Logo de l'épisode Stratégie de lancement avec Pauline Laigneau – Episode 44 du podcast Le Podcast du Marketing - stratégie digitale, persona, emailing, inbound marketing, webinaire, lead magnet, branding, landing page, copy

Stratégie de lancement avec Pauline Laigneau – Episode 44

Épisode diffusé le 15 octobre 2020 par Estelle Ballot

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L’histoire du chat rose : comment Gemmyo a révolutionné la joaillerie grâce à l’audace et l’itération

Paris, milieu des années 2010. Les couloirs du métro sont tapissés d’une image improbable : un adorable chaton rose, une bague scintillante délicatement posée sur son oreille. Pas de mannequin, pas de décor fastueux, juste une audace colorée qui détonne dans l’univers feutré et traditionnel de la joaillerie. Cette campagne, c’est celle de Gemmyo. Pour beaucoup, elle marque la naissance d’une nouvelle étoile dans le firmament du luxe français. Mais ce que peu de gens savent, c’est que ce succès viral n’était pas un coup de génie isolé. Il était l’aboutissement d’un parcours semé d’échecs, d’apprentissages et d’une conviction inébranlable. Comment de jeunes entrepreneurs, novices dans ce secteur, ont-ils réussi à bousculer les codes et à imposer leur marque ? L’histoire de Gemmyo, racontée par sa co-fondatrice Pauline Laigneau, est bien plus qu’une success-story ; c’est une masterclass sur la stratégie de lancement, la résilience et l’importance de placer le client au cœur de tout. Ce n’est pas seulement l’histoire d’une marque de bijoux, mais le récit inspirant de la transformation d’une frustration personnelle en une entreprise florissante, grâce à une philosophie simple mais puissante : agir, apprendre, et recommencer. Plongez dans les coulisses d’un lancement qui a changé les règles du jeu.

L’étincelle : quand une frustration personnelle devient un business model disruptif

Toute grande aventure entrepreneuriale commence souvent par une petite histoire personnelle. Pour Gemmyo, tout a débuté avec un moment qui devrait être synonyme de joie pure : la recherche d’une bague de fiançailles. Avec mon mari, Charif, nous nous faisions une fête de cette quête. Nous imaginions un parcours initiatique à deux, une découverte complice d’un univers qui nous était inconnu. Mais la réalité fut bien différente. Au fil des visites dans les plus grandes maisons de la place Vendôme, l’enthousiasme a laissé place à une forme de désillusion. Les bijoux étaient magnifiques, certes, mais l’expérience était intimidante, les prix prohibitifs, et surtout, un sentiment étrange s’est installé en moi : celui de n’être qu’un numéro. Je ne voulais pas que le symbole de notre engagement soit le même que celui de centaines d’autres femmes. Comme je le dis souvent :

‘J’avais pas envie d’être un numéro parmi d’autres. Tu vois je pense que j’avais envie de de stand out de d’affirmer ma singularité.’

C’est cette quête de singularité qui a été le véritable point de départ de Gemmyo. Nous avons réalisé qu’il existait un espace immense entre les marques de luxe standardisées et les artisans de quartier, talentueux mais souvent difficiles d’accès et sans la réassurance d’une marque forte.

L’expérience client, point de départ de toute innovation

Notre propre expérience a été une véritable étude de marché en temps réel. Nous avons identifié une douleur profonde chez le consommateur moderne de luxe : le désir d’avoir un produit qui raconte une histoire unique, la sienne. La solution semblait être le sur-mesure, mais celui-ci présentait ses propres inconvénients. Se tourner vers un joaillier de quartier, c’est prendre un risque. Il n’y a pas de retour possible si la création finale ne correspond pas aux attentes, et la qualité dépend entièrement de la réputation de l’artisan, souvent transmise par le bouche-à-oreille. Face à ce constat, l’idée a germé : pourquoi ne pas créer la première marque de joaillerie qui allierait le meilleur des deux mondes ? Nous voulions offrir la personnalisation et le caractère quasi unique d’une pièce d’artisan, mais avec la modernité, la transparence et la sécurité d’une marque digitale. Le concept de Gemmyo était né : permettre à chaque cliente de choisir la pierre, le métal, et de co-créer un bijou qui lui ressemble vraiment, le tout fabriqué en France et accessible en ligne. C’était une approche radicalement nouvelle, non pas pensée depuis les contraintes de l’industrie, mais depuis le désir du client.

Le courage de l’ignorance : comment notre manque d’expérience est devenu notre plus grande force

La question qui brûle les lèvres de beaucoup est : ‘Mais vous n’y connaissiez rien en joaillerie ?’ La réponse est simple : absolument rien. Je dis souvent en plaisantant qu’à nos débuts, je ne savais pas faire la différence entre un diamant et un saphir. Cette ignorance, qui aurait pu être un handicap fatal, s’est révélée être notre plus grand atout. N’étant pas formatés par les dogmes du secteur, nous avions une liberté totale pour réinventer les règles. C’est un point essentiel que je partage avec tous les entrepreneurs :

‘Je pense que c’est parce qu’on n’était pas issu du secteur de la Joaillerie qu’on a conçu l’entreprise telle qu’elle est aujourd’hui.’

Un joaillier traditionnel nous aurait dit qu’il est impossible de vendre sans stock, car ‘les clients ont besoin de voir’. Notre regard neuf, combiné à notre culture du digital, nous a permis de voir les choses autrement. Nous avons bâti notre business model sur la fabrication à la demande. Pas de stock coûteux, pas d’invendus, et une flexibilité totale pour la personnalisation. C’est notre naïveté qui nous a permis de construire un modèle économique plus agile, plus sain et parfaitement aligné avec les attentes de nos clients. Nous avons compensé l’absence de contact physique par des visuels de haute qualité et une expérience en ligne immersive, prouvant que les ‘vérités’ d’une industrie ne sont souvent que des habitudes qui attendent d’être bousculées.

Ainsi, l’idée de Gemmyo n’est pas née d’une analyse de marché complexe, mais d’une écoute attentive de nos propres frustrations de consommateurs. Cette genèse a infusé toute la culture de l’entreprise : une obsession pour l’expérience client et une volonté de remettre en question le statu quo. Mais une idée, aussi brillante soit-elle, ne vaut rien sans exécution. La prochaine étape était la plus terrifiante et la plus excitante : transformer ce concept en réalité, même si cette réalité était, au début, loin d’être parfaite.

La philosophie du ‘B-‘ : pourquoi l’action imparfaite bat toujours la perfection théorique

Une fois l’idée définie, la tentation est grande de passer des mois à peaufiner un plan d’affaires parfait, à concevoir le site web idéal, à attendre que toutes les étoiles soient alignées. C’est un piège dans lequel tombent de nombreux entrepreneurs. Pour ma part, j’ai toujours eu un biais très fort pour l’action. Je dépéris si je ne construis pas, si je ne teste pas. C’est pourquoi, dès le début de Gemmyo, nous avons adopté ce que j’appelle aujourd’hui la ‘stratégie du B-‘. Plutôt que de viser un A+ théorique, nous avons préféré lancer avec un B- concret. Nous savions que nos premières tentatives seraient imparfaites, peut-être même ‘moches’, mais elles auraient le mérite immense d’exister. C’est cette philosophie qui nous a permis de passer de l’idée à la réalité en un temps record. L’obsession n’était pas la perfection, mais l’apprentissage par l’action. Nous voulions nous confronter le plus vite possible à la seule vérité qui compte : celle du client. C’est une approche qui peut sembler contre-intuitive, surtout dans le monde du luxe où l’image de perfection est reine, mais elle est la clé pour construire une entreprise résiliente et véritablement innovante.

Objectif 5 clients : la puissance d’un premier jalon concret

Au lieu de nous perdre dans des objectifs vagues et lointains, nous nous sommes fixé un but simple, mesurable et terriblement concret : trouver nos cinq premiers clients avant la fin du mois de septembre 2011. Cet objectif a agi comme un catalyseur. Il nous a obligés à sortir de la théorie pour résoudre une cascade de problèmes très pratiques. Pour trouver cinq clients, il nous fallait un site web. Nous en avons donc bricolé un, qui était, pour être honnête, ‘infâme’. Il nous fallait des produits. Nous avons donc trouvé des fournisseurs et conçu trois pauvres bijoux qui se battaient en duel. Ce processus, bien que chaotique, a été d’une richesse incroyable. Comme je le raconte souvent :

‘C’était moche, c’était complètement imparfait mais ça avait le mérite d’exister et ça nous a appris tellement, Estelle, ça nous a appris énormément de choses quand on a trouvé nos premiers clients.’

Chaque interaction avec ces pionniers a été une leçon. Nous avons découvert ce qui leur plaisait, ce qui les inquiétait, et surtout, nous avons mis le doigt sur tous les ‘trous dans la raquette’ de notre organisation. C’est une chose d’imaginer un processus de fabrication sur-mesure, c’en est une autre de le mettre en œuvre concrètement. Le client vous ramène brutalement à la réalité, et c’est le plus grand cadeau qu’il puisse vous faire.

‘C’est en forgeant qu’on devient forgeron’ : la culture de l’itération au cœur de la croissance

Cette première expérience a ancré en nous une conviction profonde : la maîtrise s’acquiert par la répétition. Il est prétentieux de croire que l’on peut atteindre l’excellence du premier coup. Accepter d’être un débutant est une force. J’ai toujours su que le succès de Gemmyo ne se jouerait pas sur le premier bijou vendu, mais sur le millième. Cette perspective change tout. Elle dédramatise l’échec et transforme chaque erreur en une opportunité d’apprentissage. Le but n’est pas de ne jamais tomber, mais de se relever plus vite et plus intelligemment. Comme je le dis souvent à propos de n’importe quel projet que je lance :

‘Je sais très bien que le début ce sont des coups d’essai et que les coups de maître mais ils viendront au bout du 150e épisode de podcast ou en l’occurrence pour Gemio du millième bijou certi.’

Cette culture de l’itération nous a donné une agilité immense. Nous n’avons jamais eu peur de tester de nouvelles idées, de lancer de nouvelles collections, de nouvelles fonctionnalités, même si elles n’étaient pas parfaites. Nous expliquions simplement à nos clients que nous étions en phase de test, et leur indulgence et leurs retours étaient incroyablement précieux. Le plus tôt vous commencez à ‘forger’, le plus vite vous deviendrez un ‘forgeron’ compétent. La vitesse d’apprentissage est le principal avantage compétitif d’une jeune entreprise.

Avec nos premiers clients et cette culture de l’action, nous avions prouvé que notre concept avait un potentiel. Le moteur était en marche, mais il tournait au ralenti. Pour passer à la vitesse supérieure et faire connaître Gemmyo au plus grand nombre, il nous fallait maintenant trouver le bon carburant : une stratégie marketing capable de marquer les esprits. C’est là que le chemin est devenu encore plus escarpé, et nos convictions sur l’itération allaient être mises à rude épreuve.

L’anatomie d’un succès viral : les trois tentatives pour conquérir le métro parisien

Une fois le concept validé et les premiers clients servis, le défi majeur est devenu celui de la notoriété. Comment faire exister une marque digitale dans un univers aussi physique et symbolique que la joaillerie ? J’ai toujours eu la conviction que le métro parisien était un média extraordinaire : un impact visuel fort, une audience captive et un excellent rapport qualité-prix pour créer ce qu’on appelle le ‘top of mind’. Nous devions être là où les gens sont, dans leur quotidien. Cependant, avoir une conviction est une chose, la transformer en succès en est une autre. L’histoire de notre fameuse campagne du chat rose est en réalité l’histoire d’une persévérance acharnée, car ce coup de maître a été précédé de deux échecs retentissants. C’est peut-être la leçon la plus importante de notre parcours : le succès n’est pas une ligne droite, mais une série d’ajustements basés sur les leçons douloureuses du terrain. Chaque campagne ratée a été un investissement coûteux, non pas en publicité, mais en apprentissage, qui a finalement pavé la voie vers un succès qui a dépassé toutes nos espérances.

L’échec, un investissement : les deux premières campagnes qui n’ont rien rapporté

Notre première incursion dans le métro, en 2013, a été un baptême du feu… et un véritable fiasco. Nous avons suivi la recette classique de la publicité pour la joaillerie : une belle bague sur un fond noir sobre, avec notre logo et un slogan. Le résultat ? Un silence assourdissant. Personne n’a remarqué. Nous avons tout fait de travers : un achat d’espace médiocre, une création sans saveur, une impression décevante. C’était un

‘Flop total. Flop total pour plein de raisons.’

L’investissement, plusieurs dizaines de milliers d’euros, était conséquent pour notre jeune entreprise. Loin de nous décourager, nous avons décidé de retenter notre chance. Pour la deuxième campagne, nous avons corrigé nos erreurs initiales : un meilleur plan média, une création plus soignée, un bijou magnifiquement mis en avant. Et pourtant… le résultat fut le même. Un nouveau flop. Comme je m’en souviens avec douleur :

‘Personne ne le remarque mais vraiment même moi si tu veux je les voyais pas dans le métro.’

C’est là que nous avons eu une révélation cruciale. Dans l’environnement surchargé du métro, être ‘beau’ ou ‘bien fait’ ne suffit pas. C’est invisible. Pour exister, il ne faut pas être seulement visible, il faut être remarquable. Notre créativité était trop conventionnelle, trop sage. Elle se fondait dans la masse au lieu de la percer.

Le brief qui a tout changé : ‘Je veux que les gens se prennent en photo devant’

Après deux échecs, il était clair que nous n’y arriverions pas seuls. Nous avions atteint les limites de nos compétences internes en création publicitaire. Nous avons donc décidé de faire appel à une agence, BTC, avec un brief radicalement différent. Je ne leur ai pas demandé une ‘belle publicité’. Je leur ai donné un objectif comportemental :

‘Je veux que les gens s’arrêtent dans le métro en se prenant en photo devant notre créa. Donc démerdez-vous.’

Ce brief a tout changé. Il a libéré la créativité des contraintes du produit pour se concentrer sur l’émotion et l’interaction. C’est de là qu’est née l’idée du chaton rose. C’était une rupture totale avec tous les codes du luxe : pas de femme, pas de promesse d’amour éternel, mais de la tendresse, de l’inattendu, de la couleur et une touche de surréalisme. L’impact a été immédiat et au-delà de tout ce que nous pouvions imaginer. La campagne est devenue virale. Les gens se prenaient réellement en photo devant, inventant même le hashtag #Gemmyo.

‘Quand on avait arrêté la pub, on avait des gens qui nous contactaient en nous disant mais remettez-la, on vous en supplie, c’est notre moment de joie dans le métro.’

Nous avions réussi à transformer une publicité, souvent perçue comme une intrusion, en un contenu désiré, un rendez-vous attendu. Ce troisième essai fut le bon, non pas par chance, mais parce qu’il était le fruit des leçons tirées de nos deux échecs précédents.

Cette campagne a propulsé Gemmyo sur le devant de la scène. Elle a prouvé qu’avec de l’audace et de la persévérance, il était possible de se faire un nom. Mais une telle ambition a un coût. Une agence de pub, une campagne d’affichage d’envergure… tout cela représente des budgets considérables. La question inévitable se pose alors : comment une jeune startup, fondée par des étudiants, a-t-elle pu financer de telles ambitions ?

Financer l’ambition : de l’argent des proches aux fonds d’investissement

Réussir une campagne marketing d’une telle ampleur soulève une question fondamentale, celle des moyens. L’audace créative est une chose, mais la financer en est une autre. Une campagne dans le métro parisien coûte des dizaines de milliers d’euros, et faire appel à une agence de renom pour la création ajoute un budget encore plus conséquent. Pour la campagne du chat rose, l’investissement total a facilement atteint 150 000 euros. Pour une startup, c’est une somme colossale. Il est donc légitime de se demander comment nous avons pu nous permettre non pas une, mais trois tentatives. La réponse se trouve dans une stratégie de financement progressive et réfléchie, qui a évolué en même temps que la maturité de notre entreprise. Nous n’avons pas commencé avec des millions en banque. Nous avons commencé avec presque rien, mais nous avons su prouver notre valeur à chaque étape pour attirer les capitaux nécessaires à notre croissance. C’est une partie moins glamour mais absolument essentielle de l’aventure entrepreneuriale : donner à son projet les moyens de ses ambitions.

La preuve par l’action : comment générer les premiers euros pour attirer les premiers chèques

Au tout début, nos seules ressources étaient nos propres économies, c’est-à-dire très peu. Notre obsession n’était pas de lever des fonds, mais, comme mentionné précédemment, de trouver nos premiers clients. Cette phase de ‘bootstrapping’ a été fondamentale. En réussissant à générer un chiffre d’affaires récurrent, même modeste, avec ‘zéro euro’, juste notre ordinateur et notre énergie, nous avons créé l’actif le plus précieux pour un entrepreneur : la preuve de concept. Nous avons démontré qu’il existait un marché pour notre offre innovante de bijoux personnalisables, fabriqués en France et vendus en ligne.

‘C’était tellement innovant que on a compris assez vite que si jamais on voulait aller plus vite accélérer, on allait devoir se financer.’

Cette traction initiale, cette preuve que notre modèle fonctionnait, a été notre meilleur argument pour convaincre les premiers investisseurs. Personne ne mise sur une simple idée ; les investisseurs misent sur une équipe capable d’exécuter et de générer des résultats, même à une échelle microscopique. C’est cette démonstration par l’action qui a ouvert la porte à notre première levée de fonds.

Les étapes du financement : du Love Money au capital-risque

Notre financement s’est fait en plusieurs étapes. La première a été de nous tourner vers ce qu’on appelle les ‘Business Angels’, des investisseurs individuels, souvent d’anciens entrepreneurs. Par un heureux hasard, j’ai recontacté un des fondateurs de PriceMinister que j’avais rencontré au ski. Il a été séduit par notre projet et est devenu notre premier soutien. Son implication a créé un effet d’entraînement, nous permettant de lever environ 450 000 euros. Cette somme a été cruciale : elle nous a permis de nous structurer, de nous verser nos premiers salaires et surtout, de financer nos premiers tests marketing, y compris les deux premières campagnes de métro ratées. Une fois cet argent utilisé pour prouver que nous pouvions acquérir des clients à plus grande échelle et générer une ‘très belle traction’, nous étions prêts pour l’étape suivante. Nous sommes allés voir des fonds d’investissement professionnels, du capital-risque, pour lever une somme bien plus importante : 3 millions d’euros. Cet argent n’était plus destiné à prouver le concept, mais à le déployer massivement. C’est ce financement qui nous a donné les moyens de lancer la campagne du chat rose avec l’envergure nécessaire pour qu’elle devienne le succès que l’on connaît. Chaque étape de financement a correspondu à un niveau de maturité de l’entreprise, passant de la preuve de concept à l’accélération de la croissance.

Conclusion : Osez être le chat rose de votre secteur

L’aventure Gemmyo, de la frustration dans une bijouterie à une campagne virale dans le métro, est une illustration parfaite que l’entrepreneuriat n’est pas une question de génie, mais de méthode, de courage et de persévérance. Le parcours se résume en quelques étapes clés : une idée née d’une écoute sincère du client, une exécution rapide et imparfaite pour apprendre du terrain, une résilience face aux échecs pour itérer jusqu’à trouver la bonne formule, une audace créative pour se démarquer, et une stratégie de financement pragmatique pour nourrir la croissance.

Le chat rose n’était pas un coup de chance. Il était le troisième coup, celui qui a fonctionné parce que nous avons eu le cran de nous tromper deux fois auparavant et d’en tirer les bonnes leçons. Il symbolise la nécessité de briser les codes, de ne pas se contenter d’être ‘bon’, mais de chercher à être ‘remarquable’. Il nous rappelle que même dans les secteurs les plus traditionnels, il y a de la place pour l’innovation et la fraîcheur.

Alors, que vous soyez entrepreneur en herbe ou à la tête d’une entreprise établie, posez-vous la question : quelle est l’action imparfaite que vous pouvez lancer dès aujourd’hui ? Quelle est la convention de votre marché que vous pourriez audacieusement briser ? Quel est le ‘chat rose’ qui sommeille dans votre stratégie ? L’histoire de Gemmyo n’est pas une recette magique, mais une invitation à l’action. Car c’est en forgeant, en testant, et parfois en se trompant, que l’on finit par créer des histoires mémorables et des entreprises qui durent.

Questions fréquentes sur la stratégie de lancement de Gemmyo

Comment Pauline Laigneau a-t-elle eu l’idée de créer Gemmyo ?

L’idée de Gemmyo est née d’une expérience personnelle décevante. Alors qu’elle cherchait une bague de fiançailles avec son mari, Pauline Laigneau s’est sentie comme un ‘numéro’ dans les joailleries traditionnelles. Elle désirait un bijou unique qui reflète sa personnalité, mais a trouvé l’offre standardisée et l’expérience intimidante. La solution du sur-mesure chez un artisan local lui semblait risquée. Gemmyo a été créé pour combler ce vide : offrir des bijoux personnalisables de haute qualité, avec la réassurance et la modernité d’une marque digitale, en plaçant l’expérience client au centre de tout.

‘Finalement tous ces bijoux étaient très beaux mais que c’était des bijoux qui étaient un peu des bijoux pas standards, mais tu vois que j’aurais pu avoir la même bague si j’allais chez chez Cartier ou chez Van Cleef […] que l’une de mes amies. ce qui est pas un problème hein, mais mais moi c’est pas ce qui me convenait, j’avais pas envie d’être un numéro parmi d’autres.’

Quelle est la philosophie de Gemmyo en matière de lancement de produit ?

La philosophie de Gemmyo repose sur le principe de ‘l’action imparfaite’ ou la ‘stratégie du B-‘. Plutôt que d’attendre la perfection, l’équipe a choisi de lancer rapidement des produits et des services, même s’ils étaient ‘moches’ ou ‘imparfaits’ au début. L’objectif était d’apprendre le plus vite possible grâce aux retours des premiers clients. Cette approche itérative, résumée par l’adage ‘c’est en forgeant qu’on devient forgeron’, privilégie la vitesse d’apprentissage à la perfection théorique. Elle permet de confronter rapidement une idée à la réalité du marché et de s’améliorer en continu.

‘C’était moche, c’était complètement imparfait mais ça avait le mérite d’exister et ça nous a appris tellement […] C’est presque un peu prétentieux de se dire que tu vas réussir à tout anticiper intellectuellement. Finalement le concret, le client te ramène à la réalité.’

Pourquoi les premières campagnes publicitaires de Gemmyo ont-elles été des échecs ?

Les deux premières campagnes d’affichage dans le métro parisien ont échoué car elles étaient trop conventionnelles. La première souffrait d’un mauvais achat média et d’une création publicitaire standard (une bague sur fond noir) qui n’a attiré aucune attention. La deuxième, bien que techniquement mieux exécutée, restait dans les codes classiques de la joaillerie. La leçon apprise a été que dans un environnement visuellement saturé comme le métro, une publicité simplement ‘belle’ est invisible. Pour être remarquée, une campagne doit être disruptive et mémorable, ce que ces premières tentatives n’étaient pas.

‘Flop total à nouveau. Personne ne le remarque mais vraiment même moi si tu veux je les voyais pas dans le métro. Donc là je me dis c’est quand même pas possible […] Et là je comprends que ce qui pêche, c’est que la créa, en fait, elle ne se voit pas. c’est-à-dire qu’elle ne ressort pas dans le métro, elle n’est pas remarquable.’

Quel était le secret de la campagne virale du ‘chat rose’ de Gemmyo ?

Le secret du succès de la campagne du ‘chat rose’ réside dans un brief créatif radicalement différent et audacieux. Au lieu de demander une publicité produit, Pauline Laigneau a fixé un objectif comportemental à l’agence : ‘Je veux que les gens s’arrêtent pour se prendre en photo devant’. Cette consigne a permis de créer une publicité qui a brisé tous les codes du luxe en misant sur l’émotion, la surprise et la viralité. Le chaton rose était inattendu, attachant et hautement partageable, transformant une publicité intrusive en un contenu désiré et engageant pour le public.

‘Le brief, je leur ai dit je veux que les gens s’arrêtent dans le métro en se prenant en photo devant notre créa. Donc démerdez-vous. […] Cette campagne a été virale. c’est-à-dire que vraiment les gens se prenaient effectivement en photo devant, nous taguaient sur les réseaux sociaux.’

Comment Gemmyo a-t-elle financé ses ambitieuses campagnes marketing à ses débuts ?

Le financement de Gemmyo s’est fait par étapes. D’abord, l’entreprise a démarré avec très peu de moyens, en se concentrant sur l’acquisition de ses premiers clients pour prouver la viabilité de son modèle. Cette traction initiale a permis de convaincre des business angels, qui ont investi environ 450 000 euros. Ce premier tour de table a financé la structuration de l’entreprise et les premiers tests marketing, y compris les campagnes ratées. Forts d’une croissance avérée, ils ont ensuite pu lever 3 millions d’euros auprès de fonds de capital-risque, leur donnant les moyens de déployer des campagnes d’envergure comme celle du chat rose.

‘On a réussi à montrer qu’on était capable avec 0 € juste avec entre guillemets notre ordinateur, notre cerveau et puis de de la transpiration à générer du chiffre d’affaires […] et donc on a réussi à lever des fonds. Je dirais à ce moment-là quelque chose comme 400 450000 €.’

Quel conseil Pauline Laigneau donnerait-elle à un entrepreneur qui n’est pas expert de son secteur ?

Pauline Laigneau considère le manque d’expertise non pas comme un handicap, mais comme une force potentielle. Être un novice permet d’aborder un secteur avec un regard neuf, sans être limité par les dogmes et les habitudes établies. Cela pousse à réinventer les modèles économiques et à concevoir des solutions véritablement centrées sur le client, plutôt que sur les contraintes de l’industrie. Le conseil est d’assumer cette ignorance, d’avoir la lucidité de s’entourer d’experts pour les aspects techniques, mais de conserver cette fraîcheur de vision pour innover.

‘Ça peut t’apporter aussi un vent de fraîcheur et une manière de concevoir les choses qui est complètement différente. Et pour te donner un exemple concret, je pense que c’est parce qu’on n’était pas issu du secteur de la Joaillerie qu’on a conçu l’entreprise telle qu’elle est aujourd’hui.’

Pourquoi est-il si important de parler à ses clients, même quand l’entreprise grandit ?

Pour Pauline Laigneau, parler régulièrement aux clients est absolument essentiel, même après des années d’existence et avec une équipe de 40 personnes. C’est le seul moyen de rester connecté à la réalité du marché et de capter les ‘signaux faibles’ qui indiquent les nouvelles attentes ou les points de friction. Ce contact direct est une source inépuisable d’idées et permet de s’assurer que l’entreprise continue de répondre à un besoin réel. C’est un principe fondamental qui a guidé Gemmyo depuis le premier jour et qui reste au cœur de sa stratégie pour garantir sa pertinence et sa viabilité à long terme.

‘Même si aujourd’hui on est 40 personnes, je continue et mon mari aussi à parler à nos clients avec une grande régularité […] pour moi c’est c’est c’est ça qui me permet d’avoir des signaux faibles ou pas d’ailleurs sur sur sur notre business et sur et sur sa viabilité. Donc je considère que c’est un truc qui est absolument essentiel.’


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