L’hypercroissance marketing : mon journal de bord pour passer de 2 à 20 millions d’euros d’ARR
L’hypercroissance, c’est une sensation unique. Vous avez l’impression d’être aux commandes d’une fusée qui décolle, et chaque jour apporte son lot d’adrénaline, de victoires et de défis vertigineux. C’est exactement ce que j’ai vécu chez Partoo, une aventure incroyable où nous sommes passés de 20 à 400 employés et de 2 à 20 millions d’euros d’ARR en seulement quatre ans. En tant que premier marketeur, puis CMO, ma mission était de construire le réacteur de cette fusée en plein vol. Aujourd’hui, avec le recul, je veux partager avec vous non seulement les stratégies qui ont propulsé notre croissance, mais aussi, et surtout, les erreurs que j’ai commises et les leçons que j’en ai tirées. Car si le succès est grisant, les échecs sont les véritables accélérateurs d’apprentissage.
Gérer le marketing d’une boîte en hypercroissance n’est pas une science exacte. C’est un art délicat qui consiste à jongler entre la nécessité de structurer et le besoin de rester agile, entre l’ambition de tout tester et l’obligation de se concentrer sur l’essentiel. C’est un marathon intellectuel où ce que vous mettez en place aujourd’hui sera probablement obsolète dans six mois. Comme je le disais dans le podcast, ‘ce que tu mets en place ça tient 4 à 6 mois et il faut déjà détruire pour reconstruire’. C’est épuisant, mais c’est aussi ce qui rend l’aventure si formatrice. À travers mon expérience, nous allons décortiquer ensemble comment bâtir une équipe solide, comment transformer le chaos en une machine prédictible grâce aux process, comment scaler intelligemment ce qui fonctionne, et comment éviter le piège le plus insidieux : la ‘dette marketing’. Accrochez-vous, le décollage est imminent.
Le péché originel : pourquoi j’aurais dû recruter des experts bien plus tôt
Quand on démarre le marketing de zéro dans une startup qui commence à décoller, on est face à une équation complexe : des ambitions infinies et des ressources, notamment budgétaires, très limitées. La première brique, la plus fondamentale, c’est l’équipe. Et c’est là que j’ai commis ma plus grande erreur, une erreur dont j’ai mesuré les conséquences des années plus tard. Le conseil que tous mes pairs me donnaient était pourtant unanime et limpide : ‘il faut que tu recrutes des experts. Le marketing est un département d’expertise, il te faut des experts’. Un conseil que, pour de mauvaises raisons, je n’ai que partiellement suivi.
La naissance insidieuse de la ‘dette marketing’
Faute de budget et peut-être d’assez de conviction pour me battre auprès de mon CEO, j’ai beaucoup recruté de profils juniors : des stagiaires de fin d’études, de jeunes diplômés avec une première expérience. Sur le papier, cela fonctionnait. Ils étaient brillants, motivés, et nous avons obtenu d’excellents résultats. Nous avons fait, je pense, ‘le max du potentiel de ce qu’on aurait pu faire en tant qu’équipe’. Mais c’est là tout le piège. En optimisant à court terme, je construisais sans m’en rendre compte une ‘dette marketing’.
Cette dette, c’est l’écart entre là où nous étions et là où nous aurions dû être. C’est la somme de toutes les fondations fragiles, de toutes les stratégies qui manquaient de profondeur, de tous les leviers sous-exploités. Un junior talentueux peut lancer une campagne SEO et obtenir des résultats, mais un expert SEO construira une architecture durable, anticipera les changements d’algorithmes et mettra en place une stratégie de contenu qui génère un trafic exponentiel sur le long terme. En multipliant les profils juniors, je suis devenu le goulot d’étranglement, passant un temps fou à former, superviser, corriger. J’étais trop dans l’opérationnel, et pas assez dans la stratégie. Avec le recul, je le dis sans détour : ‘au bout de 4 ans, tu te rends compte que tu as quand même créé une dette marketing… J’aurais dû bâtir quelque chose de plus solide. Et pour ça, c’était les experts.’
Le rôle crucial et tardif du middle management
La seconde facette de cette erreur a été de tarder à recruter du middle management. J’ai gardé trop longtemps 7 ou 8 personnes en management direct. C’est tout simplement intenable, surtout avec des profils juniors qui demandent plus d’accompagnement. Je me suis épuisé, et surtout, je n’offrais pas à mon équipe le management de proximité et l’expertise dont elle avait besoin pour grandir. Un bon middle manager n’est pas juste un relais ; c’est un coach, un expert de son domaine qui élève le niveau de toute son équipe. En attendant trop longtemps, j’ai ralenti la montée en compétences collective et j’ai moi-même frôlé le burn-out. La leçon est claire : dès que vous dépassez 4 ou 5 personnes en direct, il faut penser à structurer l’équipe avec des leaders capables de prendre le relais, de porter une vision et de garantir l’excellence opérationnelle.
L’arme secrète contre le chaos : cadrer, processer et documenter
L’hypercroissance, c’est le chaos organisé. Le risque principal, c’est la dispersion. Comme je le disais, ‘qui dit plus de monde, dit plus d’idées et et là ça part dans tous les sens’. Tout le monde a une bonne idée : un nouveau salon à faire, une nouvelle campagne à lancer, un nouveau canal à tester. Si vous cédez à cette effervescence sans un cadre solide, vous transformez votre département marketing en une armée désorganisée qui tire dans toutes les directions. Pour canaliser cette énergie et la transformer en une force de frappe cohérente, deux éléments sont non négociables : des objectifs clairs et des process documentés.
Les OKR pour garder le cap
La première étape est de définir une direction claire. Pour cela, nous avons adopté la méthode des OKR (Objectives and Key Results). Le principe est simple mais puissant : fixer un maximum de trois objectifs prioritaires pour le trimestre, et pour chaque objectif, définir quatre actions clés mesurables qui permettront de l’atteindre. Ce cadre a eu un effet immédiat : il a forcé des discussions stratégiques au niveau de la direction pour s’aligner sur les priorités absolues. Une fois ces OKR définis, ils cascadaient à toute l’équipe. Chacun savait exactement sur quoi il devait se concentrer. Cela ne remplace pas la to-do list quotidienne, mais ça donne une boussole. Face à une nouvelle idée, la question devenait : ‘Est-ce que cela sert l’un de nos trois objectifs prioritaires ?’. Si la réponse était non, l’idée était mise de côté. C’est un outil formidable pour apprendre à dire non et pour éviter que la dispersion, ce ‘diable’, ne vienne saboter vos efforts.
Les playbooks : la recette du succès réplicable
La deuxième étape, c’est de systématiser l’excellence. Quand vous faites quelque chose de bien, comment vous assurez-vous que la 10ème personne qui le fera le réalisera avec le même niveau de qualité que la première ? La réponse, ce sont les process, les templates, les playbooks. Au début, cela peut paraître rigide ou bureaucratique, mais c’est en réalité un formidable libérateur d’énergie. Nous avons tout documenté : comment organiser un salon, lancer un webinar, créer une newsletter, monter une campagne d’emailing. Chaque playbook était un véritable tutoriel pas-à-pas, incluant les meilleures pratiques, les templates, les retroplannings. Nous utilisions un outil comme Monday pour ça, où tout était pré-configuré.
Le bénéfice est colossal. L’onboarding d’un nouveau membre de l’équipe est radicalement accéléré. Au lieu de passer des heures à former, je disais : ‘tiens, prends ce tuto, prends ce playbook et vas-y, fais ton premier webinar’. Cela garantit un niveau de qualité constant sur toutes nos productions et permet à l’équipe de monter en compétence rapidement et en autonomie. C’est ce qui permet de scaler les opérations sans sacrifier la qualité, une condition sine qua non pour survivre à l’hypercroissance.
Scaler l’existant avant d’inventer : la leçon du nurturing et des webinars
Dans le tourbillon de la croissance, la tentation est grande de vouloir constamment lancer de nouveaux projets, explorer de nouveaux canaux, bref, de multiplier les initiatives. C’est souvent une erreur. L’une des leçons les plus importantes que j’ai apprises est qu’il est bien plus rentable de scaler ce qui fonctionne déjà que de s’éparpiller. Avant de chercher la prochaine idée révolutionnaire, posez-vous cette question : ‘Est-ce que ce que tu fais actuellement, est-ce que tu penses avoir atteint le maximum de son potentiel ?’. Chez Partoo, deux leviers se sont révélés particulièrement performants : les campagnes de nurturing et les webinars. Notre stratégie a été de les pousser à leur paroxysme.
Du nurturing artisanal à la machine de guerre HubSpot
Au départ, notre nurturing était assez artisanal. Nous avions une base de contacts importante, près de 40 000, et nous envoyions des emails de manière assez simple. Mais nous avons vite vu que cela fonctionnait, notamment sur des cycles de vente longs de 3 à 12 mois. Plutôt que de lancer un autre projet, nous avons décidé d’investir pour industrialiser cette pratique. Nous avons adopté HubSpot, un outil de marketing automation puissant. Mais attention, nous ne sommes pas tombés dans le piège de vouloir tout faire tout de suite. Nous avons procédé par phases. La première étape a été de simplement dupliquer l’existant sur la nouvelle plateforme. Puis, tous les 6 à 8 mois, nous ajoutions une couche de complexité et de sophistication : segmentation plus fine, workflows personnalisés en fonction du comportement des prospects, lead scoring pour identifier les contacts les plus chauds… En nous concentrant sur ce levier, nous l’avons transformé d’une petite source de leads en un véritable moteur de croissance prédictible.
Le webinar, un contenu à recycler à l’infini
Le même principe s’est appliqué à nos webinars. Ils ont explosé pendant le Covid, mais ont continué à très bien fonctionner après. Là encore, au lieu de nous dire ‘OK, ça marche, passons à autre chose’, nous avons cherché à en extraire toute la valeur possible. D’abord, nous avons décliné le format : par pays, par secteur d’activité, par niveau de maturité. Ensuite, et c’est le point le plus crucial, nous avons traité chaque webinar comme une mine de contenu à recycler. Un webinar chez nous, c’était un script de 8 à 10 pages Word. Ce script devenait la matière première pour :
- Un ebook de 15 pages, bien designé, proposé en téléchargement.
- Cinq à six articles de blog, chacun approfondissant un point clé abordé dans le webinar.
- Des dizaines de posts LinkedIn, sous forme de carrousels, de citations ou de courtes vidéos.
- Des extraits vidéo pour les réseaux sociaux.
- Le contenu de nos campagnes de nurturing pour les mois à venir.
En adoptant cette mentalité, un seul effort de production de contenu alimentait notre marketing pendant des semaines. C’est une approche beaucoup plus efficace que de chercher constamment à produire du neuf. Comme le disait une personne de mon réseau, ‘le drame, c’est qu’on cherche à produire en permanence du contenu, mais on oublie de regarder ce qu’on a déjà créé’.
Conquérir le monde : la stratégie d’internationalisation par l’humain
L’expansion internationale est une étape clé et souvent redoutée pour une scale-up. Comment aborder un nouveau marché, une nouvelle culture, une nouvelle langue avec des ressources limitées ? Notre approche a été pragmatique, progressive et surtout, très humaine. Nous n’avons pas débarqué avec des millions d’euros de budget, mais avec une méthode agile pour tester, valider, puis accélérer.
Une approche par phases pour limiter les risques
Notre déploiement suivait un schéma clair. D’abord, l’équipe commerciale testait le marché pendant 3 mois. L’objectif était simple : obtenir un premier signal, sentir s’il y avait de l’appétence, commencer à construire un pipeline. Si ce premier test était concluant, on prolongeait pour 3 mois supplémentaires avec l’objectif de signer les premiers clients. Ce n’est qu’à ce moment-là, après 6 mois de validation par le terrain, que le marketing entrait en jeu. Notre première action était le ‘strict minimum’ : traduire le site web et les contenus les plus pertinents, en se basant sur les retours des commerciaux. Cela permettait d’investir uniquement sur les marchés qui montraient un vrai potentiel, évitant de gaspiller des ressources précieuses.
La puissance des talents locaux : l’exemple des stagiaires
Mais la véritable clé de notre succès à l’international a été de recruter des talents locaux, et ce, de manière très agile. Nous avons beaucoup fonctionné avec des stagiaires de fin d’études, natifs des pays que nous visions, mais basés à Paris. Au début, nous avions essayé avec des bilingues français, mais ce fut une erreur. Comme je l’expliquais : ‘c’est des bilingues qui étaient trop trop français… même un petit manque de compréhension du pays, de la culture’. Nous avons donc changé notre fusil d’épaule pour recruter des Italiens d’Italie, des Espagnols d’Espagne, des Indiens d’Inde, etc.
Leur impact a été immédiat et spectaculaire. Le ROI était fabuleux. Ces stagiaires, que nous embauchions ensuite pour la plupart, apportaient une compréhension culturelle inestimable. Ils ont changé le ton de nos emails jugé trop formel, adapté les horaires de nos webinars aux habitudes locales, ou encore proposé des campagnes marketing spécifiques liées à des fêtes nationales auxquelles nous n’aurions jamais pensé. Ils créaient un lien beaucoup plus fort avec les équipes de vente locales et apportaient une crédibilité et une pertinence que nous n’aurions jamais pu atteindre seuls. C’est la preuve qu’en matière d’internationalisation, la meilleure étude de marché reste l’humain.
Le revers de la médaille : gérer l’humain (et soi-même) dans la fusée
Vivre une phase d’hypercroissance est une expérience professionnelle hors du commun. L’ambiance est électrique, excitante. Voir la fusée décoller, atteindre des objectifs qui semblaient fous, recruter, ouvrir de nouveaux pays… c’est une source de motivation et de satisfaction immense. ‘L’ambiance elle est bonne, tout va bien’, et c’est vrai. Mais il y a un revers à cette médaille, un coût humain et psychologique qu’il ne faut pas sous-estimer.
‘Fatigant intellectuellement’ : le cycle de la reconstruction permanente
Personnellement, j’ai trouvé cette période extrêmement fatigante, non pas physiquement, mais intellectuellement. La raison est simple : en hypercroissance, vous n’êtes jamais dans votre zone de confort. Toute structure, tout process, toute stratégie que vous mettez en place a une durée de vie de 4 à 6 mois. Passé ce délai, l’entreprise a tellement changé (nouvelle taille, nouveaux départements, nouvelles ambitions) qu’il faut déjà tout ‘détruire pour reconstruire’. On est dans un état de construction perpétuelle, sans jamais avoir le temps de se poser et de consolider. J’aurais rêvé d’une année ‘tranquille’ pour optimiser l’existant, mais ce luxe n’existe pas dans une scale-up. Cette pression constante d’adaptation et de réinvention est un véritable marathon pour le cerveau.
L’antidote à la solitude du CMO : la force des pairs
Dans ce contexte intense, on peut vite se sentir seul. Votre CEO est votre N+1, mais ce n’est pas un manager au sens classique. Il ne va pas vous coacher sur vos doutes marketing. Vous êtes seul face à des décisions stratégiques à fort enjeu. Pour surmonter cela, ma plus grande ressource a été de m’appuyer sur mes pairs. J’ai rejoint des communautés, notamment un groupe Slack de CMOs qui s’appelle Tech Marketing Leaders. Cet espace d’échange a été une bouée de sauvetage et un accélérateur incroyable. Pouvoir poser une question, qu’elle soit très stratégique ou très opérationnelle, et recevoir les conseils de personnes qui sont passées par là ou qui vivent la même chose, c’est inestimable. ‘Ils ont un peu cette boule de cristal pour voir dans le futur’, car ils ont déjà vécu les étapes que vous vous apprêtez à franchir. Cela redonne confiance, challenge vos idées et vous permet de prendre de meilleures décisions, plus rapidement. S’entourer de ses pairs n’est pas un luxe, c’est une nécessité pour survivre et performer dans la durée.
Conclusion : construire pour durer, pas seulement pour grandir vite
L’aventure de l’hypercroissance est une leçon d’humilité. On apprend autant de ses succès fulgurants que de ses erreurs cuisantes. Si je devais synthétiser ces quatre années intenses en quelques principes clés, ce seraient ceux-ci. D’abord, investissez dans les fondations humaines : recrutez des experts qui sauront construire pour l’avenir et vous éviteront la fameuse ‘dette marketing’. Ensuite, transformez le chaos en ordre grâce à des objectifs clairs et des process documentés ; c’est ce qui vous permettra de scaler sans perdre en qualité. Concentrez votre énergie : avant de vous disperser, assurez-vous d’avoir exploité 100% du potentiel de ce qui fonctionne déjà. Pensez global, mais agissez local en vous appuyant sur des talents natifs pour votre expansion internationale. Enfin, n’oubliez jamais l’aspect humain : prenez soin de vous et de vos équipes, et appuyez-vous sur la force de vos pairs pour traverser les moments de doute. Construire une entreprise qui passe de 2 à 20 millions d’ARR est un exploit, mais construire une machine marketing solide, résiliente et prête pour les 100 millions, c’est le véritable enjeu. Et cela commence par la première brique que vous posez.
Questions fréquentes sur le marketing en hypercroissance
Qu’est-ce que la ‘dette marketing’ et comment l’éviter en hypercroissance ?
La ‘dette marketing’ est un concept qui décrit l’accumulation de faiblesses structurelles (stratégies superficielles, manque d’expertise, process fragiles) dues à des décisions de court terme, souvent budgétaires. Elle se crée typiquement en recrutant trop de juniors au lieu d’experts. Pour l’éviter, il faut se battre pour recruter des profils seniors dès que possible, même si cela coûte plus cher à l’instant T. Ces experts construiront des fondations solides (SEO, automation, branding) qui soutiendront la croissance sur le long terme, au lieu de simplement appliquer des ‘rustines’ qui fonctionnent temporairement.
‘Au bout de 4 ans, tu te rends compte que tu as quand même créé une dette marketing… On a eu un marketing très efficace… mais finalement après 4 ans on aurait dû être beaucoup plus haut que ça. Et je me dis merde, j’aurais dû voilà bâtir quelque chose de plus solide. Et pour ça, c’était les experts.’
Faut-il recruter des experts ou des juniors pour structurer une équipe marketing ?
L’erreur la plus commune est de privilégier les juniors pour des raisons de coût. Mon expérience montre que c’est un mauvais calcul. Il est crucial de recruter des experts pour les pôles stratégiques. Ils apportent non seulement leur savoir-faire, mais aussi une vision, une capacité à construire des systèmes durables et à mentorer les autres. Les juniors sont essentiels, mais ils doivent être encadrés par des managers et des experts. L’idéal est un mix équilibré, mais les premières embauches structurantes après le CMO devraient être des profils expérimentés pour poser les bonnes bases.
‘Tout le monde m’a dit il faut que tu recrutes des experts. Le marketing est un département d’expertise, il te faut des experts… finalement avec du recul, je me dis… j’aurais dû à l’époque me battre et convaincre mon CEO que non, il fallait des personnes plus senior, des personnes expérimentées.’
Comment les process et les playbooks aident-ils à scaler une équipe marketing ?
En phase d’hypercroissance, les process ne sont pas là pour brider la créativité, mais pour la canaliser et garantir l’efficacité. Des playbooks détaillés pour chaque action récurrente (webinar, salon, campagne email) permettent d’assurer une qualité constante, d’accélérer drastiquement l’onboarding des nouvelles recrues et de libérer le temps du management pour des tâches à plus forte valeur ajoutée. C’est le seul moyen de maintenir un haut niveau d’exécution quand l’équipe double de taille en quelques mois, transformant le chaos potentiel en une machine prédictible.
‘Quand tu recrutais une personne, tu n’es pas besoin de passer une heure ou deux à la former, c’était tiens, prends ce tuto, prends ce playbook et vas-y, fais ton premier webinar… ça pour faciliter l’onboarding et pour assurer aussi un niveau d’exigence et de qualité qui soit toujours au top.’
Quelle est la meilleure stratégie pour scaler les actions marketing qui fonctionnent déjà ?
Plutôt que de s’éparpiller en lançant constamment de nouveaux projets, la stratégie la plus rentable est de se demander comment maximiser le potentiel de ce qui performe déjà. Cela passe par plusieurs étapes : industrialiser l’action avec de meilleurs outils (passer d’emails manuels à HubSpot, par exemple), la décliner pour différentes cibles (par secteur, par pays, par maturité), et surtout, la recycler. Un contenu performant comme un webinar peut être transformé en ebook, articles de blog, posts pour les réseaux sociaux, nourrissant ainsi tout votre écosystème de contenu pendant des semaines.
‘Plutôt que lancer trop de nouveaux projets, déjà pose-toi la question de est-ce que ce que tu fais actuellement, est-ce que tu penses avoir atteint le maximum de son potentiel ? Qu’est-ce que tu peux faire en plus ?’
Comment réussir son déploiement marketing à l’international sans un gros budget ?
La clé est une approche progressive et humaine. D’abord, valider le potentiel du marché avec l’équipe commerciale avant d’investir en marketing. Ensuite, plutôt que de tout traduire ou de lancer de grandes campagnes, il faut recruter un talent natif du pays, même en stage. Cette personne apportera une compréhension culturelle inestimable qui adaptera votre marketing bien au-delà de la simple traduction : ton des messages, horaires, références culturelles, etc. C’est une approche à très fort ROI qui garantit une bien meilleure pertinence sur le marché local.
‘J’ai fini par dire OK en fait on va prendre des locaux qui sont à Paris… Et là tu sentais qu’en terme de compréhension du marché… c’est bête mais ils m’ont fait changer des emails sur sur le ton, un ton qui était trop formel. Ils m’ont fait changer des horaires de webinar qui étaient pas adaptés pour le marché.’
Quels outils sont essentiels pour gérer le marketing d’une entreprise en forte croissance ?
Deux types d’outils sont cruciaux. D’abord, un outil de gestion de projet et de suivi des objectifs comme Monday (ou Notion) pour aligner l’équipe, suivre les OKR et centraliser les process. Ensuite, un outil de marketing automation robuste comme HubSpot pour industrialiser les actions qui fonctionnent, notamment le nurturing et l’emailing. Cependant, le piège est le ‘sur-outillage’. Il faut choisir des outils pour répondre à un besoin stratégique avéré et ne pas hésiter à couper ceux qui ne sont pas ou peu utilisés, même s’ils semblent intéressants sur le papier.
‘On a fait une des erreurs que font beaucoup de boîtes, c’est qu’on on s’est un peu sur-outillé. Et puis au bout de 6 mois, tu te rends compte [d’un outil], alors quelqu’un a une analyse à me sortir, qui l’utilise ? Ouais. OK. allez hop, on coupe.’
Comment gérer la pression et la fatigue intellectuelle en période d’hypercroissance ?
Il faut d’abord accepter que c’est une phase intellectuellement épuisante. Le cycle permanent de ‘détruire pour reconstruire’ est mentalement exigeant. Pour y faire face, il est vital de ne pas rester isolé. S’entourer de ses pairs, via des communautés de CMOs ou des groupes de discussion, est un excellent exutoire. Partager ses défis avec des gens qui les comprennent permet de prendre du recul, de trouver des solutions et de se sentir moins seul. C’est un soutien psychologique et stratégique qui aide à tenir sur la durée.
‘J’ai trouvé ça très fatigant intellectuellement parce que ce que tu mets en place ça tient 4 à 6 mois et il faut déjà détruire pour reconstruire… tu es jamais dans ta zone de confort et j’aurais aimé un moment avoir un peu une année entre guillemets tranquille de consolidation et en fait non.’




