Logo de l'épisode Faire exploser une agence (et un podcast) - avec Matthieu Stefani du podcast Marketing Mania - Conversations d'entrepreneurs

Faire exploser une agence (et un podcast) – avec Matthieu Stefani

Épisode diffusé le 11 mars 2020 par Marketing Mania

Écouter l'épisode :

Les véritables raisons de lancer un podcast pour son business

Quand on dirige une agence, un startup studio avec près de 50 employés, la question se pose : pourquoi passer une demi-journée par semaine à faire un podcast ? Pour Mathieu Stéphanie, fondateur de CosaVostra et animateur du célèbre podcast Génération Do It Yourself, la réponse commence par un mot simple : le kiff.

Du plaisir personnel au levier de croissance

« Écoute le tout premier intérêt, je dois te dire avant d’arriver au reste ça a été ça a été le kiff. Je je vraiment j’insiste là-dessus », explique Mathieu. Cette passion pour l’échange oral, ce format « préhistorique » qui transmet quelque chose de différent, a été le moteur initial. L’idée de départ était modeste : lancer une douzaine d’épisodes en février 2017 pour tester le format. Mais le plaisir fut immédiat. « En fait j’ai été hooké tu vois ça m’a plu mais dès le dès le premier épisode et dès le deuxième, j’étais à fond dedans quoi. »

Cette expérience de test, limitée dans le temps, est une approche partagée. J’ai vécu la même chose avec mon podcast Nomade Digital. Nous nous étions dit : « on va faire 12 épisodes ». Cela permet de se lancer sans la pression d’un engagement sur dix ans. Et rapidement, les retours positifs et l’audience naissante nous ont pris au jeu.

Au-delà du plaisir, le podcast est devenu un formidable outil de brand content. Il permet de mettre en avant les expertises de son agence, CosaVostra, de manière authentique et engageante. C’est une façon de montrer son intelligence, sa vision et ses valeurs, bien plus efficace qu’une publicité clamant « je suis génial, bossez avec moi ».

Un outil de networking sans équivalent

Le podcasting ouvre des portes souvent inaccessibles. « J’ai l’occasion de rencontrer des gens qui sont l’ancien ministre de l’économie et des finances, des grands patrons, des multimillionnaires comme Jacques-Antoine Granjon », raconte Mathieu. Il a ainsi accès aux « 06 de gens qui sont juste des gens monstrueux ».

Ce réseau est un atout stratégique majeur. Il peut se transformer en clients, en investisseurs pour les startups créées par le studio, ou en source de nouvelles opportunités. Le principe est simple et puissant : « on est la moyenne des personnes qu’on fréquente et moi je me dis bah tiens je vais aller fréquenter des gens qui ont qu’ont réussi des trucs de ouf. »

En interviewant des entrepreneurs, des artistes, des sportifs, Mathieu analyse leur tronc commun : cette foi inébranlable en leur capacité à réussir. Et cet apprentissage constant rejaillit sur sa propre progression et celle de son entreprise. « En presque 3 ans, j’ai progressé, ma moyenne a progressé grâce à la somme des moyennes que je fréquente grâce à ce podcast. Et et et ben ça c’est quand même un truc de fou. »

De digital nomade à patron d’une agence de 50 employés : le parcours CosaVostra

L’histoire de CosaVostra commence par une aspiration que beaucoup d’entrepreneurs connaissent : le rêve du digital nomade. En 2011, Mathieu aspirait à une liberté totale, armé d’un ordinateur et d’un smartphone, loin des contraintes d’un bureau et d’employés.

Le rejet initial de l’entrepreneuriat traditionnel

« Une sorte de rejet total de tu sais ce mythe de l’entrepreneur libre », confie-t-il. Il réalise vite que l’entrepreneuriat est en réalité « un énorme boulet au pied », et que la clé est de « kiffer ce boulet ». Pendant un temps, il gère des business en ligne comme Morfsuits ou Iron Cards, générant des revenus confortables avec une grande flexibilité. Mais intellectuellement, ce n’était pas suffisant.

Le tournant s’opère au moment où il devient père. Il prend conscience qu’il ne construit pas de valeur pérenne. « Si je me pétais une jambe ou si je sais pas j’étais malade je laissais rien derrière en fait tu vois je je construisais pas, je valorisais pas un un truc. » Cette prise de conscience, couplée à sa nature de « team player », le pousse à formaliser une structure plus solide.

La naissance d’une agence et d’un startup studio

Partant d’une équipe de freelances, l’idée de CosaVostra émerge. Le concept est de monter une agence d’excellence avec les meilleurs designers, développeurs et stratèges. Ce « navire amiral » servirait de base pour lancer d’autres projets, à la manière d’un startup studio.

Le modèle est vertueux : « Ils vont bosser en moyenne 80, 85 % du temps de la disponible dans l’année pour des clients. Qu’est-ce que tu fais des 15 % qui restent ? » Ce temps « disponible » devient une valeur incroyable, utilisée pour créer et développer les propres startups de l’agence. En 5 ans et demi, 5 business ont été créés, dont 4 revendus avec succès.

Cette double casquette confère une crédibilité immense auprès des clients. « Quand je peux aller voir mes clients en leur disant moi je suis pas un touriste, tu vois. […] J’ai créé des boîtes que j’ai vendues en centaines de millions d’euros, j’ai créé des boîtes que j’ai vendues en millions d’euros. » Cette « street cred » est la proposition de valeur ultime de CosaVostra : accompagner des PME et des grands groupes dans leurs projets d’innovation, en s’appuyant sur une expertise entrepreneuriale réelle et éprouvée.

Comment scaler une agence sans plafond de verre ?

Monter une agence est une chose, la faire grandir de 5 à 50 employés en 5 ans en est une autre. Deux problématiques majeures se posent souvent : la frustration liée au travail client et les difficultés de scalabilité.

Le dilemme du travail client : contrainte ou opportunité ?

Beaucoup d’entrepreneurs finissent par en avoir marre de bosser pour des clients, se sentant bridés dans leur créativité et leur autonomie. Mathieu admet avoir mis du temps à trouver son équilibre. « Je pense que ça fait à peine 6 mois que je suis assez serein et et droit dans mes bottes sur cette question. »

La clé ? Comprendre la valeur immense qu’apportent les clients. « Comment veux-tu être fort dans tout ce qui est création de valeur et création de start-up si tu peux pas rentrer au-delà de la surface dans certains métiers ? » Les clients enrichissent intellectuellement l’agence en partageant leurs problématiques internes. C’est ce qui permet de « connecter des dots » et de générer de nouvelles idées de business.

Il faut accepter que le projet final appartient au client, même si l’on n’est pas d’accord avec toutes ses décisions. Le rôle de l’agence n’est pas d’être un simple exécutant, mais un conseiller qui apporte une plus-value. Avoir ses propres projets en parallèle, via le startup studio, agit comme une « soupape » et permet de tester des approches plus audacieuses.

Dépasser le syndrome du fondateur : s’effacer derrière la marque

Le deuxième plafond de verre est souvent le fondateur lui-même, qui n’arrive pas à se sortir de l’opérationnel et devient un goulot d’étranglement. Pour Mathieu, la solution réside dans « une question un peu d’humilité aussi, c’est-à-dire accepter d’être capable de recruter des gens qui sont meilleurs que toi partout. »

Le but est de construire une marque si forte qu’elle dépasse les individus qui la composent. « Mes idéaux là-dessus c’est c’est c’est des McKinsey c’est des des peut-être EY. […] Tu sais que si tu bosses avec CosaVostra, tu te plantes pas. »

La plus grande fierté pour un fondateur est de voir son agence signer et gérer de grands comptes sans son intervention directe. « J’ai des des GAFA parmi nos clients […] sur lequel on bosse depuis 6 mois sur lequel j’ai rien fait quoi. Et donc ben ça il faut juste accepter que quand ça arrive ce soit une fierté. » C’est le signe que la machine est plus grande que son créateur et que la scalabilité est réelle.

Le rôle clé des process pour faire grandir son agence de service

Pour passer de quelques freelances à une équipe de 50 personnes réparties dans plusieurs bureaux, l’intuition ne suffit plus. La mise en place de process solides devient non négociable. C’est ce qui différencie une structure artisanale d’une entreprise scalable.

L’équilibre délicat entre process et créativité

On oppose souvent process et créativité, mais c’est une fausse dichotomie. « Je pense c’est pas forcément vrai, il faut y faire attention. Dans ton process tu dois laisser place à tout ça », nuance Mathieu. L’objectif d’un bon process n’est pas de tout rigidifier, mais au contraire de libérer l’esprit des tâches répétitives pour qu’il puisse se concentrer sur la valeur ajoutée : la stratégie, la créativité, la résolution de problèmes complexes.

Un exemple concret : le process de livraison d’un site web. Une simple checklist pour s’assurer que le site est bien indexable par Google, que les tags analytics sont en place, etc., évite des erreurs coûteuses et des clients mécontents. « Ce process il a été mis à jour il y a quelques mois sur une petite bêtise mais il y a non seulement le mettre à jour et aussi être certain que les nouveaux arrivants sont bien mis au courant. »

Comment créer, maintenir et diffuser des process efficaces ?

La création de process chez CosaVostra n’est pas l’affaire d’un seul homme. C’est principalement Laurent, l’un des associés, qui porte ce rôle de COO. Il est crucial d’identifier les bonnes personnes pour cette tâche. Les process vivent dans des Google Docs, des Trello, des Asana, et de plus en plus sous forme de vidéos explicatives.

Pour qu’un process vive, il doit être possédé par quelqu’un. L’approche que j’utilise est de rendre la personne qui exécute la tâche également responsable de la mise à jour de son process. Cela garantit que la documentation reste pertinente et s’améliore continuellement.

Le défi, en grandissant, est de diffuser ces process efficacement, notamment lors de l’onboarding de nouveaux collaborateurs. Comme le souligne Mathieu en parlant des géants comme LinkedIn, l’onboarding est une science. « Ma femme […] j’hallucine sur l’onboarding qu’ils font dans ces boîtes-là. C’est c’est complètement dingue. » Le but est de créer un système où chaque nouvel employé est rapidement autonome et aligné sur les méthodes de l’entreprise, garantissant une qualité de service constante, peu importe qui est sur le projet.

L’évolution du rôle du fondateur dans une agence en croissance

Le rôle d’un fondateur n’est pas figé. Il doit évoluer au même rythme que son entreprise, sous peine de freiner sa croissance. Dans une structure de 5 personnes, il est très opérationnel. À 50, son impact doit se situer ailleurs.

« De plus en plus ben j’essaie de ne pas l’être [opérationnel] ou de l’être là où j’ai vraiment beaucoup d’impact », explique Mathieu. Son rôle se concentre désormais sur quelques axes stratégiques. Premièrement, avoir un impact sur les gros projets et les clients qui cherchent spécifiquement son expertise. « Vendre une journée de conseil à 2500 € ou 3000 € […] moi j’ai déjà vécu des choses où je suis allé convaincre des clients de pas investir un demi-million d’euros dans un truc ça m’a pris 2 heures. »

Deuxièmement, il est le garant de la culture et de l’excellence. Cela passe par le recrutement de talents qui correspondent aux valeurs de l’entreprise et par la mise en place d’un environnement qui pousse chacun à se dépasser. « Je veux tirer tout le monde vers un niveau d’excellence qui est en perpétuel remise en question. » Cela se traduit par des initiatives concrètes, comme le paiement de primes pour les employés qui terminent des formations ou des MOOCs.

Enfin, son troisième rôle est celui d’ambassadeur de la marque CosaVostra. Le podcast en est l’illustration parfaite. Il s’agit d’être visible à l’extérieur, de transmettre la vision et les valeurs de l’agence pour attirer à la fois les clients et les talents. C’est un cercle vertueux : une forte culture interne nourrit une marque forte à l’extérieur, qui à son tour renforce l’entreprise.

Conclusion : soyez vous-même, les autres sont déjà pris

Au terme de cette conversation, Mathieu partage une citation d’Oscar Wilde qui résume bien sa philosophie : « Be yourself, everyone else is taken. » Soit toi-même, parce que les autres sont déjà pris.

Cela fait écho à son mantra sur la moyenne des personnes que l’on fréquente. Il ne s’agit pas de copier les autres, mais de s’en inspirer pour construire sa propre version de soi-même. « C’est nous qui choisissons ce qu’on veut prendre chez chacun. Euh mais il faut pas se dire je veux être comme lui en fait tu vois. Faut se dire attends, ça chez lui j’adore ce machin. Ça chez lui j’adore ce truc et à la fin tu construis cette personne qui est toi. »

Cette quête d’authenticité et de progression constante est peut-être le secret pour faire exploser une agence, un podcast, et surtout, pour construire une vie d’entrepreneur alignée avec ses propres valeurs.

FAQ sur la croissance d’une agence et le podcasting

Quel est l’intérêt de lancer un podcast pour un business ?

Lancer un podcast pour son business permet de créer du contenu de marque authentique, de se positionner comme un expert, et surtout de développer un réseau de très haut niveau. C’est un outil qui allie passion personnelle et retombées stratégiques importantes.

« Au-delà du kiff, ce qui pourrait rester que ce truc là, c’est une sorte de projet vertueux tel que j’en ai jamais créé et je vois pas comment je pourrais en créer un autre aussi vertueux tu vois. » – Mathieu Stéphanie

Comment passer de freelance à une agence structurée ?

La transition de freelance à agence se fait souvent par la prise de conscience que la valeur créée seul est limitée. Il faut accepter d’être un ‘team player’, s’associer avec des compétences complémentaires (tech, design, strat) et formaliser une structure pour construire un actif pérenne et valorisable.

« Je construisais pas, je valorisais pas un un truc. Et moi je suis un peu plutôt un tu vois j’aime bien les Lego et les trucs […] j’aime bien construire des choses et et et du coup ça me convenait pas complètement. » – Mathieu Stéphanie

Comment gérer la frustration de travailler pour des clients ?

Il faut changer de perspective et voir les clients non comme une contrainte mais comme une source d’apprentissage et d’opportunités. Leurs problématiques nourrissent votre expertise et peuvent inspirer la création de nouveaux produits ou services. Avoir ses propres projets en parallèle aide aussi à garder une soupape de créativité.

« Il il il m’apprennent beaucoup. Je veux dire comment veux-tu être fort dans tout ce qui est création de valeur et création de start-up si tu peux pas rentrer au-delà de la surface dans certains métiers. » – Mathieu Stéphanie

Quels sont les plus gros défis pour scaler une agence ?

Les deux défis majeurs sont de ne pas devenir le goulot d’étranglement de sa propre entreprise et de maintenir un haut niveau de qualité en grandissant. La solution est de s’effacer derrière une marque forte, de recruter des gens meilleurs que soi et de mettre en place des process solides.

« La difficulté pour l’entrepreneur qui est derrière ou les associés c’est d’être capable de s’effacer derrière cette marque. » – Mathieu Stéphanie

Comment créer des process sans tuer la créativité ?

Un bon process doit être vu comme un outil pour libérer du temps et de la charge mentale, et non comme un carcan. Il doit automatiser les tâches répétitives et garantir les standards de qualité, pour permettre aux équipes de concentrer leur énergie sur la stratégie, l’innovation et la créativité.

« On oppose souvent le process à la créativité. Tu vois et et et je pense c’est pas forcément vrai, il faut y faire attention. Dans ton process tu dois laisser place à tout ça. » – Mathieu Stéphanie

Quel est le rôle du fondateur quand l’agence grandit ?

Le rôle du fondateur évolue de l’opérationnel vers le stratégique. Il doit se concentrer là où son impact est maximal : la vision, le recrutement des talents clés, la culture d’entreprise, les relations avec les clients stratégiques et le rôle d’ambassadeur de la marque.

« Mon deuxième rôle, il est d’être l’ambassadeur de CasaVostra et donc d’être visible à l’extérieur pour faire en sorte que les gens se disent OK ce qu’il construit là avec son équipe est-ce que c’est d’abord pour ses clients, est-ce que c’est d’abord pour son start-up studio. » – Mathieu Stéphanie

Comment vendre des prestations à des grands groupes ?

Pour vendre à des grands groupes, il faut construire une marque forte qui inspire confiance et une crédibilité basée sur des succès tangibles. Avoir soi-même une expérience entrepreneuriale (création et vente de boîtes) est un atout majeur qui vous différencie des consultants traditionnels.

« Je peux aller voir mes clients en leur disant moi je suis pas un touriste, tu vois. […] j’ai quand même tu vois ma street cred qui est là j’ai créé des boîtes que j’ai vendues. » – Mathieu Stéphanie

Comment une agence peut-elle s’assurer de recruter les meilleurs talents ?

Il faut créer un environnement où les talents peuvent s’épanouir et progresser constamment. Cela passe par une culture d’excellence, la liberté, des projets intéressants, mais aussi des incitations concrètes comme le financement de formations continues pour que chacun reste à la pointe de son domaine.

« Mon mon mon rôle il est de recruter des gens qui sont très forts et qui progressent. Ça c’est la première chose et de les accompagner, de les faire rester, leur faire comprendre que ici ils sont mieux qu’ailleurs. » – Mathieu Stéphanie


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