Le marketing d’influence B2B : un levier de croissance sous-estimé ?
Le terme « marketing d’influence » est souvent perçu comme « radioactif » dans le monde du marketing digital, immédiatement associé aux controverses du B2C. Pourtant, une branche bien plus stratégique et mesurable se développe à grande vitesse : le marketing d’influence B2B. Pour décrypter ce canal d’acquisition en plein essor, nous avons reçu Marc Richard, fondateur de l’agence d’influence B2B Obvius. Il nous partage son expertise sur la construction de campagnes efficaces, la rémunération des créateurs et l’avenir de cette discipline.
Loin des clichés, le marketing d’influence B2B s’impose comme une alternative crédible aux canaux traditionnels. Comme l’explique Marc : « Aujourd’hui, je suis une boite B2B, mes leviers d’acquisition, ça peut être l’Outbound, ça peut être le SEA […] ou faire du SEO. Le sujet, c’est que plutôt que vous vous alliez payer LinkedIn, Google pour être en face de votre audience, on va travailler avec des créateurs qui eux ont déjà construit cette audience, une audience dans laquelle ils ont la trust. » C’est cette confiance préétablie qui permet d’obtenir de bien meilleurs taux de conversion.
Comment construire une campagne d’influence B2B efficace ?
Le succès d’une campagne d’influence B2B repose en grande partie sur la qualité du brief. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre donner une direction claire et laisser au créateur la liberté d’adapter le message à son audience. Marc Richard met en garde contre deux erreurs courantes : « Ce qu’il faut pas faire déjà peut-être c’est demander au créateur ‘Tiens, j’ai rédigé le contenu, poste-le.’ Surtout pas faire ça. » À l’inverse, il ne faut pas non plus « les laisser à carte blanche. »
Les éléments clés d’un brief pour une campagne d’influence
Un brief complet et actionnable est la pierre angulaire de la collaboration. Il doit contenir plusieurs éléments essentiels pour aligner la marque et le créateur :
- Les objectifs : Qu’attend-on de la campagne ? Des impressions, des leads, un coût d’acquisition client cible ? Ces métriques doivent être clairement définies en amont.
- Les propositions de valeur : Quels messages clés sur le produit ou le service doivent être mis en avant ?
- Les guidelines : C’est le cadre à respecter. « Ce qu’il faut dire, pas dire, faire, pas faire », précise Marc.
- Les assets : L’entreprise peut fournir des visuels, des études de cas ou d’autres ressources pour enrichir le contenu du créateur.
- Les call to action (CTA) : Que veut-on que l’audience fasse ? S’inscrire (sign-up), demander une démo, télécharger un ebook ? Il est crucial de tester différents CTA pour optimiser les performances.
Une fois le brief validé, l’agence élabore un « draft de content planning » qui précise qui va poster, quand et sur quel canal, surtout lorsque la campagne implique plusieurs créateurs pour maximiser l’impact.
Le processus de validation du contenu
Pour garantir la qualité et la cohérence, un processus de validation strict est mis en place. « J’envoie le brief aux créateurs. Ils ont une semaine, 5 jours ouvrés, pour créer le contenu », explique Marc. « Ce contenu, l’agence le review et une fois que nous on se dit que c’est OK, on le fait review aux clients et si c’est OK pour le client, on valide et on poste. » Cette double validation assure que le contenu est à la fois authentique et aligné avec les objectifs de la marque.
Choisir les bons créateurs et la juste rémunération sur LinkedIn
Avec un réseau de plus de 400 créateurs, l’agence Obvius a développé une méthodologie précise pour sélectionner les profils les plus pertinents. Le choix ne se fait pas au hasard. « Quand on voit un client pour la première fois, on valide un budget, on valide une audience cible, un marché cible et une deadline », détaille Marc. À partir de là, des recommandations sont faites sur les canaux (LinkedIn, YouTube, newsletters, TikTok…) et les créateurs à activer pour tester différents formats et propositions de valeur.
Un modèle de rémunération basé sur la performance
Comment est calculée la rémunération d’un influenceur LinkedIn ? Marc Richard dévoile un modèle qui s’éloigne des métriques de vanité. « On regarde pas le nombre de followers surtout sur LinkedIn, parce qu’ils veulent quasiment rien dire. On regarde plutôt le nombre d’impression moyenne par poste sur les 30 derniers jours. »
Le calcul est concret : « Le créateur a posté 10 fois, a fait 200 000 impressions, ça fait 20k en moyenne. Et moi ensuite je le rémunère 50 € par 1000 impressions. Donc 1000 € le poste. » Mais ce n’est pas tout. Ce montant de base est ensuite ajusté par un coefficient basé sur le taux d’engagement. « Je mets une moyenne à 2 % de taux d’engagement. S’il fait deux fois moins que ces 2 %, je vais réduire de moitié son fee. […] S’il fait deux fois plus d’engagement que ces 2 %, je vais payer deux fois plus cher. » Ce système récompense la performance réelle et la qualité de l’audience plutôt que la simple taille de la communauté.
Mesurer le ROI : le défi de l’attribution en marketing d’influence
Mesurer l’impact réel est essentiel pour justifier l’investissement. En marketing d’influence B2B, l’attribution est gérée de manière assez simple et directe. Marc présente deux options principales :
- Les outils d’affiliation : « Soit nos clients ils ont déjà un outil d’affiliation […] et du coup c’est des liens traqués potentiellement derrière, il y a un coupon et donc c’est assez simple de traquer derrière dans le CRM. »
- Les UTMs : « Option 2, UTM source. Et on le fait remonter dans le CRM pour se dire OK bon bah ce gars a sign-up ou a fait une demande de démo depuis le post de X. »
Cependant, il reconnaît les limites de ces méthodes. « On va pas forcément tout capter parce que il y a des gens OK, ils vont voir le post, ils vont pas aller cliquer sur le lien traqué aujourd’hui. Ils vont peut-être y revenir dans 3 jours en tapant dans Google. » Il estime ainsi ne récupérer que « 50-60 % de ce qui est réellement venu », un phénomène bien connu dans le marketing digital où le parcours client est rarement linéaire.
Naviguer les controverses : image de marque et réglementation
Le terme « influence » souffre d’une image négative, héritée des scandales des « influ-voleurs » du B2C. Comment gérer ce risque de réputation en B2B ? Marc se veut rassurant. « Je sais qu’il y a encore une vision assez négative de la part du marché sur le sujet de l’influence. »
Plusieurs facteurs rendent l’écosystème B2B plus sûr. Tout d’abord, une loi est passée pour réguler le marché. Ensuite, la nature même de la plateforme LinkedIn impose un professionnalisme plus élevé. « Les créateurs ils mettent vraiment leur carrière un peu en jeu s’ils commencent à aller promouvoir de la merde », souligne Marc. La survie d’une entreprise B2B vendant un mauvais produit est également plus difficile que dans le dropshipping.
La transparence reste la clé. Il est crucial de mentionner les collaborations commerciales. Sur LinkedIn, une fonctionnalité permet de le faire, sinon un simple « #collaborationcommerciale » suffit. « Si tu le fais pas et que ton audience le voit, ça va avoir un effet négatif. S’ils le voient pas, tant mieux, mais maintenant fais attention au légal. »
Une campagne d’influence B2B en chiffres : budget, portée et résultats
Pour rendre les choses concrètes, Marc partage les statistiques moyennes observées sur plus de 80 campagnes. Quel budget pour une campagne d’influence B2B ? Les campagnes gérées par son agence vont de 5 000 € à 50 000 €.
Pour un budget de 5 000 €, voici les résultats attendus :
- Impressions : « On va faire entre 80 et 100 000 impressions à travers les différents posts des créateurs. »
- Leads : « On va faire 0,1 % des impressions en lead, donc 80 à 100 leads. » (Un lead étant défini comme un sign-up ou une demande de démo, pas un simple téléchargement d’ebook).
- Coût par lead (CPL) : La moyenne se situe « entre 80 et 100 € le coup par lead aujourd’hui », ce qui reste très rentable pour des entreprises avec des paniers moyens élevés.
Ces chiffres sont une moyenne et peuvent varier « selon le produit, le call to action et cetera », mais ils donnent un ordre de grandeur réaliste de ce qu’il est possible d’atteindre.
L’avenir du marketing d’influence B2B : vers des campagnes mémorables
Si 90% des campagnes actuelles se concentrent sur LinkedIn, Marc Richard parie sur la diversification des canaux (YouTube, TikTok, Instagram) et surtout sur l’innovation des formats. « Je pense qu’aujourd’hui la créa des campagnes d’influence B2B elle est au niveau zéro presque. Tu vois c’est toujours un peu le même mécanisme, […] elles ne sont pas mémorables. »
Pour se démarquer, il imagine des concepts plus engageants. Il cite un projet en interne : un live hebdomadaire sous forme de jeu télévisé type « Qui veut gagner des millions » sur un thème lié à un sponsor. « Je vais inviter deux, trois, cinq créateurs dans le milieu du sales. […] Si on est cinq créateurs plus moi, on peut déjà inviter 6000 personnes sur le live. » Le public peut participer, répondre aux questions et gagner des lots, créant une expérience de marque bien plus forte qu’un simple post.
En conclusion, pour réussir sa première campagne d’influence B2B, Marc insiste sur trois points :
- Bien choisir ses créateurs : S’assurer que leurs statistiques sont réelles et qu’ils n’utilisent pas de bots (un signe qui ne trompe pas : un nombre de partages anormalement élevé sur LinkedIn).
- Trouver le bon équilibre dans le brief : Ne pas dicter le contenu mot pour mot, mais ne pas non plus donner carte blanche.
- Mesurer, mesurer, mesurer : Utiliser des UTMs, des liens d’affiliation ou des coupons pour suivre les performances et justifier l’investissement.
FAQ sur le marketing d’influence B2B
Qu’est-ce que le marketing d’influence B2B ?
Le marketing d’influence B2B est une stratégie qui consiste à collaborer avec des experts ou des créateurs de contenu qui ont une audience et une crédibilité établies dans un secteur professionnel spécifique. L’objectif est d’utiliser leur confiance (trust) pour promouvoir un produit ou service auprès d’une cible qualifiée, générant ainsi des conversions plus efficaces que la publicité traditionnelle.
« Plutôt que vous vous alliez payer LinkedIn, Google pour être en face de votre audience, on va travailler avec des créateurs qui eux ont déjà construit cette audience, cette audience dans lequel ils ont la la trust, tu vois, auprès de ce créateur, donc ça va nous permettre d’avoir des meilleurs taux de conversion, tout simplement. » – Marc Richard
Comment briefer un influenceur B2B ?
Un bon brief ne doit ni être un script rigide, ni une carte blanche. Il doit fournir un cadre clair incluant les objectifs de la campagne (leads, impressions), les propositions de valeur à communiquer, des guidelines sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire, et les call-to-action à tester. Cela permet au créateur de rester authentique tout en respectant les attentes de la marque.
« Il faut faire un brief. Dans un brief, on parle de nos objectifs en termes d’impression, de lead, […] des différentes propositions de valeur qu’on va vouloir mettre en avant, de guidelines, […] et les call to action qu’on va vouloir tester. » – Marc Richard
Comment sont rémunérés les influenceurs sur LinkedIn ?
La rémunération sur LinkedIn se base principalement sur la performance et non sur le nombre de followers. Le modèle le plus courant calcule un tarif basé sur le nombre moyen d’impressions par publication (par exemple, 50€ pour 1000 impressions), qui est ensuite ajusté à la hausse ou à la baisse en fonction du taux d’engagement moyen du créateur.
« On regarde plutôt le nombre d’impression moyenne par poste sur les 30 derniers jours. […] Et moi ensuite je le rémunère 50 € par 1000 impressions. […] sur lequel ensuite j’applique un coefficient basé sur son engagement. » – Marc Richard
Quel budget prévoir pour une campagne d’influence B2B ?
Il est possible de lancer une campagne d’influence B2B avec un budget de départ d’environ 5 000 €. Pour ce montant, on peut viser entre 80 000 et 100 000 impressions, ce qui peut se traduire par 80 à 100 leads qualifiés (demande de démo, inscription), pour un coût par lead moyen se situant entre 80 et 100 €.
« Nous on commence nous sur des budgets qui vont 5000 € jusqu’à 50000 € la campagne. 5000 €, […] on va faire entre 80 et 100 000 impressions. […] On va faire 0,1 % des impressions en lead, donc 80 à 100 lead. » – Marc Richard
Comment mesurer le ROI d’une campagne d’influence ?
Le ROI se mesure principalement grâce au suivi des conversions. Les méthodes les plus simples sont l’utilisation de liens trackés avec des paramètres UTM (UTM source) ou la mise en place d’un programme d’affiliation avec des liens ou des codes promo uniques pour chaque créateur. Ces données sont ensuite remontées dans le CRM pour analyser le nombre de leads et de clients générés.
« Concrètement c’est assez simple. Soit nos clients ils ont déjà un outil d’affiliation, […] du coup c’est des liens traqués. […] Option 2, UTM source. Et on le fait remonter dans le CRM pour se dire OK bon bah ce gars a sign-up. » – Marc Richard
Comment vérifier l’authenticité d’un influenceur B2B ?
Pour déceler de potentiels faux influenceurs ou l’utilisation de bots, il faut analyser leurs statistiques avec un œil critique. Sur LinkedIn, un indicateur suspect est un nombre de partages (shares) très élevé et systématique sur leurs publications. Un post est rarement partagé plus de 10 fois de manière organique ; voir des chiffres comme 40 partages par post est un signal d’alarme.
« Surtout sur LinkedIn, si vous voyez que il y a beaucoup de de share, de partage. […] C’est très rare qu’un post soit partagé plus de 10 fois. Donc quand tu vois qu’un créateur il a 40 partages sur chacun de ses posts, ça pue le bot. » – Marc Richard
Le marketing d’influence B2B est-il risqué pour l’image de marque ?
Le risque est plus faible en B2B qu’en B2C. Les créateurs B2B engagent leur réputation professionnelle et sont donc plus sélectifs sur les marques qu’ils promeuvent. De plus, une nouvelle loi encadre les pratiques. La clé pour protéger son image est la transparence, en indiquant clairement qu’il s’agit d’une collaboration commerciale.
« Les créateurs ils mettent vraiment leur carrière un peu en jeu s’ils commencent à aller promouvoir de la merde. […] On est un peu plus sécure que dans le monde B2C. » – Marc Richard
Quels sont les futurs formats du marketing d’influence B2B ?
L’avenir du secteur est dans la créativité et l’interactivité pour créer des campagnes mémorables. Au-delà du simple post sponsorisé, les formats innovants incluent des événements en direct (live events), des jeux-concours, du gifting, du merchandising et des concepts de contenu originaux comme des émissions ou des challenges, afin de maximiser l’engagement de l’audience.
« Moi je pense que dans l’avenir de l’influence il y a des trucs assez cool à faire B2B. […] On veut aussi ramener un peu de guerrier marketing de gifting, de merchandising, de live event. » – Marc Richard