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#89 : Retour d’expérience d’entrepreneur > Dotmarket.eu 3 ans après

Épisode diffusé le 11 octobre 2023 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

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De l’idée à la référence du marché : 3 ans dans les coulisses de Dot Market

Le parcours d’un entrepreneur est rarement une ligne droite. Il y a trois ans, je partageais ici même les prémices de l’aventure Dot Market. C’était une période d’excitation, de doutes, mais surtout de convictions fortes. La conviction qu’il existait une manière plus juste, plus transparente et plus efficace de gérer l’achat et la vente de sites internet. Aujourd’hui, après avoir navigué à travers des succès, des galères inévitables et une pandémie mondiale qui a redéfini les règles du jeu digital, il est temps de faire le point. Ce n’est pas seulement l’histoire d’une entreprise, mais un témoignage sur ce que signifie construire, pivoter et grandir dans l’écosystème digital. Comment passe-t-on d’une frustration personnelle à une solution de marché reconnue ? Comment résout-on le fameux paradoxe de la marketplace, où il faut attirer à la fois des vendeurs et des acheteurs pour exister ? Et surtout, quelles sont les leçons, parfois apprises dans la douleur, qui peuvent servir à d’autres porteurs de projet ? Dans cet article, je vous ouvre les portes de notre histoire, non pas pour présenter une version idéalisée de l’entrepreneuriat, mais pour partager avec une transparence totale les mécanismes, les stratégies et les prises de décision qui nous ont menés là où nous sommes. Vous découvrirez pourquoi nous avons délibérément tourné le dos à la course au volume, comment l’écoute obsessionnelle de nos premiers clients a façonné notre produit, et pourquoi, parfois, la meilleure décision est tout simplement de patienter.

La genèse de Dot Market : transformer une frustration personnelle en opportunité

Toute aventure entrepreneuriale commence souvent par une étincelle, une observation, et dans mon cas, une frustration récurrente. Avant de cofonder Dot Market avec mon associée Mayanne, mon parcours était profondément ancré dans le digital, plus précisément dans l’édition de sites internet et l’affiliation. C’est un univers que je connais de l’intérieur, pour y avoir évolué pendant des années, d’abord en tant que ‘country manager’ chez un annonceur, puis en créant ma propre société d’édition. Cette expérience m’a naturellement placé dans toutes les positions possibles : créateur, mais aussi acheteur et vendeur d’actifs digitaux. C’est là que le bât blesse. Je me suis rapidement heurté à une réalité du marché qui me semblait archaïque et limitée. Comme je le confiais :

‘100 % des transactions que j’effectue au fil de ces années d’édition de site internet se font via un réseau très proche.’

Cette dépendance au ‘gré à gré’ n’était pas un choix, mais une contrainte. Pourquoi ? Parce que la confiance est la pierre angulaire de toute transaction. Vendre un actif digital à plusieurs dizaines ou centaines de milliers d’euros implique une relation solide, la certitude que l’acheteur paiera en bout de course. Le corollaire de cette situation était un marché terriblement opaque et restreint. Mes opportunités de vente se limitaient à mon cercle de confiance, et mes possibilités d’acquisition se résumaient à ‘appeler mes potes’. Cette limitation était une source de frustration immense. Je perdais potentiellement des acheteurs plus qualifiés ou des valorisations plus justes, simplement par manque d’accès à un marché plus large. De l’autre côté, je passais à côté de pépites à racheter, faute d’une plateforme centralisée et fiable pour les dénicher. Le constat était donc limpide : il manquait un tiers de confiance, un acteur capable de sécuriser, de professionnaliser et d’ouvrir ce marché de l’achat-vente de sites internet à un public plus large, tout en apportant l’expertise des cabinets de fusions-acquisitions (M&A) traditionnels à des entreprises souvent jugées ‘trop petites’ par ces derniers.

Définir sa mission : s’attaquer à un marché délaissé par les acteurs traditionnels

L’idée de Dot Market est née de cette volonté de combler un vide. Nous avons observé que les cabinets M&A classiques, experts en fusions et acquisitions, se concentraient sur des ‘caps’ (capitalisations) importants, laissant de côté un segment pourtant dynamique : les business digitaux valorisés de quelques dizaines de milliers à quelques millions d’euros. Ce marché était considéré comme trop petit, trop spécifique, avec une liquidité et une expertise différentes. C’est précisément dans ce ‘marché délaissé’ que nous avons décidé de nous positionner. Notre mission est donc devenue très claire, comme je l’explique souvent :

‘Dotmarket.eu accompagne les cédants et les cédantes de business exclusivement digitaux, j’insiste sur ce point, dans la recherche de repreneur ou de repreneuse pour leurs projets.’

Il ne s’agissait pas seulement de créer une simple plateforme de mise en relation. L’ambition était de reproduire l’excellence et la rigueur des cabinets M&A, mais en l’adaptant aux spécificités du digital. Cela signifie offrir un accompagnement complet, de A à Z. De l’estimation initiale de la valeur du business à la création d’un dossier de présentation (‘deck’) professionnel, en passant par la recherche ciblée d’acquéreurs, l’accompagnement juridique et financier, et même la gestion de la migration technique post-cession. Nous voulions être le pont sécurisé entre des vendeurs désireux de passer à autre chose ou de concrétiser la valeur de leur travail, et des acheteurs en quête d’opportunités de croissance externe. En somme, nous avons cherché à structurer et à légitimer un marché qui fonctionnait jusqu’alors sur la base de relations informelles et d’un manque criant de processus standardisés. C’était un pari audacieux, mais qui répondait à un besoin que j’avais moi-même ressenti pendant des années.

Ce passage de l’idée à la concrétisation nous a immédiatement confrontés à un défi majeur, celui que connaissent tous les créateurs de marketplace. Un défi qui semble insurmontable au premier abord, mais que nous avons, par chance et par stratégie, réussi à contourner de manière assez inattendue.

Le paradoxe de la marketplace : comment nous avons résolu l’énigme de l’œuf et de la poule

Le lancement d’une marketplace est un exercice d’équilibriste redoutable. C’est le fameux problème de l’œuf et de la poule : pour attirer des vendeurs, il faut des acheteurs ; et pour attirer des acheteurs, il faut des vendeurs. C’est un cercle vicieux potentiel qui peut tuer un projet dans l’œuf. Logiquement, lorsque j’ai commencé à parler du projet Dot Market, le premier avertissement que j’ai reçu était systématiquement le même :

‘tu vas avoir du mal parce que la problématique d’une marketplace est que tu dois faire grossir les deux audiences de manière proportionnelle pour éviter de la frustration.’

Cette prédiction, bien que fondée sur une logique implacable, ne s’est pas vérifiée pour nous. Et comprendre pourquoi est essentiel pour saisir notre stratégie de lancement. Nous sommes arrivés sur un marché où des solutions existaient déjà. Elles n’étaient pas satisfaisantes, loin de là. Elles manquaient de rigueur, de sécurité, de professionnalisme. Mais elles avaient le mérite d’exister et d’avoir éduqué une partie du marché. Par conséquent, l’audience des acheteurs de business digitaux était déjà constituée. Plus que constituée, elle était en attente, voire en souffrance. Ces acheteurs, souvent des entrepreneurs aguerris, des agences en quête de croissance ou des investisseurs, étaient frustrés par le manque de qualité des offres existantes. Ils perdaient un temps fou à trier le bon grain de l’ivraie, à vérifier des informations parcellaires et à naviguer dans des processus de transaction risqués. Notre arrivée a donc été perçue non pas comme une offre de plus, mais comme une promesse. La promesse d’une solution ‘plus pertinente, plus efficace, plus sécurisée’.

Capitaliser sur une audience en attente pour se concentrer sur l’offre

Cette situation nous a offert un luxe inestimable : nous n’avons pas eu à courir deux lièvres à la fois. L’audience acheteuse, attirée par notre discours et notre promesse de qualité, est venue à nous naturellement et s’est montrée patiente. Cela nous a permis de concentrer 100% de notre énergie sur le véritable goulot d’étranglement : la constitution d’un catalogue de business à vendre de haute qualité. La réalité, c’est que les premiers mois, notre catalogue était maigre.

‘Il nous a fallu plusieurs mois avant d’arriver à avoir un catalogue de business à vendre qui nous permette d’être un petit peu fier’

, mais cette période n’a pas été synonyme de perte de clients potentiels. Au contraire. Nous avons transformé cette attente en une forme d’exclusivité. Les acheteurs nous contactaient régulièrement, s’inscrivaient sur nos listes d’attente, de peur de ‘louper un business’. Ils étaient prêts à attendre, car ils comprenaient que notre démarche de qualification prenait du temps, mais qu’elle était la garantie d’un service à la hauteur de leurs attentes. Nous avons donc bénéficié d’un alignement des planètes assez rare : une audience acheteuse mature et en quête d’une meilleure alternative, nous laissant le champ libre pour nous focaliser sur la partie la plus difficile, à savoir convaincre les vendeurs de nous faire confiance. Cette stratégie de focalisation a été la clé de notre démarrage. Plutôt que de disperser nos efforts, nous avons résolu une moitié de l’équation (les acheteurs) par notre positionnement, pour nous dédier corps et âme à l’autre (les vendeurs).

Une fois ce cercle vertueux amorcé, la question suivante était de savoir comment délivrer cette fameuse promesse de qualité. Cela nous a conduits à prendre une décision stratégique qui allait à contre-courant des dogmes de la startup nation, celle de privilégier l’excellence opérationnelle au volume.

La stratégie du contre-pied : pourquoi nous avons choisi la qualité plutôt que le volume

Dans l’univers des startups, un mantra revient sans cesse : ‘move fast and break things’. Lance-toi vite, même si ce n’est pas parfait, et ajuste ensuite. Cette philosophie a ses mérites, mais elle n’était pas la bonne pour nous. Pourquoi ? Pour une raison simple : nos concurrents faisaient déjà cela. Ils brassaient du volume, proposaient des dizaines d’annonces, mais la critique principale qui leur était adressée par les utilisateurs était justement le manque de qualité, de suivi, de fiabilité. Tenter de les concurrencer sur leur propre terrain aurait été un suicide. Comme je l’explique souvent,

‘ça sert à rien d’essayer de faire quelque chose que la concurrence fait déjà.’

Notre chemin était donc tout tracé : si le marché critiquait le manque de qualité, notre mission était de devenir l’incarnation de cette qualité. Nous avons décidé de prendre le contre-pied total. Au lieu de nous précipiter pour afficher un catalogue fourni, nous avons passé un temps que certains jugeraient déraisonnable sur chaque dossier. Notre crédibilité initiale ne reposait pas sur notre expertise en M&A, que nous devions encore prouver, mais sur notre légitimité en tant qu’experts du digital. Nous avons donc décidé de renforcer nos forces. Cette approche s’est matérialisée dès nos premières interactions avec les acheteurs. Nous avons mis un point d’honneur à créer des ‘pitch decks’ (dossiers de présentation) d’une qualité irréprochable, même pour des transactions de faible montant. C’était notre carte de visite, la première preuve tangible de notre promesse. L’effet a été immédiat. Nos premiers prospects nous ont fait ce retour qui a validé toute notre stratégie :

‘Ah ouais, mais vous avez mis du temps à faire ce deck.’

Oui, nous avions mis du temps. Probablement trop, d’un point de vue purement ROIste à court terme, pour un site valorisé à 10 000 €. Mais ce n’était pas une dépense, c’était un investissement. Un investissement dans la confiance. Nous appliquions à la lettre le fameux conseil ‘do things that don’t scale’. Nous voulions offrir une expérience mémorable, pour que nos premiers clients associent immédiatement Dot Market à la sécurité, au sérieux et au professionnalisme. L’objectif était que la sensation de sécurité ne soit pas qu’une simple perception, mais une réalité ancrée dans nos processus. Et cette stratégie a payé : nos premières transactions se sont conclues rapidement, non pas parce que nous avions des dizaines de sites à proposer, mais parce que les quelques sites que nous proposions étaient présentés avec une rigueur qui inspirait confiance et facilitait la prise de décision.

Cette obsession pour la qualité et l’expérience client n’était pas le fruit du hasard, mais le résultat d’une autre de nos convictions fondamentales : la nécessité de parler constamment à nos futurs utilisateurs pour bâtir le produit avec eux, et non pour eux.

Structurer la croissance : l’art de transformer les feedbacks en process opérationnels

Au début, Dot Market n’était pas une merveille de technologie. C’était avant tout une équipe de deux personnes, mon associée Mayanne et moi-même, avec une répartition des rôles très claire et, je pense, cruciale à notre succès. Nous n’avions pas des millions en banque, juste une vision et une éthique de travail. Mon rôle était d’être en première ligne, constamment au téléphone. Je passais mes journées à parler à des acheteurs potentiels, à des vendeurs, à des experts du secteur. Mon objectif n’était pas de ‘vendre’ à tout prix, mais de collecter. Collecter des feedbacks, des frustrations, des attentes, des critiques. J’étais, comme je le dis souvent,

‘le réceptacle à feedback que je transformais en idée’.

Ce travail de collecte, bien qu’épuisant, était la mine d’or de notre entreprise. Chaque conversation était une brique potentielle pour construire notre service. Je me souviens notamment d’un échange avec le patron d’une agence média qui m’a donné un conseil fondamental sur le type d’acheteurs que nous devions privilégier. Ce genre de retour, venant de personnes avec une immense expérience dans le rachat de business, est inestimable. C’est ce qui nous a permis de comprendre les véritables barrières à l’entrée du marché, qui ne sont pas toujours technologiques ou financières. La crédibilité, la perception, l’image de marque : ce sont des remparts très difficiles à faire tomber une fois qu’ils sont construits. Et c’est en écoutant ces critiques constructives que nous avons bâti nos propres barrières à l’entrée. Mayanne, de son côté, avait la tâche tout aussi essentielle de transformer ce flux d’informations brutes en quelque chose de concret. Elle excellait dans la création de process, transformant mes idées en un système réplicable, que ce soit en termes de procédure d’analyse, d’outils internes ou de leçons pour notre stratégie. Cette dualité a été notre moteur : l’un à l’écoute du marché, l’autre à la construction de la machine. C’est cette délimitation stricte des tâches qui nous a permis d’avancer de manière structurée, même avec des ressources limitées.

Le mythe de l’automatisation : pourquoi le ‘fait main’ est supérieur au début

Dans le monde du web, l’automatisation est souvent présentée comme le Graal. On a l’impression qu’il suffit d’appuyer sur un bouton pour que tout fonctionne. C’est un mythe dangereux, surtout au début d’un projet. Nous aurions pu tenter d’automatiser nos processus dès le départ, comme l’envoi des accords de confidentialité (NDA). Mais nous avons rapidement compris deux choses fondamentales. Premièrement,

‘on n’automatise pas les relations humaines.’

Notre métier repose sur la confiance, et la confiance se bâtit à travers des échanges humains. Deuxièmement, on ne peut pas automatiser efficacement un processus qu’on n’a pas maîtrisé manuellement. L’exemple du NDA est parlant : si nous avions automatisé l’envoi, nous n’aurions pas compris pourquoi tant de gens ne le remplissaient pas. En le faisant manuellement, nous avons découvert que beaucoup ne comprenaient pas son utilité ou comment le remplir. Cette compréhension nous a permis d’ajuster notre communication et notre processus. Nous avons donc adopté une approche ‘lean’ : bâtir les choses manuellement, puis automatiser petit à petit uniquement les tâches répétitives et parfaitement comprises. Au début, Dot Market était une ‘fausse’ plateforme : un site vitrine où presque tout était géré manuellement en coulisses. C’est ce qui nous a permis d’apprendre et de construire des fondations solides. L’automatisation n’est pas un but en soi, c’est un outil au service de l’efficacité, à utiliser lorsque le moment est venu et que les enjeux sont parfaitement compris.

Cette approche artisanale et cette quête de maîtrise nous ont cependant confrontés à nos premières véritables épreuves, des moments où la théorie se heurte à la dure réalité de l’exécution.

Les premières épreuves du feu : apprendre à ne rien laisser au hasard

Même avec la meilleure préparation du monde, l’entrepreneuriat est une école de l’humilité. On apprend souvent le plus de ses erreurs. Notre première grosse galère aurait pu être anticipée, mais quand on est en phase de lancement, on a besoin de faire du business, on se dit ‘on y est presque, on verra bien’. L’erreur est là. Nous avons réalisé de manière douloureuse que

‘si on laissait la moindre inconnue dans un processus de vente, […] tu pouvais perdre des jours et des semaines de création d’une relation de confiance.’

Notre tout premier échec a été un simple bug de migration technique. Le scénario était parfait : nous avions la vendeuse, nous avions trouvé l’acheteur, le deal était bouclé, la relation de confiance était à son apogée. Nous avions tout géré… sauf la dernière étape, la migration du site, que nous avions confiée à un prestataire externe. Et là, c’est le drame : le prestataire plante la migration. L’acheteur est furieux, la vendeuse est désemparée, et nous, au milieu, voyons des semaines d’efforts s’évaporer en quelques heures. La confiance, si durement gagnée, était brisée. La leçon a été immédiate et brutale : il fallait internaliser cette compétence. L’hypothèse de base de Dot Market était de ne rien laisser au hasard, et pourtant, nous avions laissé au hasard cette dernière étape cruciale. Accepter qu’une partie du processus nous échappe était une faille dans notre promesse de sécurité de bout en bout. Nous avons donc dû rapidement intégrer cette compétence, même si cela représentait un coût et un effort supplémentaires. Aujourd’hui, nous accompagnons nos clients sur la migration, en collectant les accès, en organisant des réunions tripartites, en contactant les prestataires techniques. Nous contrôlons le processus de A à Z sur les mandats qui nous sont confiés. Cette expérience nous a enseigné une règle d’or : tout ce qui peut mal tourner, tournera mal. Il faut donc identifier chaque point de friction potentiel et le maîtriser.

Cette philosophie de maîtrise a été mise à rude épreuve par un événement que personne n’avait vu venir, un cygne noir qui allait à la fois accélérer notre développement et le freiner brutalement : la pandémie de Covid-19.

Naviguer en eaux troubles : l’impact de la pandémie sur notre marché

Lancer une entreprise en pleine pandémie mondiale est une expérience… formatrice. Le premier confinement a coïncidé avec nos débuts. D’un côté, cela a été une aubaine. Le monde s’est tourné massivement vers le digital, créant un appel d’air sans précédent. Beaucoup de gens cherchaient à racheter des ‘side business’ ou des activités en ligne. La demande était explosive. Le problème, c’est que nous étions en plein lancement. Notre catalogue de sites à vendre était loin d’être à la hauteur de cette demande frénétique. Nous étions donc face à un déficit d’offre. L’année suivante, la situation s’est inversée de manière spectaculaire. Le monde ‘déconfinait’, les gens retournaient au bureau. Simultanément, des facteurs économiques externes sont venus perturber le jeu : l’effondrement des cryptomonnaies qui avait financé certains rachats, la hausse du coût des matières premières et de la logistique qui impactait les e-commerces. Alors que nous commencions enfin à avoir un catalogue attractif, le moment n’était plus du tout propice à l’achat. Nous nous attendions à un effet de levier, et nous avons heurté un plateau. C’était notre première grosse phase de doute : ‘L’année dernière tout le monde voulait de nos business et cette année pourquoi personne n’en veut ?’

Face à cette situation, notre réaction peut surprendre : nous avons patienté. Mais attention, patienter ne veut pas dire rester les bras croisés. Nous avons continué à travailler sur nos fondamentaux : notre notoriété, notre SEO, nos process. Mais sur le front des transactions, il fallait attendre, pour une raison très technique liée à la valorisation d’un business. On valorise une entreprise sur la base de ses performances passées, généralement sur les 12 derniers mois. Or, la pandémie avait créé une anomalie statistique gigantesque. Les chiffres de cette période n’étaient pas représentatifs. Comme je l’expliquais, il a fallu

‘patienter de revenir à des performances marché qui permettaient d’être étudié en éliminant le facteur complètement anormal que la pandémie avait représenté.’

Les vendeurs qui avaient cartonné pendant le Covid pensaient que c’était la nouvelle norme et surévaluaient leur bien. Les acheteurs, voyant ces mêmes business s’effondrer ensuite, étaient extrêmement méfiants. À l’inverse, les sites de voyage qui étaient tombés à zéro valaient-ils vraiment plus rien ? Il a fallu du temps pour que le marché digère cette anomalie, pour que les données sur 12 mois redeviennent fiables et pour qu’un consensus se reforme entre acheteurs et vendeurs. Cette période nous a appris que notre marché est directement corrélé à la stabilité et à la prévisibilité économique. Et que parfois, la meilleure stratégie est de laisser le temps au temps pour que l’écosystème retrouve son équilibre.

Conclusion : les leçons d’un voyage entrepreneurial de trois ans

Revisiter ces trois années d’existence de Dot Market est un exercice riche d’enseignements. Si je devais synthétiser notre parcours, ce serait à travers quelques convictions fortes qui nous ont guidés. La première est que les meilleures entreprises naissent souvent d’une douleur personnelle. Résoudre un problème que l’on a soi-même vécu donne une légitimité et une compréhension intime du marché inégalables. La seconde est l’importance de la stratégie du contre-pied. Au lieu de copier la concurrence, nous avons analysé ses faiblesses pour en faire nos forces, en misant tout sur la qualité et l’expérience client. Cela nous a permis de construire une marque forte et une réputation solide. La troisième leçon est l’écoute obsessionnelle. Nos premiers clients n’étaient pas des cibles, mais des co-créateurs. Leurs retours ont été le matériau brut avec lequel nous avons sculpté notre offre et nos processus. Enfin, j’ai appris la vertu de la patience et le danger des raccourcis. Que ce soit en refusant d’automatiser trop vite ou en attendant que le marché se stabilise post-pandémie, savoir attendre et se concentrer sur ses fondations est souvent plus payant que de courir après une croissance artificielle. L’aventure est loin d’être terminée, mais ces principes restent notre boussole. Pour tous les entrepreneurs qui nous lisent, j’espère que ce partage transparent vous inspirera. Votre parcours sera unique, mais les défis de la confiance, de la qualité et de l’écoute sont universels. Lancez-vous, écoutez, ajustez, et surtout, construisez quelque chose dont vous êtes fiers.

Foire aux questions (FAQ)

1. Quelle est la mission principale de Dot Market ?

La mission de Dot Market est d’agir comme un tiers de confiance spécialisé pour l’achat et la vente de business exclusivement digitaux, comme les sites e-commerce, les médias en ligne ou les applications SaaS. Nous nous positionnons sur un segment souvent délaissé par les cabinets de fusions-acquisitions traditionnels, en offrant un accompagnement complet qui va de l’estimation de la valeur d’un site à la finalisation de la transaction, incluant les aspects juridiques, financiers et techniques. Notre but est de professionnaliser et de sécuriser ce marché pour les cédants et les repreneurs.

‘Dotmarket.eu accompagne les cédants et les cédantes de business exclusivement digitaux, j’insiste sur ce point dans la recherche de repreneur ou de repreneuse pour leurs projets.’

2. Comment Dot Market a-t-il résolu le problème de l’œuf et de la poule à son lancement ?

Nous avons eu la chance de ne pas subir de plein fouet ce paradoxe classique des marketplaces. Nous sommes arrivés sur un marché où l’audience des acheteurs de business digitaux existait déjà, mais était très insatisfaite des solutions disponibles. Ces acheteurs étaient en quête d’une alternative plus fiable, sécurisée et professionnelle. Leur demande était si forte qu’ils ont été prêts à patienter que nous construisions notre catalogue de vendeurs. Cela nous a permis de concentrer tous nos efforts sur la partie la plus difficile : trouver et qualifier des business de qualité à vendre.

‘On a pu bénéficier de cet aspect qui était que l’audience acheteuse était tellement en quête d’une solution neuve et plus fiable que cette audience a été prête à attendre qu’on puisse se focaliser sur le fait d’enrichir notre catalogue.’

3. Pourquoi avez-vous privilégié la qualité au volume au début de votre projet ?

Choisir la qualité plutôt que le volume était une décision stratégique délibérée pour nous différencier. La concurrence existante se positionnait déjà sur le volume, mais souffrait d’une réputation de manque de sérieux et de suivi. Tenter de les imiter aurait été vain. Nous avons donc pris le contre-pied en nous concentrant sur l’excellence, notamment à travers des dossiers de présentation (pitch decks) extrêmement détaillés, même pour de petites transactions. Cet investissement initial a créé un ‘effet waouh’ et a immédiatement bâti notre réputation de rigueur et de confiance, ce qui était notre principal objectif.

‘Délivre une expérience mémorable à tes acheteurs parce que ce qu’ils vont se rappeler c’est que via toi ils ont eu la sensation d’être en sécurité.’

4. Faut-il automatiser ses process dès le début quand on lance une entreprise ?

Non, c’est un mythe et souvent une erreur. Notre expérience montre qu’il ne faut pas automatiser un processus avant de l’avoir parfaitement maîtrisé manuellement. L’automatisation précoce peut masquer une incompréhension des besoins réels des clients et empêcher d’apprendre. De plus, les relations humaines, qui sont au cœur de notre métier basé sur la confiance, ne s’automatisent pas. Il faut d’abord faire les choses ‘à la main’, même si ce n’est pas scalable, pour comprendre chaque étape, puis automatiser intelligemment ce qui peut l’être pour gagner en efficacité.

‘Comment tu veux automatiser quelque chose que tu n’as pas fait assez de fois pour savoir exactement comment l’automatiser de manière efficace ?’

5. Quelle a été la plus grande erreur de Dot Market à ses débuts et comment l’avez-vous corrigée ?

Notre plus grande erreur a été de sous-estimer l’importance de maîtriser 100% du processus de vente. Lors d’une de nos premières transactions, nous avons délégué la migration technique du site à un prestataire externe qui a échoué. Cet incident a failli ruiner la transaction et a entamé la confiance que nous avions mis des semaines à construire. La leçon a été immédiate : nous devions internaliser cette compétence. Nous avons appris qu’il ne faut rien laisser au hasard, car la moindre faille dans le processus peut avoir des conséquences désastreuses.

‘Les premières grosses galères, ça a été de réaliser que en fait, si on laissait la moindre inconnue dans un processus de vente, notamment par exemple juste la migration du site en bout de course, tu pouvais perdre des jours et des semaines de création d’une relation de confiance.’

6. Comment la pandémie a-t-elle impacté le marché de l’achat-vente de sites internet ?

La pandémie a eu un double effet paradoxal. Au début, elle a créé une demande explosive pour les business digitaux, mais notre offre était encore trop faible. L’année suivante, la situation s’est inversée : nous avions l’offre, mais la demande s’est tassée à cause de l’incertitude économique. Surtout, la pandémie a créé une anomalie statistique dans les performances des entreprises, rendant leur valorisation très complexe. Il a fallu attendre que les données sur 12 mois redeviennent ‘normales’ pour que le marché retrouve un consensus entre les attentes des vendeurs et la prudence des acheteurs.

‘Il a fallu patienter de revenir à des performances marché qui permettaient d’être étudié en éliminant le facteur complètement anormal que la pandémie avait représenté.’

7. Quelle est la différence entre Dot Market et un cabinet M&A traditionnel ?

La principale différence réside dans notre spécialisation et le segment de marché que nous ciblons. Les cabinets de fusions-acquisitions (M&A) traditionnels se concentrent généralement sur des entreprises de plus grande taille. Dot Market, au contraire, a été créé pour servir un marché qu’ils délaissent : les business purement digitaux valorisés de quelques dizaines de milliers à quelques millions d’euros. Nous reproduisons la rigueur et l’expertise de ces cabinets (estimation, création de dossier, accompagnement juridique) mais en l’adaptant aux spécificités et à la taille de nos clients du web.

‘Nous on a décidé de se positionner sur un cap qui est plus ou moins délaissé par ces cabinets là traditionnellement parce que un peu trop petit, parce que liquidité différente, parce que expertise différente.’

8. Comment gérez-vous le ‘personal branding’ pour qu’il ne devienne pas un risque pour l’entreprise ?

Au début, l’entreprise était fortement associée à ma personne, ce qui était nécessaire pour bâtir la crédibilité initiale. Cependant, le risque est que l’entreprise devienne dépendante de son fondateur. J’ai donc pris du recul à un moment pour laisser l’équipe prendre le lead et devenir le visage de Dot Market. Aujourd’hui, beaucoup de nos clients ne savent pas qui je suis, ce qui prouve que l’entreprise a passé un cap. J’ai récemment repris la parole, mais dans un rôle d’éducateur pour le marché, pas en tant que point de contact opérationnel. L’enjeu est d’utiliser le ‘personal branding’ pour éduquer et attirer, tout en s’assurant que les opérations quotidiennes sont parfaitement gérées par l’équipe.

‘L’enjeu, tu as tout à fait raison, c’est d’éviter que le business se soit toi. Donc c’est une chose d’éduquer mais il faut pas que ce soit toi le point d’entrée.’


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