Changer de cap sans couler : le guide complet du pivot entrepreneurial
Imaginez un instant. Nous sommes en 2007. Dans un petit bureau, un jeune entrepreneur ambitieux, Reed Hastings, est entouré de piles de DVD attendant d’être glissés dans des enveloppes. Il est à la tête d’une entreprise nommée Netflix, un service de location de DVD par correspondance. Face à lui se dresse un titan, Blockbuster, avec ses milliers de magasins physiques. La question qui le hante est simple et brutale : son modèle peut-il survivre ? Plutôt que de se battre sur le même terrain, il a vu ce que personne d’autre ne voyait, ou ne voulait voir : l’avenir n’était pas dans le plastique des disques, mais dans l’immatérialité des données. Il a misé sur le streaming. Ce que beaucoup considéraient comme un pari fou est devenu l’une des plus grandes réussites entrepreneuriales de notre époque.
Cette histoire, c’est l’essence même du sujet qui nous anime aujourd’hui : le pivot entrepreneurial. Ce mot, parfois perçu comme un jargon de start-up, cache en réalité une des compétences les plus vitales pour tout entrepreneur, du solopreneur à la multinationale. C’est l’art de changer de direction, non pas par caprice, mais par nécessité, par vision, par instinct de survie. C’est reconnaître que la carte que vous teniez en main n’est plus celle du territoire actuel. Dans un monde où les marchés évoluent à une vitesse vertigineuse, où les technologies comme l’IA redessinent les règles du jeu en quelques mois, la capacité à pivoter n’est plus une option, c’est une condition sine qua non de la pérennité.
Dans cet épisode, nous allons plonger dans le monde fascinant du pivot entrepreneurial. Je vous propose d’explorer quand et pourquoi il est crucial de réorienter son entreprise pour s’adapter à un marché en constante évolution.
Mais ce concept soulève de nombreuses questions angoissantes. Comment savoir si c’est le bon moment ? Est-ce un aveu d’échec ? Comment opérer un virage aussi serré sans faire sortir l’entreprise de la route ? Cet article est conçu pour être votre copilote. Nous allons décortiquer ensemble les signes avant-coureurs qui ne trompent pas, explorer les stratégies concrètes pour mener ce changement avec succès, et nous inspirer des leçons, parfois difficiles, d’entreprises qui ont su se réinventer. Que vous sentiez le vent tourner pour votre activité ou que vous soyez simplement curieux de cette manœuvre stratégique, ce guide vous donnera les clés pour transformer une potentielle crise en une formidable opportunité de croissance.
Qu’est-ce que le pivot entrepreneurial, au-delà du jargon ?
Avant de plonger dans le ‘comment’, il est essentiel de bien comprendre le ‘quoi’. Le terme ‘pivoter’ est un anglicisme, tiré de ‘The Pivot’, popularisé par le mouvement Lean Startup. Mais derrière ce mot se cache une réalité bien plus profonde qu’un simple changement. Il ne s’agit pas de modifier la couleur de votre logo ou de lancer une nouvelle campagne publicitaire. Un pivot est un changement fondamental dans votre stratégie d’entreprise.
Pivoter une entreprise […] ça veut dire en fait changer son modèle, changer sa façon de faire, changer son produit, changer son activité. En fait, ça veut dire regarder ce qu’on est en train de faire, se dire que ça ne fonctionne plus, pour plein de raisons, on va en parler et se dire comment est-ce que je peux faire pour que ça fonctionne, qu’est-ce que je peux changer bien souvent de façon assez radicale.
Cette décision n’est jamais anodine. C’est un acte qui demande du courage, car il implique souvent de renoncer à une partie de l’idée originale, celle qui vous a peut-être empêché de dormir pendant des mois, celle pour laquelle vous avez tout investi. C’est une réorientation structurée, basée sur des apprentissages et des données, qui vise à trouver un chemin plus prometteur vers la croissance. Il ne faut pas le confondre avec une simple itération. Améliorer une fonctionnalité de votre produit, c’est une itération. Abandonner ce produit pour en créer un nouveau qui répond à un besoin différent que vous avez découvert chez vos clients, c’est un pivot. La nuance est de taille : l’un est une optimisation, l’autre est une réinvention.
Ce processus peut être intimidant, car il touche au cœur même de votre identité d’entreprise. Pourtant, il faut le voir non pas comme un échec du plan initial, mais comme une réussite du processus d’apprentissage. Vous avez appris quelque chose de si important sur votre marché, vos clients ou votre produit que persister dans la voie initiale serait la véritable erreur. C’est une preuve de maturité et d’agilité, la capacité de dire : ‘Nous pensions que la solution était A, mais nos clients et le marché nous crient que la véritable opportunité est B. Allons vers B’. C’est un mouvement stratégique qui doit être mûrement réfléchi, jamais une réaction de panique. C’est pourquoi il est crucial de savoir en reconnaître les signes précurseurs.
Les signaux faibles et forts : savoir écouter son entreprise et son marché
Comment savoir qu’il est temps de considérer un changement aussi radical ? La décision de pivoter ne doit jamais être une impulsion. Elle doit naître de l’observation attentive d’une série de signaux, à la fois internes et externes. Ignorer ces indicateurs, c’est un peu comme continuer à accélérer alors que tous les voyants du tableau de bord sont au rouge. Tôt ou tard, le moteur lâche. Il est donc vital d’apprendre à lire ces signaux pour agir avant qu’il ne soit trop tard.
Vos indicateurs clés (KPIs) sont dans le rouge
Les premiers signaux d’alerte proviennent souvent de vos propres données. Ce sont les chiffres qui racontent la véritable histoire de la santé de votre entreprise, au-delà des perceptions et des espoirs. Il est impératif de les suivre, pas seulement une fois par an, mais de manière continue.
Les premiers signes, c’est les signes finalement que vous allez suivre, en tout cas, je le souhaite pour vous, les fameux KPI dont on parle souvent. […] si l’un de ces indicateurs s’effondre d’un coup ou s’effondre. […] il est peut-être temps de se poser des questions sur son business, sur son modèle.
Quels sont ces KPIs à surveiller comme le lait sur le feu ? Les ventes et le chiffre d’affaires sont les plus évidents. Une stagnation suivie d’une baisse progressive est un symptôme classique. Mais il faut creuser plus loin. Votre marge bénéficiaire s’érode-t-elle ? Cela peut signifier que vos coûts augmentent ou que vous êtes contraint de baisser vos prix pour rester compétitif, un signe que votre proposition de valeur perd de sa force. Le taux de satisfaction client (NPS, CSAT) est également un indicateur précoce puissant. Des clients autrefois fidèles deviennent-ils silencieux ou, pire, critiques ? Leurs retours sont une mine d’or d’informations sur l’inadéquation croissante de votre offre. Enfin, des indicateurs financiers comme le fond de roulement peuvent signaler des tensions de trésorerie qui, si elles ne sont pas adressées par un changement de modèle, peuvent être fatales.
Le marché vous envoie des messages clairs
Au-delà de vos chiffres internes, l’environnement externe est une source constante de signaux. Le plus grand danger pour un entrepreneur est de rester dans sa bulle, amoureux de son produit, sans voir que le monde autour change. Cela peut prendre plusieurs formes. L’arrivée de nouveaux concurrents avec une approche différente peut rapidement rendre votre offre obsolète. Si vous passez votre temps à justifier pourquoi votre solution est ‘meilleure’ au lieu de continuer à innover, vous êtes déjà sur la défensive. Un changement de régulation ou de législation peut également rendre votre modèle économique actuel non viable ou beaucoup moins rentable du jour au lendemain. Pensez aux entreprises dont le modèle reposait sur l’exploitation de données personnelles avant l’arrivée du RGPD. Celles qui n’ont pas pivoté ont souffert, voire disparu.
Enfin, et c’est peut-être le plus difficile à cerner, il y a les évolutions sociétales et technologiques. Ce sont des vagues de fond qui transforment les comportements des consommateurs. L’exemple des taxis parisiens face à l’arrivée d’Uber est une leçon magistrale à ce sujet. Le besoin de sécurité, de simplicité et d’immédiateté des clients, combiné à la technologie du smartphone, a créé une brèche béante dans laquelle Uber s’est engouffré. Les taxis, protégés par leur monopole, n’ont pas vu ou voulu voir ce changement. Le résultat fut brutal. Être à l’écoute de ces mutations, même si elles semblent lointaines, est essentiel. Comme je le dis souvent :
Il est important de regarder les évolutions sociétales et de sentir un petit peu le vent tourner.
Les 3 raisons fondamentales qui justifient un pivot
Une fois les signaux détectés, il faut comprendre les raisons profondes qui les provoquent. En général, la nécessité de pivoter se cristallise autour de trois grands axes stratégiques. Comprendre lequel vous concerne vous aidera à mieux orienter votre réflexion pour la suite.
Ajuster son offre : quand le produit n’est plus la bonne réponse
C’est la raison la plus courante. Vous avez lancé un produit ou un service qui répondait à un besoin. Mais ce besoin a évolué, les attentes des clients ont changé, ou la technologie a rendu votre solution moins pertinente. Continuer à vendre le même produit, c’est comme essayer de vendre des baladeurs CD à l’ère de Spotify. Il est impératif de réajuster votre offre.
On se rend compte que le marché évolue, que les attentes des clients évoluent, que peut-être la technologie aussi a évolué. En tout cas, l’offre que vous proposez ne correspond plus aux attentes des clients, il est temps de revoir votre offre.
Cela peut signifier modifier en profondeur votre produit existant, ou carrément le remplacer. Cela peut aussi concerner la manière dont vous délivrez votre service. Peut-être que le cœur de votre service est toujours pertinent, mais le packaging, le mode de livraison ou le support client ne le sont plus. L’écoute active de vos clients est ici votre meilleur atout. Ce sont eux qui vous diront, directement ou indirectement, ce qui ne fonctionne plus et ce qu’ils attendent. Un pivot d’offre réussi est celui qui part d’une compréhension fine de cette nouvelle demande pour y apporter une réponse renouvelée et pertinente.
S’adapter aux mutations du marché : quand le terrain de jeu change
Parfois, le problème n’est pas votre offre en elle-même, mais le marché sur lequel vous opérez. Le marché peut se rétrécir, devenir saturé par la concurrence, ou tout simplement disparaître. Dans ce cas, s’acharner est une perte de temps et de ressources. La solution est de pivoter vers un nouveau marché. C’est ce que j’appelle être en veille constante, non seulement sur son pré carré, mais aussi sur les dynamiques plus larges.
Il est absolument essentiel d’être toujours en veille du marché. Et quand je dis le marché, c’est bien évidemment votre marché direct […] mais pas que. […] les mutations de la société, elles peuvent venir perturber très fortement votre marché de façon ultra rapide.
Ce changement de marché peut être géographique : votre produit n’est plus à la mode en France, mais il cartonne en Italie. Il peut être démographique : vous visiez les 18-25 ans, mais vous découvrez que les 40-50 ans sont bien plus intéressés et ont un pouvoir d’achat supérieur. Ou encore, il peut être sectoriel : vous aviez une solution pour le B2C, mais vous réalisez qu’elle résoudrait un problème bien plus coûteux pour des entreprises en B2B. Ce type de pivot est puissant car il permet de capitaliser sur votre produit ou savoir-faire existant en lui offrant un nouveau terrain de jeu, souvent moins concurrentiel et plus profitable.
Éviter l’échec : quand il faut avoir le courage de changer de voie
C’est la raison la plus difficile à admettre, mais aussi la plus courageuse. Parfois, on se trompe. L’idée qui nous semblait si brillante sur le papier ne trouve pas son public. Les ventes ne décollent pas, malgré tous les efforts marketing. On a beau essayer, tester, itérer, rien n’y fait. Dans ces moments, la persévérance peut se transformer en acharnement stérile.
Parfois on s’est juste trompé. Ben il faut savoir reconnaître que ça ne fonctionne pas, qu’on a testé, qu’on a essayé […] Pivotons, changeons, allons voir ailleurs, ne continuons pas tête baissée à investir dans quelque chose qui ne va pas marcher, il faut sauver la marque, l’entreprise.
Reconnaître que l’on a fait fausse route n’est pas un échec. Le véritable échec serait de couler l’entreprise entière par ego ou par peur de l’avouer. Le pivot devient alors une manœuvre de survie. C’est l’occasion de prendre tout ce que l’on a appris de cette première expérience (la connaissance du marché, les compétences techniques, la constitution d’une équipe) et de le réinvestir dans un nouveau projet, une nouvelle direction, avec de bien meilleures chances de succès. C’est une décision qui demande une grande humilité et une vision à long terme pour ‘sauver la marque’.
Les 3 grandes formes de pivot : quelle nouvelle boussole pour votre entreprise ?
Une fois que la décision de pivoter est prise, la question suivante est : dans quelle direction ? Il existe de nombreuses manières de pivoter, mais la plupart peuvent être regroupées en trois grandes catégories. Les avoir en tête permet de structurer sa réflexion et d’explorer méthodiquement les options possibles.
Le pivot de produit ou d’offre
C’est le type de pivot le plus intuitif. Il consiste à changer radicalement ce que vous vendez, tout en conservant votre cible de clientèle. Vous avez identifié un nouveau problème, plus urgent ou plus important, chez vos clients actuels, et vous décidez de développer une nouvelle solution pour y répondre. C’est ce qu’a fait la société Slack. À l’origine, ils développaient un jeu vidéo en ligne. Le jeu fut un échec, mais pendant sa conception, ils avaient créé un outil de communication interne pour leur équipe, qui s’est avéré incroyablement efficace. Ils ont abandonné le jeu et ont pivoté pour commercialiser cet outil de communication, qui est devenu le Slack que nous connaissons aujourd’hui. Ils ont changé de produit, mais ont capitalisé sur une technologie développée en interne.
Changer le produit, changer l’offre. Ça c’est je dirais le pivot classique, le pivot immédiat auquel on va penser.
Ce pivot nécessite une excellente connaissance de vos clients et une forte capacité en R&D ou en développement de services. Le risque est de développer un nouveau produit qui ne trouve pas non plus son marché, mais l’avantage est que vous partez avec un actif précieux : une base de clients ou une audience que vous connaissez déjà.
Le pivot de marché
Ici, la logique est inverse. Vous conservez votre produit ou votre offre, qui est solide et fonctionnel, mais vous changez radicalement la cible à qui vous le proposez. Votre produit reste le même, mais vous changez de client. C’est une stratégie pertinente lorsque vous avez un excellent produit mais que vous vous êtes trompé de marché initial, ou que ce marché est devenu trop petit ou trop concurrentiel.
Ça n’est pas de changer ce que vous proposez, votre offre, votre produit, en revanche, c’est de changer l’endroit, la cible à laquelle vous proposez. […] c’est peut-être la cible finalement qui a changé.
Imaginons une application de gestion de projet très performante conçue pour les freelances (B2C). Vous réalisez que les freelances ne sont pas prêts à payer cher pour cet outil, mais que les PME (B2B) ont exactement le même besoin et un budget bien plus conséquent. Pivoter vers le marché B2B avec le même produit, en adaptant simplement le marketing et le discours commercial, peut transformer complètement la trajectoire de l’entreprise. Ce pivot demande de grandes compétences en marketing et en vente pour comprendre et pénétrer un nouveau marché.
Le pivot de modèle économique
Le troisième grand type de pivot ne touche ni au produit, ni au marché, mais à la manière dont vous gagnez de l’argent. Le produit peut être excellent, la cible bien identifiée, mais si le modèle de revenus n’est pas viable, l’entreprise ne peut pas survivre. Changer de modèle économique peut débloquer une croissance spectaculaire. L’exemple de Microsoft avec le Pack Office est absolument parlant.
Le pack Office, il y a quelques années, vous l’achetiez, vous achetiez une licence […] qui vous coûtait, je ne sais plus assez cher. […] ça ça a disparu le jour où ils ont fait un pivot chez Microsoft et ils sont passés […] au système SAS finalement, c’est-à-dire abonnement.
En passant d’une vente de licence unique et coûteuse à un modèle d’abonnement mensuel (SaaS) beaucoup plus accessible, Microsoft a non seulement rendu son produit disponible à des millions de nouveaux utilisateurs, mais a aussi créé une source de revenus récurrents, prévisibles et bien plus stable. Ce changement a fluidifié l’acte d’achat (7,90€ est psychologiquement plus facile à dépenser que 1000€) et a fidélisé les clients sur le long terme. D’autres pivots de modèle peuvent inclure le passage du gratuit au payant (ou l’inverse avec un modèle freemium), d’un modèle de vente directe à un modèle de marketplace, etc. C’est un levier stratégique extrêmement puissant.
La stratégie pour un pivot réussi : comment opérer le virage en toute sécurité
Décider de pivoter et savoir dans quelle direction est une chose. Exécuter ce changement en est une autre. Un pivot mal géré peut être plus destructeur que l’immobilisme. C’est une véritable prise de risque. Il faut donc une méthode, une stratégie claire pour minimiser les dangers et maximiser les chances de succès. Voici les trois piliers d’un pivot réussi.
1. La recherche et l’analyse : ne foncez pas tête baissée
L’intuition est un guide précieux en entrepreneuriat, mais elle doit être validée par des faits. Avant d’engager toute l’entreprise dans une nouvelle direction, il est impératif de faire ses devoirs. Prenez le temps de la recherche et de l’analyse pour confirmer que votre nouvelle hypothèse est solide.
Ne foncez pas tête baissée. Ne partez pas seulement à l’instinct. […] avant de changer tout votre modèle, vous avez intérêt à tester l’eau du bain et à voir si bah c’est pas une lubie qui vous passe par la tête et s’il y a vraiment un besoin, une demande.
Cette phase de recherche doit être obsessionnellement tournée vers vos clients, actuels ou futurs. Discutez avec eux. Menez des entretiens, des sondages. Cherchez à comprendre en profondeur leurs problèmes, leurs frustrations, leurs désirs. C’est là que se trouve la clé. En parallèle, analysez le marché que vous visez. Quelle est sa taille ? Qui sont les concurrents ? Quelle est la tendance ? Compilez des données quantitatives pour étayer les informations qualitatives que vous avez recueillies. Cette étape permet de dérisquer massivement le pivot. Vous ne partez plus d’une simple idée, mais d’une conviction forte, étayée par des preuves.
2. La communication : le moteur de l’adhésion
Un pivot est un changement majeur qui impacte tout le monde : vos clients, vos partenaires, et surtout, vos équipes. Une communication ratée peut saboter le plus brillant des pivots. Il faut donc penser à une communication à 360°, en interne comme en externe.
En externe, il faut expliquer le pourquoi de ce changement à vos clients. Il ne s’agit pas de dire ‘on s’est trompé’, mais plutôt ‘nous avons écouté, nous avons appris, et pour mieux vous servir, nous évoluons’. Il faut présenter le pivot comme une amélioration, une évolution positive qui va leur apporter plus de valeur. C’est une opération de branding délicate qui, bien menée, peut renforcer la confiance et l’attachement à votre marque.
Mais l’aspect le plus critique, et souvent le plus négligé, est la communication interne. Vos équipes sont en première ligne. Si elles ne comprennent pas la vision, n’adhèrent pas à la nouvelle direction, ou se sentent menacées par le changement, elles ne pourront pas porter le projet. Le rejet du changement est un réflexe humain.
Il est absolument essentiel d’emmener les équipes avec vous. Comment faire pour les emmener ? Mais bien souvent déjà, travailler à de la co-construction. Ne sortez pas une idée de votre chapeau en disant il faut appliquer point barre.
Impliquez-les dès que possible dans la réflexion. Soyez transparent sur les raisons du pivot et sur la nouvelle vision. Rassurez, formez, et donnez à chacun un rôle clair dans cette nouvelle aventure. Une équipe alignée et motivée est le plus grand atout pour réussir un pivot.
3. L’approche Lean Startup : tester, itérer, et avancer par petits pas
Enfin, même avec une bonne recherche et une communication parfaite, il reste une part d’incertitude. La meilleure façon de la gérer est d’adopter une approche agile, inspirée de la méthode Lean Startup. Plutôt que de tout miser sur un ‘big bang’ et de passer des mois à construire la solution parfaite, l’idée est de tester votre nouvelle stratégie à petite échelle, rapidement, pour apprendre et ajuster en continu.
C’est de dire on teste et on itère. C’est souvent comme ça que fonctionnent les meilleures modifications, changements à petite ou à grande échelle, c’est on commence par avoir une idée, tester cette idée et tout de suite itérer.
Concrètement, cela peut signifier lancer un MVP (Minimum Viable Product) de votre nouvelle offre auprès d’un petit segment de clients. Ou tester un nouveau modèle économique sur une offre limitée. L’objectif est de recueillir des données réelles le plus vite possible. Est-ce que les gens sont prêts à payer ? Est-ce que le produit résout vraiment leur problème ? Les retours de ces premières expériences sont inestimables. Ils vous permettent de corriger le tir, d’améliorer, voire de pivoter à nouveau si nécessaire, mais à moindre coût et à moindre risque. C’est une danse en trois temps : construire, mesurer, apprendre. Et recommencer, encore et encore, jusqu’à trouver le chemin de la croissance.
Conclusion : le pivot, un muscle entrepreneurial à cultiver
Au terme de cette exploration, il est clair que le pivot entrepreneurial est bien plus qu’une simple manœuvre tactique. C’est une compétence stratégique fondamentale, un état d’esprit. L’histoire de Netflix, passant de la location de DVD au géant du streaming, n’est pas une anomalie, mais l’illustration spectaculaire d’un principe universel : dans un monde en mouvement, seuls ceux qui savent s’adapter survivent et prospèrent. Pivoter, ce n’est pas renier son passé, c’est honorer les leçons qu’il nous a apprises pour construire un avenir plus solide.
Nous avons vu que la décision de pivoter doit être éclairée par une écoute attentive des signaux, qu’ils proviennent de vos KPIs internes ou des mutations profondes de votre marché. Nous avons compris que ce changement peut prendre plusieurs formes – produit, marché, ou modèle économique – et qu’il est souvent motivé par la nécessité d’ajuster son offre, de s’adapter ou simplement de survivre. Enfin, nous avons détaillé la feuille de route d’un pivot réussi, qui repose sur le triptyque : recherche approfondie, communication transparente et exécution agile. Retenez que ce n’est pas une démarche à prendre à la légère, mais qu’elle ne doit pas non plus être paralysée par la peur.
Ce qui est intéressant, c’est d’être capable de se dire qu’un jour on aura peut-être besoin de pivoter et qu’il est nécessaire de garder un esprit ouvert sur les changements.
Alors, je vous invite non pas à pivoter pour le plaisir de pivoter, mais à cultiver cette ouverture d’esprit. Regardez votre entreprise, votre marché, vos clients avec un œil neuf. Posez-vous les questions difficiles. Soyez prêt à remettre en question vos certitudes les plus ancrées. Car en définitive, la plus grande force d’un entrepreneur n’est pas la qualité de son idée initiale, mais sa capacité à la faire évoluer. Le pivot n’est pas une fin en soi, c’est le début d’un nouveau chapitre, souvent plus passionnant et plus prometteur que le précédent. Gardez l’esprit ouvert, restez à l’écoute, et n’ayez pas peur de changer de cap. C’est là que se trouve la véritable essence de l’aventure entrepreneuriale.
Foire aux questions sur le pivot entrepreneurial
Qu’est-ce qu’un pivot d’entreprise exactement ?
Un pivot d’entreprise est un changement de stratégie fondamental et délibéré, qui ne se limite pas à une simple amélioration. Il s’agit d’une réorientation majeure qui peut concerner le produit, le marché cible ou le modèle économique. Ce n’est pas un ajustement mineur, mais une décision radicale prise après avoir constaté que la stratégie initiale ne fonctionne plus ou qu’une meilleure opportunité a été identifiée. C’est une manœuvre pour trouver un chemin plus viable vers la croissance, basée sur les apprentissages du terrain. Un pivot est donc une preuve d’agilité et non un aveu d’échec.
‘Pivoter une entreprise comme on a l’habitude de le dire, ça veut dire quoi ? Ça veut dire en fait changer son modèle, changer sa façon de faire, changer son produit, changer son activité. […] c’est quelque chose qui doit être pensé, c’est quelque chose qu’on ne fait pas au hasard.’
Quels sont les signes concrets qu’il est temps de pivoter ?
Les signes les plus concrets sont souvent dans vos chiffres : une baisse continue des ventes, une érosion des marges, un taux de satisfaction client en chute libre ou un coût d’acquisition client qui explose. Au-delà des données internes, des signaux externes forts doivent vous alerter : l’arrivée de nouveaux concurrents qui captent rapidement des parts de marché, des changements technologiques majeurs qui rendent votre offre obsolète (comme le streaming pour la location de DVD), ou encore de nouvelles réglementations qui impactent votre modèle. Si vos clients commencent à exprimer des besoins que votre offre ne satisfait plus, c’est aussi un signal très puissant.
‘Si l’un de ces indicateurs s’effondre d’un coup ou […] si plusieurs indicateurs sont mal menés, ben il est peut-être temps de se poser des questions sur son business, sur son modèle, sur ce qui se passe dans son entreprise.’
Pivoter signifie-t-il que mon entreprise a échoué ?
Absolument pas. C’est une fausse croyance très répandue. Il faut voir le pivot non pas comme l’échec de l’idée initiale, mais comme le succès du processus d’apprentissage. Cela signifie que vous avez appris quelque chose de crucial sur votre marché que vous ne pouviez pas savoir au début. Persister dans une voie sans issue serait le véritable échec. Pivoter est une preuve de courage, d’humilité et d’intelligence stratégique. C’est la capacité à reconnaître que les hypothèses de départ étaient fausses et à utiliser cette connaissance pour se rediriger vers le succès. C’est une manœuvre pour sauver et faire grandir l’entreprise.
‘Parfois on s’est juste trompé. Ben il faut savoir reconnaître que ça ne fonctionne pas, qu’on a testé, qu’on a essayé et en ça, on a déjà fait beaucoup plus que la plupart des gens. […] Pivotons, changeons, allons voir ailleurs.’
Comment choisir entre un pivot de produit, de marché ou de modèle économique ?
Le choix dépend de la nature du problème que vous avez identifié. Si votre produit ne résout plus efficacement le problème de vos clients ou si un bien meilleur produit est apparu, un pivot de produit est nécessaire. Si votre produit est excellent mais que votre marché cible est trop petit, non rentable ou saturé, un pivot de marché s’impose pour trouver une nouvelle audience. Enfin, si votre produit et votre marché sont bons mais que vous peinez à générer des revenus de manière durable et scalable, c’est votre modèle économique qu’il faut repenser. L’analyse précise de vos KPIs et les retours de vos clients vous guideront vers la bonne décision.
‘Les trois premières formes de pivot potentiellement auxquelles penser et surtout se poser la question de est-ce que c’est là que peut se trouver la solution, c’est changer de produit ou d’offre, changer de marché ou changer de modèle économique.’
Quelle est la plus grosse erreur à éviter lors d’un pivot ?
La plus grosse erreur est de se lancer dans un pivot ‘à l’aveugle’, basé uniquement sur une intuition sans validation. Un pivot doit être une décision éclairée par des données et une recherche approfondie. Ne pas parler à ses clients (actuels et potentiels), ne pas analyser le nouveau marché visé, c’est risquer de remplacer une mauvaise stratégie par une autre. Une autre erreur critique est de négliger la communication interne. Si vos équipes ne comprennent pas le ‘pourquoi’ du changement et n’y adhèrent pas, l’exécution sera vouée à l’échec. Le pivot doit être un projet d’entreprise partagé, pas la décision isolée d’un dirigeant.
‘Première chose, et c’est souvent la première chose qu’il faut faire en marketing de façon générale, c’est de passer du temps sur la recherche et l’analyse, ne foncez pas tête baissée. Ne partez pas seulement à l’instinct.’
Comment communiquer un pivot à ses équipes sans créer de panique ?
La clé est la transparence, l’implication et la vision. Expliquez honnêtement la situation et les raisons qui rendent le pivot nécessaire, en vous appuyant sur des faits et des données, pas sur des émotions. Ensuite, impliquez vos équipes dans la construction de la solution. Organisez des ateliers, des brainstormings. Faites-en un projet commun plutôt qu’une décision imposée. Enfin, présentez le pivot non pas comme une fin, mais comme un nouveau départ excitant, avec une vision claire de là où l’entreprise se dirige. Montrez-leur les opportunités que ce changement va créer pour l’entreprise et pour eux. Une communication claire et un leadership fort transforment la peur en motivation.
‘Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est de communiquer en interne. Si vous avez des équipes, ne laissez pas les équipes derrière. C’est le pire. […] il est absolument essentiel d’emmener les équipes avec vous.’


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