce premier ticket nous a donné les moyens de lancer l’opérationnel. Dans le secteur industriel, le cash est le nerf de la guerre. Il fallait pouvoir financer les approvisionnements en pièces, qui se paient des mois à l’avance. Comme je l’explique, le cycle est long :

‘tu as allez entre 1 et 3 mois d’approvisionnement de pièces. Ensuite tu as 2 mois d’import en bateau et ensuite tu assembles tes vélos’.

Sans cette levée de fonds, il aurait été impossible de démarrer la production et de tenir des délais raisonnables pour nos premiers clients.

Les chantiers opérationnels : construire une marque et un e-commerce en mode sprint

Pendant que la machine industrielle se mettait en marche, il fallait construire tout le reste. Début 2022, j’étais encore seule avec Jacques sur la partie business. Nous avons fonctionné en mode ‘sprint’ sur tous les fronts. La première semaine de janvier, nous nous sommes enfermés avec une agence créative pour définir l’identité de la marque : nom, logo, univers visuel… En une semaine, le ‘brand book’ était né. La semaine suivante, même méthode pour le site e-commerce : une semaine de sprint pour concevoir toutes les maquettes UX/UI, faire des tests utilisateurs et briefer les développeurs pour l’intégration sur Shopify. Nous n’avions pas le temps de nous perdre en conjectures. Nous avons appliqué une méthode agile et ultra-rapide pour poser les fondations de notre commercialisation. Chaque étape, du branding au développement du site, était pensée pour créer une expérience client cohérente avec notre promesse de simplicité et d’efficacité. Cette période a été intense, mais elle a prouvé qu’avec une vision claire et une exécution focalisée, il est possible de bâtir les piliers d’une marque D2C en quelques semaines seulement. La fusée GAYA était sur son pas de tir, prête pour le décollage.

Conclusion : Les leçons d’un lancement réussi dans un secteur compétitif

Le parcours de GAYA, de l’idée à la commercialisation en moins d’un an, est une démonstration que même les marchés les plus saturés recèlent des opportunités pour ceux qui osent regarder ailleurs. Notre succès ne repose pas sur une innovation technologique de rupture, mais sur une innovation d’usage, née d’une écoute profonde et sincère des besoins non exprimés d’une cible précise : les familles urbaines. Si je devais résumer les clés de cette première phase de notre aventure, ce seraient les suivantes : commencez par le ‘pourquoi’ à travers une introspection personnelle ; plongez-vous obsessionnellement dans la vie de vos futurs clients pour identifier les vrais problèmes ; osez une différenciation radicale qui répond à ces problèmes de manière visible et fonctionnelle ; et surtout, validez votre concept avec des méthodes agiles et peu coûteuses avant de chercher des financements importants. L’histoire de GAYA prouve qu’il est possible de créer un ‘océan bleu’ en se concentrant sur une niche et en lui offrant une solution qu’elle n’attendait plus. Nous n’avons pas seulement créé un vélo électrique ; nous avons conçu un partenaire de vie pour simplifier le quotidien complexe des parents en ville. Et ce n’était que le début de l’aventure. La prochaine étape, tout aussi cruciale, était de mettre en place une stratégie d’acquisition pour faire connaître notre solution au plus grand nombre, mais cela, c’est une autre histoire.


Questions fréquentes sur la création de la marque GAYA

Quelle a été l’idée de départ pour créer la marque de vélos GAYA ?

L’idée de GAYA n’est pas venue d’une illumination soudaine sur un produit, mais d’une profonde quête de sens personnelle. Après être devenue mère et avoir vécu des expériences professionnelles intenses, je ressentais le besoin de créer un projet à impact, qui simplifierait concrètement la vie des gens tout en ayant un effet positif sur l’environnement urbain. C’est cette volonté qui m’a guidée vers le secteur de la mobilité. L’idée précise de GAYA s’est ensuite construite avec mon associé, Jacques, après une analyse fine du marché et des besoins non satisfaits des familles.

‘Quand j’ai quitté Eveneos, j’avais une envie d’avoir un projet à impact, ça c’était évident avec un impact écologique, un impact aussi très concret ici et maintenant dans la ville dans laquelle mon fils grandissait.’

Comment GAYA se différencie-t-elle sur le marché ultra-concurrentiel du vélo électrique ?

GAYA se différencie radicalement en ne cherchant pas à être le meilleur vélo pour tout le monde, mais le vélo parfait pour une cible spécifique : les familles urbaines. Notre stratégie repose sur trois piliers qui répondent à leurs besoins non adressés. Premièrement, la modularité, avec des vélos capables de transporter jusqu’à 160 kg, soit un adulte et des enfants. Deuxièmement, un sentiment de sécurité accru grâce à une géométrie inspirée du scooter (centre de gravité bas) et des équipements comme les clignotants et un phare puissant. Enfin, nous levons le frein majeur du vol grâce à un traceur GPS intégré.

‘On est allé targeter une niche différente pour créer notre océan bleu. Pour adresser une cible qui est la cible des familles urbaines et qui ont trois besoins particuliers.’

Quelle a été l’importance de l’étude utilisateur dans le développement de GAYA ?

L’étude utilisateur a été le fondement de toute notre stratégie. Elle nous a permis de passer d’un marché ‘océan rouge’, où tout le monde se copie, à un ‘océan bleu’ en identifiant des problèmes que personne ne résolvait. En interviewant directement les utilisateurs potentiels, nous avons compris leurs frustrations face au jargon technique, et surtout, nous avons identifié les trois besoins clés : modularité, sécurité et peur du vol. Chaque caractéristique de nos vélos est une réponse directe à un insight recueilli lors de cette phase de recherche. C’est ce qui rend notre offre si pertinente.

‘On a analysé le marché à la fois d’un point de vue expérience utilisateur, expérience client. Avec beaucoup d’interview clients que j’ai réalisé moi-même.’

Comment avez-vous validé le concept de GAYA avant de lever des fonds ?

Nous avons utilisé une stratégie de double validation pour minimiser les risques. D’un côté, nous avons créé des prototypes physiques que nous avons fait tester par une cinquantaine de personnes pour obtenir des retours qualitatifs. De l’autre, et c’est la partie la plus innovante, j’ai créé une fausse page de vente et investi 1000€ en publicités Facebook pour simuler un lancement. Cette campagne nous a permis de générer plus de 400 prospects qualifiés qui ont rempli un long questionnaire, validant ainsi l’attrait pour notre concept, notre cible et même des préférences de prix et de couleurs.

‘Fort de tout ça, on a pu présenter ça lors de notre levée de fond parce qu’en fait, on partait certes d’une page blanche, mais avec un concept qui était prévalidé.’

Quels sont les trois principaux besoins des familles urbaines que GAYA adresse ?

Les trois besoins fondamentaux que nous avons identifiés et auxquels GAYA répond sont : 1. La modularité : le besoin d’un seul vélo capable de tout faire au cours d’une journée (transporter les enfants, les courses, ses affaires). 2. La sécurité : la nécessité de se sentir en confiance dans la circulation urbaine, un sentiment que nous créons avec la stabilité du vélo et des équipements de visibilité. 3. La peur du vol : un frein majeur à l’achat et à l’usage que nous levons avec notre solution de géolocalisation et d’alarme intégrée.

‘Le besoin numéro 1, c’est un besoin de modularité… Le deuxième élément qui est clé… c’est le besoin de sécurité… Et le troisième frein qu’on a travaillé… c’est la peur du vol.’

Pourquoi avoir choisi un modèle de vente direct (D2C) et non la grande distribution ?

Le choix du modèle Direct-to-Consumer (D2C) était une évidence pour nous. Il nous permet de maîtriser entièrement l’expérience client, du premier contact sur notre site jusqu’au service après-vente. Dans un marché où l’expérience d’achat est souvent complexifiée par un jargon technique, nous voulions offrir un parcours simple et rassurant. Le D2C nous permet aussi de recueillir des retours clients en direct et en continu, ce qui est crucial pour améliorer le produit. Enfin, ce modèle nous donne une plus grande agilité et un meilleur contrôle sur notre image de marque et notre stratégie de prix, sans dépendre d’intermédiaires.

‘On a regardé comment l’expérience client se faisait… la réalité c’est qu’il y a plein d’informations ultra techniques vraiment tu te perds en tant qu’utilisateur… [Le D2C nous permet de simplifier ça].’

Quel a été le rôle du co-fondateur technique dans le succès de GAYA ?

L’association avec mon co-fondateur ingénieur, Jacques Bonneville, a été absolument fondamentale. Mon profil est orienté business et stratégie, tandis que Jacques apporte une expertise produit et technique immense, acquise dans les secteurs les plus exigeants de la mobilité. Ce duo complémentaire nous a permis de traduire les insights des utilisateurs en solutions techniques concrètes et fiables. Jacques a été le maître d’œuvre de la conception du vélo, s’assurant que notre vision se matérialise dans un produit de haute qualité, sûr et innovant. C’est l’incarnation parfaite du binôme ‘visionnaire-réalisateur’.

‘C’est une entreprise que j’ai cofondé avec Jacques Bonneville, mon associé qui est le pendant ingénieur du binôme.’

Comment GAYA résout-il le problème de la peur du vol de vélo électrique ?

Nous avons pris ce problème très au sérieux car c’est un frein majeur pour nos clients. Pour y répondre, nous avons intégré une solution technologique complète. Chaque vélo GAYA est équipé d’un traceur GPS invisible, connecté à une application mobile. Si une tentative de vol est détectée, le propriétaire reçoit une notification et une alarme puissante se déclenche sur le vélo. Il peut alors géolocaliser son vélo en temps réel et bloquer l’assistance électrique à distance, le rendant beaucoup moins attractif pour les voleurs et plus difficile à revendre.

‘Ce qu’on a fait c’est qu’on a intégré un traceur GPS connecté à une application mobile qui permet de géolocaliser le vélo en permanence, qui permet de déclencher une alarme automatiquement en cas de suspicion de vol et de bloquer l’assistance électrique.’


Épisodes similaires