Logo de l'épisode #22 : Le Drive to Store l'an 1 après 2018 du podcast Bannouze : Le podcast du marketing digital !

#22 : Le Drive to Store l’an 1 après 2018

Épisode diffusé le 15 juillet 2019 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

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Le Drive to Store, du buzzword au levier marketing incontournable

Le Drive to Store a été le « buzzword de l’année 2018 ». D’abord perçu comme le remède miracle pour les marketeurs cherchant à reconnecter le digital et le physique, ce concept a rapidement fait face à des défis majeurs, notamment en matière de protection de la vie privée. Comment ce secteur a-t-il évolué ? Quels sont aujourd’hui les véritables enjeux et, plus concrètement, comment lance-t-on une campagne efficace pour générer du trafic en point de vente ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons Olivier Mannon Serin, CEO et co-fondateur de Fits Up, une société spécialisée dans le Drive to Store. Fort de huit ans d’expérience, il nous livre une analyse à tête reposée de cet univers. « J’ai fondé la boîte en sortie d’école », explique-t-il, « dans l’ambition justement d’utiliser le mobile pour réconcilier les univers online et offline, arriver à joindre ces deux univers qui sont souvent disjoints. » Cette ambition l’a mené au cœur de la publicité mobile pour le retail, un secteur en pleine effervescence.

Qu’est-ce que le Drive to Store ? Une définition claire pour les marketeurs

Le terme « Drive to Store » est sur toutes les lèvres, mais sa signification reste parfois floue. Olivier Mannon Serin nous propose une définition précise : « Moi, je le définirais comme toute action de communication qui vise à générer du trafic sur le magasin. » Si certains acteurs, comme les « store locators », utilisent ce terme, il est plus communément associé à la publicité, qu’elle soit mobile ou non, dont le but est de faire venir les consommateurs en boutique.

L’enjeu est de taille : il s’agit de transformer une interaction digitale en une visite physique. C’est la promesse fondamentale de la publicité géolocalisée appliquée au retail, un pont entre l’écran du smartphone et la porte du magasin. « Plus communément le Drive to Store, c’est de la publicité mobile ou pas mais qui permettent de faire revenir du monde en point de vente », résume Olivier.

2018, l’année charnière du Drive to Store face au RGPD

L’année 2018 a marqué un tournant pour le secteur. La puissance du Drive to Store repose sur sa capacité à utiliser les données de localisation, une information considérée comme personnelle lorsqu’elle est associée à un identifiant publicitaire. « C’est ce qui fait la richesse finalement de ces campagnes de communication pour les enseignes », précise Olivier. Cependant, cette richesse a un prix : la conformité réglementaire.

L’entrée en vigueur du RGPD le 25 mai 2018 a rebattu les cartes. « 2018 ça a été une année charnière sur les sujets de privacy », se souvient-il. La CNIL a décidé de se pencher de près sur le secteur, et Fits Up, ainsi que trois autres acteurs, a fait l’objet d’une mise en demeure. Le reproche principal portait sur la manière de collecter le consentement de l’utilisateur. « Ce qui nous était reproché, c’était la manière dont on récoltait le consentement de l’utilisateur pour accéder à ses données de localisation. »

Cette période, bien que difficile, a eu un effet structurant majeur. Elle a poussé les entreprises à renforcer leurs processus et a, paradoxalement, mis en lumière l’expertise française. « Ça nous a placé un peu sous le feu des projecteurs même au niveau international. On a des acteurs américains maintenant qui nous contactent en mode comment est-ce qu’on fait pour être GDPR compliance. » Cet épisode a solidifié la crédibilité des acteurs français sur les questions de RGPD et données de géolocalisation, rassurant des annonceurs initialement devenus frileux.

Le marché du marketing local : chiffres clés et opportunités

Pour comprendre l’importance du Drive to Store, il faut saisir l’ampleur du marché qu’il adresse. « Le marché au global de la communication locale […] est d’environ 10 milliards d’euros d’investissement par an sur le marché français », révèle Olivier. Une part écrasante de ce budget reste allouée au offline, notamment au papier. « La part du digital est inférieure à ce qui se fait en moyenne, autour d’une vingtaine de % d’investissement en digital. »

Cette situation représente une formidable opportunité de croissance. Le besoin des enseignes de digitaliser leur communication locale n’a pas disparu, bien au contraire. Le mobile reste le canal roi, offrant une capacité de ciblage inégalée. « Le mobile apporte […] cette capacité de géolocalisation d’être capable de diffuser une publicité digitale uniquement à des personnes qui se trouvent à proximité géographique du point de vente de destination. » C’est une innovation majeure par rapport aux campagnes nationales qui génèrent beaucoup de déperdition pour les réseaux de magasins.

Les acteurs spécialisés comme Fits Up gèrent un chiffre d’affaires cumulé de « quelques dizaines de millions d’euros », accompagnant « quelques centaines d’enseignes ». Cela montre qu’il existe une marge de progression importante pour capter une plus grande part de ces 10 milliards d’euros.

Comment mesurer le trafic en point de vente ? Les secrets technologiques

La question fondamentale pour tout annonceur est : ma campagne a-t-elle réellement ramené du monde en magasin ? Pour y répondre, il faut une technologie de mesure de trafic en magasin extrêmement précise. C’est le cœur du réacteur du Drive to Store.

Les limites du GPS pour une mesure précise

La première technologie qui vient à l’esprit est le GPS, présent dans tous les smartphones. Pourtant, elle se révèle rapidement insuffisante. Olivier Mannon Serin est catégorique : « Le constat qu’on a fait au début de la boîte, c’est que le GPS avait un niveau d’imprécision au-delà duquel on ne pouvait rien faire. » En rase campagne, la précision est d’environ 10 mètres. Mais en ville, l’environnement est plus complexe. « Le niveau de précision en ville est plutôt de l’ordre de 25 à 100 m. »

Une marge d’erreur de 50 mètres dans une rue commerçante ou un centre commercial est rédhibitoire. « Ça peut être un certain nombre de points de vente voire même des points de vente concurrents. » Il était donc impératif de développer des solutions plus fiables pour garantir la validité de la mesure du trafic en point de vente.

WiFi, iBeacon : des technologies pour une précision chirurgicale

Pour surmonter les limites du GPS, Fits Up s’est tourné vers d’autres technologies. « Dès le début de Fitz Up, on a travaillé à développer des technologies qui ont très vite été basées sur le WiFi. » Le principe est simple : un smartphone émet en permanence des signaux WiFi. En installant des balises dans les magasins, il devient possible de le détecter avec une grande précision.

Comment cela fonctionne-t-il concrètement ? « On peut installer des petites balises qui font la taille d’un smartphone qui se branchent sur une prise électrique dans le magasin. » Discrètement placées dans les faux plafonds ou la PLV, ces balises détectent les signaux émis par les téléphones à proximité. « On a une pression de l’ordre de quelques mètres avec ce type de technologie. » Cette précision permet de certifier qu’un utilisateur est bien entré dans le magasin cible et non chez le voisin. C’est cette rigueur dans la mesure qui donne toute sa valeur à une campagne Drive to Store.

Lancer et optimiser une campagne Drive to Store : le guide pratique

Savoir comment lancer une campagne Drive to Store est essentiel pour tout retailer. Le processus est structuré et repose sur une collaboration étroite entre l’annonceur et l’expert.

Les étapes clés pour démarrer votre campagne

La première étape est de définir le périmètre. Olivier explique : « La première des questions qu’on lui pose, c’est d’abord quel est le périmètre sur lequel toi marque ou enseigne tu veux opérer. » S’agit-il de tout le réseau, ou de quelques magasins spécifiques à Rouen, Marseille et Lille ? Ensuite vient la définition de l’offre et la création des visuels publicitaires. Une fois ces éléments validés, la diffusion peut commencer. « Nous on s’occupe de diffuser pour le compte de l’enseigne […] la campagne en programmatique mobile », c’est-à-dire d’afficher la publicité dans les applications les plus pertinentes.

Mesurer l’efficacité au-delà du clic : la visite en magasin comme KPI ultime

Contrairement à de nombreuses plateformes digitales qui optimisent sur le clic, les spécialistes du Drive to Store se concentrent sur la visite. « La plupart des plateformes digitales quand vous achetez de la pub aujourd’hui, elles optimisent le clic. Et nous on optimise la visite là-dessus. » L’expérience a montré que le clic n’est pas un indicateur fiable de l’intention de visite. « On s’est rendu compte que l’événement de cliquer sur une bannière n’augmentait pas les chances […] qu’un utilisateur se déplace ou non en point de vente. »

La véritable mesure de la performance est donc l’incrément de visite en magasin. Pour le calculer, une méthode rigoureuse est employée : « On est capable de créer des sortes de population de témoins qu’on expose pas à la campagne mais dont on regarde si elle se déplace dans le point de vente. » Si le groupe témoin a un taux de visite de 0,5% et que le groupe exposé à la publicité atteint 1%, on peut mesurer précisément l’apport de la campagne. C’est ce qui permet de « rassurer le client qui se dit ‘bon ben j’investis mais c’est pour une bonne raison, c’est que ça augmente la visite des personnes qui voient la pub’. »

Comment cibler de nouveaux clients et pas seulement les habitués ?

Une préoccupation majeure des marques est d’acquérir de nouveaux clients. Le Drive to Store offre des solutions de ciblage publicitaire local très fines pour y parvenir. « Si on sait qui vient dans le point de vente, on peut tout simplement les exclure d’éventuelles campagnes de conquête pour aller chercher que du nouveau trafic », explique Olivier. En utilisant les données de géolocalisation (GPS et WiFi), il est possible de segmenter les audiences selon leurs habitudes de visite, par exemple en ciblant les clients d’un concurrent ou ceux qui ne sont jamais venus dans le magasin de l’annonceur.

Les métriques à suivre et les leviers d’optimisation d’une campagne

Pour piloter une campagne, il faut se concentrer sur les bonnes métriques. « La principale métrique à suivre, c’est la visite », insiste Olivier. Il faut donc surveiller le taux de visite (le pourcentage de personnes exposées qui se rendent en magasin) et l’incrémentalité. Mais derrière ces indicateurs clés, l’optimisation de la campagne marketing local est un art complexe.

« Chez Fitz Up, on a développé des algos par exemple qui optimisent sur 60 critères. » Ces critères sont variés : ils incluent des éléments classiques comme l’application où la publicité est diffusée ou le format de la créa, mais aussi des données de localisation beaucoup plus fines. « Quelle est la distance du smartphone à qui j’affiche la publicité par rapport au magasin de destination ? Quelle est la typologie du magasin de destination ? » En effet, il est bien plus facile de faire venir quelqu’un dans un centre commercial que dans une concession automobile. C’est en ajustant en permanence ces multiples paramètres que l’on maximise le retour sur investissement.

Étude de cas et ROI : que peut-on vraiment attendre d’une campagne Drive to Store ?

Les résultats peuvent être impressionnants. Olivier cite une campagne pour Thomas Cook : « On a réussi à faire rentrer pas mal de monde dans ses agences de voyage […] c’était plusieurs dizaines de visites par agence sur une période de deux ou trois semaines. » Ce chiffre peut paraître modeste, mais « faire rentrer du monde dans une agence de voyage au 21e siècle, c’est cavalier », souligne-t-il avec fierté.

Le coût par visite en magasin est cependant très variable. « Il y a des industries dans lesquelles, par exemple dans le vêtement, dans les centres commerciaux où on arrive à faire déplacer des gens pour 1 € ou 2 € d’investissement média. » À l’opposé, le secteur du luxe est beaucoup plus exigeant. « Le plus compliqué étant par exemple l’univers de l’automobile haut de gamme où on peut être amené à dépenser 150-200 € pour faire rentrer quelqu’un dans une concession d’une marque haute de gamme. » Ces chiffres rappellent une vérité fondamentale du retail : la publicité ne crée pas le besoin. « Si les gens n’ont pas prévu d’acheter une Porsche, on ne les fera pas venir. »

L’avenir du Drive to Store : consolidation et concurrence des géants du web

Comment le marché va-t-il évoluer ? Olivier Mannon Serin note une forte intensité concurrentielle en France. « Il y a énormément d’acteurs sur un marché qui est pas si gros. » Il anticipe donc une nécessaire consolidation « pour faire émerger un leader », afin d’éviter que les principaux bénéficiaires ne soient les géants américains.

La concurrence de Google et Facebook sur le Drive to Store est une réalité. Leur principal atout ? « Ce sont des carrefours d’audience. » Cependant, ils ont des faiblesses. Leurs solutions sont souvent moins spécialisées pour les besoins spécifiques du retail, et les enseignes françaises sont prudentes à l’idée de partager leurs données avec des acteurs qui pourraient les cannibaliser. « On est indépendant, on va pas prendre votre donnée pour vous la cannibaliser mais pour la magnifier », argumente Olivier pour souligner l’avantage des acteurs français.

Ces derniers ont développé une expertise technologique pointue sur le marketing multi-local et offrent un niveau d’accompagnement que les GAFAM ne proposent pas aux PME. Il y a donc une place à prendre, mais la vigilance reste de mise face à la puissance de frappe de ces mastodontes.

FAQ sur le Drive to Store

Qu’est-ce que le Drive to Store exactement ?

Le Drive to Store désigne toute action de communication, généralement une publicité digitale sur mobile, qui a pour objectif principal de faire venir un consommateur dans un point de vente physique. C’est une stratégie qui vise à créer un pont entre le monde en ligne et le monde hors ligne.

« Moi je le définirais comme toute action de communication qui vise à bah générer du trafic sur le magasin, de d’arriver du trafic sur sur le magasin. » – Olivier Mannon Serin

Comment la réglementation RGPD a-t-elle impacté les campagnes Drive to Store ?

Le RGPD, entré en vigueur en 2018, a profondément impacté le Drive to Store en renforçant les exigences sur la collecte du consentement pour l’utilisation des données de localisation, qui sont considérées comme des données personnelles. Cela a obligé les acteurs du secteur à revoir leurs pratiques et à devenir des experts de la conformité, ce qui a structuré le marché.

« Ce qui nous était reproché, c’était la manière dont on récoltait le consentement de l’utilisateur pour accéder à ses données de localisation, à ses données qui sont considérées comme personnelles. » – Olivier Mannon Serin

Pourquoi le GPS n’est-il pas suffisant pour mesurer les visites en magasin ?

Le GPS manque de précision en environnement urbain, avec une marge d’erreur pouvant aller de 25 à 100 mètres. Cette imprécision ne permet pas de déterminer avec certitude si un utilisateur est entré dans un magasin spécifique ou dans un commerce voisin, ce qui rend la mesure de l’efficacité de la campagne peu fiable.

« 50 m dans une rue marchande ou dans un centre commercial, ça peut être un certain nombre de points de vente voir même des points de vente concurrents. Et donc il a fallu qu’on développe des technologies qui soient beaucoup plus précises. » – Olivier Mannon Serin

Comment mesure-t-on l’efficacité réelle d’une campagne Drive to Store ?

L’efficacité réelle se mesure par l’incrément de visites. On compare le taux de visite d’un groupe d’utilisateurs exposé à la publicité avec celui d’un groupe témoin similaire qui ne l’a pas vue. La différence entre les deux taux représente le nombre de visites additionnelles directement générées par la campagne.

« On est capable de créer des sortes de population de témoins qu’on expose pas à la campagne […] et puis on voit que les gens qui sont exposés à la campagne eux se déplacent à 1 % et ça nous permet donc de mesurer l’incrémental de la campagne. » – Olivier Mannon Serin

Est-il possible de cibler uniquement de nouveaux clients avec le Drive to Store ?

Oui, c’est l’un des grands avantages de cette technologie. En se basant sur les données de fréquentation d’un point de vente (collectées via WiFi ou GPS), il est possible d’exclure les clients existants d’une campagne pour se concentrer exclusivement sur l’acquisition de nouveaux visiteurs, par exemple en ciblant les clients des concurrents.

« Si on sait qui vient dans le point de vente, on peut tout simplement les exclure d’éventuelles campagnes de conquête pour aller chercher que du nouveau trafic. » – Olivier Mannon Serin

Quels sont les indicateurs clés (KPIs) à suivre pour une campagne ?

Le KPI principal est la visite en magasin. Il faut donc suivre attentivement le nombre total de visites générées, le taux de visite (pourcentage de personnes exposées ayant visité le magasin) et, pour une analyse plus fine, le coût par visite et l’incrément de visites par rapport à un groupe témoin.

« Moi je dirais que la principale métrique à suivre, c’est la visite puisque le principal but du Drive to Store c’est de faire venir du monde. Donc il faut regarder la visite. » – Olivier Mannon Serin

Combien coûte une visite générée par une campagne Drive to Store ?

Le coût par visite varie considérablement en fonction du secteur d’activité. Il peut être très bas, de l’ordre de 1 à 2 euros pour des secteurs à fort trafic comme l’habillement, et atteindre des montants bien plus élevés, jusqu’à 150 ou 200 euros, pour des achats très impliquants comme une voiture de luxe.

« Dans le vêtement, dans les centres commerciaux où on arrive à faire déplacer des gens pour 1 € ou 2 € d’investissement média et puis il y a des univers où c’est beaucoup plus complexe […] on peut être amené à dépenser 150-200 € pour faire rentrer quelqu’un dans une concession d’une marque haute de gamme. » – Olivier Mannon Serin

Les acteurs spécialisés peuvent-ils concurrencer Google et Facebook ?

Oui, bien que Google et Facebook soient des carrefours d’audience massifs, les acteurs spécialisés ont des avantages clés. Ils proposent des technologies plus pointues et adaptées aux besoins spécifiques du retail, une expertise approfondie du marketing local et offrent aux enseignes des garanties de conformité RGPD et d’indépendance quant à l’utilisation de leurs données.

« En France notamment bah les enseignes sont prudentes quant à l’idée de partager des données avec ces acteurs américains. […] On a quand même développé énormément de technologies qui sont propres aux besoins de l’enseigne. » – Olivier Mannon Serin


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