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#103 > Marketing Digital > Comment gérer le marketing d’une boite en hypercroissance ?

Épisode diffusé le 16 octobre 2024 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

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Comment Gérer le Marketing d’une Boîte en Hypercroissance : Mon Retour d’Expérience Brut chez Partoo

L’hypercroissance. Le mot est sur toutes les lèvres dans l’écosystème startup. C’est le Graal, la validation ultime que votre produit a trouvé son marché. On imagine une fusée qui décolle, une courbe qui grimpe à la verticale, l’excitation à chaque nouvel objectif pulvérisé. Et c’est vrai, il y a de ça. Comme je le confiais, ‘c’était ma première expérience en start-up, tu es pas mécontent de vivre une phase hypercroissance’. Passer de 20 à 400 employés et de 2 à 20 millions d’euros d’ARR en seulement quatre ans, c’est une aventure grisante. Mais derrière l’euphorie se cache une réalité beaucoup plus complexe, une tension permanente. C’est comme construire les ailes de l’avion alors qu’il est déjà en plein vol. Chaque jour, chaque semaine, ce qui fonctionnait hier est déjà obsolète. Les processus craquent, les équipes s’épuisent et la stratégie doit être réinventée en permanence. La question n’est plus seulement ‘comment générer de la croissance ?’, mais ‘comment survivre à cette croissance sans que tout implose ?’. Pendant quatre ans, en tant que CMO de Partoo, j’ai été au cœur de ce réacteur. J’ai construit le département marketing de zéro, seul au départ, pour finir par piloter une machine internationale. J’ai fait des choix qui se sont avérés payants. J’ai aussi commis des erreurs, des erreurs qui m’ont coûté cher et qui, avec le recul, auraient pu être évitées. C’est cette histoire, sans filtre, que je veux vous raconter. Pas une théorie marketing lue dans un livre, mais les leçons apprises sur le terrain, dans la fatigue et l’excitation. Nous allons voir ensemble comment bâtir une équipe solide, comment dompter le chaos avec des processus, et comment identifier les actions qui comptent vraiment quand tout s’accélère.

La Leçon la Plus Dure : Bâtir les Fondations Humaines de l’Hypercroissance

Lorsqu’on pense à scaler le marketing, on pense immédiatement aux outils, aux campagnes, aux budgets. On pense ‘actions’. Pourtant, ma plus grande erreur, celle qui me hante encore un peu, ne concerne rien de tout cela. Elle est profondément humaine. La véritable fondation d’un département marketing capable de soutenir une croissance exponentielle, ce sont les personnes qui le composent. Et la manière dont on assemble cette équipe dès le départ détermine la hauteur que l’on pourra atteindre. J’ai reçu un conseil que beaucoup de mes pairs m’ont donné, un conseil que j’ai entendu, compris intellectuellement, mais que je n’ai pas suivi. Et je l’ai regretté amèrement. Ce conseil était simple : ‘il faut que tu recrutes des experts. Le marketing est un département d’expertise, il te faut des experts’. C’était la clé, et en choisissant une autre voie, j’ai involontairement commencé à construire ce que j’appelle aujourd’hui ‘une dette marketing’. C’est une dette invisible au début, masquée par les bons résultats et l’énergie de l’équipe, mais qui finit toujours par vous rattraper. Elle se manifeste par des plafonds de verre que l’on atteint sur certains canaux, par un manque de profondeur stratégique, par une structure qui devient fragile à mesure que la complexité augmente. C’est la différence entre une croissance rapide et une croissance durable. Et tout part des premières briques que l’on pose : les premiers recrutements.

L’Erreur Contre-Intuitive : Pourquoi j’aurais Dû Recruter des Experts d’Abord

Au début, la logique semblait implacable. Le budget était limité, les besoins immenses et la culture startup valorisait l’agilité et la polyvalence. J’ai donc fait ce que beaucoup font : j’ai recruté des profils juniors, des stagiaires en fin d’études, des personnes avec une première expérience. Des talents brillants, motivés, qui ont abattu un travail colossal. Et sur le court terme, ça a marché. Les actions étaient menées, les objectifs atteints. Mais je me suis voilé la face. Je me suis dit que le manque de budget était une excuse valable. Avec le recul, je réalise que ‘j’aurais dû à l’époque me battre et convaincre mon CEO que non, il fallait des personnes plus séniors, des personnes expérimentées’. Pourquoi ? Parce qu’un expert n’apporte pas seulement sa capacité d’exécution. Il apporte une vision, un recul stratégique, la connaissance des pièges à éviter. Sur un sujet comme le SEO, par exemple, nous avons eu de bons résultats au début car nous partions de zéro. Mais après deux ans, nous avons réalisé que nous avions pris ‘un train de retard’. Nous avions fait des choses basiques qui fonctionnaient, mais nous n’avions pas construit les fondations techniques et sémantiques profondes pour dominer notre marché sur le long terme. Un expert SEO aurait vu cela dès le premier jour. Cette ‘dette marketing’, c’est l’accumulation de toutes ces fondations fragiles. C’est ce sentiment, après quatre ans de travail acharné, de se dire : ‘merde, j’aurais dû voilà, bâtir quelque chose de plus solide’. C’est réaliser qu’avec les bonnes personnes dès le départ, nous n’aurions pas simplement été ‘très efficaces’, nous aurions pu être à un tout autre niveau.

Le Piège du Management Direct : Quand le Manager Devient le Goulot d’Étranglement

L’autre facette de cette erreur de structuration est la charge managériale. En recrutant principalement des profils juniors, je me suis retrouvé avec une équipe qui, logiquement, demandait plus d’accompagnement, plus de formation, plus de validation. À un moment, je me suis retrouvé avec ‘peut-être je crois 7 ou 8 personnes en direct, c’est trop. En plus des personnes juniors, donc elles vont te prendre un peu plus de temps’. Je suis devenu le goulot d’étranglement de mon propre département. Chaque décision, chaque validation, chaque question devait passer par moi. Mon agenda était une succession de points de suivi, ne me laissant plus le temps de prendre de la hauteur, de penser à la stratégie à six mois, à un an. Je m’épuisais dans l’opérationnel, et l’équipe, malgré toute sa bonne volonté, ne pouvait pas atteindre son plein potentiel sans un encadrement plus spécialisé. La solution, que j’ai mise en place bien trop tard, était le mid-management. Recruter des ‘Head of’ ou des ‘Team Leads’ pour prendre en charge des pôles d’expertise (acquisition, content, etc.). Ces managers intermédiaires ne sont pas un simple luxe de grande entreprise ; ils sont une infrastructure vitale en hypercroissance. Ils assurent la montée en compétence des équipes, garantissent la qualité de l’exécution au quotidien et libèrent le CMO pour qu’il puisse se concentrer sur les enjeux stratégiques, l’alignement avec les autres départements et la vision à long terme. Retarder leur arrivée, c’est accepter de naviguer à vue et de risquer le burn-out, pour soi et pour son équipe.

Avoir les bonnes personnes est la première étape, mais ce n’est que la moitié de l’équation. Dans le tourbillon de l’hypercroissance, même la meilleure équipe du monde peut se disperser et s’épuiser si elle n’a pas un cadre clair. La croissance génère du bruit, des idées nouvelles chaque jour, des sollicitations de tous les départements. Sans une structure solide, cette énergie se transforme en chaos. La question suivante était donc : comment canaliser cette formidable puissance pour qu’elle nous propulse dans la même direction, sans perdre en vitesse ni en qualité ? La réponse se trouve dans la mise en place de processus et de frameworks, des mots qui peuvent faire peur dans une startup, mais qui sont en réalité les garde-fous de la performance à grande échelle.

Dompter le Chaos : L’Art de Mettre en Place des Processus qui Scalent

Au début, on se méfie des ‘process’. On associe ça à la bureaucratie, à la lenteur des grands groupes. On veut rester agiles, flexibles. Mais l’hypercroissance vous apprend très vite une chose : l’absence de processus ne crée pas de la flexibilité, elle crée de l’anarchie. Quand on est 20, tout le monde peut se parler et s’aligner autour d’un café. Quand on passe à 150, puis 300, cette communication informelle devient impossible. Les informations se perdent, les priorités se contredisent, et la qualité d’exécution devient hétérogène. J’ai dû apprendre à faire quelque chose dont ‘j’étais pas très fan, mais il faut être conscient que ça apporte énormément, c’est mettre en place des process, des templates, des playbooks, bref, du cadrage’. Loin d’être un frein, ce cadrage est devenu notre principal accélérateur. Il a permis de transformer l’énergie brute de l’équipe en une force cohérente et prévisible. Ce travail de structuration s’est articulé autour de deux piliers fondamentaux : définir une direction claire pour tout le monde, puis documenter les meilleures manières de l’atteindre.

La Boussole de l’Équipe : Aligner Tout le Monde avec les OKRs

Le plus grand ennemi de la performance en hypercroissance, c’est la dispersion. ‘Qui dit plus de monde, dit plus d’idées et là ça part dans tous les sens. Ça peut partir dans tous les sens, ça peut être le bordel’. Le commercial vous demande de faire un salon, le produit veut une campagne pour une nouvelle feature, le CEO a lu un article sur un nouveau canal à tester… Si vous dites oui à tout, vous ne faites rien de bien. La dispersion est un poison lent. Pour y remédier, nous avons mis en place une discipline de fer grâce à la méthode des OKRs (Objectives and Key Results). L’idée est simple mais redoutablement efficace. D’abord, on s’assure d’un alignement au niveau de la direction : quels sont les 3 objectifs prioritaires de l’entreprise pour le trimestre ? À partir de là, chaque département, y compris le marketing, définit ses propres OKRs qui contribuent directement à ces objectifs globaux. Par exemple : ‘on a max trois objectifs et quatre actions clés par objectif’. Cela donne un cadre limpide. Ce n’est pas une to-do list, mais une ligne directrice. Chaque membre de l’équipe sait que son travail doit servir ces priorités. Si une nouvelle idée arrive, la première question est : ‘Est-ce que cela sert l’un de nos OKRs ?’. Si la réponse est non, l’idée est mise de côté. Cela permet de dire ‘non’ de manière objective et de protéger l’équipe des distractions, tout en garantissant que chaque effort marketing est aligné avec la stratégie globale de l’entreprise.

Le Secret de la Duplication : Créer des Playbooks pour une Exécution d’Excellence

Une fois la direction claire, il faut s’assurer que l’exécution soit impeccable, et ce, de manière constante, peu importe qui réalise la tâche. C’est là que la documentation devient votre meilleure amie. Pour chaque action récurrente – organiser un webinar, lancer une campagne d’emailing, publier un article de blog – nous avons créé des playbooks détaillés. Ce n’était pas juste une checklist, mais un véritable guide ‘en mode pas à pas avec des le côté tutoriel et le côté aussi best practice, retro planning’. Tout était centralisé dans notre outil de gestion de projet, Monday. L’impact est triple. Premièrement, l’onboarding est fulgurant. Un nouvel arrivant n’a pas besoin de deux heures de formation pour organiser son premier webinar. On lui dit : ‘tiens, prends ce tuto, prends ce playbook et vas-y’. Deuxièmement, cela garantit un niveau de qualité constant. On évite le piège où, en tant que manager, on regarde les choses de loin en se disant ‘Oui, bon, ça a l’air d’aller, ça fait le taf’. Ce laxisme est dangereux, car les petites erreurs se répètent, se propagent et deviennent de mauvaises habitudes. Le playbook assure que les standards d’excellence sont respectés à chaque fois. Enfin, et c’est le plus important, cela libère l’esprit. En automatisant la réflexion sur le ‘comment’, on peut consacrer plus d’énergie au ‘quoi’ et au ‘pourquoi’, c’est-à-dire à la stratégie et à la créativité.

Avec une équipe mieux structurée et des processus clairs pour guider l’action, il nous fallait l’équipement adéquat. Le choix des outils est une étape critique dans la phase de scaling. Trop peu d’outils, et vous vous épuisez dans des tâches manuelles. Trop d’outils, et vous créez une complexité inutile, un ‘sur-outillage’ coûteux et contre-productif. Notre approche a été pragmatique : commencer simple, prouver la valeur d’une action manuellement, puis investir dans un outil pour automatiser et passer à l’échelle ce qui fonctionne déjà. C’est une philosophie qui nous a permis de construire une ‘MarTech stack’ cohérente, sans nous laisser séduire par le dernier gadget à la mode.

La Boîte à Outils du CMO : Choisir et Maîtriser son Arsenal Technologique

La technologie marketing est un univers fascinant et dangereux. Il existe un outil pour tout, et la tentation est grande de croire qu’un nouveau logiciel va résoudre tous vos problèmes. L’hypercroissance exacerbe cette tentation : on cherche des solutions rapides pour gérer la complexité grandissante. Notre parcours avec les outils a été fait d’apprentissages, parfois dans la douleur. Nous avons eu de grands succès en adoptant des plateformes qui ont réellement décuplé notre efficacité, mais nous sommes aussi tombés dans le piège classique de l’accumulation. J’ai appris qu’un bon outil est celui qui vient résoudre un problème existant et prouvé, pas celui qui promet de créer une nouvelle opportunité sortie de nulle part. La gestion de la ‘stack’ technologique est donc un exercice d’équilibre constant entre l’ambition de scaler et la discipline de rester focalisé sur l’essentiel. Notre philosophie s’est affinée autour de deux principes : automatiser ce qui a déjà fait ses preuves et savoir couper sans pitié ce qui n’est pas utilisé.

L’Automatisation Intelligente : De l’Artisanat à l’Industrie avec Hubspot

Notre plus grand succès en matière d’outillage est venu de l’automatisation de nos campagnes d’emailing. Au départ, tout était fait manuellement. Nous avions prouvé que le nurturing de notre base de contacts était un levier extrêmement puissant. ‘Ça fonctionnait tellement bien qu’un moment j’ai pu obtenir des budgets pour aller plus loin’. La logique était saine : n’automatisez que ce qui fonctionne déjà. Investir dans un outil comme Hubspot sans avoir validé la pertinence du canal aurait été une perte de temps et d’argent. Notre implémentation a été progressive, ce qui a été, je pense, la clé du succès. Nous n’avons pas essayé de construire une usine à gaz dès le premier jour. La première phase a été simple : ‘on a juste dupliqué l’existant avant de rentrer dans la machine avec des tonnes de campagnes’. Une fois cette base stable, nous avons ajouté des couches de complexité tous les six ou huit mois : un scoring de leads plus fin, des workflows de personnalisation plus poussés, de nouvelles segmentations. Cette approche par étapes nous a permis de maîtriser l’outil, de former l’équipe progressivement et de démontrer la valeur à chaque étape, justifiant ainsi l’investissement continu. C’est le passage maîtrisé d’un atelier artisanal performant à une ligne de production industrielle efficace.

Le Fléau du Sur-Outillage : Savoir Abandonner un Outil Inutile

À l’inverse, nous avons aussi connu l’échec du sur-outillage. Poussés par l’envie de bien faire et de couvrir tous les angles, nous avons souscrit à des outils qui semblaient prometteurs sur le papier. Mais la réalité est souvent différente. Un outil ne vaut que par son adoption et son utilisation réelle par les équipes. Nous nous sommes retrouvés avec des licences actives pour des plateformes que personne n’utilisait vraiment. C’est une erreur classique : ‘on s’est un peu suroutillé. Et puis au bout de 6 mois tu te rends compte et alors quelqu’un a une analyse à me sortir, qui l’utilise ? Ouais. OK, allez hop, on coupe’. La leçon est double. D’abord, il faut être impitoyable dans l’évaluation du ROI des outils. Si après quelques mois, personne ne peut démontrer un impact clair et chiffré, il faut avoir le courage de couper. Un outil inutilisé n’est pas seulement une perte d’argent ; c’est aussi une charge mentale, une source de données potentiellement obsolètes et une distraction. Ensuite, il faut s’interroger sur la maturité de l’équipe. Parfois, un outil n’est pas utilisé non pas parce qu’il est mauvais, mais parce que ‘on est peut-être pas assez mature ou pas assez bien organisé ou qu’on n’aurait pas encore l’intérêt pour X raisons’. Reconnaître cela, c’est aussi une forme de sagesse stratégique.

Une fois l’équipe, les processus et les outils en place, le cœur du réacteur peut enfin tourner à plein régime. La question devient : sur quels boutons appuyer pour obtenir un maximum de puissance ? En hypercroissance, on n’a pas le temps de tout tester. Il faut identifier rapidement les 20% d’actions qui génèrent 80% des résultats et concentrer toute sa puissance de feu dessus. Pour nous, deux leviers se sont clairement détachés du lot. Et notre stratégie a été de les pousser jusqu’à leurs limites, en explorant toutes les manières de les optimiser, de les dupliquer et de les recycler.

Double-Down : Identifier et Scaler les Actions Marketing à Plus Fort Impact

Dans un contexte où tout va très vite, la tentation est grande de lancer constamment de nouveaux projets, de tester le dernier canal à la mode. C’est une course sans fin qui mène souvent à l’épuisement et à la médiocrité. J’ai appris qu’il était bien plus puissant de faire une chose et de la faire exceptionnellement bien, plutôt que d’en faire dix de manière moyenne. Ma philosophie est devenue : ‘plutôt que de lancer trop de nouveaux projets, déjà pose-toi la question de est-ce que ce que tu fais actuellement, est-ce que tu penses avoir atteint le maximum de son potentiel ?’. Pour nous, qui ciblions des entreprises mid-market et enterprise avec des cycles de vente longs, deux actions se sont révélées extraordinairement efficaces : les campagnes de nurturing et les webinars. Au lieu de nous disperser, nous avons décidé de devenir les meilleurs sur ces deux terrains. Nous les avons analysés, déconstruits, et avons cherché par tous les moyens à en extraire chaque goutte de valeur.

Le Nurturing : Moteur de Croissance sur les Cycles de Vente Longs

Nous avions un trésor : une base de données de près de 40 000 contacts, acquise au fil du temps par la prospection des commerciaux et des actions de scrapping. Sur des cycles de vente pouvant aller de 3 mois à un an, laisser ces contacts dormir était un crime. Le nurturing, c’est l’art de maintenir une relation, d’éduquer sa cible et de rester présent à l’esprit jusqu’au moment où le besoin se déclare. Nos campagnes de nurturing ont ‘fonctionné extrêmement bien’. Au début, c’était artisanal. Puis, avec Hubspot, nous avons industrialisé le processus. Mais le scaling ne s’est pas arrêté à l’outil. Nous avons cherché à aller plus loin. Comment ? En segmentant de plus en plus finement notre base (par secteur d’activité, par taille d’entreprise, par maturité), en personnalisant les messages, en testant différents formats de contenu. Chaque campagne devenait une occasion d’apprendre et d’améliorer la suivante. C’était un travail de fond, moins visible qu’une grande campagne de communication, mais qui a alimenté notre pipeline de manière constante et prévisible, devenant l’un des piliers de notre croissance.

Le Recyclage de Contenu : Comment un Webinar Devient Dix Actifs Marketing

Les webinars ont été notre deuxième levier majeur, surtout pendant la période du Covid, mais leur efficacité a perduré bien après. Là encore, au lieu de simplement enchaîner les événements, nous avons réfléchi à comment maximiser la valeur de chaque heure passée en direct. La clé a été le recyclage systématique du contenu. Un webinar n’était jamais une fin en soi ; c’était le début d’une cascade de contenus. Chez nous, un webinar était entièrement scripté, ce qui générait ‘généralement 8 à 10 pages de Word’. Ce script était la matière première. De là, nous le transformions en un ebook designé de 15 pages. Ensuite, nous le découpions en 5 ou 6 articles de blog, chacun approfondissant un point spécifique. Ces articles généraient des posts pour LinkedIn. Les extraits vidéo les plus percutants étaient montés en capsules pour les réseaux sociaux. Et bien sûr, l’ebook et les articles venaient nourrir nos campagnes de nurturing. En faisant cela, on répond à une réalité simple : tout le monde ne consomme pas l’information de la même manière. ‘On n’a pas tous l’appétence pour le même format, il y en a qui vont préféré le podcast, il y en a qui vont préféré l’écrit’. En déclinant un contenu source sur de multiples formats, on maximise sa portée et on amortit l’effort de création de manière spectaculaire. C’est cesser de penser en ‘sprints’ de production de contenu pour adopter une logique d’actifs durables.

Ces succès en France nous ont naturellement poussés à regarder au-delà de nos frontières. L’internationalisation est une étape clé de l’hypercroissance, mais aussi l’une des plus périlleuses. L’erreur serait de croire qu’il suffit de traduire son site web pour conquérir un nouveau marché. Chaque pays a sa culture, ses codes, ses spécificités. Notre approche a été prudente, pragmatique, et surtout, centrée sur l’humain, en comprenant que la clé du succès à l’étranger résidait dans la finesse de la compréhension locale.

Conquérir le Monde : Une Stratégie d’Internationalisation Pragmathique et Efficace

L’expansion internationale est souvent fantasmée. On imagine de grandes inaugurations de bureaux, des lancements en grande pompe. La réalité, du moins pour une entreprise autofinancée comme Partoo, est bien plus mesurée. Chaque euro investi doit avoir un retour sur investissement. On ne peut pas se permettre de se lancer à l’aveugle. Notre stratégie a donc été basée sur un principe de validation progressive. Nous n’avons jamais investi massivement dans le marketing d’un pays avant d’avoir des signaux commerciaux forts. Et lorsque nous décidions d’accélérer, notre arme secrète n’a pas été un budget publicitaire colossal, mais le recrutement de talents locaux capables de nous apporter une compréhension authentique et profonde de leur marché. Cette approche nous a permis de nous adapter rapidement et d’éviter les erreurs culturelles qui peuvent coûter très cher.

Tester Avant d’Investir : Le Modèle Commercial d’Abord, le Marketing Ensuite

Notre règle était simple : le commercial passe toujours en premier. Avant que le marketing ne dépense le moindre centime dans un nouveau pays, une équipe de vente y était envoyée pour tester le marché. ‘Souvent sur 3 mois. Et au bout de 3 mois, c’était un peu censé donner un go no go’. Si au bout de trois mois, il y avait de l’appétence et un début de pipeline, on continuait pour trois mois supplémentaires, avec l’objectif de signer les premiers clients. Ce n’est qu’à ce moment-là, après six mois de validation terrain, que le marketing entrait en jeu. Et même là, nous commencions par le ‘strict minimum’ : traduire le site web et les quelques contenus les plus pertinents, en se basant sur les retours des commerciaux. Cette méthode ‘sales-led’ est extrêmement sécurisante. Elle garantit que l’on n’investit des ressources marketing que dans des marchés où il existe une demande avérée, réduisant ainsi drastiquement le risque d’échec et optimisant l’allocation de notre budget.

La Puissance du Talent Local : Pourquoi un Stagiaire Natif Vaut de l’Or

Une fois la décision d’accélérer prise, comment faire ? Nous avons beaucoup fonctionné avec des stagiaires, et j’en suis un fervent défenseur : ‘je trouvais que le ROI était fabuleux’. Mais nous avons vite appris une leçon essentielle. Au début, nous recrutions des bilingues basés à Paris. L’intention était bonne, mais le résultat décevant. Ces profils, souvent, étaient ‘trop français’, manquant de la subtilité culturelle nécessaire. C’est là que nous avons pivoté pour ne recruter que des natifs du pays cible, même s’ils ne parlaient pas parfaitement français. Le changement a été radical. ‘J’avais ma personne indienne, espagnole, italienne et là tu sentais qu’en terme de compréhension du marché…’ c’était le jour et la nuit. Ces collaborateurs ont apporté des ajustements qui semblent mineurs mais qui sont en réalité cruciaux : ils ont changé le ton de nos emails jugé trop formel, décalé les horaires de nos webinars pour qu’ils correspondent aux habitudes locales, ou encore suggéré des campagnes marketing liées à des fêtes nationales importantes. Ce sont des choses qu’aucune étude de marché ne peut vous donner avec autant de précision. Plus encore, leur présence a fluidifié la relation avec les équipes de vente locales, créant une synergie bien plus forte. C’est la preuve que la culture est aussi importante, si ce n’est plus, que la langue.

Conclusion : Accepter l’Imperfection pour Mieux Reconstruire

Le voyage au cœur de l’hypercroissance est une expérience intense, formatrice, mais aussi épuisante. Comme je le disais, ‘ce que tu mets en place, ça tient 4 à 6 mois et il faut déjà il faut il faut détruire pour reconstruire’. On n’est jamais dans sa zone de confort. En regardant en arrière, je suis fier de ce que nous avons accompli. Nous avons construit une machine marketing efficace qui a largement contribué au succès de Partoo. Mais je suis aussi lucide sur mes erreurs. Ma plus grande leçon est probablement celle-ci : la croissance à tout prix n’est pas durable si les fondations ne sont pas solides. Et ces fondations sont avant tout humaines et structurelles. J’aurais dû me battre plus tôt pour recruter des experts. J’aurais dû déléguer plus vite en mettant en place du mid-management. J’ai laissé se créer une ‘dette marketing’ que ma remplaçante a dû gérer. C’est une prise de conscience difficile mais nécessaire. Si je devais donner un conseil à un CMO qui s’apprête à vivre cette aventure, ce serait de ne pas rester seul. Le soutien de mes pairs, dans des communautés comme Tech Marketing Leaders, a été ma bouée de sauvetage. Ils étaient ma ‘boule de cristal pour voir dans le futur’, me montrant les écueils que je n’avais pas encore rencontrés. Parlez à ceux qui sont passés par là. Apprenez de leurs erreurs pour ne pas avoir à les répéter. Et surtout, construisez votre équipe et vos processus en pensant non pas à l’entreprise que vous êtes aujourd’hui, mais à celle que vous serez dans 18 mois. C’est la seule façon de s’assurer que lorsque la fusée décolle vraiment, les ailes que vous avez construites tiendront le choc.


Foire Aux Questions (FAQ) sur le Marketing en Hypercroissance

Quelle est la plus grande erreur à éviter en structurant une équipe marketing en hypercroissance ?

L’erreur la plus courante et la plus dommageable est de privilégier le recrutement de profils juniors pour des raisons budgétaires. Bien que tentant à court terme, cela empêche de construire des fondations stratégiques solides sur des expertises clés comme le SEO, le contenu ou l’acquisition. Cette approche mène à la création d’une ‘dette marketing’ : des canaux sous-performants et des stratégies qui atteignent rapidement un plafond de verre. Il est crucial de se battre pour recruter des experts seniors dès que possible pour bâtir une structure durable.

‘Tout le monde m’a dit il faut que tu recrutes des experts. Le marketing est un département d’expertise, il te faut des experts. […] J’aurais dû à l’époque me battre et convaincre mon CEO que non, il fallait des personnes plus séniors, des personnes expérimentées.’

Comment les OKRs aident-ils à gérer le marketing dans une startup qui grandit vite ?

Dans une entreprise en hypercroissance, la multiplication des équipes et des idées crée un risque énorme de dispersion. Les OKRs (Objectives and Key Results) agissent comme une boussole stratégique. En définissant un maximum de trois objectifs clairs et alignés sur la stratégie globale de l’entreprise, ils fournissent un cadre pour prioriser les actions et dire ‘non’ aux initiatives qui ne servent pas ces objectifs. Cela permet de canaliser l’énergie de l’équipe vers ce qui compte vraiment et d’éviter le chaos.

‘Nous on fonctionne beaucoup en OKR. Pour dire voilà, on a max trois objectifs et quatre actions clés par objectif. Donc déjà ça ça donne un cadre, t’évite la dispersion.’

Pourquoi est-il crucial de documenter les processus marketing (playbooks) ?

La documentation des actions récurrentes via des playbooks est un accélérateur de scaling. Elle permet d’onboarder rapidement les nouvelles recrues, d’assurer un niveau de qualité d’exécution constant à travers toute l’équipe, et de libérer du temps de management. Au lieu de réexpliquer constamment comment faire les choses, on fournit un guide ‘pas à pas’ qui garantit l’excellence opérationnelle. C’est la clé pour passer d’une exécution artisanale à une machine marketing prévisible et efficace.

‘Quand tu recrutes une personne, tu as pas besoin de passer 1 heure ou deux à la former, c’était tiens, prends ce tuto, prends ce playbook et vas-y, fais ton premier webinar, lance ta première campagne de marketing automation.’

Quelle est la meilleure stratégie pour choisir ses outils marketing (MarTech) ?

La meilleure approche est de n’automatiser que ce qui fonctionne déjà. Il faut d’abord prouver la valeur d’un canal ou d’une action manuellement. Une fois que son efficacité est démontrée, on peut investir dans un outil pour le scaler. Il est également essentiel d’éviter le ‘sur-outillage’ en auditant régulièrement l’utilisation réelle des plateformes. Si un outil n’est pas adopté par l’équipe ou ne démontre pas de ROI clair après plusieurs mois, il faut avoir le courage de s’en séparer pour ne pas complexifier inutilement sa stack technologique.

‘On a fait une des erreurs qu’on font beaucoup de boîtes, c’est qu’on on s’est un peu suroutillé. Et puis au bout de 6 mois tu te rends compte et alors […] qui l’utilise ? Ouais. OK, allez hop, on coupe.’

Comment maximiser le ROI d’un webinar grâce au recyclage de contenu ?

Un webinar ne doit jamais être une opération unique. Pour maximiser son retour sur investissement, il faut le considérer comme la matière première d’une multitude d’autres contenus. En scriptant intégralement la présentation, on obtient un document riche qui peut être transformé en ebook, découpé en plusieurs articles de blog, synthétisé en posts pour les réseaux sociaux, et dont les extraits peuvent alimenter des campagnes de nurturing. Cette stratégie de recyclage permet de toucher différentes audiences avec des formats variés et d’amortir considérablement l’effort de création initial.

‘Un webinar, chez nous c’était scripté, ça faisait généralement 8 à 10 pages de Word […]. Et bah ça derrière, on en faisait un ebook […], on en faisait 5 6 articles, des posts Linkedin, tu mettais ça dans tes campagnes nurturing.’

Quelle est l’approche la plus efficace pour le marketing à l’international ?

Une approche pragmatique consiste à valider le potentiel commercial d’un marché avant d’y investir des ressources marketing. Il faut laisser les équipes de vente tester le terrain pendant plusieurs mois. Une fois la demande confirmée, la clé du succès réside dans le recrutement de talents natifs du pays cible. Leur compréhension intime de la culture, des codes de communication et des habitudes locales est infiniment plus précieuse que la simple maîtrise de la langue. Ils apportent des ajustements cruciaux qui font la différence entre une stratégie plaquée et une approche authentiquement locale.

‘J’ai fini par dire OK en fait on va prendre des locaux qui sont à Paris […] et là tu sentais qu’en terme de compréhension du marché, des personnes, enfin tu vois c’est bête mais ils m’ont fait changer des emails sur sur le ton, un ton qui était trop formel.’

Qu’est-ce que la ‘dette marketing’ et comment l’éviter ?

La ‘dette marketing’ est l’accumulation de fondations fragiles dues à un manque d’expertise initiale. Elle se crée lorsqu’on privilégie la vitesse d’exécution à court terme sur la construction stratégique à long terme, souvent en recrutant des profils trop juniors. Elle se manifeste plus tard par des performances qui stagnent sur certains canaux (comme le SEO) et un manque de profondeur stratégique. Pour l’éviter, il faut investir dès que possible dans des experts (internes ou externes) et construire des processus solides, même si cela semble ralentir les choses au début.

‘Au bout de 4 ans, tu te rends compte que tu as quand même créé une dette marketing. […] Je me dis merde, j’aurais dû voilà, bâtir quelque chose de plus solide et pour ça c’était les experts.’

Comment un CMO peut-il continuer à se former et ne pas se sentir isolé ?

Le rôle de CMO en hypercroissance peut être très solitaire. Le meilleur moyen de se former et de prendre du recul est de s’appuyer sur une communauté de pairs. Rejoindre des groupes (Slack, meet-ups) de CMOs confrontés aux mêmes défis permet d’échanger sur des problématiques concrètes, de bénéficier de conseils de personnes plus expérimentées et de valider ses intuitions stratégiques. Ces pairs agissent comme une ‘boule de cristal’, partageant leur expérience sur les étapes de croissance à venir, ce qui est une aide inestimable pour anticiper les futurs challenges.

‘Ça pour moi ça a été un ça a été fou parce que tu te sens très seul. […] Et tu te sens sur des prises de décision assez seul et y avoir ce slack pour dire écoutez voilà, j’ai ce sujet. […] Et en fait tu tu reviens un peu gonflé à bloc.’


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