Logo de l'épisode #41 : USA > L'actualité des US sur bannouze du podcast Bannouze : Le podcast du marketing digital !

#41 : USA > L’actualité des US sur bannouze

Épisode diffusé le 20 mai 2020 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

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Californie, mai 2020 : Mon témoignage depuis l’épicentre de la tech mondiale en plein choc du COVID-19

Bonjour, je m’appelle Romain Bourgois. En temps normal, je suis Product Manager chez Criteo, à Palo Alto, au cœur d’une Silicon Valley qui vibre d’innovation et d’une énergie presque palpable. Mais nous ne sommes pas en temps normal. Nous sommes en mai 2020, et comme des millions de personnes, je vous parle en étant confiné. La Californie, terre de tous les possibles, est à l’arrêt. L’ambiance est surréaliste. Les autoroutes habituellement saturées sont désertes, les campus high-tech des géants du web sont devenus des villes fantômes. C’est de cette situation inédite que je souhaite vous parler aujourd’hui, non pas en tant qu’expert en virologie, mais en tant que témoin direct de l’impact du COVID-19 sur l’écosystème de la tech aux États-Unis.

Quand on pense à la Silicon Valley, on imagine une machine inarrêtable, un moteur économique mondial tournant à plein régime. Pourtant, cet événement planétaire est venu gripper les rouages de manière brutale et inattendue. La question qui nous hante tous ici n’est pas seulement sanitaire, elle est profondément économique et sociale. Comment un secteur qui semblait si robuste, si préparé à l’ère du tout-numérique, encaisse-t-il un choc d’une telle magnitude ? Au-delà des gros titres, quelles sont les réalités vécues par les employés, les entreprises, les annonceurs et les médias qui forment ce tissu complexe ?

Dans les lignes qui suivent, je vais partager avec vous mes observations de terrain, une chronique depuis la Baie de San Francisco. Nous verrons comment la transition vers le télétravail, qui semblait être une formalité, cachait en réalité des fissures bien plus profondes. Nous plongerons dans la violence de la réaction du marché de l’emploi américain, une réalité souvent mal comprise en Europe. Nous décortiquerons les chiffres alarmants de la publicité digitale, qui est le carburant de tant d’entreprises, et nous verrons le paradoxe douloureux des éditeurs, qui n’ont jamais été aussi lus mais aussi peu rémunérés. Enfin, parce que c’est aussi l’ADN de cet endroit, nous chercherons les lueurs d’espoir, ces initiatives qui témoignent d’une incroyable culture du rebond. Bienvenue dans les coulisses de la tech américaine à l’heure du coronavirus.

Le télétravail généralisé : une transition en apparence fluide qui cache une réalité plus complexe

La première réponse visible de la tech californienne au confinement a été le passage massif et immédiat au télétravail. De l’extérieur, on pourrait croire que ce fut une simple formalité. Après tout, nous sommes dans le berceau des outils collaboratifs, des visioconférences et du cloud. Et en surface, c’est vrai. Comme je l’expliquais, il y a une spécificité américaine et plus encore californienne :

‘les distances sont plus sont plus grandes et et en fait ça met déjà une culture enfin ces ces distances grandes mettent déjà une culture du télétravail qui est assez qui est assez ancrée quoi.’

Cette culture préexistante a été un avantage indéniable. Personne n’a été pris au dépourvu. Les ordinateurs portables, les accès VPN sécurisés, les licences pour les outils de communication… tout était déjà en place. Slack est devenu plus qu’un outil, c’est devenu le bureau lui-même, le lieu de toutes les interactions, formelles comme informelles. Les visioconférences, déjà quotidiennes, se sont simplement multipliées.

Sur le plan purement opérationnel, la productivité n’a pas semblé chuter drastiquement dans les premières semaines. L’impact sur la capacité de production des entreprises de la tech a été, je dirais, ‘relativement minime’. Mais cette vision est parcellaire. Elle ne prend pas en compte les défis humains qui se sont rapidement manifestés. Le premier est l’effacement de la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle. Le salon est devenu le bureau, la journée de travail n’a plus de début ni de fin claires. Le deuxième défi est celui de la créativité et de l’innovation spontanée. Comment reproduire la magie d’une conversation informelle à la machine à café, où naissent souvent les meilleures idées ? Enfin, l’isolement et la santé mentale des équipes sont devenus une préoccupation majeure pour les managers. La fluidité technique de la transition a masqué une adaptation humaine bien plus ardue.

Au-delà des outils : les vrais enjeux du ‘tout-à-distance’

Si la technologie a parfaitement répondu présente, elle ne résout pas tout. Les entreprises ont dû rapidement apprendre à gérer des équipes entièrement à distance, ce qui est très différent d’avoir quelques employés en télétravail ponctuel. Cela implique de réinventer les rituels de management, de formaliser la communication pour éviter les malentendus, et surtout, de faire un effort conscient pour maintenir le lien social et la culture d’entreprise. On a vu fleurir les ‘e-cafés’, les ‘happy hours’ sur Zoom et les canaux Slack dédiés aux conversations non professionnelles. C’étaient des tentatives, parfois maladroites mais nécessaires, pour recréer du lien.

L’autre enjeu majeur est celui de l’équité. Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne face au télétravail. Certains vivent dans de petits appartements, parfois partagés, d’autres doivent jongler avec la garde des enfants dont les écoles sont fermées. La capacité à être productif à la maison n’est pas universelle. Cette période a mis en lumière des inégalités qui étaient moins visibles lorsque tout le monde se retrouvait dans le même espace de bureau. La transition a donc été fluide en surface, mais elle a initié une réflexion de fond sur le futur du travail, bien au-delà de la simple logistique.

L’onde de choc : licenciements massifs et la dure réalité de la précarité à l’américaine

Alors que nous nous adaptions à cette nouvelle vie en télétravail, une deuxième vague, bien plus violente, a déferlé sur notre écosystème. Une vague d’annonces de licenciements. Ce fut un choc par sa rapidité et son ampleur. En France, on est habitué à des processus plus longs, à des mesures comme le chômage partiel pour amortir le choc. Aux États-Unis, la réaction est immédiate. J’ai vu sur mon réseau, dès le mois de mars, des annonces en cascade.

‘Moi j’avais commencé à voir que beaucoup d’agence commençaient à pratiquer des des politiques voilà de licenciement, de chômage partiel, de réduction de salaire et ce dès mars. Et puis en avril, c’était des acteurs vraiment 100 % digitaux.’

Les chiffres sont sans appel et touchaient le cœur de l’ad-tech, un secteur très sensible aux coupes budgétaires : ‘Rubicon a réduit ses effectifs de 8 %, pareil pour Mediamath, OpenX prévoit de réduire les sien de 15 %’. Ces pourcentages ne sont pas abstraits, ils représentent des milliers de personnes, de familles, dont la vie a basculé en quelques jours. Cette rapidité est à la fois une force du système américain, qui permet aux entreprises de s’adapter très vite, mais aussi sa plus grande brutalité. Pour comprendre l’angoisse que cela génère, il faut saisir une différence culturelle fondamentale avec la France : ‘le chômage aux États-Unis, il est beaucoup beaucoup plus précaire qu’en France’. Perdre son emploi ici, ce n’est pas seulement perdre son salaire. C’est très souvent perdre son assurance santé, qui est liée à l’employeur. C’est se retrouver face à un système d’aide qui, bien que présent, est loin de suffire pour couvrir les frais de la vie courante, surtout dans une région aussi chère que la Baie de San Francisco.

La double peine : perdre son emploi et sa couverture santé en pleine pandémie

C’est un aspect que les Européens ont souvent du mal à mesurer. L’aide financière versée est une bouée de sauvetage, mais elle est minuscule face au coût de la vie.

‘C’est une aide financière qui qui suffit généralement pas à couvrir les les frais habituels.’

Imaginez l’anxiété : vous perdez votre revenu, votre assurance maladie en pleine crise sanitaire mondiale, et vous vivez dans une des zones les plus chères du monde. C’est une pression immense. Cette situation a révélé la fragilité du contrat social américain pour de nombreux travailleurs de la tech, qui se sentaient pourtant à l’abri. On a vu des ingénieurs, des chefs de produit, des commerciaux très qualifiés se retrouver du jour au lendemain dans une situation de grande incertitude. C’est une leçon d’humilité pour tout un secteur qui se croyait peut-être intouchable. La précarité n’est jamais loin, même pour les cols blancs de la Silicon Valley.

Côté annonceurs : la coupe est franche, les investissements publicitaires en chute libre

Ces licenciements massifs ne sortaient pas de nulle part. Ils étaient le symptôme d’une cause profonde : le gel quasi instantané des dépenses publicitaires. La publicité en ligne est l’huile qui fait tourner le moteur d’une grande partie de l’économie numérique. Quand les annonceurs coupent les vannes, c’est tout l’écosystème qui grince. Pour quantifier ce phénomène, une étude de l’IAB (Interactive Advertising Bureau) publiée fin avril a agi comme un électrochoc. Les résultats étaient, comme je le disais, ‘un peu sans appel. les investissements sont sont en berne’.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Imaginez un panel de 300 annonceurs majeurs. Parmi eux, ’37 %… ont coupé leurs investissements, 45 % qui ont réajusté leur spend’, ce qui est un euphémisme pour dire qu’ils ont réduit la voilure. Seulement 15 % maintenaient leur plan initial. Si vous faites le calcul, 82 % des entreprises ont appuyé sur la pédale de frein. C’est un coup d’arrêt d’une violence inouïe. Les 3 % restants ? ‘Ils savent toujours pas ce qu’ils vont faire’, probablement paralysés par l’incertitude dans des secteurs comme le voyage ou l’événementiel, totalement à l’arrêt. Cette frilosité s’explique par une double raison : la nécessité de préserver la trésorerie face à un avenir inconnu, et la peur de communiquer de manière inappropriée ou ‘tone-deaf’ en pleine crise.

Entre survie et adaptation : la psychologie des marques en temps de crise

Derrière ces pourcentages se cachent des décisions stratégiques majeures. Couper les budgets publicitaires est souvent le premier levier activé en temps de crise car il est facile et rapide à mettre en œuvre. Les budgets de ‘branding’ sont les premiers sacrifiés, au profit de campagnes de ‘performance’ visant un retour sur investissement immédiat. Mais même ces dernières ont été réduites. Les marques se sont posé des questions fondamentales : est-ce le moment de vendre ? Mon produit est-il pertinent actuellement ? Mon message est-il audible ? Beaucoup ont préféré se taire. Cependant, une petite lueur d’espoir est apparue dans cette étude.

‘Le seul point positif que je vois dans cette étude c’est un petit rebond sur sur sur les dernières semaines puisqu’on était à moins 33 % year over year… à la fin mars qui qui est passé à – 29 % fin avril.’

C’est minime, mais cela signifie qu’après le choc initial, certaines marques commençaient à trouver une nouvelle voix, à adapter leur message au contexte et à réinvestir prudemment, souvent sur des thèmes de solidarité, d’entraide ou de services utiles pendant le confinement. C’était le début d’une lente réadaptation.

Côté éditeurs : le paradoxe d’une audience record et de revenus qui s’effondrent

Si la situation était critique côté annonceurs, elle était carrément paradoxale et angoissante pour les éditeurs de contenu, notamment la presse en ligne. D’un côté, ils n’ont jamais été aussi utiles et consultés. Confinés chez eux, les gens avaient une soif inextinguible d’information fiable sur la pandémie. Le trafic a littéralement explosé. L’exemple du New York Times est frappant : ‘son trafic avait plus que doublé en mars’. C’était le moment où le journalisme de qualité pouvait prouver sa valeur essentielle à la société. Mais de l’autre côté, le modèle économique qui finance ce journalisme s’est effondré.

‘Son revenu publicitaire dans la même période avait chuté de de de de 15 %.’

Plus de lecteurs, mais moins d’argent. C’est un ciseau économique mortel.

La prévision pour le trimestre suivant était encore plus terrifiante : ‘ils s’attendent à moins 40 moins – 45 % de revenus publicitaires digitaux en en en moins sur le second trimestre, c’est dingue’. Cette chute s’explique par deux facteurs. Le premier, nous l’avons vu, est la baisse globale des investissements. Le second est plus technique : le ‘brand safety’. Les annonceurs utilisent des technologies pour ne pas que leurs publicités apparaissent à côté de contenus jugés négatifs. Et en pleine pandémie, des mots comme ‘coronavirus’, ‘COVID’, ‘mort’, ‘crise’ étaient sur toutes les pages. Résultat : une grande partie de l’inventaire publicitaire des sites d’information est devenue invendable, alors même qu’elle était la plus lue. C’est une ironie tragique. Tout l’écosystème intermédiaire, les ‘DSP, SSP, ad Exchange’, s’est retrouvé ‘sous tension’, pris en étau entre des annonceurs qui ne paient plus et des éditeurs qui ont besoin de revenus pour survivre.

La peur de la faillite en chaîne et la quête de la solvabilité

Cette tension a ravivé un traumatisme récent dans le monde de l’ad-tech : la faillite de Sizmek l’année précédente.

‘Au moment où ils ont fait faillite, ils étaient dans l’incapacité de payer pour l’inventaire qu’ils avaient déjà acheté. Et et et ça ça fait vraiment vraiment vraiment peur aux aux publicur.’

Cette peur a provoqué un changement de paradigme. La priorité n’était plus de trouver le partenaire technologique qui proposait le meilleur CPM (coût pour mille impressions), mais celui qui était le plus solide financièrement. On a assisté à une fuite vers la qualité et la sécurité. ‘La stratégie publisher est un peu aujourd’hui de de pas forcément essayer d’aller sur le sur le CPM le plus élevé mais sur qui va pouvoir vraiment payer quoi, qui a l’air insolide pour aller régler’. Des acteurs comme OpenX et TripleLift ont même dû souscrire des assurances spécifiques pour garantir aux éditeurs le paiement de leur inventaire. C’est dire le niveau de méfiance et de risque qui régnait sur le marché. L’heure n’était plus à l’optimisation des revenus, mais à la simple survie.

La culture du rebond : quand la solidarité s’organise face à la crise

Face à ce tableau assez sombre, on pourrait sombrer dans le pessimisme. Pourtant, au milieu du chaos, quelque chose de remarquable s’est produit. C’est quelque chose de profondément ancré dans la mentalité américaine, et particulièrement ici dans la Baie de San Francisco.

‘Il y a cette culture de rebond, voilà, tu tu as évoqué le rebond. La culture du du rebond existe existe aux US, elle est hyper ancrée.’

Cette culture ne s’est pas manifestée par de grands discours, mais par une multitude d’actions concrètes et spontanées, souvent nées de l’initiative individuelle ou de petits groupes.

Le meilleur exemple est l’aide apportée aux milliers de personnes qui ont perdu leur emploi. Presque du jour au lendemain, des outils se sont créés pour mettre en relation les talents disponibles et les entreprises qui, malgré la crise, continuaient de recruter. Ce ne sont pas des initiatives gouvernementales, mais des plateformes créées par la communauté, pour la communauté. ‘Il y a un site qui s’appelle Kendor.co qui qui référence 7500 entreprises, il y en a un autre layoff.FYI qui propose des listing très similaires.’ Ces sites sont devenus des ressources précieuses, des listes d’entreprises gelant leurs embauches, celles qui licencient, et surtout, celles qui recrutent encore. C’est une démonstration puissante de la force du réseau et de l’entraide dans l’écosystème. Les gens ont massivement utilisé leurs connexions LinkedIn pour recommander des collègues licenciés, pour partager des offres d’emploi, pour donner des conseils. Il y avait un sentiment partagé que tout le monde était dans le même bateau et qu’il fallait s’aider mutuellement à traverser la tempête.

L’espoir au bout du tunnel ? Les spécificités de l’écosystème de la Baie

Il faut rester lucide : cette capacité de rebond est aussi le privilège d’un écosystème unique au monde. La concentration de talents et d’entreprises technologiques est telle qu’elle crée un marché de l’emploi avec une profondeur inégalée. Comme le dit l’adage local : ‘dans la baie on dit toujours qu’il y a plus de boulot que de que de que de personnes qui peuvent les prendre’. Même en pleine crise, cette affirmation reste partiellement vraie. Les géants de la tech (Google, Apple, Facebook, Amazon) ont mieux résisté et ont continué, de manière plus sélective, à recruter. Les start-ups dans les secteurs portés par la crise (livraison, collaboration à distance, santé en ligne) ont même accéléré leurs embauches.

L’espoir pour une personne licenciée de retrouver un emploi est donc réel, probablement plus qu’ailleurs aux États-Unis ou dans le monde. La situation est difficile, personne ne le nie, mais elle n’est pas désespérée. Cette crise agit comme un énorme ‘reset’, une redistribution des cartes qui va sans doute accélérer certaines tendances et en tuer d’autres. La résilience de la Silicon Valley est mise à rude épreuve, mais les fondations de l’innovation et de l’esprit d’entreprise sont toujours là, prêtes à construire la suite.

Conclusion : une crise révélatrice et un avenir à réinventer

Ce que nous vivons en ce printemps 2020 en Californie est bien plus qu’une simple crise économique. C’est un révélateur. Elle révèle la robustesse technologique de notre industrie mais aussi sa fragilité économique. Elle révèle la brutalité d’un système social qui laisse peu de filets de sécurité, mais aussi l’incroyable force d’une communauté capable de s’auto-organiser pour faire face à l’adversité. Nous avons vu que la chaîne de valeur de la publicité digitale, si essentielle à l’internet ouvert, est sous une pression extrême, forçant tous les acteurs à repenser leurs stratégies, non plus pour la croissance, mais pour la survie.

Ce témoignage n’est qu’un instantané, une photographie prise au cœur de la tempête. Nul ne sait exactement comment le paysage de la tech sortira de cette épreuve. Certaines habitudes, comme le télétravail, seront durablement transformées. Certains modèles économiques devront être réinventés. Mais une chose est certaine : la capacité d’adaptation et de rebond qui caractérise cet endroit sera le principal atout pour construire l’après. Pour l’heure, nous naviguons à vue, en espérant des jours meilleurs, et en croisant les doigts pour que la solidarité l’emporte sur la précarité. Merci de m’avoir lu, et à bientôt pour, je l’espère, des nouvelles plus positives.

Foire aux questions (FAQ)

Comment les entreprises de la tech en Californie se sont-elles adaptées au télétravail durant le confinement ?

L’adaptation au télétravail a été techniquement très rapide pour les entreprises de la tech en Californie, car elles bénéficiaient déjà d’une forte culture du travail à distance et possédaient les infrastructures nécessaires. Les outils collaboratifs comme Slack, les plateformes de visioconférence et les accès sécurisés aux réseaux d’entreprise étaient déjà largement déployés. Cette préparation a permis d’assurer une continuité opérationnelle quasi immédiate. Cependant, le défi principal a été humain : maintenir la cohésion d’équipe, stimuler la créativité sans interactions informelles et préserver la santé mentale des employés face à l’isolement et à la disparition de la frontière entre vie professionnelle et privée.

‘Ces distances grandes mettent déjà une culture du télétravail qui est assez qui est assez ancrée quoi. Donc globalement tous les employés de la tech qui sont sont tous bien équipés les visio conférences étaient déjà en place Slack devient encore plus incontournable et les outils internes sont déjà accessible à distance.’

Pourquoi y a-t-il eu une vague de licenciements si rapide dans la tech américaine ?

La rapidité de la vague de licenciements s’explique par la conjonction de deux facteurs : une cause économique et une cause culturelle. Économiquement, l’effondrement brutal des revenus publicitaires a forcé les entreprises, notamment dans le secteur de l’ad-tech, à réduire leurs coûts de manière drastique et immédiate pour préserver leur trésorerie. Culturellement, le marché du travail américain, basé sur le principe du ‘at-will employment’ (emploi sans engagement de durée), permet aux employeurs de se séparer de leurs salariés beaucoup plus rapidement et avec moins de contraintes qu’en Europe. Cette flexibilité conduit à des réactions très vives en cas de crise.

‘En avril, c’était des acteurs vraiment 100 % digitaux. Rubicon a réduit ses effectifs de 8 % pareil pour Mediamath, OpenX prévoit de réduire les sien de 15 %. c’est vraiment enfin c’est c’est il y a vraiment des réactions très très rapide très rapide qui sont qui sont un peu qui sont un peu inquiétantes.’

Quelle est la grande différence entre le chômage aux États-Unis et en France en cas de crise ?

La différence fondamentale réside dans le niveau de protection sociale. Aux États-Unis, le système d’assurance chômage est bien moins généreux et protecteur qu’en France. L’aide financière est souvent insuffisante pour couvrir les frais de la vie courante, surtout dans des régions chères. De plus, la perte de l’emploi signifie très souvent la perte de l’assurance santé pour l’employé et sa famille, ce qui est particulièrement anxiogène en pleine pandémie. Le système français, avec des dispositifs comme le chômage partiel (activité partielle), vise davantage à préserver l’emploi et offre un filet de sécurité beaucoup plus solide, rendant la situation des salariés moins précaire.

‘Le chômage aux États-Unis, il est beaucoup beaucoup plus précaire qu’en France. … c’est une aide financière qui qui suffit généralement pas à couvrir les les frais habituels.’

Quel a été l’impact chiffré de la crise du COVID-19 sur les investissements publicitaires ?

L’impact a été massif et immédiat. Selon une étude de l’IAB (Interactive Advertising Bureau) citée dans le podcast et datant de fin avril 2020, la grande majorité des annonceurs a fortement réduit ses dépenses. Les chiffres clés sont éloquents : 37 % des annonceurs interrogés ont complètement coupé leurs investissements, 45 % les ont réajustés, c’est-à-dire revus à la baisse, et seulement 15 % ont maintenu leurs plans initiaux. Cela signifie que 82 % des entreprises ont freiné leurs dépenses publicitaires, provoquant un choc majeur pour tout l’écosystème digital qui en dépend.

‘Il y a 37 % des des annonceurs qui ont coupé leurs investissements, 45 qui ont réajusté leur spend, je vais mieux dire que c’est plutôt à la baisse et il y a seulement 15 % qui maintiennent leur plan initial.’

Pourquoi les revenus des éditeurs de presse ont-ils chuté malgré une explosion du trafic ?

Ce paradoxe s’explique par la mécanique du marché publicitaire digital. Bien que le trafic ait explosé car le public cherchait de l’information, les revenus publicitaires, eux, se sont effondrés. Premièrement, les annonceurs ont massivement réduit leurs budgets globaux. Deuxièmement, les outils de ‘brand safety’ ont empêché la diffusion de publicités à côté d’articles traitant de la pandémie (avec des mots-clés comme ‘COVID’, ‘crise’, etc.), rendant une large partie de l’inventaire des sites d’info invendable. Le revenu publicitaire étant le produit du nombre d’impressions par le prix de ces impressions (CPM), la chute vertigineuse du CPM n’a pas pu être compensée par la hausse du trafic.

‘Le New York Times a indiqué que son trafic avait plus que doublé en mars et que son revenu publicitaire dans la même période avait chuté de de de de 15 %.’

Comment les éditeurs (publishers) ont-ils changé leur stratégie de monétisation face à la crise ?

Face au risque de faillite de certains partenaires technologiques (SSP, Ad Exchanges), les éditeurs ont radicalement changé leur priorité. Avant la crise, l’objectif principal était de maximiser les revenus en cherchant le CPM (coût pour mille impressions) le plus élevé. Pendant la crise, la priorité est devenue la gestion du risque. Les éditeurs ont commencé à privilégier les partenaires qui leur semblaient les plus solides financièrement, ceux qui étaient les plus susceptibles de pouvoir payer l’inventaire acheté, même si leur offre de CPM était moins attractive. La solvabilité est devenue plus importante que la performance à court terme.

‘La stratégie publisher est un peu aujourd’hui de de pas forcément essayer d’aller sur le sur le CPM le plus élevé mais sur qui va pouvoir vraiment payer quoi, qui a l’air insolide pour aller pour aller régler.’

Quelles initiatives concrètes ont été mises en place pour aider les employés licenciés de la tech ?

La communauté de la tech a réagi avec une grande solidarité en créant de manière spontanée des plateformes d’entraide. Des sites web comme Kendor.co ou layoff.fyi ont vu le jour. Ils recensent et partagent des listes d’entreprises qui continuent de recruter, celles qui ont gelé leurs embauches, ainsi que des listes d’employés talentueux à la recherche d’un nouveau poste. Ces initiatives, nées de la communauté elle-même, ont joué un rôle crucial en offrant de la visibilité aux candidats et en facilitant la mise en relation avec les recruteurs, démontrant une forte culture du rebond et de l’entraide.

‘Il y a un site qui s’appelle Kendor.co qui qui référence 7500 entreprises, il y en a un autre layoff.FI qui propose des listing très similaires.’

Y a-t-il un espoir de rebond rapide pour le secteur de la tech dans la Baie de San Francisco ?

Oui, il y a un espoir de rebond, fondé sur la ‘culture du rebond’ très ancrée dans la mentalité locale et sur la densité unique de l’écosystème de la Baie. Malgré la crise, la demande de talents qualifiés reste forte dans de nombreux sous-secteurs de la tech, notamment chez les géants qui ont mieux résisté et les startups dont les services ont été plébiscités pendant le confinement. La concentration d’opportunités est telle qu’un employé licencié a de meilleures chances de retrouver un travail rapidement ici qu’ailleurs. La crise agit comme un test de résilience, mais les fondamentaux d’innovation et d’entraide de la région laissent entrevoir une capacité d’adaptation et de reprise.

‘La culture du du rebond existe existe aux US, elle est hyper ancrée. … on peut espérer que en tout cas dans la baie on dit toujours qu’il y a plus de boulot que de que de personnes qui peuvent les prendre.’


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