Logo de l'épisode #109 : Market > La levée de fond en 2025 c'est possible ? du podcast Bannouze : Le podcast du marketing digital !

#109 : Market > La levée de fond en 2025 c’est possible ?

Épisode diffusé le 13 janvier 2025 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

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Introduction : Lever des fonds en 2025, mission impossible ou opportunité cachée ?

Le fil d’actualité de nos réseaux sociaux, particulièrement LinkedIn, est saturé d’annonces triomphantes : des millions levés, des valorisations qui crèvent le plafond, des histoires d’entrepreneurs devenus rockstars du jour au lendemain. Cette vitrine scintillante a façonné une perception où la levée de fonds semble être un passage obligé, une consécration. Pourtant, en coulisses, la réalité est bien plus nuancée, surtout dans le contexte économique actuel. Beaucoup d’entrepreneurs se posent la question, avec une pointe d’anxiété : est-ce seulement possible de lever des fonds en 2024 et 2025 ? Le rêve est-il encore permis ou la fête est-elle finie ?

C’est précisément pour répondre à cette question cruciale que nous avons échangé. Je suis Germain Leconte, co-fondateur de Brakage.tech, un cabinet de conseil qui accompagne les entrepreneurs dans leurs premières levées de fonds. Mon quotidien, c’est de naviguer dans cet écosystème, de sentir le pouls du marché et de guider les fondateurs à travers ce qui s’apparente souvent à un parcours du combattant. Loin des clichés, je souhaite vous partager une vision de terrain, pragmatique et honnête. Comme je le disais en introduction du podcast : ‘Avec toi on va parler des levées de fonds. Et on va voir si c’est possible de lever des fonds en 2024 2025.’

Cet article n’est pas une recette magique. C’est une plongée en profondeur dans les nouvelles règles du jeu. Nous allons d’abord déconstruire le mythe de la levée de fonds pour comprendre ce qu’elle est vraiment – un outil, et non une fin en soi. Ensuite, nous analyserons l’état actuel du marché pour comprendre pourquoi, malgré un climat plus frileux, des opportunités existent. Nous décortiquerons ce que les investisseurs appellent une ‘belle boîte’ en phase d’amorçage, en allant bien au-delà des simples métriques financières. Enfin, nous détaillerons le processus étape par étape, de la préparation de votre histoire à la signature finale, en soulignant les implications concrètes pour vous et votre entreprise. Mon objectif est de vous armer de la lucidité et des connaissances nécessaires pour décider si la levée de fonds est la bonne voie pour vous, et si oui, comment maximiser vos chances de succès.

Déconstruire le mythe : La levée de fonds n’est pas une fin en soi

Avant même de se demander ‘comment’ lever des fonds, la question fondamentale est ‘pourquoi’ et ‘qu’est-ce que cela implique’. Dans l’écosystème tech, nous sommes tellement abreuvés d’annonces que l’on finit par confondre le moyen et l’objectif. La levée de fonds n’est pas un certificat de réussite, c’est un outil de financement avec des caractéristiques et des conséquences bien précises. Comprendre cette réalité est le premier pas vers une démarche saine et réfléchie.

Qu’est-ce qu’une levée de fonds, concrètement ? Dilutif vs. Non-dilutif

Lorsqu’on parle de levée de fonds dans le jargon startup, on fait presque toujours référence à un mécanisme spécifique : la levée de fonds ‘dilutive’. Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est très simple dans son principe. Comme je l’explique souvent, ‘c’est un apport de capitaux […] qui permet à l’entrepreneur du coup de recevoir du cash en contrepartie d’une cession des actions.’ En d’autres termes, vous faites entrer des investisseurs (Business Angels, fonds de capital-risque) dans le capital de votre société. Ils vous donnent de l’argent pour accélérer votre développement, et en échange, ils deviennent propriétaires d’une partie de votre entreprise. Cette part, que vous leur cédez, ‘dilate’ le capital existant, et par conséquent, votre propre pourcentage de détention diminue. C’est un acte fondateur qui change la structure de propriété de votre projet pour toujours.

Il est crucial de distinguer cette méthode d’une autre forme de financement : le ‘non-dilutif’. Celui-ci regroupe tous les financements qui n’impliquent pas de cession de capital. Il s’agit principalement de prêts (bancaires, d’honneur, Bpifrance) ou de subventions. L’avantage est évident : vous ne cédez aucune part de votre entreprise. La contrepartie, c’est qu’il s’agit le plus souvent d’une dette qu’il faudra rembourser. Ces deux mécanismes ne sont pas opposés, ils sont souvent complémentaires. Une bonne stratégie de financement combine intelligemment des fonds propres (dilutifs) pour financer la croissance à risque et de la dette (non-dilutive) pour des besoins plus prévisibles. L’erreur serait de ne voir que la levée de fonds comme seule et unique option.

Une norme ou une exception ? La réalité statistique du financement

À force de passer nos journées sur les réseaux et dans les médias spécialisés, on peut vite avoir l’impression que toutes les startups qui réussissent lèvent des fonds. C’est une illusion d’optique. La réalité est tout autre. Lever des fonds ‘c’est évidemment une exception, c’est une exception dans l’histoire d’une boîte.’ La très grande majorité des entreprises, y compris des entreprises très rentables et pérennes, ne lèvent jamais de fonds. Elles se financent par leurs propres revenus, c’est ce qu’on appelle le bootstrapping.

Même au sein de l’écosystème des startups technologiques, celles qui réussissent à convaincre des investisseurs sont une minorité. Les chiffres varient, mais une statistique souvent citée est parlante : ‘généralement on cite qu’après 5 % des boîtes qui arrivent à lever des fonds.’ Cela signifie que 95% des projets qui se lancent dans cette voie n’y parviennent pas. Il est donc fondamental de ne pas associer la valeur d’une entreprise à sa capacité à lever des fonds. Je le répète sans cesse aux entrepreneurs que je rencontre : ‘il faut très vite faire une dichotomie entre des belles boîtes et des boîtes qui lèvent des fonds.’ On peut construire une magnifique entreprise, leader sur son marché et très profitable, sans jamais céder un seul pourcent de son capital. La levée de fonds n’est qu’une stratégie d’accélération adaptée à un certain type de projet : ceux qui visent une croissance exponentielle sur des marchés immenses, au prix d’une perte de rentabilité à court terme.

Cette prise de recul est essentielle. Se lancer dans une levée de fonds parce que ‘tout le monde le fait’ est la pire des raisons. C’est un chemin exigeant, qui change la nature même de votre rôle d’entrepreneur. C’est un choix stratégique qui doit être mûrement réfléchi, en pesant les bénéfices de l’accélération face aux contraintes de la dilution et du reporting.

Le marché de la levée de fonds en 2024-2025 : Un retour à la raison

Après des années d’euphorie où l’argent semblait couler à flots, le marché du capital-risque a connu un net refroidissement. Les gros titres parlent de ‘tech winter’, de crise, de difficultés. Il est indéniable que le contexte a changé. Mais plutôt qu’une crise, je préfère y voir un retour à la normale, une forme d’assainissement qui, à long terme, est bénéfique pour l’écosystème. Naviguer dans ce nouvel environnement demande plus de préparation et de réalisme, mais les opportunités n’ont pas disparu, elles se sont simplement recentrées.

Moins de volume, plus de sérieux : L’état des lieux du capital-risque

Les chiffres sont clairs : ‘les levées de fonds se réduisent. c’était cas en 2023, c’est aussi le cas en 2024.’ Les investisseurs sont devenus plus prudents, plus ‘frileux’. Les délais de décision s’allongent, les audits (due diligences) sont plus poussés, et les exigences en matière de traction et de rentabilité se sont accrues. L’ère de l’investissement basé sur la peur de manquer une opportunité (‘FOMO’) est révolue. Pour un entrepreneur, cela signifie que le parcours est plus ardu. Il faut un dossier plus solide, une vision plus claire et une patience plus grande.

Cependant, je suis convaincu que ce changement est positif. ‘À titre personnel je suis assez convaincu que c’est un mécanisme assez sain.’ Pourquoi ? Parce que nous voyons des investisseurs qui retournent aux fondamentaux : une analyse rigoureuse des modèles économiques, une véritable évaluation des équipes et des marchés. Cette exigence accrue conduit à financer des projets mieux structurés et plus résilients. ‘Je pense que on a aussi moins de boulettes qui se font avec cette période.’ En parallèle, cette situation force les entrepreneurs à être meilleurs. Ils doivent se concentrer davantage sur leur ‘equity story’, l’histoire qu’ils racontent aux investisseurs, et sur la construction de bases solides pour leur entreprise. La bulle a éclaté, et ce qui reste, c’est un écosystème plus mature et plus rationnel.

Pourquoi l’early stage reste un segment protégé

Dans ce contexte général de contraction, il est important de nuancer. Toutes les étapes de la vie d’une startup ne sont pas touchées de la même manière. Les tours de financement très avancés (Série C, D et au-delà) sont les plus impactés, car ils dépendent de valorisations qui ont été fortement corrigées. En revanche, le segment qui nous intéresse, l’amorçage (pre-seed, seed, série A), est relativement épargné. ‘Je pense que sur le segment early stage, on est assez protégé.’

La raison est structurelle. Les fonds d’amorçage et les Business Angels qui investissent à ce stade ont levé des capitaux auprès de leurs propres souscripteurs (les LPs) pour les déployer sur plusieurs années. Ils ont donc un mandat d’investissement et des liquidités à placer. ‘On a toujours des investisseurs que ce soit des business Angel ou des fonds très early stage […] qui ont encore les poches relativement pleines.’ Leur métier est de parier sur le très long terme, sur des équipes et des visions, bien avant que la rentabilité ne soit prouvée. Ils savent que les plus grandes entreprises naissent souvent dans les périodes de crise. J’en ai la preuve concrète quasi quotidiennement : ‘je discutais encore avec un fond lundi qui me disait qu’il avait quatre deals à faire d’ici la fin de l’année.’ L’argent est donc disponible. Mais il est plus sélectif. La conclusion est simple : la place existe, mais elle est réservée aux meilleurs projets. ‘Il y a toujours de la place pour les belles boîtes. Les belles boîtes arrivent toujours à lever.’ La question n’est donc plus ‘peut-on lever ?’ mais ‘mon projet fait-il partie de ces belles boîtes ?’.

Anatomie d’une ‘belle boîte’ : Ce que les investisseurs recherchent vraiment

Le terme ‘belle boîte’ est sur toutes les lèvres des investisseurs, mais que signifie-t-il concrètement, surtout au tout début de l’aventure, quand les chiffres sont encore embryonnaires ? Un investisseur en capital-risque (VC) ne lit pas l’avenir, il essaie de déceler des signaux faibles qui indiquent un potentiel hors-norme. Bien sûr, il va analyser le marché, le produit, la vision. Mais en early stage, où tout est encore à construire, deux critères écrasent tous les autres par leur importance.

L’équipe avant tout : Le pari sur les fondateurs

C’est le mantra de l’investissement d’amorçage : on investit dans des gens avant d’investir dans une idée. Une idée peut pivoter, un marché peut évoluer, mais une équipe de fondateurs exceptionnelle saura naviguer dans la tempête. C’est le critère numéro un, non négociable. La conviction est profonde et partagée par tous les VCs : ‘un investisseur préfère miser sur un projet plus ou moins bancal mais qui sera allié par un entrepreneur entrepreneuse qui a une vraie vision, une vraie force d’exécution plutôt que l’inverse.’

Qu’est-ce qu’une équipe ‘top gun’ ? Ce n’est pas seulement une question de CVs prestigieux. C’est un mélange de plusieurs facteurs. D’abord, la légitimité : pourquoi cette équipe est-elle la mieux placée au monde pour résoudre ce problème précis ? Ensuite, la complémentarité : les fondateurs couvrent-ils les compétences clés (tech, produit, sales) ? Enfin, et c’est peut-être le plus important, la force d’exécution et la résilience. Un investisseur cherche des entrepreneurs capables d’abattre des murs, d’apprendre vite et de ne jamais abandonner. Si vous avez déjà une expérience entrepreneuriale, même un échec, c’est souvent un atout précieux. Cela prouve que vous connaissez la dure réalité du terrain. C’est sur cette capacité humaine que l’investisseur parie des millions.

La vision globale : Penser ‘licorne en puissance’ dès le premier jour

Le deuxième critère, tout aussi fondamental, est l’ambition du projet. Il faut comprendre la mécanique du capital-risque. Un fonds investit dans un portefeuille de 10, 20, 30 startups, en sachant pertinemment que la majorité va échouer. ‘Un visici par définition, il y a une boîte sur 10 qui va qui va fonctionner et donc il faut que demain la boîte puisse être une licorne en puissance.’ Le succès d’une seule de ces entreprises doit non seulement couvrir les pertes de toutes les autres, mais aussi générer un retour sur investissement significatif pour tout le fonds. Par conséquent, un VC ne peut pas se permettre d’investir dans une ‘belle PME’ qui vise un marché de niche. Il recherche des projets capables de devenir des leaders mondiaux et de valoir des milliards.

Cette exigence de vision globale est souvent ce qui fait défaut. Nous voyons passer de nombreux projets solides, intelligents, mais dont le marché potentiel est trop limité. Le problème numéro un d’un fonds d’investissement de premier plan à Paris n’est pas le manque d’argent, mais de trouver des projets avec cette ambition démesurée : ‘C’était son problème numéro 1, c’était trouver des belles boîtes qui peuvent demain peser plusieurs milliards d’euros sur un marché européen.’ Votre travail, en tant qu’entrepreneur, est de démontrer que le problème que vous résolvez est immense et que votre solution peut s’étendre bien au-delà de votre marché initial.

Faut-il absolument générer du revenu pour lever des fonds ?

C’est l’une des questions les plus fréquentes et l’une des plus grandes idées reçues. L’entourage, souvent bienveillant mais mal informé, martèle : ‘Génère du revenu, sinon n’y va même pas’. Ma réponse est catégorique : ‘Non. Non, je suis je suis je suis pas d’accord avec ça et la plupart des investes non plus.’ Et ce n’est pas un discours marketing pour attirer les entrepreneurs le plus tôt possible, c’est une réalité stratégique.

Ce qu’un investisseur achète, ce n’est pas un chiffre d’affaires à un instant T, c’est une dynamique, une vélocité. ‘Un investisseur va acheter une traction et dans la notion de traction, il y a une notion de vitesse.’ La traction peut prendre de multiples formes : une liste d’attente de milliers d’utilisateurs, des lettres d’intention de grands comptes, un taux d’engagement exceptionnel sur un produit gratuit, etc. L’exemple que j’aime donner est celui de deux entreprises : la première fait 500 000€ de chiffre d’affaires mais stagne depuis 6 mois ; la seconde est pré-revenu mais vient de signer 10 projets pilotes avec des leaders de son industrie. Laquelle est la plus attractive ? Sans hésiter, la seconde. Elle démontre une capacité à exécuter et une validation marché qui promet une croissance explosive une fois le financement obtenu. Attendre d’être sur un ‘plafond de verre commercial’ pour lever des fonds est une erreur stratégique. Vous arrivez devant l’investisseur sans dynamique, et pendant les 4 à 8 mois du processus, votre croissance sera plate, ce qui est le pire signal à envoyer.

Le processus de levée de fonds décortiqué : De la préparation au closing

Se lancer dans une levée de fonds, c’est comme s’engager dans un marathon. C’est un processus long, intense et codifié, qui dure en moyenne entre 4 et 8 mois, parfois jusqu’à 12. Chaque étape a ses propres enjeux et exige une préparation méticuleuse. Le rôle d’un cabinet comme le nôtre est d’être le ‘chef d’orchestre’ de ce marathon, mais c’est bien l’entrepreneur qui court. Il est essentiel de comprendre que cela va devenir une part très significative, voire principale, de votre travail pendant plusieurs mois.

La phase de préparation (1-2 mois) : L’art de construire son histoire

Cette première phase est sans doute la plus critique. C’est là que vous posez les fondations de tout le processus. L’erreur serait de croire qu’il s’agit simplement de rédiger un ‘deck’. Il s’agit de définir en profondeur votre ‘equity story’ : l’histoire que vous allez raconter sur la valeur future de votre entreprise. Cela implique de se poser des questions fondamentales sur votre vision, votre marché, votre stratégie. C’est un travail introspectif intense qui va durer environ un mois et demi et consommer 50 à 70% du temps d’un fondateur.

L’outil principal de cette phase est le fameux ‘deck’ de présentation. Un bon deck repose sur trois piliers. Premièrement, la simplicité. ‘Utiliser des mots simples, le moins de mots techniques possible pour ne pas perdre un un investisseur.’ N’oubliez jamais le contexte : votre deck sera lu en 3 à 5 minutes par un analyste jeune qui en voit passer des centaines par semaine. S’il ne comprend pas immédiatement, il passe au suivant. Deuxièmement, le storytelling. Le but n’est pas de tout dire, mais de susciter l’envie. Le lecteur doit finir sa lecture avec une seule pensée : ‘Comment je peux prendre un call avec l’entrepreneur pour en savoir plus sur le projet.’ Troisièmement, le design. Ce n’est pas un détail. ‘C’est la quasiment la seule occasion de montrer au lecteur et à l’investisseur que votre façon de bosser elle est propre.’ Un design soigné, sans faute de frappe, inspire confiance et professionnalisme. En parallèle du deck, il faudra préparer un business plan détaillé et des prévisions financières pour les discussions plus approfondies.

Le roadshow (2-4 mois) : Un marathon de sales à plein temps

Une fois les documents prêts, la phase de ‘roadshow’ commence. C’est un pur travail de commercial : il s’agit de contacter des dizaines d’investisseurs, de pitcher, de suivre, de relancer. C’est l’étape la plus chronophage et la plus exigeante nerveusement. Pendant cette période, l’un des fondateurs doit y être dédié quasi exclusivement. ‘Généralement on conseille qu’il y ait un des founders qui se soit focus à 100 % sur la sur la levée de fond.’ En termes de charge de travail, ‘c’est au moins je pense 80 % de la journée.’

L’objectif n’est pas seulement de trouver UN investisseur, mais d’en intéresser plusieurs simultanément pour créer une dynamique concurrentielle. C’est ce ‘jeu d’enchère’ qui vous donnera le pouvoir de négocier de meilleures conditions (valorisation, clauses, etc.). C’est un processus itératif : chaque rendez-vous est une occasion d’affiner votre pitch, de comprendre les objections et d’améliorer votre histoire. Il faut une organisation sans faille pour gérer le pipeline d’investisseurs, les suivis, et maintenir l’élan sur la durée.

Le closing (1-2 mois) : Négociation et paperasse

Lorsque vous recevez une ou plusieurs offres d’investissement, appelées ‘term sheets’, vous entrez dans la phase finale : le closing. Cette phase est moins chronophage en termes de rendez-vous, mais elle est extrêmement dense et stressante. C’est ici que les avocats spécialisés entrent en jeu pour négocier les détails juridiques de la term sheet et surtout du pacte d’actionnaires, le document qui régira votre relation future avec vos investisseurs. Cette étape inclut aussi la phase de ‘due diligence’, où les investisseurs vont vérifier en profondeur tous les aspects de votre entreprise (technique, financier, juridique). C’est une période intense où la moindre erreur peut coûter cher. ‘Les derniers jours où évidemment là on signe […] c’est je pense du full time au moins dans l’énergie consommée.’ La levée n’est officielle que lorsque l’argent est viré sur le compte en banque de l’entreprise.

L’après-levée : Comprendre les nouvelles règles du jeu

Le virement des fonds sur le compte de l’entreprise n’est pas une ligne d’arrivée, c’est une nouvelle ligne de départ. L’euphorie de la signature laisse rapidement place à une nouvelle réalité. Vous avez désormais des partenaires, des comptes à rendre et une pression accrue pour délivrer la croissance promise. C’est un changement de paradigme fondamental dans la vie d’un entrepreneur.

La dilution : Combien de capital allez-vous céder ?

La question de la valorisation et de la dilution est souvent celle qui préoccupe le plus les entrepreneurs. Combien de mon entreprise vais-je devoir céder ? Il n’y a pas de réponse unique, mais il existe des standards de marché. Pour une première levée de fonds (pre-seed, seed), ‘la dilution moyenne […] se rapproche quand même autour de 20 %.’ Idéalement, pour un tour d’amorçage, on essaie de rester entre 10 et 15%. Si le deal est moins favorable ou le projet moins attractif, cela peut monter à 25%. Il faut comprendre que la valorisation n’est pas une science exacte à ce stade. Elle est le fruit d’une négociation et surtout du rapport de force que vous avez réussi à créer. ‘Si au bout de 2 mois de road show, tu as que une tape sur la table, il sera beaucoup moins fort que si au bout de 3 semaines tu as 10 investisseurs qui tapent à la porte.’ C’est la compétition entre investisseurs qui fait monter la valorisation, pas un tableau Excel complexe.

Le pacte d’actionnaires : Votre nouveau contrat de mariage

Au-delà de la dilution, le changement le plus profond est la perte d’une partie de votre autonomie. C’est un point que nous martelons : ‘à partir du moment où tu fais rentrer un investisseur, tu es plus totalement chez toi.’ Votre relation avec vos nouveaux actionnaires est encadrée par un document juridique clé : le pacte d’actionnaires. C’est votre ‘contrat de mariage’. Il définit les règles de gouvernance, les droits et les devoirs de chacun. Concrètement, cela se traduit par des obligations de reporting régulières. Vous devrez organiser des ‘boards’ (conseils d’administration) tous les mois ou tous les trimestres pour présenter vos résultats, vos plans et prendre des décisions stratégiques. Certaines décisions importantes (recrutements clés, nouvelles dépenses majeures…) pourront même nécessiter l’approbation de vos investisseurs. C’est un changement majeur pour un fondateur habitué à une totale liberté de décision. Il faut être prêt à jouer ce jeu de la transparence et de la co-construction.

Conclusion : Prêt à vous lancer dans l’arène ?

Nous avons parcouru ensemble les méandres de la levée de fonds en 2025. Le tableau est clair : le chemin est plus escarpé qu’auparavant, l’exigence est montée d’un cran, mais la voie reste ouverte pour les projets d’exception. Le marché, plus mature et rationnel, favorise les entrepreneurs qui ne cèdent pas aux effets de mode mais construisent des entreprises résilientes sur des fondations solides. La clé n’est plus dans l’agitation, mais dans la préparation et la lucidité.

Les points à retenir sont simples mais fondamentaux. D’abord, la levée de fonds est un outil, pas une fin. Assurez-vous qu’elle correspond bien à votre ambition et à votre modèle. Ensuite, rappelez-vous qu’en early stage, les investisseurs parient avant tout sur une équipe ‘top gun’ et une vision capable de transformer un marché. Le revenu est secondaire par rapport à la vitesse de votre traction. Enfin, comprenez que ce processus est un véritable marathon qui vous demandera un investissement total, au détriment du développement opérationnel à court terme, et qui changera durablement votre rapport à votre propre entreprise.

Alors, avant de rédiger le premier mot de votre deck, posez-vous les bonnes questions. Suis-je prêt à consacrer six mois de ma vie à ce processus ? Mon projet a-t-il réellement le potentiel d’une licorne ? Suis-je prêt à partager le contrôle et à rendre des comptes ? Si la réponse à ces questions est un ‘oui’ franc et massif, alors lancez-vous. Préparez-vous, entourez-vous, et racontez votre histoire avec conviction. Car si la levée est réussie, ce n’est que le début. C’est le carburant qui vous permettra de passer à la vitesse supérieure et de transformer votre vision en réalité.

FAQ : Les questions que tout entrepreneur se pose sur la levée de fonds

Est-ce une bonne période pour lever des fonds en 2025 ?

Oui, c’est tout à fait possible, mais le contexte a changé. Le marché est plus sélectif et les investisseurs sont plus prudents. Ils prennent plus de temps pour analyser les dossiers et attendent des projets plus solides. Cependant, cette situation est aussi plus saine, car elle filtre les projets moins viables et favorise les entreprises bien structurées. Les fonds d’amorçage ont toujours des capitaux à déployer et sont activement à la recherche des meilleures équipes. Pour une ‘belle boîte’, il y aura toujours de la place.

‘Oui, on a des sont qui se font. […] il y a toujours de la place pour les belles boîtes. Les belles boîtes arrivent toujours à lever. […] clairement, oui, c’est encore le cas sur des conditions plus difficiles sur des temps plus longs avec des challenges plus importants.’

Qu’est-ce qu’une ‘belle boîte’ pour un investisseur en early stage ?

En phase d’amorçage, une ‘belle boîte’ ne se définit pas par son chiffre d’affaires, mais par deux critères primordiaux. Le premier est l’équipe fondatrice : les investisseurs parient sur des entrepreneurs qui ont une vision forte, une grande capacité d’exécution et de la résilience. Le second critère est la taille de l’opportunité : le projet doit s’attaquer à un marché immense et avoir une vision globale, avec un potentiel de devenir un leader valant plusieurs milliards. C’est ce potentiel de croissance exponentielle qui justifie le risque pris par l’investisseur.

‘Le premier c’est le critère de l’équipe. […] un investisseur préfère miser sur un projet plus ou moins bancal mais qui sera allié par un entrepreneur entrepreneuse qui a une vraie vision, une vraie force d’exécution. […] le deuxième bloc […] c’est une vision globale. Un visici par définition, il y a une boîte sur 10 qui va qui va fonctionner et donc il faut que demain la boîte puisse être une licorne en puissance.’

Dois-je absolument avoir du chiffre d’affaires pour intéresser un investisseur ?

Non, c’est une idée reçue. Il est tout à fait possible, et parfois même stratégique, de lever des fonds avant d’avoir généré du revenu. Ce que les investisseurs recherchent, c’est de la ‘traction’, qui est une preuve de validation du marché et d’une dynamique de croissance. Cette traction peut être une forte croissance du nombre d’utilisateurs, une liste d’attente importante ou des lettres d’intention de clients. Une startup sans revenu mais avec une traction explosive est souvent plus attractive qu’une entreprise avec un chiffre d’affaires qui stagne.

‘Non. Non, je suis je suis je suis pas d’accord avec ça et la plupart des investes non plus. […] un investisseur va acheter une traction et dans la notion de traction, il y a une notion de vitesse.’

Quels sont les trois éléments clés d’un bon deck de présentation ?

Un deck efficace, qui donne envie à un investisseur de vous rencontrer, repose sur trois piliers. D’abord, la simplicité : utilisez un langage clair et évitez le jargon technique pour être compris en quelques minutes. Ensuite, le storytelling : votre deck ne doit pas tout dire, mais raconter une histoire captivante qui donne envie d’en savoir plus. L’objectif est de décrocher un rendez-vous. Enfin, le design : un document propre, soigné et sans fautes de frappe montre votre professionnalisme et le sérieux de votre démarche.

‘Un bon deck je pense que sur un bon deck, il y a un peu trois éléments à avoir en tête. Le premier c’est […] la simplicité […]. Deuxième ambition, c’est d’être d’avoir un story time parfait […]. Et le troisième point […] c’est celui du design.’

Combien de temps un entrepreneur doit-il consacrer à sa levée de fonds ?

Lever des fonds est une activité extrêmement chronophage qui ne doit pas être sous-estimée. Il est généralement conseillé qu’un des cofondateurs se consacre quasi-exclusivement au processus. La phase de préparation peut occuper 50 à 70% de son temps pendant un à deux mois. La phase de roadshow (rencontres avec les investisseurs) est encore plus intense et s’apparente à un travail à plein temps, occupant au moins 80% de ses journées pendant deux à quatre mois. C’est un véritable marathon qui se fait au détriment des autres tâches opérationnelles.

‘Généralement on conseille qu’il y ait un des founders qui se soit focus à 100 % sur la sur la levée de fond. […] le road show […] là c’est évidemment du plein temps. […] c’est au moins je pense 80 % de la journée.’

Quelle part du capital cède-t-on lors d’une première levée de fonds ?

La dilution est une conséquence inévitable de la levée de fonds. Pour un premier tour de table (pre-seed ou seed), la norme de marché se situe autour de 20%. Dans un scénario idéal, avec un projet très attractif et une bonne négociation, il est possible de céder entre 10 et 15%. Dans des conditions moins favorables, cela peut monter à 25%. La dilution finale dépendra moins de calculs théoriques que de votre capacité à créer une compétition entre plusieurs investisseurs intéressés.

‘La dilution moyenne elle est la médiane et la moyenne se rapproche quand même autour de 20 %. sur du préside, l’idéal c’est quand même de lâcher plutôt entre 10 15 %. […] sur des un peu plus importantes, c’est 20 25 %.’

Quel est le rôle exact d’un cabinet de conseil en levée de fonds comme Brakage ?

Un cabinet comme le nôtre agit comme un chef d’orchestre pour professionnaliser et optimiser le processus de levée de fonds. Notre rôle est de rééquilibrer l’asymétrie d’information entre l’entrepreneur, qui lève des fonds pour la première fois, et l’investisseur, qui en fait son métier. Nous aidons à construire l’histoire (equity story), à préparer la documentation (deck, BP), à cibler les bons investisseurs, à gérer le roadshow et, surtout, à négocier les meilleures conditions. Notre objectif est de maximiser les chances de succès de l’entrepreneur en le préparant au mieux, sans jamais garantir le résultat.

‘Notre métier c’est d’être le chef d’orchestre de la de fond et donc de les accompagner sur l’ensemble de ces étapes. […] Il y a une asymétrie d’information qui est hyper forte et qu’on essaie de régler.’

Quelles sont les plus grandes erreurs à ne pas commettre lors du premier contact avec un investisseur ?

La première impression est cruciale. L’erreur la plus fréquente est le manque de simplicité : si l’investisseur ne comprend pas ce que vous faites en 30 secondes, il décroche. Il faut éviter le jargon et être capable de pitcher son projet clairement. Une autre erreur est de manquer d’humilité et de ne pas être ouvert aux feedbacks. Un entrepreneur trop sûr de lui, qui donne l’impression de n’avoir besoin de personne, fait fuir les investisseurs qui cherchent à être des partenaires. Il faut trouver le juste équilibre entre une conviction inébranlable dans son projet et une posture d’écoute.

‘L’erreur qu’on voit souvent des entrepreneurs, c’est déjà ne pas forcément être simple. […] ce qu’on aime pas voir c’est c’est des c’est des entrepreneurs un peu sûrs d’eux qui vont avoir cette posture de presque nous faire le cadeau de travailler avec eux. On a besoin encore une fois d’avoir des entrepreneurs ouverts au feedback.’


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