Comment faire l’autopsie d’un projet qui a échoué ?
La question plus large à se poser ici, c’est comment est-ce qu’on va apprendre de ses échecs ? Ce que font la plupart des gens, c’est de se dire « tiens, ce projet il a pas marché, c’est dommage, ça me saoule, je suis dégoûté, j’ai même plus envie d’y penser ». Et en fait, ils vont pas vraiment essayer de comprendre le pourquoi de leur projet a marché ou ils vont faire la croix sur l’ensemble du projet. Ils ont essayé de lancer une formation en ligne, la formation en ligne n’a pas marché. Bon ben, ça marche pas, je vais changer de domaine, je vais arrêter de faire des formations en ligne.
Le piège de l’abandon et l’importance des hypothèses
En réalité, il faut comprendre qu’un projet, il peut échouer pour différentes raisons. Et un projet va réussir selon un ensemble d’hypothèses. Donc quand vous allez lancer un projet, vous allez établir un ensemble d’hypothèses qui, si elles sont vraies, feront que votre projet soit un succès. Et parfois, on va pas faire ces hypothèses de manière explicite, on va les faire de manière implicite sans vraiment y réfléchir, mais ça vaut le coup d’y réfléchir et d’essayer de les expliciter.
Par exemple, si on lance une formation en ligne, il y a un certain nombre d’hypothèses qui sont faites et qui sont nécessaires d’être vraies pour que le produit fonctionne :
- Mon audience a un besoin.
- Mon audience est prête à dépenser de l’argent pour résoudre ce besoin.
- Mon audience a de l’argent à dépenser.
- Je suis crédible auprès de cette audience.
- Mon offre est la bonne.
- Je suis positionné sur le bon marché.
Si votre produit ne marche pas, il peut y avoir plein de raisons pour lesquelles ça ne fonctionne pas, ça peut être différentes hypothèses qui ne sont pas vérifiées ici.
Isoler les variables : la clé pour apprendre de ses échecs
Si vous prenez l’idée que le projet n’a pas marché et que d’un coup vous avez abandonné complètement l’ensemble de l’idée, et ben en fait, ça se trouve il y avait des hypothèses là-dedans qui étaient vraies et que vous auriez pu garder. Mais si vous abandonnez tout d’un coup, c’est un petit peu comme si vous faites une expérience scientifique et vous changez 50 variables. Théoriquement, si vous faites une expérience scientifique, vous donnez par exemple à une personne le médicament A et à une personne le médicament B et gardez tout le reste exactement identique pour savoir si le médicament A ou le médicament B est le plus efficace.
L’idée, c’est de pouvoir isoler les variables et de comprendre très précisément quelle est l’hypothèse ici qui était vraie ou quelle est l’hypothèse qui était fausse. Par exemple, si vous voyez que vos concurrents cartonnent sur ce marché, ça vous dit qu’il y a un besoin, que les gens sont prêts à dépenser de l’argent. Le problème peut venir de votre différenciation ou de votre crédibilité.
Un autre exemple : si vous envoyez des e-mails de promotion et que personne ne clique, c’est un signal assez fort que le problème, c’est votre offre. Pas le prix, pas l’audience, mais l’offre elle-même, l’accroche, la promesse.
Étude de cas : l’analyse de ma vidéo sur Animal Crossing
Sur ma vidéo Animal Crossing, c’est assez facile d’identifier ce qui a pu se passer. C’est une vidéo qui a une performance solide, 60 000 vues, mais elle a surtout tourné sur mon audience existante, elle n’est pas devenue virale. La question, c’est pourquoi ? Il y a trois hypothèses potentielles :
- Le sujet : Peut-être que le sujet n’intéresse pas tant de monde que ça.
- Le titre et la miniature : Mon angle n’était peut-être pas bon.
- La qualité de la vidéo : Peut-être que la vidéo est ennuyeuse et que les gens ne restent pas.
L’avantage sur YouTube, c’est que toutes ces hypothèses peuvent être confrontées avec de la data. Pour la qualité, je vais voir la durée de visionnage. La vidéo a une durée moyenne de 10 minutes 39 secondes, soit 53% de rétention. C’est une excellente performance, donc l’hypothèse de la vidéo ennuyeuse est invalidée.
Pour le titre et la miniature, j’ai testé une autre approche. J’avais fait ça sur une vidéo sur Gillette qui n’avait pas marché au début. J’ai changé la miniature et du jour au lendemain, elle est devenue virale. Sur Animal Crossing, j’ai changé le titre et le texte de la miniature, mais ça n’a fait aucune différence. Donc, le problème n’était pas l’angle.
Il ne reste donc que le sujet : Animal Crossing. Mes chiffres montrent un bon taux de clic (environ 5%) et une bonne durée de visionnage, mais YouTube ne propose pas la vidéo à une audience plus large. Pourquoi ? Parce que YouTube pense que ce sujet n’intéresse pas les audiences adjacentes à la mienne. Pour creuser, je vois deux angles : soit les sujets de jeux vidéo ne fonctionnent pas sur ma chaîne, soit le sujet est trop féminin pour mon audience qui est à 85% masculine. Ce que je pourrais tester à l’avenir, c’est de parler d’un jeu vidéo avec un angle plus masculin, comme Call of Duty ou GTA, pour voir si c’est le gaming en général ou le type de jeu qui pose problème.
Les formateurs en ligne risquent-ils de se faire ubériser par des plateformes comme Udemy ?
La réponse est non, et je ne pense pas que les formateurs en ligne risquent de se faire ubériser. La différence fondamentale est simple : vous vous fichez complètement de quel chauffeur Uber vient vous chercher, c’est interchangeable. Au contraire, vous ne vous fichez pas du formateur qui va vous former.
La différence fondamentale avec Uber : le formateur n’est pas interchangeable
Dans le domaine de la formation, il y a un effet de célébrité, d’attachement, un effet de marque. Les formateurs populaires ne veulent pas être interchangeables, ils veulent avoir leur propre business et le contrôle. Un chauffeur de taxi n’a pas non plus envie d’être interchangeable, mais le public n’a pas de demande particulière pour un chauffeur spécifique. Ici, il faut réfléchir à qui possède le pouvoir dans l’industrie.
Le pouvoir des ‘célébrités’ à l’ère du digital
Si on compare à l’industrie du cinéma, le formateur est l’équivalent d’un acteur. Il fut un temps à Hollywood où les studios avaient tout le pouvoir et les acteurs étaient des salariés. Mais les acteurs ont réalisé qu’ils avaient le pouvoir de mettre des gens dans les salles. Un film comme The Revenant est impossible à financer ou à vendre sans Leonardo DiCaprio. Il devient le point essentiel, irremplaçable, du projet.
L’acteur découvre qu’il est la marque, qu’il a du pouvoir. Et c’est la même chose pour les formateurs. Plus on va sur internet, plus les moyens de distribution sont faciles, plus on concentre de pouvoir dans les marques célèbres. Regardez Netflix. Ils n’ont pas ubérisé le cinéma. Au contraire, ils ont augmenté le pouvoir des réalisateurs et acteurs célèbres. Scorsese n’arrivait pas à faire financer The Irishman par son studio. Netflix lui a donné 160 millions de dollars et une autonomie totale. Pourquoi ? Parce que Netflix sait que Scorsese n’est pas interchangeable.
Dans la formation, c’est pareil. Le formateur individuel concentre de plus en plus de pouvoir. Si vous avez la confiance de l’audience, que les gens veulent se former chez vous, vous n’avez plus de raison d’être sur Udemy et de ne plus contrôler votre plateforme. Les meilleurs formateurs resteront indépendants.
Comment gérer ses emails pendant un lancement pour ne pas saouler son audience ?
La première chose à prendre en compte ici, c’est un dicton qu’on m’a dit une fois : « nous ne sommes qu’un moment dans la journée de notre client ». On a l’impression que le monde tourne autour de notre business, mais pour les gens, on est juste un e-mail qui passe dans leur boîte mail.
Nous ne sommes qu’un moment dans la journée de notre client
Quand vous avez l’impression d’envoyer beaucoup d’e-mails, la majorité des gens les voit juste vaguement passer. La preuve, c’est que vous pouvez refaire un lancement avec les mêmes e-mails et des gens qui n’ont pas acheté la première fois achèteront la deuxième. Peut-être qu’ils n’avaient pas lu, ou que ce n’était pas le bon moment.
Je pense que c’est totalement équitable et judicieux d’envoyer un e-mail par jour pendant 7 jours si vous faites un lancement. Sur de gros lancements, j’envoie un e-mail par jour pendant 10 ou 15 jours. Je dirais même que vous pouvez envoyer deux e-mails le dernier jour : un le matin pour annoncer le dernier jour, et un le soir, très court, pour dire que ça ferme dans quelques heures.
Opt-in vs Opt-out : donner le contrôle à votre audience
Vous avez deux options pour le faire. La première est le lancement en opt-in. Vous annoncez le lancement à venir et vous dites : « Si ça vous intéresse, cliquez ici et je vous enverrai des e-mails à ce sujet ». Vous aurez une liste plus petite mais extrêmement qualifiée, avec des taux de conversion très élevés.
La deuxième option, que je privilégie, est l’opt-out. J’envoie les e-mails à toute ma newsletter et j’ajoute une mention : « Je vais vous envoyer un e-mail par jour sur ma nouvelle formation. Si vous n’êtes pas intéressé, cliquez ici et je ne vous enverrai plus d’e-mail au sujet de ce lancement ». Ici, beaucoup plus de gens reçoivent les e-mails, mais ceux qui ne sont pas intéressés peuvent se désinscrire uniquement de ce lancement, sans se désinscrire de la liste entière. Ça me permet d’être plus agressif sur les e-mails tout en donnant le contrôle à mon audience. S’ils sont saoulés, ils cliquent et le problème est réglé.
Comment convaincre les gens de faire de l’écologie grâce au marketing ?
Ici, le principal problème, c’est que quand on nous parle d’écologie, on nous explique jamais ce que moi, égoïstement, j’ai à en tirer. Il faut comprendre que les gens vont prendre uniquement des décisions sur ce qui va leur apporter un bénéfice égoïste. Heureusement, l’humain a une version assez large de ce qui peut être un bénéfice égoïste, et ça implique les émotions et l’identité. Je vois deux manières d’attaquer ce sujet.
Le premier levier : le bénéfice égoïste de la santé
Quand Arnold Schwarzenegger était gouverneur de Californie, il a réussi à faire passer des mesures environnementales significatives. Pourquoi ? Parce qu’il a expliqué aux gens que le but n’était pas de sauver les ours blancs, mais de diminuer les émissions polluantes pour dépolluer l’air et éviter à leurs enfants d’avoir des maladies respiratoires. Ce qu’il a dit aux gens, ce n’est pas « on va sauver la planète », c’est « on va sauver vos enfants ».
Cet argument de santé touche chaque individu. La meilleure manière de vendre un produit écologique, c’est de dire qu’il est bon pour votre santé. Il est plus facile de dire « ne buvez pas dans des pailles en plastique car des molécules vont détraquer votre système hormonal » que de dire « ne le faites pas parce qu’un phoque va l’avaler ». Le but final de l’écologie, c’est de sauver les humains qui sont sur la planète, et avant tout, nous-mêmes et nos enfants.
Le second levier : le signalement de vertu et l’identité
Le deuxième grand canal, et celui qui marchera le mieux sur le long terme, c’est le signalement de vertu. Faire de l’écologie est une question identitaire qui est cool et qui vous permet de vous sentir vertueux. Celui qui a le mieux fait ça, c’est Elon Musk avec Tesla. Tesla, c’est un truc cool, c’est chic. Non seulement vous aidez la planète, mais vous renvoyez une certaine image de vous-même.
Il faut prendre l’analogie de la religion. Elle fonctionne par la peur (l’enfer, bénéfice personnel) et par la pression sociale. Le problème de beaucoup d’écolos, c’est qu’ils ont une image de gens chiants et moralisateurs. En prenant ce positionnement, ils se tirent une balle dans le pied car ils ne peuvent pas positionner l’écologie comme quelque chose d’aspirationnel. Si vous voulez convertir une grande partie de la population, vous devez faire de ce comportement quelque chose d’aspirationnel.
Il faut faire de l’écologie une valeur positive, un signe aspirationnel, un symbole de la classe supérieure. Pensez au bronzage : avant, c’était un signe de classe inférieure (travail aux champs) ; maintenant, c’est un signe de classe supérieure (loisir, vacances). La manière de jouer sur cette identité, c’est le marketing de célébrité. Il faut des célébrités, des youtubeurs, qui montrent que c’est cool de vivre de manière minimaliste, avec des panneaux solaires, en étant autonome. C’est en vendant cette image que vous vendrez ce lifestyle, pas en faisant la morale.
Questions Fréquemment Posées
Quelle est la première étape pour analyser l’échec d’un projet ?
La première étape consiste à ne pas abandonner l’idée entière, mais à la décomposer en un ensemble d’hypothèses distinctes (besoin de l’audience, pertinence de l’offre, crédibilité, etc.) pour identifier précisément laquelle n’a pas été validée.
« En réalité, il faut comprendre que un projet il peut échouer pour différentes raisons. Et un projet va réussir selon un ensemble d’hypothèses. Donc quand vous allez lancer un projet, vous allez établir un ensemble d’hypothèses qui, si elles sont vraies, feront que votre projet soit un succès. »
Comment les données YouTube aident-elles à comprendre pourquoi une vidéo ne devient pas virale ?
Les données YouTube, comme la durée de visionnage et le taux de clic, permettent de confronter et de tester des hypothèses spécifiques sur la performance d’une vidéo. On peut ainsi déterminer si le problème vient du sujet, de la miniature ou de la qualité du contenu lui-même.
« L’avantage sur YouTube, c’est que toutes ces hypothèses là peuvent être confrontées avec de la data. »
Pourquoi les formateurs en ligne ne risquent-ils pas l’ubérisation comme les taxis ?
Contrairement aux chauffeurs de taxi qui sont interchangeables, les formateurs en ligne construisent une marque personnelle et une relation d’attachement avec leur public. Le choix d’un formateur n’est pas interchangeable, ce qui leur donne un pouvoir de négociation et de contrôle sur leur business.
« tu te fiches complètement de quel taxi vient te chercher. C’est totalement interchangeable… Au contraire, tu ne te fiches pas du formateur qui va euh venir te former. Donc il y a un effet de célébrité, il y a un effet d’attachement, il y a un effet de marque. »
Est-ce une bonne idée d’envoyer un email par jour pendant un lancement de produit ?
Oui, c’est une stratégie judicieuse. La plupart des gens ne sont pas aussi attentifs à leurs emails qu’on le pense, et la répétition est nécessaire pour s’assurer que l’information soit vue au bon moment. Un email par jour pendant une semaine de lancement est tout à fait acceptable.
« je pense que c’est totalement équitable et judicieux d’envoyer un e-mail par jour pendant 7 jours si tu fais un lancement. »
Comment éviter de perdre des abonnés email lors d’un lancement ?
La meilleure méthode est de proposer un système d’opt-out. Dans chaque email de lancement, incluez un lien permettant aux abonnés de se désinscrire uniquement de la séquence d’emails de ce lancement spécifique, sans se désabonner de la newsletter principale.
« Si vous n’êtes pas intéressé, cliquez ici et je ne vous enverrai plus d’e-mail au sujet de ce lancement. Donc ici, c’est l’inverse. Donc il y a beaucoup plus de gens qui vont recevoir mes e-mails et les lire, mais les gens qui ne sont pas intéressés peuvent se désinscrire uniquement de ce lancement. »
Quel est l’argument le plus efficace pour promouvoir l’écologie ?
L’argument le plus efficace est celui qui s’adresse au bénéfice égoïste de l’individu. Plutôt que de parler de sauver la planète, il faut se concentrer sur des avantages directs et personnels, comme la santé.
« Il faut comprendre que les gens vont prendre uniquement des décisions sur ce qui va leur apporter un bénéfice égoïste. »
Pourquoi l’appel à la santé est-il plus puissant que l’appel à sauver la planète ?
L’appel à la santé est puissant car il est direct, personnel et a des conséquences immédiates pour l’individu et sa famille. À l’inverse, sauver la planète est un concept vague, distant et dont l’impact personnel est difficile à mesurer.
« ce qu’il a dit aux gens, c’est pas on va sauver la planète, c’est on va sauver vos enfants. Et donc tous ces arguments de santé sont extrêmement forts. »
Comment utiliser l’identité et le statut social pour le marketing écologique ?
Il faut positionner l’écologie non pas comme une contrainte moralisatrice, mais comme un comportement aspirationnel et un symbole de statut social élevé. En associant les gestes écologiques à une image ‘cool’ et désirable, comme le fait Tesla, on incite à l’adoption par désir d’appartenance et de reconnaissance sociale.
« il faut faire de l’écologie une valeur positive et non pas un truc négatif de vous êtes méchant si vous le faites pas. Un signe aspirationnel, un symbole de la classe supérieure. »