Mesure Marketing : Comment survivre et performer à la fin des cookies tiers ?
Le sol se dérobe sous les pieds des marketeurs. Pendant près de deux décennies, nous avons bâti nos stratégies sur un pilier que nous pensions immuable : le cookie tiers. Cet outil, aussi controversé que puissant, était le véritable ‘fioul du digital’, nous permettant de suivre, de comprendre et d’optimiser nos campagnes avec une précision inégalée. Mais cette ère est révolue. Entre les impératifs légaux de protection de la vie privée et la guerre déclarée par les navigateurs, l’écosystème de la mesure marketing digital est en pleine implosion. La question n’est plus de savoir si le changement va avoir lieu, mais comment y survivre. Comment mesurer l’impact de nos actions quand les règles du jeu sont entièrement réécrites ? C’est le défi colossal auquel nous sommes tous confrontés.
Cette transition n’est pas une simple mise à jour technique ; c’est un changement de paradigme. Nous passons d’un monde de certitudes individuelles, en temps réel, à un avenir fait de données agrégées, de délais et d’une complexité accrue. Pour nous guider dans ce brouillard, j’ai eu la chance de discuter avec Laurent sur le podcast Bannouze. En tant que Directrice Activation et Programmatique chez Weborama, je suis aux premières loges de cette transformation. Mon parcours, d’abord juriste en droit des nouvelles technologies puis passionnée de publicité programmatique, me donne une perspective unique sur les enjeux à la fois techniques et légaux de cette révolution.
Dans cet article, nous n’allons pas nous contenter de survoler le sujet. Nous allons plonger au cœur du réacteur pour comprendre les mécanismes de cette transformation. Nous commencerons par un rappel du monde d’hier pour bien saisir ce que nous perdons. Ensuite, nous analyserons la double rupture, légale et technologique, qui a tout changé. Puis, nous décortiquerons la réponse de Google, la fameuse Privacy Sandbox, avec ses promesses et ses zones d’ombre. Enfin, et c’est le plus important, nous explorerons les solutions concrètes et la réorganisation impérative que les annonceurs doivent entreprendre dès aujourd’hui pour ne pas être laissés pour compte. Préparez-vous, le voyage vers le futur de la mesure marketing commence maintenant.
Le panorama de la mesure avant le grand basculement
Pour bien comprendre l’ampleur du séisme qui nous attend, il est essentiel de se souvenir du monde dans lequel nous opérions jusqu’à présent. Un monde fondé sur une promesse simple mais révolutionnaire : la capacité de tout mesurer, ou presque, en temps réel. Cette capacité reposait presque entièrement sur notre ‘copain le tiers partie cookie’, cet outil qui a permis de structurer tout notre écosystème publicitaire et analytique. Il était la clé de voûte d’un système qui, malgré ses défauts, offrait une vision incroyablement riche du parcours client.
L’ère du cookie tiers : une vision unifiée et en temps réel
Le principal avantage du cookie tiers était sa capacité à créer un langage commun, un système homogène à travers le web. Comme je le soulignais, ‘le coquitier a permis de créer un système homogène’. Grâce à lui, nous pouvions suivre un internaute de site en site, comprendre ses centres d’intérêt, analyser son parcours d’achat et lui adresser des messages pertinents au bon moment. Cette vision ‘user-centric’ était le graal du marketing digital. On pouvait savoir qu’un même utilisateur avait vu une bannière sur un site média, cliqué sur une annonce sur un réseau social, puis converti sur le site de l’annonceur.
Cette richesse de données alimentait trois grands types de mesure qui cohabitaient :
- La mesure site-centric : Focalisée sur ce qui se passe sur le domaine de l’annonceur. C’est l’univers de Google Analytics, qui nous renseigne sur le temps passé, le nombre de pages vues, les interactions. C’est le thermomètre de la performance de notre propre environnement.
- La mesure média : C’est le cœur de l’optimisation des campagnes. On y retrouve les impressions, les clics, les taux de conversion, la visibilité des publicités, le taux de complétion des vidéos. Ces KPIs nous permettaient de prendre des décisions quasi instantanées. ‘Aujourd’hui, on lance une campagne digitale quasiment deux ou trois jours plus tard, on peut savoir si elle fonctionne ou pas et s’il faut allouer ses budgets autrement’.
- La post-mesure statistique : Ces approches, comme l’incrémentalité ou le Marketing Mix Modeling (MMM), analysent des masses de données plus larges, sur des temps plus longs. Elles ne sont pas en temps réel mais apportent une vision stratégique complémentaire sur l’apport réel d’un canal marketing.
L’ensemble de ces outils nous donnait l’impression de piloter nos investissements avec une grande finesse, grâce à des données granulaires et disponibles rapidement.
L’attribution : l’éternelle quête du modèle parfait
Au sein de ce panorama, la question de l’attribution a toujours été, comme le disait Laurent, ‘l’Arlésienne’ du marketing digital. Le fameux débat sur le ‘last click’ a occupé les esprits pendant des années. Attribuer 100% du mérite de la conversion au dernier point de contact était une simplification extrême du parcours client, mais avait l’avantage de la simplicité. Progressivement, des modèles plus sophistiqués ont émergé (linéaire, en U, basé sur la donnée) pour tenter de rémunérer plus justement chaque levier contribuant à la conversion. Mais même dans ce monde ‘parfait’ du cookie, aucun consensus n’a jamais été trouvé. Chaque plateforme, chaque outil avait sa propre logique, créant déjà des dissonances dans les rapports. Ce débat, déjà complexe hier, va devenir un véritable casse-tête dans le monde de demain. Ce système, bien que perfectible, offrait une visibilité sans précédent. Mais deux forces majeures, l’une juridique et l’autre technologique, sont venues dynamiter cet édifice. Plongeons au cœur de la révolution cookieless.
La double rupture : comment le monde de la mesure a volé en éclats
La fin de l’âge d’or du cookie tiers n’est pas le fruit du hasard. C’est le résultat d’une double lame de fond, puissante et coordonnée, qui a fondamentalement redéfini les règles de la collecte et de l’utilisation des données sur Internet. D’un côté, le législateur a imposé un cadre beaucoup plus strict. De l’autre, les géants de la tech, via leurs navigateurs, ont pris des mesures techniques drastiques. C’est cette combinaison qui rend le changement si profond et irréversible.
Le cadre légal : RGPD et ePrivacy, les gardiens du consentement
Le premier choc est venu de la loi. L’arrivée du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) en 2018, suivi par les directives ePrivacy, a marqué un tournant. L’idée fondamentale était de redonner le contrôle de leurs données aux utilisateurs. Concrètement, cela s’est traduit par une obligation de consentement clair et explicite pour toute opération de lecture ou d’écriture d’informations sur le terminal d’un utilisateur. Et cela ne concerne pas que les cookies tiers. Comme je le précisais, ‘l’arrivée des mesures légales avec le GDPR, l’ePrivacy qui ont conditionné le consentement et surtout la pose de cookie tiers et la pose de cookie first d’ailleurs, la pose de cookie tout court’. Cette exigence a brisé le postulat de base selon lequel on pouvait suivre tout le monde par défaut. Désormais, chaque tracking, même celui réalisé par le site lui-même pour ses propres besoins (first-party), est soumis à l’accord de l’internaute. C’est la fin du tracking ‘silencieux’ et le début d’une ère où la donnée collectée n’est plus exhaustive mais parcellaire, dépendante de taux de consentement variables.
La guerre des navigateurs : quand la technique impose ses règles
Le second choc, tout aussi violent, est venu du front technologique. Les navigateurs, qui sont notre porte d’entrée sur le web, se sont positionnés en protecteurs de la vie privée de leurs utilisateurs. Apple a ouvert le bal de manière très agressive avec Safari. ‘Safari a ouvert quand même le bal en 2019 en complètement interdisant les tiers partie cookie’. Firefox a rapidement suivi le mouvement, bloquant par défaut ces mêmes traceurs. Pendant un temps, l’écosystème a pu continuer à fonctionner sur Chrome, le navigateur ultra-dominant. Mais l’annonce par Google de la suppression des cookies tiers dans son navigateur a sonné le glas de tout le système. La taille de Chrome est telle que sa décision impacte l’ensemble du marché. ‘Google représente quand même plus de 60 % en Europe’, ce qui signifie que lorsque Chrome basculera, la majorité du trafic web deviendra ‘aveugle’ au sens où nous l’entendions. Contrairement aux autres, Google a choisi de ne pas simplement bloquer, mais de proposer une alternative : la Privacy Sandbox. Une initiative qui, sous couvert de collaboration avec le marché, redéfinit en profondeur qui détient le pouvoir dans la mesure publicitaire.
Face à cette tempête réglementaire et technique, l’écosystème retient son souffle. Google, acteur incontournable, ne pouvait rester silencieux. Sa réponse ? La Privacy Sandbox. Un nom prometteur, mais qui cache une refonte totale de notre manière de mesurer.
Naviguer dans le brouillard : comprendre la Privacy Sandbox
Face au vide laissé par la disparition des cookies tiers, Google a donc avancé sa solution : la Privacy Sandbox. Il ne s’agit pas d’un simple outil, mais d’une suite d’APIs (interfaces de programmation) intégrées directement dans le navigateur Chrome, chacune conçue pour répondre à un cas d’usage marketing (ciblage, retargeting, mesure) sans exposer les données individuelles. C’est une refonte architecturale majeure qui change radicalement la façon dont l’information circule et est traitée.
Le principe fondamental : de l’individu à la cohorte agrégée
Le changement le plus important à intégrer est un changement de philosophie. Nous devons abandonner la vision individuelle. Fini le suivi d’un utilisateur unique à la trace. L’avenir est à l’agrégation. ‘On va être dans un monde totalement agrégé. On n’aura plus les accès aux données individualisées sauf dans quelques rares cas’. Concrètement, cela signifie que nous ne travaillerons plus sur des parcours individuels, mais sur des groupes d’utilisateurs anonymisés, des ‘cohortes’. Le navigateur analysera les comportements localement, sur la machine de l’utilisateur, et ne partagera aux acteurs publicitaires que des résultats statistiques et groupés. Pour un marketeur, cela veut dire perdre une granularité immense. On saura qu’un groupe exposé à une campagne a généré un certain volume de ventes, mais il sera impossible de relier une vente précise à une exposition publicitaire précise pour un individu donné. C’est la fin du ‘user journey’ tel que nous le connaissons.
Les Measurement APIs : les nouvelles règles du jeu de l’attribution
Au cœur de la Privacy Sandbox, la partie qui nous intéresse le plus est celle des ‘Measurement APIs’. Elles sont conçues pour permettre la mesure de la performance des campagnes. Il y a principalement deux briques :
- L’Event-Level API : Elle donne des informations sur les impressions et les clics, mais avec très peu de détails et des ‘bruits’ statistiques ajoutés pour préserver l’anonymat.
- L’Aggregate Reporting API : Beaucoup plus riche, elle fournit des données détaillées sur les conversions (valeur du panier, type de produit acheté, etc.).
Mais le point crucial, et le plus déroutant, est que ces deux briques sont conçues pour ne pas communiquer entre elles au niveau individuel. ‘On pourra plus lier et créer cette chaîne impression, clic, conversion de manière individualisée. Donc d’un côté, on aura les les impressions et les clics, de l’autre on aura les conversions’. Cette dissociation volontaire brise la logique même de l’attribution. De plus, une autre révolution est la fin du temps réel. Les rapports ne seront plus instantanés. ‘Ces données là ne seront plus fournies en temps réel. Seront fournis entre 24 heures et 7 jours après l’événement’. Cette latence impose de revoir complètement les processus d’optimisation de campagnes, qui reposaient sur la réactivité.
La perte de contrôle : quand le navigateur devient juge et partie
Le corollaire de cette nouvelle architecture est un transfert de pouvoir massif vers le navigateur. C’est sans doute l’aspect le plus inquiétant pour l’écosystème. Auparavant, les annonceurs et leurs partenaires technologiques déployaient leurs propres outils de mesure et pouvaient vérifier, croiser et auditer les données. Demain, la logique sera inversée. L’annonceur définira ses règles de mesure, mais c’est Chrome qui les appliquera en interne, dans une sorte de ‘boîte noire’, avant de restituer un résultat final agrégé. ‘On va déporter la mesure et l’attribution au sein du navigateur’. La question de Laurent est alors fondamentale : ‘comment tu vas contrôler ce qu’ils font en fait ?’. Et la réponse est directe : ‘C’est ça la grande question. C’est qu’effectivement on n’aura pas cette capacité qu’on a aujourd’hui d’aller contrôler, d’aller vérifier les données, on va devoir s’appuyer sur les données qui sont fournis par les navigateurs’. Nous devrons faire confiance au modèle de Google, sans possibilité d’audit indépendant. Cela pose des questions majeures de transparence et de dépendance vis-à-vis d’un acteur qui est à la fois le principal vendeur d’espaces publicitaires et l’arbitre de leur mesure.
La Privacy Sandbox n’est qu’une pièce, bien que majeure, du puzzle. Le tableau que je dresse peut sembler sombre, mais il n’est pas sans espoir. D’autres voies se dessinent, exigeant une réconciliation complexe mais porteuse de nouvelles opportunités.
Reconstruire la mesure : les solutions alternatives et la nouvelle organisation
Face à ce tableau complexe et à la solution proposée par Google, il est crucial de comprendre qu’il n’y aura pas une seule réponse magique. L’avenir de la mesure marketing digital ne sera pas une solution de remplacement ‘plug-and-play’ du cookie tiers, mais un patchwork de technologies et de stratégies qu’il faudra apprendre à orchestrer. La bonne nouvelle, c’est que des alternatives existent et se développent. La clé sera de changer de mentalité et de s’organiser pour faire cohabiter ces différentes approches.
Le trésor des données First-Party : votre actif le plus précieux
La première pierre angulaire de toute stratégie future est la donnée ‘first-party’. C’est la donnée que vous collectez directement auprès de vos utilisateurs sur vos propres environnements (site web, application, CRM). Comme je l’ai rappelé, ‘les first party cookies, c’est-à-dire les cookies déposés par un annonceur ou par un éditeur dans ses propres environnements ne sont pas remis en question et heureusement’. Cette donnée est votre propriété, elle est de haute qualité et, sous réserve d’avoir obtenu le consentement, vous pouvez l’utiliser pour comprendre ce qui se passe ‘chez vous’. Vous pouvez toujours analyser le parcours sur votre site, le taux de conversion de vos visiteurs, leur fidélité. La grande limite, c’est que cette vision s’arrête à vos frontières. Vous ne pouvez pas savoir ce que l’utilisateur a fait avant d’arriver, ni ce qu’il fera après. C’est pourquoi une stratégie first-party robuste est nécessaire mais pas suffisante. Elle devient le socle sur lequel construire le reste.
Les identifiants uniques et les ID graphs : la quête d’une vision unifiée
Pour recréer un lien entre les différents environnements, l’industrie travaille sur des ‘identifiants uniques’ (ou ‘Unified IDs’). Contrairement aux cookies, ces identifiants sont souvent basés sur des informations déterministes fournies par l’utilisateur, comme une adresse e-mail ou un numéro de téléphone hachés (c’est-à-dire anonymisés). Des acteurs comme LiveRamp ou The Trade Desk sont à la pointe de ces initiatives. L’avantage est qu’ils permettent un suivi cross-device et cross-canal d’un individu réel, et non d’un navigateur. Cependant, ils présentent deux défis majeurs. Le premier est la portée : ‘ça représentera qu’une petite partie parce qu’elle a portée est très faible’. En effet, cela ne fonctionne que pour les utilisateurs qui se sont authentifiés. Le second défi est l’interopérabilité. Il existe des dizaines d’identifiants différents qui ne se parlent pas encore. ‘Il va avoir tout ce gros travail là de de de synchronisation’ pour que l’écosystème puisse fonctionner de manière fluide.
L’impératif d’une réorganisation interne : la compétence au cœur de la stratégie
C’est peut-être le point le plus important pour les annonceurs. La technologie ne résoudra pas tout. Le plus grand changement doit être humain et organisationnel. Le futur de la mesure sera trop complexe pour être entièrement délégué à des agences ou des partenaires technologiques sans une forte supervision interne. ‘Si les annonceurs doivent faire quelque chose aujourd’hui, c’est penser à ça, c’est penser à cette réorganisation là et à la préparer demain’. Concrètement, cela signifie créer des équipes capables de naviguer dans cette complexité. ‘La première chose qu’ils doivent faire, c’est créer des équipes en interne qui vont être capable de jongler avec plusieurs plateformes, qui vont aller regarder ce qui se passe dans la privacy Sandbox, qui vont regarder ce qui se passe avec les identifiant uniques, avec les forces party cookies’. Ces équipes devront agréger des données de sources hétérogènes (APIs de Google, plateformes d’ID, data first-party) pour leur donner du sens. Cela implique également de ‘réfléchir à de nouveaux KPI’, moins centrés sur la performance individuelle immédiate et plus sur l’analyse de cohortes, la valeur à long terme (Lifetime Value) ou des indicateurs de notoriété et d’engagement. Chez Weborama, par exemple, nous développons des approches basées sur l’analyse sémantique pour comprendre les centres d’intérêt des audiences de manière totalement ‘cookie-less’, ce qui représente une autre brique de connaissance à intégrer.
Conclusion : un nouveau chapitre pour la mesure marketing
Nous sommes à la fin d’un chapitre et à l’aube d’un nouveau. Le monde confortable, bien que trompeur, de la mesure individuelle et en temps réel s’efface pour laisser place à un paysage plus complexe, fragmenté et exigeant. Le tableau peut sembler sombre, mais il ne faut pas céder au pessimisme. Comme je le disais, ‘ce n’est pas aussi noir mais on aura une mesure différente’. Ce changement forcé est aussi une formidable opportunité de repenser nos pratiques.
Les points clés à retenir sont clairs : la fin du suivi individuel au profit de l’analyse de cohortes agrégées ; la disparition du temps réel qui nous oblige à adopter une vision plus stratégique et moins tactique ; et l’émergence d’un écosystème de solutions multiples qu’il faudra orchestrer. Il n’y a pas de solution miracle, pas de ‘nouveau cookie’. La performance de demain reposera sur la capacité des annonceurs à maîtriser leur donnée first-party, à s’interfacer avec les nouvelles APIs des navigateurs, et à intégrer les informations issues des identifiants uniques.
Le plus grand défi ne sera pas technologique, mais humain. Il est impératif d’investir dès maintenant dans la compétence interne, de former des équipes capables de comprendre et de synthétiser ces nouvelles sources de données. C’est le moment de questionner nos anciens KPIs, d’expérimenter et de construire les modèles de mesure de demain. Le train est en marche, et ceux qui attendent sur le quai risquent de le voir passer sans pouvoir monter à bord. La préparation est la clé, et elle doit commencer aujourd’hui.
Questions fréquentes sur la mesure marketing à l’ère post-cookie
Quelle est la principale différence entre la mesure marketing d’hier et de demain ?
La différence fondamentale réside dans le passage d’une mesure individuelle à une mesure agrégée. Hier, grâce aux cookies tiers, nous pouvions suivre le parcours d’un utilisateur spécifique à travers différents sites et points de contact. Demain, cette vision granulaire disparaîtra. Nous analyserons des groupes d’utilisateurs, des cohortes anonymes, pour en déduire des tendances. De plus, la mesure ne sera plus en temps réel, mais différée de 24 heures à plusieurs jours, ce qui impacte fortement l’optimisation des campagnes.
‘On va être dans un monde totalement agrégé. On aura plus les accès aux données individualisées sauf dans quelques rares cas mais la plus grande partie en fait des données dont on va disposer seront agrégées. Donc on va travailler sur des cohortes plutôt ou sur des comportements globaux de groupes et non plus sur des comportements individualisés.’
La fin des cookies tiers signifie-t-elle la fin de tout suivi des utilisateurs ?
Non, c’est une nuance importante. C’est la fin du suivi *tiers* cross-site, c’est-à-dire la capacité d’un acteur A à suivre un utilisateur sur le site d’un acteur B. En revanche, le suivi *first-party* reste possible. Un annonceur pourra toujours analyser ce que font les visiteurs sur son propre site ou son application, à condition d’avoir obtenu leur consentement. La donnée first-party devient donc un actif stratégique majeur, même si elle ne donne pas de vision sur ce qui se passe en dehors de son propre périmètre.
‘Les first party cookies, c’est-à-dire les cookies déposés par un annonceur ou par un éditeur dans ses propres environnements ne sont pas remis en question et heureusement. (…) L’annonceur, il continuera en fait de son côté à pouvoir s’appuyer sur sa first party data, à savoir ce qui se passe sur son site modulo le consentement.’
La Privacy Sandbox de Google est-elle la seule solution pour la mesure future ?
Non, et c’est un point crucial. La Privacy Sandbox sera une solution incontournable pour l’écosystème Chrome, qui représente une part majoritaire du trafic. Cependant, ce n’est qu’une pièce du puzzle. D’autres solutions coexisteront : les APIs de mesure propres à Apple pour son écosystème, les identifiants uniques basés sur des données déterministes (e-mail haché), les approches contextuelles et sémantiques, et bien sûr, l’analyse approfondie des données first-party. La compétence de demain sera de savoir réconcilier ces différentes sources de données.
‘Il n’y a pas une seule solution comme pour le ciblage en fait. On n’a pas une seule solution qui va remplacer à 100 % la connaissance que nous avons avec le tiers partie cookie. Donc vraiment il faut s’y faire à l’idée qu’on aura très peu d’informations individualisées.’
Pourquoi ne pourrons-nous plus optimiser nos campagnes en temps réel ?
L’optimisation en temps réel reposait sur la capacité à obtenir des données de performance (clics, conversions) quasi instantanément. Les nouvelles architectures, comme la Privacy Sandbox de Google, introduisent volontairement des délais dans la transmission des rapports pour protéger la vie privée et empêcher l’identification d’individus. Les données de conversion, par exemple, pourront arriver entre 24 heures et 7 jours après l’événement. Cette latence rend impossible le pilotage quotidien ou horaire des campagnes tel que nous le pratiquions.
‘Et ces données là ne seront plus fournies en temps réel. Seront fournis entre 24 heures et 7 jours après l’événement. (…) ce que ça va vouloir dire, c’est que au mieux le lendemain, je vais avoir et et surtout la donnée du du du précédente.’
Quel est le plus grand risque pour les annonceurs dans ce nouvel écosystème ?
Le plus grand risque est la perte de contrôle et de transparence. En déportant la logique de mesure au sein des navigateurs, les annonceurs et leurs partenaires perdront la capacité de vérifier et d’auditer les données de manière indépendante. Ils devront faire confiance aux chiffres fournis par des plateformes comme Google, qui sont à la fois juges et parties puisqu’elles sont aussi les principales régies publicitaires. Cela crée une dépendance et un manque de visibilité sur la robustesse et l’impartialité des modèles d’attribution utilisés.
‘On n’aura pas cette capacité qu’on a aujourd’hui d’aller contrôler, d’aller vérifier les données, on va devoir s’appuyer sur les données qui sont qui sont fournis par les navigateurs. Alors Google parle de de fournir des garanties sur la robustesse des modèles et cetera mais ça on le verra dans le temps.’
Concrètement, que doit faire un annonceur aujourd’hui pour se préparer ?
L’action la plus urgente est de se réorganiser en interne pour monter en compétence. Il ne faut plus considérer la mesure comme un sujet purement technique délégué à des tiers. Les annonceurs doivent créer des équipes capables de comprendre les différentes solutions (Privacy Sandbox, ID uniques, etc.), de les tester et de réconcilier les données qu’elles fournissent. C’est le moment de lancer des chantiers sur la stratégie de données first-party, de revoir ses KPIs et de commencer à expérimenter avec les nouvelles approches pour ne pas être pris au dépourvu lorsque les cookies tiers disparaîtront complètement de Chrome.
‘La première chose qu’ils doivent faire, c’est créer des équipes en interne qui vont être capable de jongler avec plusieurs plateformes, qui vont aller regarder ce qui se passe dans la privacy Sandbox, qui vont regarder ce qui se passe avec les identifiant uniques, avec les forces party cookies… et pouvoir ben trouver des moyens en interne du faire du du du sens de tout ça.’




