L’attribution marketing est-elle galvaudée ? Le guide pour enfin comprendre et optimiser vos investissements
Dans le grand orchestre du marketing digital, chaque instrument joue sa partition : le SEO attire, le display suscite l’intérêt, les réseaux sociaux engagent, et l’emailing fidélise. Mais à la fin du concert, lorsque la conversion retentit, une question hante chaque directeur marketing : qui mérite les applaudissements ? Plus crûment, quel investissement a réellement porté ses fruits ? Cette interrogation est le cœur du sujet de l’attribution marketing. Un terme qui, à force d’être sur toutes les lèvres, semble parfois perdre de sa substance, devenant un concept galvaudé, une quête sans fin du modèle parfait. Pourtant, loin d’être une simple lubie de data analyst, l’attribution est une démarche essentielle, une quête de sens pour chaque euro dépensé.
Le problème est que nous avons été conditionnés à chercher une réponse simple à une question complexe. Nous voulons un coupable, un héros unique pour chaque vente. C’est la facilité intellectuelle du ‘dernier clic’. Mais la réalité du parcours client est bien plus nuancée. Un consommateur aujourd’hui est exposé à une multitude de messages, sur différents canaux, à différents moments. Il voit une publicité sur Instagram, recherche la marque sur Google, lit un article de blog, reçoit une newsletter, puis clique sur une annonce de retargeting avant d’acheter. Attribuer 100% du mérite au dernier maillon de cette chaîne est non seulement injuste, mais surtout dangereux pour la stratégie globale. C’est comme ne féliciter que le buteur en ignorant le travail des défenseurs, des milieux de terrain et du passeur décisif.
Dans cet article, nous allons déconstruire ensemble les mythes et les réalités de l’attribution. En m’appuyant sur des années d’expérience dans la technologie et l’accompagnement d’annonceurs, je vais vous guider à travers les concepts fondamentaux, en commençant par une distinction cruciale qui change toute la perspective : la différence entre attribution et contribution. Nous verrons ensuite comment transformer cette démarche, souvent perçue comme contemplative, en un véritable outil d’aide à la décision. Enfin, nous aborderons sans détour les défis techniques et humains avant de conclure sur cinq conseils pragmatiques pour lancer un projet qui apporte une réelle valeur ajoutée. Mon objectif n’est pas de vous vendre un modèle miracle, mais de vous donner les clés pour entamer une démarche intellectuelle et empirique qui vous permettra de mieux comprendre vos clients et d’allouer vos budgets avec plus d’intelligence. Car comme je le dis souvent :
‘l’objectif c’est de répondre en fait à une question qui est quelle est la rentabilité de mon investissement’.
Les fondations de l’attribution marketing : définir pour mieux agir
Avant de plonger dans les stratégies complexes et les modèles algorithmiques, il est impératif de poser des bases solides. Le mot ‘attribution’ est utilisé à tort et à travers, souvent comme un terme fourre-tout. Pour naviguer sereinement, il faut d’abord maîtriser le vocabulaire et, plus important encore, la philosophie qui se cache derrière. L’attribution n’est pas une fin en soi, mais un moyen. C’est une méthode, ou plutôt un ensemble de méthodes, visant à quantifier la valeur ajoutée de chaque point de contact marketing dans le parcours d’un consommateur. La finalité est simple et pragmatique : associer un retour sur investissement à chaque euro que vous engagez dans vos campagnes. C’est cette promesse qui la rend si séduisante, mais c’est aussi la simplification de cette promesse qui peut mener à des conclusions erronées.
Qu’est-ce que l’attribution marketing, concrètement ?
Dans sa forme la plus simple, l’attribution est une convention, une règle du jeu que l’on se fixe pour répartir le crédit d’une conversion. Imaginez un parcours client : un internaute voit une bannière display (sans cliquer), puis clique sur une annonce de recherche payante (SEA), et enfin convertit quelques jours plus tard en tapant directement l’URL de votre site. Un modèle d’attribution ‘dernier clic’ donnera 100% de la valeur au canal ‘Direct’. Un modèle ‘dernier clic payant’ l’attribuera au SEA. Un autre modèle encore pourrait prendre en compte la vue de la bannière. Vous le voyez, la ‘vérité’ dépend entièrement de la règle choisie. Il n’y a pas une seule bonne réponse, mais différentes lectures d’une même histoire. L’important est de comprendre ce que chaque lecture vous apprend, et surtout, ce qu’elle occulte. C’est un prisme à travers lequel on analyse la performance, et comme tout prisme, il peut révéler certaines couleurs tout en en cachant d’autres.
Attribution vs. Contribution : le duel sémantique qui change tout
C’est ici que se situe le point de bascule intellectuel. Si l’on veut réellement progresser, il faut cesser de confondre ces deux termes. La distinction est fondamentale. Comme je l’expliquais,
‘l’attribution dans la majeure partie des cas […] c’est mettre en place un modèle qui va associer une conversion […] à un événement publicitaire’.
C’est une logique binaire, déterministe. On applique une règle stricte : ‘le dernier clic payant remporte la mise’. Pour chaque vente, on regarde l’historique et on désigne un unique vainqueur selon la règle préétablie. C’est simple, facile à comprendre et à mettre en œuvre. C’est pour cela que ce modèle a dominé le marché pendant des années. Mais sa simplicité est aussi sa plus grande faiblesse, car elle ignore la complexité et la richesse de tout ce qui s’est passé avant.
La contribution, elle, adopte une philosophie radicalement différente. Elle ne cherche pas un coupable unique, mais essaie de comprendre le rôle de chaque acteur. Elle part du principe que plusieurs événements publicitaires ont contribué, à des degrés divers, à la décision finale. Pour reprendre mes mots :
‘on va essayer à travers la méthodologie de contributive d’aller donner une forme de pourcentage de contribution ou score de contribution à chacun des événements’.
On ne dit plus ‘cette vente est grâce au SEO’, mais plutôt ‘le SEO a contribué à hauteur de 27%, le display à 15%, etc.’. Pour y parvenir, on ne se base plus sur une règle simple, mais sur des modèles statistiques ou algorithmiques. Le plus connu est le modèle en U (ou U-shape), qui surpondère le premier point de contact (celui qui a initié la relation) et le dernier (celui qui a conclu la vente), tout en donnant un poids moindre mais réel aux événements intermédiaires. C’est une approche intellectuellement plus satisfaisante, car elle reconnaît la valeur de chaque étape du parcours. Mais elle est aussi plus complexe à mettre en œuvre et à interpréter. Confondre les deux, c’est comme confondre le verdict d’un juge (attribution) et l’analyse détaillée des délibérations du jury (contribution).
Pour résumer, l’attribution est une photo nette qui désigne un vainqueur, tandis que la contribution est une peinture plus nuancée qui montre la collaboration de plusieurs acteurs. L’une n’est pas intrinsèquement meilleure que l’autre ; ce sont deux outils qui répondent à des questions différentes et qui, idéalement, devraient être utilisés de manière complémentaire pour obtenir une vision complète de la performance marketing.
Au-delà de la contemplation : l’attribution comme outil d’aide à la décision
Une fois les concepts d’attribution et de contribution clarifiés, le piège le plus courant est de tomber dans ce que j’appelle le ‘désir contemplatif’. C’est la recherche du Saint Graal : le modèle parfait, le tableau de bord ultime qui révélera la vérité absolue sur la performance de vos campagnes. C’est une quête vouée à l’échec. L’objectif d’un projet d’attribution n’est pas de produire de jolis rapports, mais de prendre de meilleures décisions. Il faut sortir de la posture passive de l’observateur pour entrer dans celle, active, du stratège qui utilise la donnée pour agir.
‘L’objectif, c’est pas de faire de l’attribution, de la contribution pour un plaisir, purement satisfaire un plaisir ou un désir contemplatif. L’objectif, c’est de répondre en fait à une question qui est quelle est la rentabilité de mon investissement.’
Cette approche pragmatique change tout. On ne cherche plus ‘la’ vérité, mais des réponses à des questions business concrètes.
Challenger les arbitrages publicitaires : votre première mission
La première utilité d’un bon système d’attribution est de challenger le statu quo et les idées reçues. Chaque entreprise a ses ‘vaches sacrées’, ces leviers dont on pense qu’ils sont indispensables. Un cas d’école est l’achat de mots-clés sur sa propre marque en SEA. Les rapports au dernier clic payant montrent souvent un ROI exceptionnel. Mais est-ce que cet investissement génère réellement des ventes additionnelles, ou est-ce qu’il ne fait que cannibaliser des ventes qui auraient eu lieu de toute façon via le SEO ou le trafic direct ? Pour répondre, on peut utiliser l’attribution de manière active. On va comparer le modèle ‘dernier clic payant’ avec un autre modèle où l’on exclut ou dépriorise les clics sur la marque. On observe alors quels sont les leviers qui ‘récupèrent’ ces conversions. C’est un moyen puissant d’évaluer la réelle contribution de cet investissement. Le même raisonnement s’applique à de nombreux autres sujets : le retargeting est-il un simple ‘voleur de conversions’ ou un véritable levier de persuasion ? Les sites de couponing apportent-ils de nouveaux clients ou simplement une marge réduite sur des ventes déjà acquises ? En jouant avec différents modèles, on ne cherche pas le ‘bon’ modèle, mais on met en lumière les interactions et les dépendances entre les canaux.
Comprendre l’interaction des leviers : le rôle clé du Customer Journey
Aucun levier marketing ne vit en autarcie. Ils interagissent, se complètent, parfois se cannibalisent. Un bon projet d’attribution doit donc impérativement s’accompagner d’une analyse du parcours client, le fameux ‘customer journey’. Il ne s’agit plus seulement de savoir qui a ‘gagné’ la conversion, mais de comprendre la séquence des événements qui y ont mené. On cherche à identifier les schémas récurrents. Quels sont les leviers qui sont souvent en début de parcours, dans une logique de découverte ? Typiquement, on y retrouve le display, les réseaux sociaux. Quels sont ceux qui interviennent au milieu, dans la phase de considération ? Le SEO, les comparateurs. Et enfin, quels sont les leviers de conclusion ? L’affiliation, le SEA de marque, l’emailing. Comprendre ces rôles permet d’affiner sa stratégie. On ne va pas juger un levier d’initiation avec les mêmes KPIs qu’un levier de conversion. L’analyse du customer journey permet de sortir de la logique simpliste du ROI direct pour chaque levier et d’adopter une vision d’écosystème, où chaque élément a un rôle à jouer dans la performance globale.
Le pragmatisme avant le dogme : pourquoi il n’y a pas de modèle parfait
Face à cette complexité, la tentation de l’algorithme magique est grande. On nous promet des modèles ‘data-driven’ qui calculent pour nous la contribution parfaite de chaque canal. Mon expérience m’a appris à m’en méfier. Je crois profondément à une approche inverse, une démarche empirique, presque philosophique.
‘je pense qu’à l’inverse, si on veut être capable de trouver les réponses à ces questions, il faut justement partir d’une approche qui est extrêmement pragmatique, très agnostique et avoir une une logique très empirique, un peu philosophe des siècles des du siècle des lumières’.
Cela signifie qu’il faut commencer simple. On part de sa règle historique, par exemple le ‘dernier levier payant’. On observe les résultats. Puis, on se pose une question : ‘Que se passe-t-il si j’ignore les clics qui ont lieu pendant la session de conversion ?’. On met en place une deuxième règle, on compare. ‘Et si je dépriorise la marque ?’. Troisième règle, on compare. C’est cette démarche itérative de questionnement et de comparaison qui génère les insights les plus précieux. L’outil ne doit pas penser à votre place ; il doit vous permettre de tester vos hypothèses. C’est l’humain, avec ses questions et son intuition, qui doit rester le pilote. L’algorithmique vient dans un second temps, une fois qu’on a déjà une compréhension fine des interactions en jeu. Vouloir sauter directement à l’algorithmique, c’est comme vouloir courir un marathon sans jamais avoir appris à marcher.
Les obstacles sur la voie de la vérité : gérer les limites techniques et humaines
Se lancer dans un projet d’attribution, c’est un peu comme entreprendre une expédition en territoire inconnu. Le potentiel de découverte est immense, mais le chemin est semé d’embûches. Il serait malhonnête de présenter l’attribution comme une solution miracle sans en reconnaître les limites et les défis. La question ‘L’attribution est-elle galvaudée ?’ trouve souvent sa source dans une méconnaissance ou une sous-estimation de ces obstacles. Les deux principaux défis sont d’ordre technique (comment collecter une donnée fiable dans un environnement complexe ?) et humain (comment interpréter correctement cette donnée ?). Les ignorer, c’est s’assurer d’arriver à des conclusions biaisées et, potentiellement, de prendre de mauvaises décisions. La clé n’est pas de viser une perfection inatteignable, mais d’identifier les biais, de les quantifier et de les prendre en compte dans l’analyse.
Le cookie n’est pas mort : démystifier le tracking à l’ère du RGPD et des Ad-blocks
Le cookie est souvent désigné comme le maillon faible de l’attribution. On entend parler de sa disparition, des ad-blockers, de l’ITP d’Apple… Il est vrai que le contexte s’est complexifié. Mais il faut nuancer. Le principal problème concerne les cookies tiers, ceux déposés par un domaine différent de celui du site que vous visitez. Or, une bonne technologie d’attribution, comme celle que nous développons, travaille principalement avec des cookies première partie (first-party).
‘l’idéal c’est typiquement ce qu’on ce qu’on fait chez nous, c’est de lier le cookie au nom de domaine de l’annonceur. Ce qui maximise le nombre d’occasions de d’écrire nos cookies.’
Ces cookies sont beaucoup plus résilients et moins sujets au blocage. Ils permettent de suivre de manière fiable le parcours d’un utilisateur sur le site et les applications de l’annonceur. Le véritable défi se situe plutôt sur le tracking des impressions publicitaires (le post-view), qui repose souvent sur des mécanismes tiers. Il y a donc un biais : on voit très bien les clics, un peu moins bien les vues. Il faut en avoir conscience. Mais dire que le cookie est mort et que tout suivi est impossible est une simplification abusive. Il s’agit de choisir la bonne technologie et de comprendre ses forces et ses faiblesses.
Le défi du Cross-Device : réconcilier les parcours fragmentés
L’autre grand défi technique est le cross-device. Un utilisateur commence sa recherche sur son mobile dans les transports, continue sur son ordinateur au bureau et finalise son achat sur sa tablette le soir. Pour une solution de tracking basée sur les cookies, ce sont trois personnes différentes. Comment les réconcilier ? Il existe deux approches. La première, probabiliste, essaie de deviner qu’il s’agit de la même personne en se basant sur des signaux (même adresse IP, mêmes horaires de connexion…). C’est une méthode que je trouve personnellement peu pertinente pour l’attribution, car elle manque de précision. La seconde approche, déterministe, est beaucoup plus fiable.
‘l’internaute se logue, l’internaute ouvre un mail. On a un événement à l’occasion duquel on récupère un identifiant qui est un identifiant pivot qui permet ensuite de réconcilier les terminaux’.
Cette méthode est très efficace pour les clients connus et logués. Mais elle a aussi ses limites : elle fonctionne mal pour les nouveaux prospects. Là encore, il y a un biais. On aura une vision cross-device très juste sur ses clients fidèles, mais une vision plus parcellaire sur les purs prospects. La conclusion est la même : oui, il y a des limites, mais il faut savoir où elles se situent pour nuancer son analyse. On ne tirera pas les mêmes conclusions sur les campagnes d’acquisition pure que sur les campagnes de fidélisation.
L’humain au cœur du projet : l’importance fondamentale de la segmentation
Le plus grand biais n’est peut-être pas technique, mais humain. C’est la tendance à regarder les données de manière agrégée, en mettant tout le monde dans le même panier. Un rapport d’attribution global mélange les choux et les carottes. Il agrège le comportement d’un nouveau client avec celui d’un client qui a déjà acheté 10 fois, celui d’un jeune étudiant avec celui d’une mère de famille. C’est un non-sens.
‘on oublie que bah dans le même rapport en fait on le rapport il est construit avec de la donnée d’une mère de famille qui a fait son premier achat d’un étudiant qui avait déjà acheté 10 fois d’un de ma mère de 87 ans qui avait déjà aussi acheté une dizaine de fois. Et et au final on on finit par comparer des des choux et des carottes.’
Pour moi, il est fondamental d’intégrer des données utilisateur dans l’analyse. Il faut segmenter ses rapports par profil : nouveaux clients vs clients existants, clients à forte valeur vs clients occasionnels, etc. On se rend alors compte que les leviers efficaces pour l’acquisition ne sont pas les mêmes que pour la fidélisation. Une campagne peut être très performante sur une cible et totalement inefficace sur une autre. Ne pas segmenter, c’est se priver de 80% de la valeur des insights. C’est l’analyse fine, au niveau des segments de population, qui transforme un rapport de données brutes en une véritable aide à la décision stratégique.
De la théorie à la pratique : 5 conseils pour lancer un projet d’attribution efficace
Maintenant que nous avons exploré la philosophie, les outils et les défis de l’attribution, il est temps de passer à l’action. Comment transformer ces concepts en un projet concret, qui apporte une valeur mesurable à votre entreprise ? Un projet d’attribution réussi n’est pas seulement une question de technologie, c’est avant tout une question de méthode et d’état d’esprit. Au fil des années, j’ai vu des projets aboutir à des optimisations spectaculaires et d’autres s’enliser dans une complexité stérile. Les facteurs de succès sont souvent les mêmes. Voici, synthétisés, les cinq conseils que je donnerais à tout annonceur qui souhaite se lancer ou redynamiser sa démarche d’attribution.
Conseil n°1 : La qualité de la donnée, votre obsession n°1
C’est le point de départ absolu, non négociable. Vous pouvez avoir les algorithmes les plus sophistiqués du monde, si les données qui les alimentent sont incomplètes ou incorrectes, vos conclusions seront fausses. C’est le principe du ‘Garbage In, Garbage Out’. Avant même de regarder le premier rapport, il faut mener un audit rigoureux de votre plan de taggage.
‘je pense que le premier point c’est de vérifier qu’on a un bon tagage, que tout est tagé. On a souvent des cas où on a une version mobile qui a pas été ou une version […] qui a pas été taggé’.
Est-ce que toutes les pages de votre site sont couvertes ? Vos applications mobiles ? Vos différents sous-domaines ? Est-ce que les informations de transaction (montant, produits, identifiant) remontent correctement ? Cette phase de validation est cruciale et demande une grande rigueur. C’est un investissement en temps initial qui conditionne l’ensemble de la valeur que vous tirerez du projet par la suite. Ne sautez jamais cette étape.
Conseil n°2 : Gardez un mètre étalon pour mesurer vos progrès
Lorsque vous changez de perspective, il est essentiel de ne pas perdre vos repères. Beaucoup d’entreprises, en passant à un modèle d’attribution plus avancé, abandonnent complètement leur ancienne méthode de mesure (souvent le dernier clic). C’est une erreur. Votre ancien modèle, même imparfait, constitue votre historique, votre ‘mètre étalon’.
‘je pense que garder la règle qu’on utilise au moment où on démarre […] permet de pouvoir ensuite suivre ses résultats avec dans un contexte qui est celui qui est historiquement celui de la société.’
Conserver ce modèle de référence en parallèle de vos nouveaux modèles vous permet de mesurer l’impact de vos changements de perspective. Vous pourrez dire : ‘Selon notre ancienne vision, ce levier avait un ROI de X. Avec notre nouvelle analyse, son ROI contributif est de Y’. Cela facilite la communication en interne et permet de justifier les changements de stratégie en montrant concrètement ce que la nouvelle approche révèle de différent.
Conseil n°3 : Ne brûlez pas les étapes, construisez votre compréhension
La complexité n’est pas un gage de qualité. Je le répète, il faut résister à la tentation de sauter directement au modèle de contribution algorithmique le plus avancé. La démarche doit être itérative et pédagogique pour vous et vos équipes. L’objectif n’est pas seulement d’avoir un chiffre, mais de comprendre ‘pourquoi’ ce chiffre est ce qu’il est.
‘il faut pas brûler les étapes et et qu’il faut avoir une vraie démarche de construire la compréhension de du cycle de ses consommateurs’.
Commencez par des modèles d’attribution simples. Comparez un ‘dernier clic’ avec un ‘dernier clic payant’. Introduisez une règle qui exclut la marque. Analysez les parcours clients. C’est en faisant ce travail intellectuel de fond que vous développerez une intuition et une compréhension fine de votre écosystème marketing. Une fois cette compréhension acquise, vous serez beaucoup mieux armé pour construire ou utiliser un modèle de contribution pertinent, car vous saurez quelles variables y intégrer et comment interpréter ses résultats.
Conseil n°4 : Posez des questions concrètes avec des objectifs quantifiés
Un projet d’attribution ne doit pas démarrer avec l’objectif vague de ‘mieux comprendre la performance’. Il doit partir d’une liste de questions business précises.
‘Je pense qu’il faut avoir des des questions spécifiques du genre est-ce que je dois couper ou pas tel ou tel investissement ? est-ce que je dois surinvestir ?’
Fixez-vous des objectifs clairs et, si possible, quantifiés. Par exemple : ‘Mon objectif pour le premier trimestre est de déterminer si notre investissement de 50k€ sur le levier X est rentable, en mesurant sa contribution réelle et son impact sur les autres canaux’. Cette approche par ‘cas d’usage’ rend le projet beaucoup plus tangible et permet d’obtenir des victoires rapides (‘quick wins’). Ces succès initiaux sont essentiels pour créer une dynamique positive et démontrer la valeur de la démarche à l’ensemble de l’organisation.
Conseil n°5 : Intégrez les données utilisateur pour des insights plus fins
C’est le conseil qui permet de passer d’un bon projet d’attribution à un excellent projet. Ne raisonnez pas seulement en termes de sources de trafic, mais intégrez la dimension client.
‘le fait de pas raisonner uniquement sur une logique de pure source de trafic mais vraiment d’intégrer des données utilisateur dans l’attribution’.
Connectez votre outil d’attribution à votre base CRM. Segmentez vos analyses par type de client : nouveaux vs anciens, clients à forte valeur vs occasionnels, segments démographiques, etc. Vous découvrirez des schémas de comportement radicalement différents. Un levier peut être un excellent canal d’acquisition pour une cible jeune mais totalement inefficace pour réactiver des clients seniors. Cette finesse d’analyse est ce qui permet de passer de l’optimisation de campagnes à l’optimisation de l’expérience client dans sa globalité. C’est là que réside la véritable puissance d’une attribution bien menée.
Conclusion : L’attribution, un voyage humain vers la performance
Au terme de cette exploration, la réponse à notre question initiale – ‘L’attribution est-elle galvaudée ?’ – est claire : non, à condition de la considérer pour ce qu’elle est vraiment. Ce n’est pas une formule magique, ni un oracle technologique qui délivre une vérité absolue et incontestable. C’est une discipline, une démarche intellectuelle et pragmatique qui, lorsqu’elle est menée avec rigueur et curiosité, devient un levier de performance extraordinairement puissant. L’erreur serait de déléguer entièrement la réflexion à l’outil. La technologie fournit les données et les moyens de les analyser, mais c’est l’intelligence humaine qui doit poser les bonnes questions, formuler les hypothèses et interpréter les résultats à la lumière du contexte business.
Les points clés à retenir sont simples : commencez par assurer une qualité de donnée irréprochable. Adoptez une approche itérative, en partant de modèles simples pour construire progressivement votre compréhension. Ne vous laissez pas aveugler par les chiffres globaux ; segmentez, affinez, cherchez à comprendre les comportements derrière les données. Et surtout, gardez toujours à l’esprit que l’objectif final n’est pas la contemplation d’un rapport parfait, mais la prise de décisions éclairées pour optimiser la rentabilité de vos investissements et mieux servir vos clients.
Finalement, le plus grand bénéfice d’un projet d’attribution bien mené n’est pas seulement l’optimisation des budgets. C’est la compréhension profonde qu’il apporte sur la manière dont vos clients interagissent avec votre marque. C’est un voyage qui vous force à déconstruire vos certitudes, à challenger vos habitudes et à vous rapprocher de la réalité complexe et fascinante du comportement des consommateurs. C’est une démarche exigeante, certes, mais dont les récompenses vont bien au-delà de quelques points de ROI. C’est une invitation à devenir un marketeur plus intelligent, plus curieux et, in fine, plus efficace.
FAQ sur l’attribution marketing
1. Quelle est la différence fondamentale entre attribution et contribution marketing ?
La différence est majeure et réside dans la philosophie de mesure. L’attribution est une approche déterministe qui vise à assigner 100% du crédit d’une conversion à un seul et unique événement publicitaire, selon une règle prédéfinie (par exemple, le dernier clic). C’est une vision simplifiée qui désigne un ‘vainqueur’. La contribution, à l’inverse, est une approche algorithmique ou statistique qui part du principe que plusieurs points de contact ont influencé la décision d’achat. Elle ne désigne pas un vainqueur mais distribue un score ou un pourcentage de contribution à chaque événement du parcours client, reconnaissant ainsi le rôle de chacun.
‘La contribution elle, elle a un objectif qui est déjà plus compliqué […] c’est de dire que pour précédent chaque événement commercial […] on a un certain nombre d’événements publicitaire. Et on va essayer à travers la méthodologie de contributive d’aller donner une forme de pourcentage de contribution ou score de contribution à chacun des événements.’
2. Pourquoi le modèle ‘dernier clic’ est-il souvent insuffisant ?
Le modèle ‘dernier clic’ (ou ‘last click’) est insuffisant car il ignore l’intégralité du parcours client qui a précédé la conversion. Il survalorise systématiquement les canaux de fin de parcours (comme le SEA de marque ou l’emailing promotionnel) et sous-estime voire ignore complètement les canaux d’initiation et de considération (comme le display, les réseaux sociaux ou le SEO générique). En vous basant uniquement sur ce modèle, vous risquez de couper les budgets des leviers qui nourrissent le haut de votre tunnel de conversion, ce qui pourrait assécher vos ventes à moyen et long terme. Il ne reflète tout simplement pas la complexité des interactions d’un consommateur avec une marque aujourd’hui.
3. Dois-je commencer par un modèle d’attribution simple ou un modèle de contribution complexe ?
Il est fortement recommandé de commencer par des modèles d’attribution simples. Tenter de déployer d’emblée un modèle de contribution algorithmique complexe sans avoir au préalable analysé les interactions de base entre vos leviers est une erreur. C’est une démarche itérative. Commencez par votre règle historique (souvent le dernier clic payant), puis comparez-la à d’autres modèles simples (ex: en excluant la marque, en ne tenant pas compte des clics en cours de session). Ce processus vous permet de construire une compréhension solide et de générer des insights actionnables rapidement, avant de vous lancer dans la complexité de la contribution.
‘Moi je te promets, je te pari tout ce que tu veux que si tu démarres ex nihilo sans avoir eu des premières démarches à la fois attributive pour comprendre le le rang d’action de de tes différents leviers, […] moi je te dis que tu vas définir un modèle contributif qui va t’amener dans le mur.’
4. Comment le cross-device impacte-t-il la fiabilité de l’attribution ?
Le cross-device est un défi majeur car un même utilisateur peut interagir avec une marque via plusieurs appareils (mobile, ordinateur, tablette), apparaissant comme plusieurs individus distincts pour les outils de tracking basés sur les cookies. Cela peut fragmenter le parcours client et biaiser l’attribution, en sous-évaluant notamment le rôle des appareils mobiles dans les phases de découverte. Pour y remédier, la méthode la plus fiable est la réconciliation ‘déterministe’, qui utilise un identifiant unique (comme un login ou un clic dans un email) pour relier les différents appareils à une seule personne. Cependant, cette méthode a ses limites, car elle est plus efficace sur les clients connus que sur les prospects anonymes. Il faut donc être conscient de ce biais potentiel dans l’analyse.
5. L’attribution marketing est-elle réservée aux grandes entreprises ?
Non, absolument pas. En théorie, toute entreprise qui investit en marketing digital, même avec un petit budget, aurait intérêt à faire de l’attribution pour optimiser ses dépenses. Le véritable frein n’est pas la pertinence, mais le coût d’entrée, qui inclut le prix de la technologie et surtout le temps humain et les compétences nécessaires pour piloter le projet. Une petite structure aura du mal à dédier une ressource à plein temps. Cependant, l’idée qu’il faut un volume de trafic ou de chiffre d’affaires colossal est fausse. Un e-commerçant de niche avec peu de trafic mais un panier moyen très élevé a un intérêt immense à optimiser chaque euro investi.
‘du jour où tu commences à dépenser 300 €, tu commencerais à faire l’attribution pour mettre ta stratégie sur les bons rails, identifier les billets de ce que tu fais tu gagnerais beaucoup de temps. Donc en fait tu as intérêt à le faire tout de suite.’
6. Comment s’assurer de la qualité des données pour un projet d’attribution ?
La qualité des données est le socle de tout le projet. Pour s’en assurer, la première étape est de réaliser un audit complet et rigoureux de votre plan de taggage. Il faut vérifier que tous les environnements (site desktop, version mobile, applications) sont correctement et exhaustivement tagués. Assurez-vous que toutes les interactions clés et surtout les données de conversion (identifiant de transaction, chiffre d’affaires, etc.) sont collectées de manière fiable et systématique. Il s’agit d’une phase de validation technique indispensable avant toute analyse. Sans une donnée exhaustive et de qualité, les plus beaux tableaux de bord du monde ne produiront que des conclusions erronées. C’est le conseil numéro un et le plus fondamental.
‘je pense que le premier point c’est de vérifier qu’on a un bon tagage, que tout est tagé. […] on part dans des analyses sans avoir une une donnée dont on a bien validé on va dire la la qualité et l’exhauutivité. […] c’est un point fondamental.’
7. Quel est le rôle du post-view (impression publicitaire) dans les modèles d’attribution ?
Le post-view consiste à prendre en compte les impressions publicitaires (les bannières vues mais non cliquées) dans le parcours de conversion. C’est un sujet récurrent et complexe. L’idée est qu’une publicité peut avoir une influence même sans clic, en générant de la notoriété ou en rappelant la marque à l’internaute. Inclure le post-view dans un modèle d’attribution peut donner une vision plus complète de l’impact des campagnes display ou de retargeting. Cependant, sa mesure est techniquement plus délicate que celle des clics et peut être sujette à des biais. La bonne approche est de tester : comparer un modèle qui inclut le post-view avec un modèle qui l’exclut pour comprendre son impact réel et décider, de manière pragmatique, s’il est pertinent de le prendre en compte ou non pour vos analyses.
8. En quoi la segmentation client (CRM) enrichit-elle l’analyse d’attribution ?
Intégrer vos données CRM pour segmenter vos rapports d’attribution transforme radicalement la profondeur de vos analyses. Au lieu d’analyser une performance moyenne agrégée, vous pouvez comparer le comportement de différents profils : nouveaux clients vs clients fidèles, hommes vs femmes, clients à forte valeur vs acheteurs occasionnels. Cette segmentation révèle des insights cruciaux qu’une vue globale masque totalement. Vous pourriez découvrir qu’un levier est extrêmement performant pour l’acquisition de nouveaux clients mais inutile pour la réactivation d’anciens. Cela permet de passer d’une optimisation de campagne globale à une stratégie d’investissement ciblée par segment de clientèle, ce qui est infiniment plus efficace.
‘pour moi, c’est fondamental d’avoir une démarche où on va segmenter des rapports d’attribution par profil à minima client prospect client très régulier […] on va pas le mélanger les performances des campagnes sur des gens qui sont déjà acheteurs 10 fois et plus avec les performances des campagnes en acquisition pure.’




