Logo de l'épisode #87 : Le product market fit c'est quoi ? du podcast Bannouze : Le podcast du marketing digital !

#87 : Le product market fit c’est quoi ?

Épisode diffusé le 24 juillet 2023 par Bannouze : Le podcast du marketing digital !

Écouter l'épisode :

Qu’est-ce que le product market fit ? La définition d’une experte

Le monde de l’entrepreneuriat est rempli de concepts et d’anglicismes qui peuvent parfois sembler complexes. Pourtant, certains sont fondamentaux pour la réussite d’un projet. Le product market fit en fait partie. Loin d’être un simple jargon business, il s’agit d’une étape cruciale qui détermine si votre produit a une chance de réussir avant même de lancer des campagnes marketing à grande échelle. Pour démystifier ce terme, j’ai reçu Coralie Dussart, fondatrice du cabinet de growth marketing Spag et créatrice du jeu de société Mimetics.

Alors, c’est quoi le product market fit ? Coralie nous livre sa vision, intimement liée à son expertise en marketing digital :

« Notre définition chez Spag du product market fit, c’est plutôt d’essayer d’être sûr qu’on a le bon produit, que le produit a trouvé son marché et surtout qu’en fait, au moment où on veut accélérer et faire du marketing digital justement, et ben, on a un peu tous les voyants qui sont au vert pour commencer des vrais tests. […] qu’on a trouvé son marché, sa cible, son audience, qu’il y a un intérêt, que le produit a été adoubé, validé. »

En d’autres termes, atteindre son product market fit signifie que vous avez créé un produit qui répond à un besoin réel pour un marché suffisamment large, et que ce marché est prêt à payer pour votre solution. C’est le signal que vous pouvez appuyer sur l’accélérateur sans jeter votre argent par les fenêtres.

Valider son produit avant le lancement : les étapes cruciales

La question qui brûle les lèvres de tout entrepreneur est alors : comment savoir si le produit que je vais lancer est le bon, avant même d’avoir des clients ? Coralie Dussart insiste sur l’importance de la phase de validation en amont, une démarche structurée pour minimiser les risques.

De l’étude de marché à la co-construction

Tout commence par un travail qui peut sembler classique, mais qui reste indispensable. Coralie le rappelle : « Finalement, ce n’est pas inutile. Il est quand même [important] de regarder un peu le marché dans lequel on évolue, est-ce qu’il y a déjà des produits similaires, pas similaires ? Est-ce qu’on est dans ce fameux océan bleu ou océan rouge ? » Cette première analyse concurrentielle permet de situer son projet et d’évaluer la maturité du marché.

Mais la théorie ne suffit pas. L’étape suivante est de confronter l’idée à sa cible potentielle. L’ère du digital facilite grandement cette démarche. « Aujourd’hui, je pense que ça se fait de plus en plus avec LinkedIn de se dire bah voilà, je veux créer par exemple un SAS en RH, ben je vais aller contacter quelques RH sur LinkedIn et puis leur demander un peu leurs avis pour co-construire avec eux. » Cette idée de co-construction est centrale : il ne s’agit pas seulement de demander un avis, mais d’impliquer les futurs utilisateurs dans la création même du produit, à la manière des bêta-testeurs pour un logiciel.

L’exemple concret de Mimetics : prototyper et tester pendant 3 ans

Pour illustrer ce processus, Coralie partage son expérience personnelle avec son jeu de société, Mimetics. L’idée de départ était bonne, mais comment s’assurer qu’elle plairait au-delà de son cercle d’amis ? La réponse fut le prototypage et le test intensif.

« On en avait fait un peu des prototypes mais sans se lancer dans un prototype énorme, sur des petits papiers, on a fait jouer des gens mais pendant 3 ans avant de se lancer vraiment. Jusqu’à ce que tout le monde nous dise vraiment ‘c’est trop bien’ et qu’on voie aussi un peu les pain points. »

Ce long processus de test a permis d’identifier des problèmes concrets et d’affiner le produit. Par exemple, en observant les joueurs, Coralie et son équipe ont réalisé que les gens mimaient toujours les mêmes expressions. Cette observation a conduit à une amélioration clé : intégrer des cartes d’expressions dans le jeu. « Au moment où le jeu est sorti, en fait, on l’avait co-créé. […] et là bah on est presque sûr de trouver un marché ou en tout cas on sait adresser cette cible-là. »

L’erreur fatale : la peur de se faire piquer son idée

Une des plus grandes craintes de l’entrepreneur, c’est de parler de son projet et de se faire voler son idée. Coralie est catégorique sur ce point : c’est une erreur. « Osez parler de vos produits. » L’idée seule ne vaut rien ; ce qui compte, c’est l’exécution. « Si il y a l’idée de génie, quelqu’un l’a déjà eu avant si ce n’est qu’une idée. Donc en fait c’est il faut que si c’est un très bon produit, il faut qu’il soit développé puis il faut qu’il y ait du faire savoir sur ce produit. » Ne pas communiquer sur son produit en amont, c’est se priver de retours précieux qui pourraient faire la différence entre un succès et un échec.

Après le lancement : comment affiner son product market fit ?

Le travail de validation ne s’arrête pas une fois le produit sur le marché. C’est même là que le plus gros du travail commence. Il faut passer de la théorie à la pratique et confronter son produit à la réalité des vrais clients.

Le dialogue client : la clé pour éviter les biais cognitifs

Le plus grand piège pour un créateur est de tomber amoureux de son produit au point de s’aveugler. C’est ce qu’on appelle les biais cognitifs. On pense que son produit est le meilleur, on imagine des fonctionnalités que les clients attendent alors qu’ils n’en ont pas besoin… Pour combattre cela, une seule solution : parler à ses clients.

Coralie observe une tendance surprenante : « Je me rends compte souvent nous chez nos clients que les gens en fait, ils ont presque peur de parler à leurs clients souvent. » Ils oublient alors l’essentiel : les appeler, comprendre ce qui les a fait passer à l’acte, pourquoi ils achètent, et surtout, pourquoi ils rachètent. C’est la fidélisation qui est le véritable indicateur d’un product market fit solide. Pour cela, plusieurs techniques existent : analyser les avis, envoyer des questionnaires, mais la plus efficace reste le contact direct. « Le mieux c’est quand même de les appeler, de leur parler, quitte à les faire venir, un peu d’essayer de créer une communauté de ces gens qu’ont acheté le produit sans nous connaître. »

Découvrir sa vraie cible : l’histoire inattendue de Mimetics

Parfois, la confrontation avec le marché réserve des surprises. On pense s’adresser à une cible précise, mais la réalité est tout autre. L’exemple de Mimetics est encore une fois parlant :

« On s’est rendu compte pour Mimetics que finalement c’était pas les gens de notre entourage spécifiquement qui achetaient le plus mais des mamans de 50 ans et plus qui achetaient parce qu’elles voulaient créer de l’unité dans leur famille et ça on l’avait pas anticipé. »

Cette découverte est fondamentale. Plutôt que de s’entêter à vouloir toucher sa cible fantasmée (les trentenaires qui aiment jouer en soirée), il faut réagir vite, s’adapter, et aller parler à cette nouvelle audience pour ajuster ses canaux de communication et son message marketing.

Gérer les avis : entre retours constructifs et bruit statistique

Les avis en ligne sont une mine d’or, mais il faut savoir les interpréter. Un avis négatif ne doit pas être ignoré, mais il ne faut pas non plus tout remettre en question à chaque critique. Coralie met en garde contre la surréaction : « C’est pas parce qu’il y a un client qui dit que c’est vraiment nul qu’il est représentatif. Il y a un peu ce sujet de la représentativité. » Il est essentiel de prendre du recul et de savoir faire la part des choses, tant pour les avis négatifs que pour les avis positifs. L’objectif est d’identifier des tendances de fond, pas de réagir à chaque cas isolé.

La méthodologie du ‘Test and Learn’ pour optimiser en continu

Une fois les premières ventes réalisées et les premiers retours collectés, comment structurer sa démarche d’amélioration ? C’est là qu’intervient la méthodologie Test and Learn.

Les principes d’un test marketing efficace

Le Test and Learn, ou « on essaie et on apprend », n’est pas simplement une série de tentatives au hasard. C’est une approche rigoureuse. Coralie insiste sur un point : « Faire des tests significatifs. […] des tests qui ont assez de volume et qui sont assez précis pour qu’on puisse en tirer des vraies conclusions. » Trop souvent, des entrepreneurs concluent qu’une approche ne fonctionne pas après un test mal conditionné.

La méthode est multi-axes et comparative. Il s’agit de tester simultanément plusieurs variables :

  • Les audiences : La femme de 50 ans ou celle de 35 ans ?
  • Les bénéfices (axes marketing) : Le jeu est-il perçu comme un outil intergénérationnel, un jeu pour s’amuser en soirée, ou un cadeau original ?
  • Les formats publicitaires : Vidéo, image, carrousel ?

L’idée est de comparer les performances de chaque combinaison pour comprendre ce qui résonne le mieux auprès de quelle cible. Ce n’est pas juste de l’A/B testing classique (A vs B), mais une exploration multidimensionnelle pour découvrir des opportunités.

Le ‘Test and Learn’ pour les grands groupes et les PME

Cette approche n’est pas réservée aux startups agiles. Coralie explique comment son agence l’applique même pour des départements innovation de grands groupes cosmétiques. « Avant le lancement d’un produit, on va tester la cible pour voir s’il y a du répondant. On peut faire une fausse marque avec une landing page qui explique le futur produit, des publicités […] et on regarde si elle a un intérêt. » Cette technique permet non seulement de valider l’intérêt pour le produit mais aussi d’estimer les futurs coûts d’acquisition, reliant ainsi le marketing au business plan.

Et pour les petites boîtes ? C’est tout à fait applicable. « C’est ce qu’on a fait pour Mimetics par exemple qui est aussi un side project. On a lancé nos pubs avec différents visuels. » La clé, pour une petite structure, est de surmonter le manque de réflexe de documentation.

L’importance de la documentation pour un apprentissage sur le long terme

Le principal écueil pour une petite entreprise est de tester sans formaliser. « Il faut prendre le pli de documenter avant de tester pour voir si notre test est valable et surtout pour se souvenir de ce qu’on avait testé. » Cela force à réfléchir en amont à l’objectif du test et à historiser les résultats. Sans cela, impossible de capitaliser sur les apprentissages.

De plus, le marché évolue. « Un test qu’on a fait il y a 5 ans ou 3 ans ou 2 ans, en fait 2 ans après […] les tests c’est plus les mêmes parce que le marché il est plus pareil. » Documenter permet de réitérer des tests et de voir si ce qui fonctionnait hier est toujours valable aujourd’hui.

Ressources pour aller plus loin sur le product market fit

Pour approfondir ces concepts, Coralie Dussart recommande quelques lectures et ressources essentielles :

  • Système 1 / Système 2 de Daniel Kahneman : Une bible sur les biais cognitifs, indispensable pour comprendre les comportements d’achat et ses propres biais d’entrepreneur.
  • Hacking Growth de Sean Ellis : Un livre de référence sur le growth marketing, qui aborde en détail la création de produit et la recherche du product market fit.
  • La newsletter d’Andrew Chen (a16z) : Très pointue sur les sujets de growth, elle offre des analyses approfondies avec des exemples concrets, souvent tirés de la Silicon Valley.

Ces ressources, combinées à une approche terrain rigoureuse, sont les meilleurs atouts pour tout entrepreneur souhaitant s’assurer que son produit ne soit pas juste une bonne idée, mais une véritable solution attendue par un marché.

FAQ sur le product market fit

Qu’est-ce que le product market fit concrètement ?

Le product market fit est le moment où vous avez la certitude que votre produit répond à un besoin réel pour un marché défini, et que ce marché est prêt à l’adopter. C’est le feu vert qui indique que vous pouvez commencer à investir massivement en marketing pour accélérer votre croissance.

« C’est plutôt d’essayer de d’être sûr que le qu’on a le bon produit, que le produit a trouvé son marché et surtout qu’en fait, au moment où on veut accélérer et faire du marketing digital justement, et ben, on a un peu tous les voyants qui sont au vert. » – Coralie Dussart

Comment savoir si mon produit a trouvé son marché ?

Les signes sont multiples : les clients achètent sans que vous ayez à les convaincre outre mesure, ils deviennent fidèles et rachètent, ils parlent de votre produit autour d’eux (bouche-à-oreille), et les avis sont majoritairement positifs. La demande commence à dépasser votre capacité à y répondre facilement.

« Comment tu sais que […] j’arrive à vendre mon produit, ça veut dire qu’il a été adoubé en quelque sorte par mes clients. […] Et puis après pourquoi ils réachètent parce que c’est surtout ça qu’on veut savoir pourquoi ils deviennent fidèles à un produit un service. » – Coralie Dussart

Quelles sont les premières étapes pour valider un produit avant son lancement ?

Commencez par une étude de marché pour comprendre la concurrence. Ensuite, confrontez votre idée à votre cible potentielle (via LinkedIn, des forums, etc.) pour co-construire le produit avec eux. Enfin, créez des prototypes simples pour faire tester votre concept et recueillir des retours concrets avant d’investir massivement.

« On peut très bien faire des bêta testers pour tout. […] Moi j’ai je pas pardon. Ouais, non non c’est je te coupe maladroitement, souvent l’entrepreneur, il a il a peur de se faire piquer son idée. » – Coralie Dussart & Laurent

Pourquoi est-il crucial de parler à ses clients après le lancement ?

Parler à ses clients permet de comprendre les véritables raisons de leur achat, d’identifier des usages que vous n’aviez pas anticipés et de découvrir votre véritable cible. C’est la meilleure façon de lutter contre ses propres biais cognitifs et de faire évoluer le produit dans la bonne direction.

« Les gens en fait, ils ont presque peur de parler à leurs clients souvent. Donc ils oublient de faire le basique de bah les appeler, essayer d’être proche d’eux, d’essayer de comprendre qu’est-ce qui les a fait passer à l’acte. » – Coralie Dussart

Faut-il avoir peur de se faire voler son idée de produit ?

Non. Une idée seule a peu de valeur. Le succès d’un produit réside dans son exécution, son développement, et sa commercialisation. Ne pas parler de son idée, c’est se priver de retours essentiels qui sont bien plus précieux que le risque, très faible, de se faire copier.

« Ce qui compte, c’est la c’est la l’exécution après coup. Enfin, tout le monde l’a toujours dit mais si il y a l’idée de génie, quelqu’un l’a déjà eu avant si c’est qu’une idée. » – Laurent & Coralie Dussart

En quoi consiste la méthodologie ‘Test and Learn’ en marketing ?

C’est une approche structurée qui consiste à lancer des tests sur plusieurs variables (cibles, messages, formats) de manière simultanée et comparable. L’objectif est de collecter des données significatives pour comprendre ce qui fonctionne le mieux et d’optimiser en permanence sa stratégie marketing.

« Le principe du test and learn, c’est du multi multi axe, on va tester des audiences, des cibles. […] face à ses cibles, les bénéfices les axes marketing. […] et puis suite à ça est-ce qu’il y a des formats publicitaires qui marchent mieux ? » – Coralie Dussart

Comment éviter les biais cognitifs en tant qu’entrepreneur ?

Le meilleur remède est la confrontation constante avec la réalité du marché. Parlez à vos clients, analysez les données de vente sans a priori, soyez attentif aux retours négatifs, et acceptez que votre vision initiale puisse être différente de ce que le marché désire réellement. La data et le dialogue client sont vos meilleurs alliés.

« En tant qu’entrepreneur souvent on a on se voile un peu la face. Euh son produit, c’est le meilleur avant même de d’avoir questionné ses clients. […] c’est également parler à la place de son client en fait. » – Laurent

Cette approche est-elle réservée aux grandes entreprises ?

Absolument pas. La méthodologie pour trouver son product market fit et l’approche ‘Test and Learn’ sont accessibles et même essentielles pour les petites entreprises et les porteurs de projet. La clé n’est pas le budget, mais la rigueur, la méthode et la capacité à documenter ses tests pour en tirer des apprentissages.

« C’est pas réservé aux grands groupes. Non, pas du tout. Les grands groupes, c’est juste qu’ils font appel à des agences comme nous […] Mais en petit en petit projet, c’est aussi possible. » – Coralie Dussart


Épisodes similaires